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A PARIS, LE NOBMÂNT, imprimeui^libraîre, rue de Seine, ii.<»8 j PILLET, imprimeur-libraire, me Cbriâtine, n.® 5^ 6&TJNOT-LABBE, libraire, quai des Augustins, n.^ 33 j BLAISE, libraire, cpiai des Augoftins, n.° 6i ; ChEz( ^ CIiÊBE, libraire, quai des Augnstins, n.» 35 j BOSSANGE ET MASSON, imprimeurs-libraires, rue de Tournon; RENOUABD, libraire, rue Saint-Andrë-des-Arts; TREtJTTEL etVURTS, libraires, rue de Bourbon; FOUCAULT, libraire, rue des Noyers^ n.» 3; j AUDOT, libraire, rue des Mathurins-Saint- Jacques, ET A BRUXELLES, \ LE CHARLIER, libraire. ^ OEUVRES DE BOSSUET, ÉVÊQUE DE MEAUX, BEVUES SUR LES MANUSCRITS ORIGINAUX, ET LES ÉDITIONS LES PLUS CÛBBECTES. ^/%^»>»^»^^%>%^^»»/^«^^r^^i^>^>wa^^^»^ TOME XL ■%^^W%i^i'^%<»/»%H%^«%'*^/%^^<^^^^'%'*^^^' r I A VERSAILLES, DE L'IMPRIMERIE DE J. A. LEBÊL, IXPAIMEUH DU KOI. 1816. \ SERMONS. '\ F t - 1 « I."' SERMON POUR LA FÈTÈ DE TOUS LES SAINTS, PrêcliéàMetz, en faveur d'une assemblée de charité, consacrée au soulagement des pauvres malades. Le dîsooan n*est point entier ; mai^ quoique imparfiBÛt|, û contient des vérité» qui le rendent trés-întéreuant. L^anteur y (ut voir ce qu'exige euTers les pauvres et les misérables la miséricorde reçuo eu espérée. %^Mi^i^^09MMi^/^%m^%^^ Beat! miséricordes, quoniam ipsi misericordiam conse- quentur. Bienheureux les miséricordieux, parce quHs obtiendront miséricorde. Matth. v. 7. La solennité de ce jour, et 1^ charge particulière qui m*est imposée ^ m'obligent à partager mon es- prit en deux pensées bien contraires , et à vo^s faire arrêter* les yeu^i^ sur deux objets bien diffifrens. Et premièrement y chrétiens^ c'est Tintention de la sainte Eglise que Ton prêche dans toutes ses chaires la gloire des esprits immortels qu'elle honore tous aujourd'hui par une même célébrité. Et pour suivre ses volontés y il faut que par cette clef admirable d^ la parole divine à laquelle rien n'est krvàé, je vous ouvre les portes àacrées de la céleste Jtérusajeni, ;.et, BOSSUET. XI. a A VOUA I.K FBTB que je vous fasse entrer dans ce sanctuaire ado^ rable y où tous ces esprits bienheureux se reposant de tous leurs travaux , sont rendus dignes de porter leur bouche à la source toujours féconde de félicité et de vie. C'est le premier objet que Ton me pro- pose : mais voici que ti'an autre côté on me charge de recommander à vos charités de prendre soin des pauvres malades^ et de vous animer, si je puis, h vous joindre d'un zële fervent à cette sainte société^ qui ayant formé depuis quelques années le dessein 4e les soulager dans leur extrême misère , s*est liée et dévouée depuis peu à cette œuvre salutaire , avec tme ferveur nouvelle et un saint accroissement de dévotion. Que ferai-je ici, chrétiens, partagé entre deux matières qui paroissent si opposées? D'un côté il faut que je vous fasse entendre les cantiques har- monieux et la ravissante musique par laquelle les saints expriment leur joie : et l'on m'oblige dans le même temps de faire résonner à vos oreilles les gé- missemens des infirmes, et les plaintes des languis- sans. Il faut élever nos esprits à cette cité bienheu- reuse et brillante d'une lumière immortelle; et en m^e temps il nous faut descendre dans les de- meures tristes et obscures où sont gisans les pau-> Très malades. Et comment- sera-t-il possible de mar- cher dans le même moment en des lieux si différens^ et sur des chemins si contiwes ? Toutefois nous nous trompons ; chrétiens , ce n'est qu'une fausse apparence, et si nous savons pénétrer les mystères du christianisme et la doctrine de notre Evangile , nous demeurerons convaincus que ces deux objets que l'on nous- présente , quoiqu'ils semblent fort BE {rotrs XË8 SAINTS. B opposés f sont unis nécessairement' d'une liaison très-étroite. <]2ar, dites-moi ^ je vous prie, mes frères, qu'est-ce que le ciel? qu est-ce que ce s^our glo- rieux 7 C'est, le lieu que Dieu nous prépare pour y recevoir la miséricorde* Et les chambres des pauvres infirmes^ les lits non de repos et de sommeil, mais cl ^inquiétudes et de veilles laborieuses où nous les voyons attachés? C'est le lieu que Dieu nous destine pour y faire la miséricorde. Et maintenant ne voyeas- vous pas quelle liaison il y a entre la miséricorde reçue et la miséricorde exercée ? Bienheureux les miséricordieux ; voilà ceux qui exercent la miséri- corde : parce 4fuils obtiendront la miséricorde ; et voilà ceux qui la reçoivent. Ne croyez donc pas, chrétiens, que ce soient deux choses fort élpigpées ,de regarder en un seul discours les heureiix «t les misérables. Vous voyez que notre Sauveur met enr semble les uns et les autres ; et cela pour quelle .raison ? C'est qu'en nous montrant le lieu bienhcti:^^ jreux où il répand sur nous la miséricorde, il- nous fait yoir où il nous faut tendre : et en nous parlant du lieu où nous la pouvons exercer, il nous montre le droit chemin par lequel nous y pouvons arriver. Ouvrez vos mains, dit notre Sauveur; ouvrez-*les du coté de Dieu, ouvrez-les du côté des pauvres : ouvrez pour recevoir, ouvrez poui' donner. Si vous fermez vos entrailles sur les nécessités de vos frères, 1^ source de la miséricorde divine se tarira aussitôt sur vous : ouvrezrleur et votre cœur et vos mains, elle coulera avec abondance. C'est, mes frères, cette liaison et cette concorde admirable entrai la miséri- corde que nous espérons et la miséricorde que Sv 4 POUR LA FÊTE nous, exerçons y que f espère traiter en deux points avec le secours de 1^ grâce. Je vous représenterai avant, toutes choses avec quelle libéralité Dieu exerce sur nous sa miséricorde, lorsqu'il nous reçoit d^ns sou paradis : et après je tâcherai de vous faire voir combien cette, abondance de miséricorde que le Père céleste témoigne envers nous y en nous appe- lant à sa gloire , nous oblige d'avoir de tendresse pour nos frères qui sont ses enfans et les membres de son Fils unique. C'est le sujet de tout ce discours» PREMIER POINT. Commençons avec allégresse à publier les miséri- cordes que notre bon Père exerce sur nous, lors- ^qu'il daigne nous appeler à la gloire de son royaume. Disons, confessons, publions, que nous n'y pou- vons entrer que par grâce , par un pur effet , de bonté, par un sentiment de miséricorde. Et leSau- yenv nous le dit dans notre Evangile : Misericor^ Âmm conseifuentur (') ^ « ils obtiendront miséri- » corde (*) ». Quelle est cette miséricorde que le Fils de Dieu leur promet? Je soutiens que c'est la vie étemelle : Jtegnum cœlorum (3>, « le royaume des » cieux » : Deum videbunt (3)^ « ils verront Dieu » : CO Matth, V. 7. — (*) Ibid, 3. — (3) Ibid. 8. (*) Bossuet s'étoit contenté de mettre dans son manuscrit les textes latins qu'il emploie dans ce sermon; il se proposoit sans doute d^ajouter lii traduction de ces textes, lorsqu^il précherdît. Noos avons donc cm^ devoir la St^ppléer aussi dans rimpression. Cest la régie que nous suivrons à Tégard de tous ,les sermons qui fie trouveroient dans le même état. Il nous suffira d'en avoir prévenu le lecteur en commençant, sans être obligés à chaque fois de réiié- ver FaviirtiasGment. Edit. de Déforis. 2)fi TOTTS LES SÂÏNTS4 S possideBunt terrdm (0^ « ils posséderont la terre » : terram viventium ip)^ « la terre des vivans » : saiu- rabunUiri^), « ils seront rassasiés » : inebriaburt- tur (4), « ils seront enivrés » : satiabor cirni appa- ruent gloria tua (5) , « je Serai rassasié lorsque votre » gloire se manifestera » : cohsolabûntur (Ô) , a ilà 31 seront consolés » : àbsterget Deus omnern lacry^ mam (7) , « Dieu essuiera toutes les larmes » : ainsi , misericordiam consequentur, ce ils obtiendront la » miséricorde ». En effet, que pouvonsraous espérer, misérables bannis , enfans d'Eve , c'est-à-dire enfans de colère , enfans de malédiction , naturellement ennemis, chassés du paradis de délices ? Si l'on nous rappelle à notre pÀtrie, û l'on nous tire de l'abîmé, que devons-nous faire autre chose qne de louer la misé- ricorde de ce charitable pasteur, qui nous a retirés du lac piar le sang de son testament, et nous a re- portés au ciel chargea sur ses é]f)âules ? Misericordias Domîni in œtemwn cantabo (S) , « Je chanterai éter- » nellement les miséricordes du Seigneur » : in œter- num , « éternellement » ; ce n'est pas seulement dans le temps , mais encore principalement dans l'éternité. Toutefois on me pourroit dire que cela n'est pas de la sorte ; la gloire leur étant donnée comme ré- compense, il semble que c'est plutôt la justice qui la distribue au mérite, que la miséricorde qui la donne gratuitement. Esprits saints , esprits bienheu- (») MaUh.Y. 4. — (») Psal. xxvi. i3. — (3) Matth. r, 6. — (4) Ps, XXXV. 9. — (5) Ps. XVI. 17. — W Matth. v. 5, — (7) Apoc. XXI. 4- — ^) Ps* LXXXVIII. I. 6 POUR LA piTB reux , ne fais-je point tort à vos bonnes oeuvres ? J'entends un de vous qui dit : Bonwn certamen cer-- tof^i (0, ce J'ai livré un glorieux combat ». On vous rend la couronne ; mais c^est que vous ave^ com* battu : on vous honore ; mais vous avez servi : on vous donne le repos; mais vous avez fidèlement travaillé : ce n*est donc pas miséricorde. A Dieu ne plaise : mais c'est cette doctrine qui fait éclater la. miséricorde; Expliquons cette doctrine : saint Au- gustin [ nous Fa développée par ces paroles ] : Red^ deC omnino DeuSj et màla pro malis çuoniamjustus est; et bona pto malis quoniam bonus est; et bona pro bonis çuoniam bonus et justus est (^). « Dieu » nous rendra certainement le mal pour le mal y » parce qu'il est juste : Dieu nous rendra le bien » pour le mal y parce qu'il est bon : enfin Dieu nous » rendra le bien pour le bien , parce qu'il est bon » et juste en même temps ». h. cela se rapporte toute la conduite de Dieu envers les hommes. L'une semble diminuer les autres ; non point en Dieu^: les ouvrages de Dieu ne se détruisent point les uns les autres. Cette justice n'est pas moins justice pour être mêlée de miséricorde; cette grâce n'est pas moins grâce pour être accompagnée de justice : au contraire y c'est le comble de la grâce et de la misé- ricorde. Pour l'entendre encore plus profondément , con- sidérons avec le même saint Augustin de quelle sorte les âmes saintes se présentent devant leur juge ^ devant la justice : Redde quod promisisti ; fècimus (0 //, Tint. iT. 7. «— (>) S, Au§, de Grat, et Uh* Arb. çap. xxiir, n- 4^> tom. Xy coL 744- DE ÏOtïS I miséricorde. La jus* tiçe. la tient ^ j^oiaislà miséricorde la^doiine. Mais pénétrons enaore plus loin. Cette . pran^esse étoit cp^ditionneUe. Je vous ai. promis le^cieL t oui^si vous veniez ; à mpi sans péché^^ et voua &uctifiies dans les bon^nqs jçtnyr^s* Seriez^vous sasfi péchés ^ A les miséricordes ne. les avoient reaiîs3:Auriea^vbqs de bonnes œuvres,,jii là: grâce jtie les* avoH £ûieft? JSt hoc Ua fi^cisU jf.quia labùran^ jupisti {?) : « Ai^eA 3> vous ^ Seigneur y qui avez, fait tout ce que f ai de » bien l parce que vous m'avea aidé dans le trfiv&il ». Ne voyez-vous donc. pdS) que la ^itstice cherche à i^compenser^? m^is t elle; ïte^^^tirouvé ribn à rëdonir- peoser que ce. qu'a iaît laMfniséricdrdé. Il a l'habit nuptial, il est juste, qu il soit du banquet ; mais cet habit nuptial lui a été [donnéjvpar présent.: patnm ,est: ilU9 t^ €0ùpprUink ^- bysnr\Q aplefidemié • èti eam- Aido. X?) ; « il leur fà 4té donné de se: revêtir d'un j> fin liq^pur ^eit:.éalQ$a|i.t ^< U/aut qu'ils entrent.au royaume ^ p^rce quils^ en santidigoes ; aiais c'est JDieu qui les a faits .dignes : leiir^ céuvjnés le» animent; mais Dieu les 4 i^\W* Pi^u q^ peiut avec justide les rejeter^de ^d^ji^ant.sa face i parce qu'ils, sont reviétus de sainteté ,:>ii»ai^ saint P^uU^^. aux Hébreux : Aptet "pos intOmniionOj. utfAcigfis^ e/us volun^aiem , Ja^ (») iS^srm- CLVin, n. «-> iom, v, mL ^61 • — (») ttid» --• W ApoQ* XIX. 8. s ' ' 8 ^OVR LJL ï'ixS eiens in n>éiis 'çued^ piùûeéU coram se per Je^um Christam (0 : *« Que Dieu vous ren^e parfaits etk » toute bonne ceuvre; 'afin* que vouis fassiez sa vo- » lonté y lui •> même faisant en vous ce qui lui est 31 agréable par J^s-Ghrist » : Quodplaceat c^ram se, ... . in amniiono^ « ce qui lui est agréable; . . ; » en toute bonne œuvre ». C'est une suite de la loi .éternelle par. iaquetle Dieu aime le bien ;• c'est jus- tice> : «mais sptet nùs y Jhciai iti noiis. Il est juste j^pie.jcette pâerresoit mise au plus haut de cet ^- £c^.> .qui^âe fasse le chapiteau de cette colonne ^ quelle soit.mise en vue sur ee piédestal $ mais c'est parce, quil a pluià-l-ou^^rier de- la façonner de la £orte* Plus il y ^ de usérite ^ p^us il y a. de grâce : •plus M,y a>dei justice / plus- il y ade miséricol>de. C'est, pourquoi les vingt -«quatre vieillards, jettent leurs couroiinssi aux pieds ide T Agneau (^}. Combat •de Dieu et >det rhomme. -Dieu leur donne ; y6ilà Ik justice : ils la lui reiidenl; par actions de gracies*; :c'est qu'ils reconaoissént la miséricorde : Gratiais •Deo qui. dédit ftûHs /victoriam (^) : ^ Grâces soient »vTendues. à Dieu qui nous à donné la victoire >y. Ravissement des «aints en voyant ia miséricorde' Q, luL^at. — (^ ^poc-vr^ lo. •— ^) /. Cor, xt. SJ. — (4) Ps. ai. 1 , 4- — W Ibid, 6. DE r&ys làE's sAiiTTs. g » tous iK>& dësirs par Fabondaiiee de ses .biens , en » nous traitant -sekm^ misépieorde »• Amour prtf-^ venant dès r^temit'é'y «par lequel illes a choisis; par. quels secret9 il a louéhé leurs <;aeiir&; le soin qu il a eu de détourne» lés' occasions , les périls infinis du voyage se connoHront à la fin , lorsqu'ils seront arrivés, voyant les daûmés^ et que la se«de misé-' ricorde les a triés : Misericordia ejus 'prœ\^enwt me (0, « sa miséricorde me préviendra » : Miseri'- cardia ejus subsequetur me {^) , « sa miséricorde » m'accompagnera ». Le peu de proportion de leurs œuvres avec leuç gloire : Supra^modum , in suili*^ mitate^ ceternum gloriw pondus (3) ^ « un poids étei^; » nel d'une gloire souveraine .et incomparable »^ Ils ne peuvent comprendre comn^ent une créature diétive a été capable de tant de grandeur. ^^/eZuiia;: Dieu les loae^, ils louent Dieu (4). Vous ave? bien fait y leur diit Dieu : Quia ^i§rm sunl (^) -, « parce P qp'ils.,e^ sç^t dignes a* :Ç'/sst ypps qui Tavez &iit : Omnia opéra nqsira ope^fOus es in TfP^^ Domine (^ : « r&uç.avez, S6JigQeur,:|Opéi^ eu nous toutes nos » couvres ». C*^st àjÇe liçu de pa^ii: .que nous atypir rops; c'est > après >;çette patrie :bv^baui^u§ej que uotrev pèlerinage so^pwî o'iççsfe^^cetteuiiséiiicordîe que nous espérons Se/,peut-ijl fs^îre^que npusa^ten;* dions tant de)grâ|çe$ sai^s en i^9i\i)oir fa^ro ^ ,uc^ frères? La'misériQ$v^^ .poi^s efiyiroane de. . fjoul^s parts : Miserioor4iA^ej^si,eircJ^û^^dal^it me^ijX- Cet exemple de nqtre Dieune nous QM:endritri)rp^s7 Si un maitFe est; jJodulgQi^t,. à $e>.vdQ)nestL^u^sf^ il ^e («) Ps. LYiif. II. — (») Ps. XXII. 6. — (3) //. Cor, IV. 17. — (4) j^poc. XIX. 1, 3, 4> 6.-^5) Ibid. m. 4. -^ i^J IsaL xxti. i 2. — ^l)Ps. xxxi. lo. lO POUR LA FÊTB peut soufirir les insolens et les fâcheux : il veut q^i^ sa douceur serve de loi à toute sa famille. Sous ui^ père si bou que Dieu, quelle douceur pouvons^nous prétendre , si nous sommes durs et inexorables X Vous voyez donc déjà , chi^ëtiens , la liaison qu'il y a entre la miséricorde reçue et la miséricorde exer-;» cée : mais entrons plus profondément dans cette matière , et expliquons notre seconde partie* SECOND POINT, Je croîs que vous voyez aisément que de tous les divins attributs celui que nous devons reconnoître dans un plus grand épancfaement de nos cœurs , c*est sans doute la miséricorde. C'est celui dont nous dépendons le plus : nous ne subsistons que par grâce: il faut la reconnoître en la publiant j la publier en l'imitant : Estote miséricordes , sicui et Pater rester misericors est (0 : « Soyez miséricordieux comme » votre Père est miséricordieux ».Nous ayant faits à son image , il n'aime rien plus en -nous que r«f* fort que nous faisons de nous conformer à ses divines perfections. Saint Paul aux Colossiens ^ après leur avoir montré la miséricorde divine dans la gi^âce de leur élection , conclut en ces termes : lûduHk vos ergo sicui electi Deij sancti et éUecti ip) : k R^* » vêtez -vous donc y eomme étant élus de Dieu^ » saints et bien-aimés, d'entrailles de miséricorde:» electi , é\\xs y par miséricorde et par grâce: dilecti, bien-aimés, par pure bonté: sancti, saints ^ par la rémission gratuite de tous vos péchés : Induite i^ («) Luc, VI. 36. — W Colos. m. la. DE TOUS tes 8ÂIVTS. II ergo viscera mùericordiœ : « revêlez - vous dono j d'entrailles de miséricorde ». Pouvez-vous mieux confesser la miséricorde que TOUS recevez , qu'en la faisant aux autres en simpli*» cité de cœur? Si vous êtes durs et superbes sur les misérables y il semble que vous ayez oublié votre misère propre. Si vous la faites aux autres dans un sentiment de tendresse , vous ressouvenant des grâ- ces ; c'est alors que vous honorez ces bienfaits : c'est là le sacrifice que demande sa miséricorde : TaUbus hostiis promereturi}) : « c'est par de semblables hos- » ties qu'on se rend Dieu favorable ». Il y a un sar crifîce de destruction , c'est le sacrifice de la justice divine y en témoignage qu elle détruit les pécheurs. Mais le propre de la miséricorde y c'est de conser- ver : il lui faut pour sacrifice conserver les pauvres et les misérables : voilà l'oblation qui lui platt. Vous prétendez aii rayaume céleste ; Dieu vous en a donné la connoissance ; il vous y appelle par son évangile^ il vous y conduit par sa grâce ; Quidreiribuàm Do^ mino (^)7 c< que rendrai». je au Seignôur » ? Quelle victime lui ofirirez-vous? voyez tous ces pauvres ma* kdes : oiirez4ui ces victimes vivantes et raisonnables^ conservées et soulagées par vos charités et par vos aumônes. Us sont dans la fournaise de la paiivreté et de la m^die ; que ne descendes - vous avec la rosée de vos aumônes? O sacrifice agréable ! Visa^a sanctorwn requieveruntper te,fr4tler&^ : «.Les cœurs 3» des saints ont reçu beaucoup de soulageweoit de » votre banté^ mon cher frère ». A qui cela con- vient-il mieux y sinon aux pauvres malades? Je ne (0 ffebr. xin. i6. — (») Ps. cxr. 3. — C^) Phiknk 7. Ï3 POUR L'A PÊTË néglige pas pour cela les autres ; mais je prête ma voix à ceux-ci , parce qu'ils n'en ont point. Voyez quelle est leur nécessité. Nous naissons pauvres ; Dieu a commandé à la ten'e de nous fournir notre nourriture : peui qui n'ont point ce fonds, impo- sent un tribut à leurs mains; ilis exigent d'elles ce qui est nécessaire au reste du corps : voilà le second degré de misère* Quand ce fonds leur manque par Finfirthité, mais encore y a-t-il quelque recours; la nature leur a donné une voix , deîs plaintes, des gé- missemen^; dernier refuge des pauvres afQigés pour attirei^ le secours des autres. Ceux dont je parle ii'onf pas' Ces moyens : îls' sont contraints d'être renfer- més : leurs plaintes ne sont entendues que de leur pauvre famille ëplorée , et de quelques-uns de leurs voisins, ipeut- être encore plus misérables qu'eux. Mais dans Textréme misère, quahd on a Vusage de kon esprit librô, la nécessité fait' trouver des inven-* tibiis: lé leur est accablé par la inialadie , par les in-^ quiétudes-, et souvent parle désespoil*. Dans une telle nécessité,' puià-)é leur refuser ma voix ? -' Combien. de malades dans Metz! Il semble que j'entends tout autour de moi un cri de misère :nè voulez* vous pas avoir pitié? leur voix est lasse, parce iqu'elle est infirme : moins \e les entends , et plus ils me- percent le- o<»ur. Mais sr leut v«ix n'est pas asseSÈ forte ^ écoutez Jésus^Ghrist qui se joint à eux. Ingrat?, déloyal , nous dit-il, tû mangea 'et tu te reposés à tèn aise ; et tu ne songea pas que je suis souffrant en tôlie maison ,.que j'ai la fièfre en cette autre , et que partout' je tneilt-s de ftiim , si tu ne In'assistes. Qu'at- tendez-vous y cruels, pour subvenir à la pauvreté de DE TOUS LES SAIITTS. l3 ce misérable? Quoi! attendez-vQus que les ennemis de la foi en prennent le soin pour les gagner à eux par une cruelle miséricorde? Voulez-vous que votre dur reté leur sei;ve d'entrée? Ah! qu'un homme se fait bien entendre, quand il vient donner la vie à un déses- péré. Foibleçse d'esprit dans la maladie. Vous voulez qu^ils spie^n); secourus; favorisez donc de tout votre pouvoir cette confrérie charitable qui se consacre à leur service. Aidez ces filles charitables , dont toute la gloire est d'être les servantes des pauvres malades; victimes consacrées pour les soulager. Et ne me dites point : Les pauvres sont de mauvaise humeur y on ne peut les contenter. C'est une suite nécessaire de la pauvreté. Sont-ils de plus mauvaise humeur que ceux auxquels Jésus-Christ disoit : O g^neraiia per^ versa, usquequo potier vos? adhuc Mtc fiUum iuum (0. « O race incrédule et dépravée ! jusqu'à » quand vous souiTrirai-je ? amenez ici. votre fils >>• Mais ils ne se contentent pas de ce que nous leuT donnons : ils veulent de l'argent et non des bouil'^ Ions y et non des remèdes. Qui le veut ? c'est l'ava* rice. Vous n'êtes pas assemblées pour satisfaire à ce que leur avarice désire j mais à ce qu'exige leur né* cessité. Mais il n'y a point de fonds? C'est la cha- rité des fidèles; et c'est à vous, mesdames, à l'exci-t ter. C'est pour cela, mesdames, que vous vous étef toutes données, à Dieu pour faire la quéte^ Si la pauvreté dans le christianisme est hono- rable, vous devez être honorées de faire pour Jésus^ Christ l'action de pauvres. Quoi ! rougirez- vous de demander l'aumône pour Jésus-Christ ? Quand est-ce (O^ucix. 4'*. * l4 POUR LA FÊTE que vous donnerez y si vous ne pouvez vous résoudre à demander? Vous devriez ouvrir vos bourses , et vous refusez de, tendre la main ! Mais on ne me donne rien. O vanité^ qui te mêles jusque dans les actions les plus humbles, ne nous laisseras-tu jamais •en repos? Jésus se contente d'un liard; Jésus se contente d'un verre d'eau : bien plus , il ne laisse pas de demander aux plus rebelles , aux plus incré^ dules. Animez-vous donc les unes les autres; mais persévérez. Quelle honte d'avoir commencé! ce seroit une hypocrisie. Rien de plus saint : tout le monde y devroit concourir. N'écoutez pas ceux qui disent : Cet œuvre ne durera pas. II ne durera pas^ si vous êtes lâches : il ne durera pas , si vous man- quez de foi y si vous vous défiez de la Providence. Dieu suscitera l'esprit de personnes pieuses pour vous fournir des secours extraordinaires; mais ce sera si vous faites ce que vous pouvez. Quelle conso- lation! je n'ai qu'un écu à donner; il se partagera entre tous les pauvres y comme la nourriture entre tous les membres. C'est l'avantage de faire les choses en union. Si chaque membre prenoit sa nourriture de lui-même , confusion et désordre : la nature y a pourvu : une même bouche. Comme les membres s'assistent les uns les autres, prêtez-leur vos mains ^ prêtez-leur vos voix. La main prend un bâton pour soutenir le corps au défaut du pied. Exhortation , en considérant la miséricorde que nous recevons de Jésus^Christ : que lui rendrons'^ nous? il n'a que faire de nous. Empressement de la reconnoissance : Sauveur , je meurs de honte de re- cevoir vos bienfaits sans rien rendre ; donnez-moi DE T6V9 les saints. i5 le moyen de les reconnoitre. Pressé par ces raisons que la gratitude inspire : il dit : Je te donne les pau- vres : ce que tu leur feras, je le tiens pour reçu aux mêmes conditions qu eux : je veux entrer en leur place. Ne le crois-tu pas? C'est lui qui le dit. Il a dit que du pain c'étoit son corps; tu le crois et tu Fadores. Il a dit qu'une goutte d'eau lavoit nos pé- chés; tu le crois y et tu conduis tes enfans à cette fontaine. Il a dit qu'il étoit en la pei^onne despau- vres; pourquoi refuses-tu de le croire ? si tu refuses de le croire , tu le croiras et tu le verras , lorsqu'il dira : Infirmas , et non visitastis me (0 : « J'ai été M malade et vous ne m'avez pas visité ». L'homme devant Dieu , demandant de le voir dans sa gloire : tu ne m'as pas voulu voir dans mon infirmité: une troupe de misérables s'élèvera ; Seigneur, c'est un impitoyable. C'est pour cela que le mauvais riche voit Lazare au sein d'Abraham. Au contraire , ces pauvres vous recevront dans les demeures éter- nelles : Récipient vos in œterna tabernacula (^). Employer à cela le crédit et l'autorité ; elle s'éva- nouira en l'autre monde. Voulez-vous qu'elle vous y serve? employez-la au ministère des pauvres. CO Hitath» JULT. 43* — C>) Luc. xTx. 9. %<^^%^^o%^^^^^v<» l6 POUR LÀ FÊTE EXORDE D'un Sermon prêché dans une assemblée de charité. Le Prophète-roi, chrétiens, étoit entré bien pro- fondément dans la méditation de la dureté et de Tin- sensibilité des hommes , lorsqu'il adresse à Dieu ces beaux mots : 2\bi derelictus estpauper (0 : « O Sei- » gneur, on vous abandonne le pauvre ». En effet ^ il est véritable qu'on fait peu d'état des malheureux : chacun s'empresse avec grand concours autour des fortunés de la terre; les pauvres cependant sont dé- laissés : leur présence même donne du chagrin ; et il n'y a que Dieu seul à qui leurs plaintes ne soient point à charge. Ppisque tout le monde les lui aban- donne, il étoit digne de sa bonté de les recevoir sous ses ailes , et de prendre en main leur défense. Aussi s'est-il déclaré leur protecteur : parce qu'on méprise leur condition, il relève leur dignité; parce qu'on croit ne leur rien devoir, il impose la nécessité de les soulager : et afin de nous y engager par notre in- térêt , il ordonne que les aumônes nous soient une source infinie de grâces. Dans cette maison des pauvres, dans cette assemblée qui se fait pour eux, on ne peut rien méditer de plus convenable que ces vérités chrétiennes : et comme les prédicateurs de l'Evangile sont les véritables avocats des pauvres , je m'estimerai bienheureux de parler aujourd'hui en leur faveur. Tout le ciel s'intéresse dans cette cause , et je ne doute pas, chrétiens, que je n'obtienne facile- ment son secours par l'intercession delà sainte Vierge. (0 Ps* IX. Héb, X. i4» IL- DE TOUS LES 8X11STS. I7 < i • II.= SERMON POUR LA FÊTE DE TOUS LES SAINTS. Desseins admirables de Dieu sur ses élus : il les a mis au-dessus de tous ses ouvrages ; il se les est proposés dans toutes ses entre- prises^ il les a inséparablement unis à' la personne de son Fils, afia de les traiter comme lui. Merveilles que Dieu opère dans re^^éculioa de 6ts grands desseins. Ômnîa yestra sunt, vos autem Chrîsti. Tout est à vous, et vous êtes à Jésus'-Christ , dit le grand apôtre^ parlant aux justes. I. Cor* m. 2.a^ ^3. 01 nous employions à penser aux grandeurs du' ciel la moitié du temps que noi^s donnons inutilement aux vains intérêts de ce monde ^ nous ne vivrions pas comme nous faisons dans un mépi-is si apparent des affaires de notre salut. Mais tel est Ip malheur où nous avons été précipités par notre péché : ce tyran ne s'e^st pas contenté de nous faire perdre le royaume dans Fespérance duquel nous avions été élevés ; il nous a tellement ravalé le courage , que nous n'oserions quasi plus aspirer à sa conquête, quelque secours qu'on nous offrç pour y rentrer; A peine nous en a-t-il laissé un léger souvenir : et s'il nous en reste quelque vieille idée qui ait échappé BOSSUET. XI. â |8 POUn LA FÂT£ à cette commune ruine , cette idée ^ Messieurs ^ n^a pas assez de force pour nous émouvoir : elle nous touche moins que les imaginations de nos songes. Ce qui est plus cruel ^ c*est qu'il ne nous donne pas seulement le loisir de penser à nous. Il nous entre- tient toujours par de vaines flatteries ; et comme il n'a rien qui nous puisse entièrement arrêter, toute sa malice se tourne à nous jeter dans une perpé- tuelle inconstance, tantôt d'un côté, tantôt d*uQ autre ; et nous faire passer cette misérable vie dans un enchaînement infini de désirs incertains, vagues ^ et de prétentions mal fondées. Gela fait que nous né concevons qu'à demi ce qui regarde l'autre vie : ces vérités ne tiennent point à notre ame déjà préoc- cupée des erreurs des sens. En quoi nous Sommes semblables à ces insensés, desquels parle le Sage, qui> sans prendre garde aux grands desseins que Dieu avoit conçus dès Fétemité pour ses saints, s'i- maginoient qu'ils fussent enveloppés dans le même destin que les impies , parce qu'ils les voyoient su- jets à la même nécessité de la mort : Fïdebunt Jinent sapientis , et non intelligent quid cogitaverit de'eo Dominusi^) t icâs verront la fin du sage, et ils ne » comprendront point le dessein de Dieu sur lui ». Soufirirez-vous pas bien , Messieurs, pour nous dé- livrer de ce blâme , que nous nous entretenions sur ces desseins si admirables de Dieu sur les bienheu- reux > «n ce jour, où FEglise est occupée à les con- gratuler sur leur félicité? Nous ne pouvons rien dire qui contribue plus à leur gloire ni à notre édification* Certes je l'oserai dire , si la joie abondante dans la- DE T0176 Ï.ES SÀIKTS. ig quelle, ils vivent ^ leur permet de (aire des enfans d'Israël qu'il avoit en vue ». Les élé- mens et les causes créées ne persistent, que parce que Dieu a enveloppé ses élus dans leur ordre, et qu'il les veut feire sortir de leurs actions. « Aussi 3> elles sont comme dans les douleurs de l'enfante* » ment » : Omnis creaturaingemiscieetp€vrUiritusçué 0) Deut. zzxii. 8. DE TOVB LKS SÀI^TTS. a3 adhiic (i). a Elles attendent avec impatience que » Dieu fasse la découyerte dé ses enfans » : Revelor* tionem JiU^rum Dei expeotf^t W. L'auteur de leur nature y qui leur a donné i leurs inclinations^ leur a imprimé un amour comme naturel de ceux à qui il les a destinées. Elles ne font point encore de dis'«' cernêment \ c'est à Dieu de commen^ery c est à lui à faire voir» ceux qu'il recon&oSt pour ses enfaiis legi* times. Etqiiand il lesaïu^a marcpiés, qu'il aura dé<- brouillé cettfi confusion qui les mêle , elles tourne** ront tout0 leur fureur coatre ses ennemis : Pugnor bit cvm ea othis terramm contra insematos (^) : « Tout Vunivers combattra aiïec lui contre les in*- )> seiïsés )». EUea se soumi^ttront volontiers à ses en»- fauB : Omnis creai^ra ingemi^it ^i parturit mçu^ adhuc^.^. rm^elation0in ^oepect^ms JUiorum Dei : «c Jusqu'il présejDt tout/ô créature soupire et paroît » dansVenfantement^.*. attendant la manifestation » des enfans de Dieu », - Si nou^ allons encore plus avant dans le dessein de Die^^AOUS trouverons quatre €om«»umcations de isa nature» La preoûère dans la création^ la sd<> condiâ »e fait par la grâce ^ Id troisième de sa gloire^ la quatrième de sa personl^. Et si le moins par&it est pour le plus «scellent v donc la création regar* doit la îuj^tigcaftion y et la justification étoit poi^r la c^MumuÈûcation de la gloire y et la commaiaication de la gloire pôttr la persosinetle. Cest la gra4atioa de saint Paul : Omnia vestra sunt , vos autenà Christi]^'Christus auiem DeiiA)'^ je Tout àst à vous^ m. 22, 23. ..: . . i4 POtin tA PÈTB » et vous êtes à Jésus-Christ , et Jésus-Christ est â » Dieu ». Mais il ne faut pas séparer Jésus-Christ d'avec ses éluSj d'autant que c'est le même esprit de Jésus -Christ qui se répand sur eux : tanquani uiiguentum in capiteM : ce comme le parfuin ré- M pandu sur la téte^ qui descend sur toute la barbe » d'Âaton ». Ce sont ses membres^ et la 'glorifica- tion n'est que la consommation du corps de Jésus- Christ : Donec occurramus ei in virunt perjectum seoundîim mensuram plenitudinis Christi (^} : « Jus- » qu à ce que nous parvenions à Tétat d^uïi homme » parfait, à là mesure de Tâge et de la plénitude 5) selon laquelle Jésus -Christ doit être' formé en » nous ». Et nous sommes tous bénis en Jésus- Christ^ tanquam in unô^) : « comme en uh seul ». Donc les prédestinés sont ceux qui ont toutes les pensées de Dieu dès rétérnité, ce sont ceux à qui aboutissent tous ses desseins. C'est pourquoi , ont- nia propter electos (4) : « tout est pour les élus ». C'est pourquoi encore , diligeniibus Dèuni omnia cooperantutin bonum (5) : « tout contribue au bien » de ceux qui aiment Dieu ^> : omnia;- tout;* d'autant que tout étant fait pour leur gloire , il n'yaa rîen à qui le Créateur n'ait donné une puissance et même une secrète inclination -de -les y servir. « i ' ^^ ' Et il;y a ici deux choses à remarquer ; Tune que c'est à eux que se terminent tous les desseins xle Dieu y la seconde qu'ils se terminent à eux conjoin-* tement avec Jésus-Christ. • • . ; ^ Quel doit être cet ouvrage à qui là crés^ioù .de (») Psal. cxxxu. a. -*- (») Ephes, iv. i3. *- C') Gcdatf^ ïU. i6. — (4) //. Cor. ly . 1 5. — v^) Rom, t m. 28. ■<- . ■ DE trous LES SA.INTS. ^6 cet univers n'a servi que de préparation , que Dieu a regardé dans toutes ses actions , qui étoit le but de tous ses désirs ^ enfin après Texécution duquel il se veut reposer toute l'éternité ? Il y aura assez de quoi contenter cette nature infinie. Lui qui a trouvé que la création du monde n'étoit pas une entreprise ceigne de lui , se contentera après avoir consommé le nombre de ses élus. Toute Tétemité il ne fera que leur dire : Voilà ce que j'ai fait ; voyez , n'ai-je pas bien réussi dans mes desseins? pouvois- je me proposer une fin plus excellente ? Et qui peut douter que ce dessein ne soit tout extraordinaire y puisque Dieu y agit avec passion? Il s'est contenté de dire un mot pour créer le ciel et la terre. Nous ne voyons pas là une émotion vé- hémente. Mais pour ce qui regarde la gloire de ses élus y vous diriez qu'il s'y applique de toutes ses forces : au moins y a-t-il employé le plus grand de tous les miracles y l'incarnation de son Fils. c< Ne » s'est-il pas lié et comme collé d'affection avec son ». pe^uple » ? Conghitinatus est Dôminus patribus msiris (0. Tantôt il se compare à une aigle qui ex- cite ses petits à voler, tantôt à une .poule qui ra* masse ses petits poussins sous ses ailes. Il condescend à toutes leurs foiblesses ; son amour le porte à l'ex- cès, et lui fait faire des actions qui paroisseut extra- vagantes. Ecoutez comme il crie au milieu du temple : Si {juis sait, veniat ad me et hibat (^) : ce Si quel- » qu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive ». Il n'en faut pas douter^ il y ^ ici une inclination veliémente. Jamais Dieu n'a rien voulu avec tant de (0 /)«!(. X. i5. — C») Jean. tii. 37. a8 POtTR LA râTE le cours de ce temps misérable , et qu'il faudra alors qu elle se débonde. Vivez ^ heureux favoris du Dieu des armées : il a tout fait pour vous : il vous a pré* serves parmi tous les périls de ce monde : il vous a gardés, çuasi pupillam ociiU sui (0^ ce comme la 3» prunelle de son œil ». 11 ne s'est pas contenté de vous faire du bien par miséricorde : il a voulu vous être redevable y afin de vous donner plus abondam- ment. Il a voulu vous^ donner le contentement de mériter votre bonheur ^ et a mieux aimé partager avec vous la gloire de votre salut et de son dessein dernier^ que de diminuer la satisfaction de votre ame. Vous êtes les successeurs de son héritage : c'est vous que regardent les promesses qu'il a faites à Abraham et à Isaac ; mais c'est vous que regarde ^héritage promis à Jésus-Christ. U faut donc savoir que tous les biens que Dieu promet aux prédestinés, c'est conjointement avec Jésus-Christ : il ne faut point séparer leurs intérêts^ Dieu promet à Abraham de bénir toutes les nations : In semine tuo (^) , ce dans ton fils » : où l'apôtre saint Paul remarque : JVon in seminibus , sed tançuam in uno (3) : ce L'Ecriture ne dit pas à ceux de sa race , » mais à sa race y c'est-à-dire à l'un de sa race ». Cette bénédiction, c'est ce qui fait cette nouvelle vie que Dieu nous donné. Donc cette vie nouvelle réside dans Jésus-Christ comme dans le chef, et de là elle se répand sur les membres : mais ce n'est que la piéme vie : J^iv^.o ego ,jam non ego ; viuit verb in me iChristus (4) : ce je vis, ou plutôt ce n'est plus moi qui (0 Deut. XXXII. 10. — C») Gen, xxii. i8. — i}) Calât, nu i6. •-• ( 4) Ibiâ, 11. 20. DE TOtJS LES SAINTS. SQ » vis; mais c'est Jésus-Christ qui vit en moi». L'hé- ritage ne nous regarde qu à cause que nous sommes les enfans de Dieu. Nous ne sommes les enfans de Dieu y que parce que nous sommes un avec son fils naturel ; d'autant que nous ne pouvions participer à la qualité d'enfant de Dieu^ que par dépendance de celui à qui elle appartient par préciput. C'est pourr quoi ) /. Cor, xn. ii. — C^) Galat, m. i6 (4) Colosf, I. 19. — ^^ Jo chés de la puissance des ténèbres , et nous a fait » passer dans le royaume de son Fils bien-aimé »; Voilà ce qu'étoit Jésus-Christ à son Père à raison de sa filiation ; et cela faisoit sans doute une obli- gation bien étroite de lui préparer un royaume ma- gnifique : mais lui-même l'exagère encore dans l'A- pocalypse : Qui vicerit , dabo ei ut sedeat in throno meo : sicut et ego vici^ et sedi ad dexteram Pa- tris (4) : tt Quiconque sera victorieux, je le ferai » asseoir avec moi sur mon trône , comme ayant (0, Matth, m. 17. — (*) Rom, viu. i5. — (^ Coloss» i. ï3. — (4) Apoc, m. ai. » été DE TOtrS LES SAINTS. 33 » étémoi^-méine victorieux je me suis assis avec mon » Père sur son trône » . Comme s'il disoit : Je devois attendre de mon Père de grandes choses , à raison, de la qualité que j*ai de son Fils unique et' bien-^ aimé ^ mais quand je n'eusse du rien attendre d'une affection si légitime, il ne me peut rien refuser après mes victoires. C'est nioi qui ai renversé tous ses en- nemis : c'est moi qui ai établi son royaume : par moi il est béni dans les siècles des siècles : par moi sa miséricorde et sa justice éclatent : je lui ai con- quis un peuple nouveau et un nouveau royaume : c'est moi qui ai établi la paix dans ses Etats. Y eut-il jamais un plus puissant exécuteur de ses ordres ? J'ai renversé tous ses ennemis, et ai fait redouter sa puissance à la terre et aux enfers. Y eut-il un fils plus obéissant que moi, après m'étre soumis à la mort et à la mort de la croix ? Jamais prêtre lui offrit-il une hostie plus agréable et plus sainte ? Ja- mais y eut-il lévite qui lui ait immolé avec plus de pureté que moi , puisque je me suis immolé moi- même comme une hostie sainte et immaculée, non pas pour Vkes péchés , mais pour les péchés des autres ? Ah ! il n'y a rien que je ne doive non-seu- lement attendre , mais encore justement exiger de mon Père. Aussi n'ai-je pas sujet de me plaindre de lui. U a. ouvert sur moi tous ses trésors : il m'a mis à sa dextre.,' et je ne pouvois pas attendre de plus grand houneur; C'est là ce qui regarde Jésus-Christ : voilà ce qui nous regarde. Sa gloirç est grande, il est vrai; mais le bien qui le regarde nous regarde aussi : ses pré- tentions sont les. nôtres. S'il a vaincu , ce grand BOSSUET. XI. 3 o4 POUR 1/ A FÊTE eapitaine^ il a vaincu pour nous aussi- bien que pour liii ; et j'ose dire plus pour nous que pour lui ; car il n'avoit rien quasi à gagner, étant dans Ta- bondance : ou s'il avoit quelque chose à gagner , c'étoiient les élus. S'il a été obéissant à son Père , c'a été pour nous. Le sacrifice même de ce grande prêtre est pour nous consommer avec lui daiis son Père : Sanctifico pro eis meipsum (0. « Je me sacrifie » moi- même pour eux ». Et cela pourquoi ? Ut 6m- hes unum sint, sicut tu in me et ego in te ; ut et ipsi in nobis unum sint (^) : ce Afin qu'ils soient un tout » ensemble comme vous , mon Père , vous êtes en » moi y et moi en vous, qu'ils soient de même un en » nous ». Nous motu^ons en sa mort; nous ressus* citons en sa résurrection; nous sommes immolée 4ans son sacrifice : tout nous est commun avec lui. Et si nos souffrances iie sont qu'une continuation des siennes ; Adimpleo quœ desunt passionum Christi (5). « J'accomplis ce qui reste à souffrir à Jésus-Christ )> ; notre gloire ne. doit être qu'une extension de la sienne, Quodsi, comme dit l'apôtre, ctim essemus inimicij reconciliati sumus ifi sanguine ipsius , muith magis reconciliati saly^i erimus in vita ipsius (4) : « Si' lorsque nous étions ennemis de Dieu, nous » avojis été réconciliés avec lui par la mort de son » Fils , à plus forte raison étant maintenaht récon- 3) ciliés avec lui, nous serons Sauvés par la vie dé son >> même Fils ». Si lors même que nous étions sépa- rés dé lui, ce qui se pasâoit en lui venoît jusqu'à iious ; si nous sommes morts au péché dans sa moit ; à plus forte raison les propriétés de sa vie doivent (0 Joan. xvii. 19.— W làid' ai. — [^) Coloss. i. 24» "" W Rom. V. 10. * iDE ÏOtJS tBS SAINTS. 35 nous être communiquées 'après i^tte nous aVobs été réunis par la réconciliation avec -son Père, et qu'il bous a lui-même donné sa Vie. Êa grâ<îe et la vie nouvelle ré '«de en lui; tnais elle VLj réside que comme dans la {^mcipale partie; Et tout de même que la vie du cceur ne seroit pa$ jparfaite , si eUe ne se répâindoit sur les membres ^ quoiqu'elle réside principalement dans le cœur ^ ainsi il manqueroit quelque ehose à la vie nouvelle de lésus-Christ y si elle ne :se répaudoit sur lès élus qui sont ses membres, quoiqu'elle réside principalement en lui comme dans le chef. Sa clarté ne pàrc^t pas dans sa grandeur , si elle né se communiqué; d'au-*- tant que ce n^est pas conime ces lumières découlées du soleil^ qui ne se répandent pas plus loin : mais fe'est une lumière et une splendeur première et ori* ginelle , telle que celle qui réside dans le soleiL Vous gâtez une source, quand elle Ue s'étend pas dans tout le lit du ruisseau. C*est pourquoi le Fils de Dieu dît k son Père : Egù în eis , et tu in me y ùt sint corisiimmati in uttumi^X tf Je suis en eux et vous en moi, afin qu'ils soient cou- i> sommés dans l'unité » . Vous êtes uri , mon Père , et vous voulet tout réduire à l'unité : ut sint unum^ sicut et nos imûtn sumus W': « afin qu'ils soient un , » comme nous sommes un ». C'est porurquoi vous êtes dans moi et moi en eux , « afin de les consommer » dans l'unité y>^. ut Hnt consurnmati in umtm. C'est pourquoi ce jeleur ai donné la clarté que vous m'avet » donnée» tdedieisclatitatemçuamdedistimihi^ ut sintwium sicut et nosS^} : afin qu'ils soient un coanme W Joan. XVII. a3. — W Ibid. 22. — C') Ihid. 36 POUR LA FÊTB nous i parce q^e cette clarté m'est donnée pour la leur communiquer* Et « c'est par-là qu'il faut que le » monde sache que you3 m'avez envoyé » : ut sciât munduS quia tu me misisti (0. Voilà pourquoi je suis venu : voilà votre dessein quand vous m'avez envoyé y de consommer tout en un. C'est pourquoi^ Pater, çuos dedisti trahi W , « Père, ceux que vous » m'avez donnés », non - seulement comme mes compagnons et comme mes frères, mais comme mes membres ; volo , « je veux » ; ah ! ce sont mes mem- bres ; si vous me laissez la disposition de moi-même , TOUS me devez laisser celle de mes membres : volo ut ubi sum ego, et ilU sint (^} , « je veux que là où. » je suis, ils y soien^ aussi ». Si je suis dans la glaire, il faut qu'ils y soient : mecum, mecum^ « avec mot^ ?} par unité avec moi » ; afin qu'ils connoissent la clarté que vous m'avez donnée , qu'ils la connoissent en eux-mêmes, et qu'ils voient sa.grandeur par son étendue et par sa communication : çiuim dedisti mihi; « c'est de vous que Je la tiens, mon Pèire ». C'est pourquoi , « parce que vous m'aimiez avant la créa- » tion du monde » : çuia tu me dilexisti, à constitua tione mundi; vous me l'avez donnée toute entière^ capable de se communiquerait de se répandre ; « afin » qu'où je suis ils y soient aussi avec moi , pour qu'ils » voient la gloire que vous m'avez donnée » ; ut u6i ego sum et illi sint m,ecum , ut videant daritatem mecun quam, dedisti mihi (4)^ ce Je me sacrifie pour » eux » et pour leurs péchés : Ego pro eis sanctifico meipsum (5). C'étoient des victimes dues a votre co- 0 CO Joan. XYiu a3. — W Ibid. a4. — P) 7^W. — (4) Uid. — (5) Uid. ip. DE TOUS JLES SAINTS. 3*] 1ère : je me mets en leur place , pro eis / « pour » eux » 'y afin qu'ils soient saints et consacrés à votre majesté à même temps que je me dévoue et me sa--> crifie moi-même. Quand les bras ou les autres membres ont failli , c'est assez de punir le chef. Quand on couronne le chef, il faut que les membres soient couronnés : s'ils ne participent à la gloire du chef , il faut que la gloire du chef soit petite. Il manqueroit quelque chose à la perfection de mon offrande, s'ils nétoient offerts en moi : Sanctijîco meipsum pro eis , ut sint et ipsi sanctijîcati : « Je me sanctifie moi -.même » pour eux , afin qu'ils soient aussi sanctifiés » : à ma mort , s'ils ne mouroient par ma mort : Adint" pleo quœ desunt passionnm Christi pro Corpore ejus quod est Ecclesia (') : « J'accomplis ce qui » manque aux souffrances de Jésus-Christ pour son » corps qui est l'Eglise (*) » : à ma vie , à ma résur- rection et à ma gloire, s'ils ne ressuscitoient par ma résurrection , et ne vivoient par ma vie , et ne fussent glorieux par ma gloire. Mon Père, je suis en eux : il faut donc que « l'amour que vous avez » pour moi , soit en eux » : Dilectio quâ dilexisti me in ipsîs sit^ et ego in eis(?) : et il faut aussi (0 Cohss. I. a4. — (») Joan, xvii. a(>. {*) Bossuet ft mis ici à la marge ue j;on mamiscrit ce texte do Fapôtre : ( Ephes. i. 22 , a3. ) JSt ipsum dédit capiU supra omnem Ecclesiam, quœ est corpus ejus et plenitudo ejiis, qui adimpletur omnia in omnibus : « H Ta donné pour chef suprême à TEglise , la- » quelle est son corps, et dans laquelle il trouve son entière pér- il fection , lui qui accomplit tout en tous ». Sur quoi il fait cette glose : Ideoque adimpletur, eo quodjît omnia in omnibus t il accom- plit tout en tous, parce quil est tout en tous. Edit. de Déforis. 38 POUR LA FÊTE que la joie et Ja gloire que vou3 me donnerez, soit en eux , et tout ce qui est à vous est à moi^ et je^ » suis glorifié en eux ». La gloire du chef tombe sur le^ membres., et la gloire des membres rervient au chef. Je suis glorifié en eux ; il faut qu'ils soient glorifiés en moi. Père saint y Père juste, je vous les recommande : puisqu'ils^ sont à moi, ils sont avons; et si vous m'aimez, vous en devez avoir soin comme . de moi. Enfin il ne veu* dire autre chose par tout ce discours,, sinon que nous sommes touç à lui, comme étant nn avec lui, et comm0 devant être aimés du Père étemel par 1^ même affection qu'il a pour lui : non pas qu'elle ne soit plus grande pour lui que pour nous \ mais cela ne fait pas qu'elle soit diJÛTérente. C'est le même açiour qui va droit à lui, et rejaillit sur nous : à peu près comme une flèche qui par un même coup et un même niouvemènt percé la première chose quelle rencontre; et ne fait \ ce qu'elle attrape après, qù'uiie légère entamure. Ou comme un bon père qui regarde ses ènfans et les leurs par un même amour, qui ne laisse pas d'être plus grand dans ses enfans sur lesquels se porte sa première itnpétuosité. Ou plutôt comme nous aimons d'une même affec- tion tout notre corps , quoique nous ayons plus de soin de conserver et honorer lés plus nobles parties. Et après cela nous nous étonnons si Dieu agit (i) Joan. xyii. i3. -^ (*) Ibiâ, lo. DE TOUS LES $AI;NTS. 3q, avec passion 7 et s'il agit avec passion y comment no produira-t^il point des, eiTets extraordinaires, e( qui surpasseront toutes nos pensées ? La passion fait faire des chosef étranges aux personnes les plus foibles : et que fera-t-elle à Dieu ? Elle &it surpasse» aux hommes leur propre puissance : eh ! le moins qu'elle puisse faire à Dieu , c'est de lui faire passer les bornes de sa puisaançe ordinairié. Non^ ce n'est pas assez^ pour rendre. les élus heureux^ d'emplayier cette puissance par laquelle il à fait le monde : U faut qu'il étende; S(H3i bras; : In manupot^nti ^t brd- chio extento (0 : « avec une main fo|:*t0 et un bras 31 étendu »> Il n^ ^ attachera pliis aux natures déft choses ; U ne prendra plus loi que de sa puissance et de son amour. Il ira chercher dans le fond de l'ame l'endroit par où elle sera plus capable de félir cité. La joie, y entrera avec trop d'abondance^ pour y passer par les canaux ordinaires : il faudra lui ouvrir les . entrées y et lui donner une capacité extraordinaire. Il ne regardera plus ce qu'il en a fait y mais ce qu'il en peut faire. Ce sera là où il donnera Cottime le coup de maître : il nous est inconcevable y misérables apprentife que jaous Bmst^ mes* n tournera notre esprit de tous côtés pour le façonaer ey^tièrement :à sa ïnode > et n'aura égard à nptre dî$poaition naturelle qu'autant qu'il fau- dra pop^ ne : noiis point faire de violence. Aussi lorsqu'il décrit les douceurs du paradia, ce n'est que pajr des mystèr«. XXXII. 9. — 1^6) Apoc. II. 1 7. DE TOUS LES SAlli'TS. ^l pouvez apporter au prix de ce qu'il a vu , ou bien en avouant qu'il ne sauroit l'expliquer. Il en mar- que quelques conditions générales^ qui nous laissent dans la même ignorance ail il nous a trouvés. Ut sciatis cum omnibus sanctis quœ sit longivudo , et laUtudo^ etsubh'mitas, et profiindum W : « afin que » vous compreniez avec tous les saints quelle est » la longueur y la largeur, la hauteur et la profon- » deur de ce mystère ». Ne vous semble -t- il pas entendre un homme, qui auroit vu quelque magni* fique palais , semblable à ces châteaux enchantes de qui nous entretiennent les poètes, et qui Ue parle- roit d'autres choses, sinon de là hauteur des édifices, de la largeur des fossés, de la profondeur des fon- demens, de ladongueur prodigieuse de la campagne qu'on découvre ; au reste ne peut pas donner une seule marque pour le reconnoître , ni en faire une description qui ne soit grossière : tant il est ravi en admiration de ce beau spectacle ! Voilà à peu près ce que fait le grand apôtre. Il ne nous exprime la grandeur des choses qu'il a Vues, que par l'empres* sèment où il est de les décrire, et par la peur qu'il a d'en venir à bout. Demandez-lui-en des particula- rités : il vous dira que cela est inconcevable : tout ce que vous pouvez lui dire n'est rien à' comparaison: Parlez-lui des grandeurs de ce monde , et de toute la beauté de Funtvers , pour savoir du moins ce que c'est que ce royaume par comparaison et par res- semblance: il n'a rien à vous dire, sinon : Existimaifi sicut stercôra (^) : « Tai tout regardé comme du «fumier et de l'ordure ». JVe lui allègues^ point le (i) Epheâ. iii. 18. — (>) Phiiip. uU 8. 4^^ ?QUR LA FETE témoignage; de vos y/eux ni de vos oreilles : Dieu agit ici par des moyens inconnuç^ Il donne un tour tout nouveau à la créature : et puisque^ comme j'ai dit, en cette action il ne prend point de loi que de sa puissance > et qu'il ne s'attache pas à la nature des choses ^ nous ne pouvtitos pas pluS' concevoir cet effet que sa vertu. Les choses prendront tout une autre face^ d'autant que Dieu agira tout assujettir » ^ o'e^t-à-dire changer tout l'ordre de la natuiie; y et faire servir toute sorte d'êtres à sa volonté !; secundiim operationem çud possit subji^f^ cere sibi omnia (0, C'eàt pourquoi l'oeil^ qui voit tout ce qu'il y a de beau dans le monde , n'a tieii vu de pareil j l'oreille, par laquelle notriç ame pér nètre les choses les plus éloignées , n'a rien entendu qui appjTOche de la grandeur de ces choses; l'e^it^ à qui Dieu n'a point donné de bornes dan^ ses pen-> sées, toujours abondant à se former des idées nou'^ velles, ne sauroit se figurer rien de semblable : Neque oculus ^iditj, ne^ue auris {iudi^it^ fwçue in ùor hominis ascendit quœ prœparoMit Deus^diMgen^ tibus se (3) : « L'œil n'a point vu , l'oi^eille n'a point » entendu y res{H*it:de l'homme n'a jamais conçu ce » que Dieu a prépâiré pour ceux qui l'aiment »• Le Sauveur du monde ^ le plus Juste estîmftteur des choses qui pujt être, voyant d'un côté: la gloire que son Père lu^ présentoit, d'autre côté Pinfamie, la cruauté, l'ignominie de son supplice avec lequel il falloit acheter la félicité , daQs cet échange fit si peu d'état de son supplicje , qu'à peine le considéra-t41 ^ CO PhiUp. m. 21. — W /. Cor. h. 9. DE TOtrS hES SAINTS. 4^ et sans délibération aucune , u dans la vue de la » joie qui lui étoit propo3é6; il a souffert la croi^ SI en méprisant la bonté et l'ignominie » : Proposito uiigaudioj stistimtit crucejn canfusione contemp^ td (0. Et il est à remarquer qu'il ne s'agissoit que d'une partie -accidentelle de sa béatitude ^ étant, en possession de la béatitude essentielle dès sa concept tion.' Et que sera -ce donc de nous qui avons à combattre pour le total, et qui avons à SQufirir si |>eu 'de chose ? Qu'il est bien vrai ce que dit l'apô- tre : Non sunt condignœ passiones kujus iemporis adjvturam gloriam (^) : ce Le$ souiFrances dé la vie » présente n'ont point de proportion avec la gloire » du siècle à venir ». Mais nous ne le concevons pas. Prions donc Dieu qu'il nous fasse la grâce dé connottre cette gloire, qui doit être le dernier a<> complissement des desseins de Dieu, et quelle doit ^re la magnificence de ce royaume qui nous est préparé conjointement avec Jésus-Christ, et quel doit être cet effet merveilleux que Dieu opérera dans nos âmes, par cette opération surnaturelle et toate-puissante : Det nobis spiritum sapientice- «qu'il nous donne l'esprit de sagesse » , dans la -connoissance de ses desseins : et reyelaUonis in agn>- -tione èjits{^) : « et de lumière, dans la connoissance » de son- amour » : illuminatos oculos cordis ves- tri (4) : « ces yeux éclairés du cœur » ; de ce cœur et de cette ame nouvelle qu'il nous a donnée pour porter notre esprit à des choses tout autres que celles que nous voyons en ce monde, et nous re^ (0 Heb, XII, a. — C») Rom, viii. i8. — ^) Ephes* i. 17. -^. (4) Ihid, 18. 44 POUR LA FÊTE mettre en Tesprit la puissance de Dieu : ut sciatis quœ sit spes vocationis ejus : ce ce que nous devons >i espérer d'une vocation si haute » ; étant appelés de lui au dernier accomplissement de ses ouvrages : et (juœ diyitiœ gloriœ hœreditatis ejus in sanctis (0 : a quelle estla richesse et Fabondance de ce royaume » : et quœ sit supereminens magnitudo virtutis ejus in nos qui credimus W : « el combien grand sera réffort » de sa puissance qu il fera sur nous ^ par L'extension » qu'il fera sur nous des miracles et des grandeurs » qu'il a opérés en Jésus-Christ » : secundum opera^ tionem potcnt/œ ejus quam operatus est in Christo (^X Puissions-nous concevoir l'affection que Dieu a pour nous, par laquelle « lorsque nous étions morts par » nos péchés, il nous a rendu la viie en Jésus-Christ, » et nous a ressuscites avec lui » : Ckm essemus mortui peccatis, conresuscitavit nos Christa et cofb" i^ii/i/icavitii)', voilà l'unité dans la vie : « et nous » a fait asseoir dans le ciel en Jésus - Christ » : et consedere fecit in Christo (5) ; voilà l'unité de la gloire : ut ostenderet in sœculis supervenientibus : ce afin de faire paroître dans l'éternité la magnir » fîcence de sa grâco* en Jésus - Christ dans ses » membres, par l'écoulement de la gloire de Jésus- » Christ sur nous » : ut ostenderet in sœculis super- venientibus abundantes di\fitias gratiœ suœ, in. ba^ nitate super nos in Christo (6). (0 Ephes. I. i8. — (») Ibid, ig. — (3) Ihid. ao. -- (4) Ephes. ii. 5, — ^5) ibid, 6. — (6) Ibid. 7. DE TOUS LES SAIITTS^ 4^ SECOND POINT. Dieu étant unique et incomparable dans le rang qu il tient , et ne voyant rien qui ne soit infiniment au-dessous de lui , ne voit rien aussi qui soit digne de son estime^ que ce qui le regarde, ni qui mérite d'être la fin de ses actions que lui-même. Mais bien qu ilse considère dans tout ce qu*il fait , il n'augmen- tera pas pour cela ses richesses. Et si sa grandeur l'oblige à être lui seul le centre de tous ses desseins, c'est parce qu'elle fait qu'il est lui seul sa félicité. Ainsi, quoi qu'il entreprenne de grand, quelques beaux ouvrages que produise sa toute-puissance , il ne lui en revient aucun bien que celui d'en faire aux Autres. Il n'y peut rien acquérir que le titre de bien- faiteur 5 et l'intérêt de ses créatures se trouve si heu- reusement conjoint avec le sien, que comme il ne leur donne que pour l'avancement de sa gloire , aussi ne sauroit-il avoir de plus grande gloire que de leur don- ner. C'est ce qui fait que nous prenons la liberté de lui demander souvent des faveurs extraordinaires : nous osons quelquefois attendre de lui des miracles, parce que sa gloire se i^ncontre dans notre avance- ment, et qu'il est lui-même d'un naturel si magnifi- que , qu'il n'a point de plus grand plaisir que de faire largesse. Cela nous est marqué dans le livre de. la Genèse, lorsque Dieu après avoh^ fait de si belles créatures se met à les considérer les unes ^près les autres. Certes si nous voyions faire une action pa* reille à quelque autre ouvrier, nous jugerions sans doute qu'il feroit cette revue pour découvrir les fautes qui pourroient être échappées à sa diligence. 48 fOUR LA FÊTE majesté/ il les réudra heureux par la contempla- tion de sa beauté infinie; Que dirai<*je davantage? il les élèvera par^-dessus tout ce que noui; pouvons nous imaginer^ poiH* tirer iainsi plus de gloire de leur estime^ Si c'est peu de chose que d'être loué par des JiommeSy il en fera des dieux, et s'o^^ligera par ^ là à faire cas de leurs louanges. Notre Dieu enfin pour contenter. Tinclination qu'il a d'établir son honneur par la magnificence, se fera tout un peuple sur le* quel il régnera plus par ses bienfaits que par son pouvoir , auquel il se donnera lui-même , pour n'a- voir plus rien à donner de plus excellent. Après cela je pense qu'il n'est pas bien difficile de •se persuader que Dieu a tout fait pour la gloire de ses saints. N'y auroit-eyit - il faire .qù^LtoUs les de$sein$;de Dieu, aboutissent aux bienhemîeil^? Jésus-Christ n'est-il pas le premier-né » de toutes 91^3 cré^ur^es ? N'est-ce pias en lui qu^a été . créé . tf^uk ce ..qu'il y a de visible et d'invisible 7 IJl est Ja consommation de. tous les ouvrages de Dieu. Et, sau^ ^ler plus Ipin^. les paroles de mou text^ noua iout assez yoîi^ que les saints, ne sont pas la fin que Dieu, s'e^t proposée $lan$.,tous.s!e.S;Ouvrage^i puisqu'eux-^memes ne spot que.pyui: Jésus^Christ ^ Fqs miiem: Christi (0 : « Et .vous êtes à Jésus^ ^ Christ v> Tout cela .est très-véritable , M^ieut^s ^ mais il n'y < a rieu. à .mon avis, qui établisse plus ce que, je viesisde dire. Le même apôtre qui a dit que^, tout,e[5tpp^r, no.tre Seigneur, a dit aussi que^ tout est.pojur, le$ élqs..]S.t non-seulçment il Ta dit;, il BQVS.s^ dpuné de. plus une doctrine admirable pour le cçimprefidre» . Il nous apprend. que Dieu ^ afin de pouvoir dQnner cette prérogative à son Fils , sans rien déroger, à ce qu'il préparoit à ses saints ^ a trouvé le , moyen 4'imir leurs intérêts avec tant d'à- dres$e^,i que tous leurs avantages et tous leui^ biens sout cpmm|4ps i?). Q'est ce qui^me reste à expliquer en pieu de mots. Que si Dieu me fait la grâce de pottypirdire ;,quelquje chose qi|i approche de ces hautes vérités ^ il. y ^nra de, qnoi. nous étonner de l'aifectiop qu'il a pour les saints , et des grandeiics pi^ il les ^pelle. ... i^) L (^. m. 2i. mm j;*)jfom. y nu fàjiy 5» »OUK IiA fAtI t ' " * ' » TROISIÈliE P01^ft^ , ' Lti Pèfe' éternel à^^âilt réiiipli sdii l*îls d« toutes les richesses d« la divinité ^ a voulu qil^en lui tdute^ leâ iidtions fUsseât b^ïiilés. Et comme il lui a àbûni les plvié jfl^Ûrès dé ses iumilreâ y il a iftâbli eëtté loi universelle , î|u- il iï*y eftt point de gràco 4ui hé fût un écoulement dé là siétthe. belii vieut que le Fils de Dieu dit à son Pète qu'il à dôtitté aui )U6tes la Inètàe ùlkvlê qtlll a Voit reçue de lui : Ego clartia* lém ^uàfh, âedSsû mitUi dùâi eisW : « Je leur ai ;l^ donné II clarté que iéïiÈ m'aves donnée)». Oil comt^e Voùâ Véyez^ U compatrélâ Sainteté k la liir ibièré^ pournoiis faire voir qii^éllé est une et in- divisible^, et que tbùt dé ihéme quê lés tâybns du sôtéE Veuant à tbkiibelr sur quelque corps ^ lui dokb- Àetit vék^ttablemérit un éblâl nouV^àti et une beauté tioiiyëlle/ mais qui ù*èst (j[u^ine impreàsiott de là beauté du âbleil ^ et ùâis éSUsion dé cette lumière originelle qu\ réside eti lui; AiUsi la ]teticé dé^ élUs n'est autre chose que la justice dé notre ISéiguéur^ qui s^étéud suk* eux ^ns se ^éjpét^r de i»à sdut^e> pàrbê qu'elle est iùfihie : de sorte qùlls lî'biit dé Splendeur qtie ceUe du Fils ^é Dieu ; iià sfbM euvi^ ifonnés de sa gloire; ib sont tout couverts ^ pout parler avec îapôti»è, et totit réVêtus de Jéàus-C!brist. L'esprit de Dfeu y JMéssfeùrs; « cet ^èisprît imiiïénsé » qui cbm^reii'd en soi tbûtès choses », hoc ûùoi èontlhet 'èràniaW y se repose sûr eint poUr leur donner une vie commune. Il va pénétrant le fotid DS TOtrs LEfI «AlUfTS. 53 de leur ame; et là, d'unie manière ineffable , il ne cesse de 1^ .travailler jusgues à tant ient mêlés et confondus avec lui , cornm^ il fait lui»* même avec son Père une parlaite qnité. Il semble qu'il iadt peur qu'il n'y mette quelque différence : Ego in eis et tu in me, utsintcùnsamtfiati in unum, M seiai mmndus quia dihxisU eos sfieùt et ma di^ 0) Cohës. nu 4- •*• (*) Ephes* i. 33. •» \') Joan, zvii, 24* 54 ' ^VOV% tk ïiTB texisiiL^)^ t « Je suis en eux et vouiS' einnor, lafin >> qu*ils soient consommés dans Tunité, et 'que le «'monde connoisse que vous les avez aimés, comme * n vous m'avez aimé )>. Eà unipeù après.; Dileptiâ çud dHexisti me in ipsis sit^ et ega in ei&i'^ï: «Que Ta- T» maur dont vous m'avez aimé soit en- eux ^ et que » je soi& moi-même en eux^». ïe suis en eux et vous ^n moi > afin que tout se {réduise à Tunité, et que le inonde sache que vous ne faites: point de distinction entre nous > quevou&leisiaimesi, etqueivous^enacvez: soin comme de moi-inéme. . , - ^ » ' A ces- paroles^ Messieurs , qui séroit Tiuseixsible qui né se laisseroit éuuDUVoir? Certes, elles sont $jl avantageuses pour nous> -que je lels cr ôirois inju-c rieuses à notre maître, si lui-même ne les avoitpro-^ xioncées. Mais qui : peut , douter de ce prodige:? Etr quoique d'abord cqla nous semble incroyahle,^:e$t-ce frop peade sa parole pon^^ nous en assurer ?. Teuonsr Boys hardiment à cette promesse, et.laiissO>u$;ména-^ geiràuvPère éterndlles intérêts de son. Fils :dl saura bienr.luii donner le rang qui est dût à sa qualité .et à son mérite, sans violer cettCr unité queilui-iaéme lui a si instamment deJnandée. .Gomme une^ boj^ne mère qui tient son cher enfant entre ses< bras ^^ porte différemment ses caresses sur diverses partie de son ,corps ^rselon gué son affection la pousise}/d y en a .quelqûeis-unes qu'elle orne avec plus de> soth , qu'elle, conservé^ avec- plus d'empressement; .ce n'eat toute- fois ' que le mêmie amotir qui l'anime : ;de même le JRère éternel , sans diviser cet amojur qu'il doit en commun à soti Fils et à ses membres ^^ura hmx lui DE XOVfll hUS SAIVTS. 5& donner la prééminence du chef. EjL s il y a quelque difij^rence en, oet «xêm|ile> c'est ^ Messieurs , que Tuniondes saints! aviec Jésus^Christ est bien plus, étroite; parce qu il emploiera pour la feire/et sa main toute-puissante ^ et cet esprit unissant , que les^ Pères ont appelé le lien de la Trinité. Ditesrmoi tout ce qu il vous plaira de la grandeur^ des victoires y du {sacrifice de mitre maître; |'ayoae- rai tout cda, Messîeufôy et f eh avouerai beaucoup davantage : car iqne pôurriQOSr^nous dire qtii appro- ehât de sa igloire^ Mai& je ne laisserai pas de&oute-* nir que celui, qui n'aspire pas ou même royaume^ qui ne porte pas son ambition :)^asqu'aux mêmes, honneurs); qui inf espère pas la même félicité ^ n'est pas digne.de ;iMortèr le nom de chrétien , ni d'être lavëtde'sonvsâng^mi d'être animé de son esprit. Four qui a-t-^il vaii/cb , si ce n'est* pour nous? N'est-ce pas poitr>*nous qu'il s'est immoté? Sa gloire lui s^ partenoit î)arl€| ôek| se peut *^ il npliquer^^ qu^en disant que nous sommes le méuDe torf^, tt qu'il ne faut point metti^e de difiilrence entre lui et BOUS? Après de si grands desseins de la Providence sur les bienheureux y après que Dieu s'«st .intéressé lûî-' même à iettr grandeur y et s'y est intéressée, pur ce qu'il aime le plus; prenez garde ^ dir^iens, locs^ qu^on vous parlera du royaume céleste, de ne vcma le pas représenter à la fiiçon de cesdboses basses qui frajppent nos sens, on 4^ ce^ plaisiiis périssables qui trompent plutôt notre imagin«tîon qu'ils ne ia contentent : tout nous y sembléna. siouvteasi, mûns n'aurons jamais rien vu de semblable : N0%^fimiQ omnimi^) : « ^e m'en vais faire tfmtes tdbeises nou«^ » velles ». Comme Dieu,* sans avoir «gàrd -k ne qu'il a fait d^s <^oses , ne considâre^a plus qite tie. 4^*il en peut faire ; comme il ne isuivraplua lem^ dispoai'« tion natureUe, et ne prendra Jdi que ide .sa {Puissance et de son amours ^ce ne serok pas uisBiiiaiModre.té^ mérité de prétoidre txmoevi^ir ce iqu'il£MÎ'dahs les bienheureux, qiie sL nous véulions r odmprsndre sa toute ^piâssance. Mettre ks icfaosesidans jcefcj^tat naturel oii nous les voyons, cela âoit bén pour commencer les ouvi^es de Dieu. JMbis s'il veut ftdre des saints quelque <^ose digne de lui , il faut qu'il travaille, in manu potenti 0i irach^iy eMenê^i'^ïf « avec une main ibi^e.eiun bras étendu s/Ufauti (0 Zrot. xuii. 19. ^poc. XXI. 5. — (*) Deui, t. iS. SE TOITS LES SÀliTTS. S*] dis-fe^ qo^i Sentie -se^n bras; il faiit qù^il' leâ-t<^rnd de tous cètés pmir W feçeàner eiitièreâient à $a mode, et qu'il ik'aHr^^d à' leur dfeposkion natu- rdlc'^ qu\ititant qu'il: faudra pour ne leur point faire de violence.' éè^sèret pourlorS qu'il êènnera ce grand coufi d» niaftre/qui rendra les saints à jamaié étonnés de leur propre gloire. Ils seront teHement embellis des présens de Dieu , c(u'à ^eine rétemité leur suffira-t-elle pour se riecohnôltre. Est-ce là ce corps anh-efois sujet à tant ieû ouvre léis en^ trées , et qu'il leur prête, pouî»' aînâ dire , son es^ prit, comnîe il les fera jouir de sa félicité: Je* vous prie de oonsidéjcer un tnoniefit kië^ vi^ «e qu^ o'e$t que cette béatitude. Notre ame da^s oeMie diair morteM^ ne peut hqu reacontrer qui k aol&fas^e : elle est d^un^ bumeur diflieile^ «Ue trouve à redire -elle concévoif de plus grande qu^ déposséder odoi qui Sa possèide, et que cet ob)èt ifii la maîtrise «pilà 4^1 Car il n'y a rien qui soit -plus^^ à elle que' <^ qui ^t sa récqm^ pense; d'autantque la j^écofflpeuse «stauâcbée à une action , de laquelle le domaine lui appartient. Comme 58 POUR LA Figrs elle loue Dieu de ravoir si bien conduite , d'avoir ppéré en elle tant de merveiUes^ cependant que son Dieu même laïque ! Là y Seigneur^ toif jours, on chan^ tera vos louanges ; on n'y parlera, ne, s'entretiendra que de vos merveilles;, jamais on, ne se lassera d'y parler de la magnificence de votre royaume :Mag^ nificenUam gloriœ sanctitatis tuœ loquentur, et mi"^ rabilia t^a narrabimt CO : r Ils parleront de la ma- 9 gnificence de votre gloire et de votre sainteté , et «raconteront vQ$ merveilles ». Mais vous ne vous lasserez non plus de leur dire qu'ils put bien fait; vous leur parlerez de leurs travaux avec une ten- dresse de pèi^e : et ainsi de part i^t d'autre l'éter- nité se passe];*a en des congratulations perpétuelles. O que la terre leur, paroîtra petite! Comme ils se riront des fo^le^ joies de ce monde ! JÇn est- ce. assez y Messieurs , ou s'il faut encpre quelque c}ip^e. poujr.PQUSî exciter î'^Que restoit - il à faire au Père éternel pour nous attirer à lui 7 II nous appelle au royaume de, son Fils unique > nous qui ne «ommeâ que des serviteurs , et des serviteurs ii\utilç$ix Il ne veut rien avoir de secret ni de ré^eryé pour, nous. L*ob)et qui le rend heureuse, il nous l'abanf donne. Il nous . fait les compagnojiMS de. sa gloire , x:endre et pourriture quenouâ sommes; et il ne nous d€|9Aande pour cela que notre amour , 6t quelques pietits services qui lui sont déjà dus par une infinité d'obligations que uous lui avons ^.et qui ne seroient que. trop bien payés des moindres dé ses faveurs^: Cependant qui le pourroit .croire, $i une malbeu* reuse expérience ne nous l'appi^eiioit ? L'homme in-^ DE ^OtTS tB^S .«ÀIVTS. Sq sensé ne veut point de ces. grandeurs : il enibtasse avec/autant. d'ardeur des plaisirs mortels ^ que s'il i>'étoit pas né pour une ^pire étemelle ; et comme s'il .vaûloit^ Qtre heureux mà]gré.san créateur, il prend pour {trouver la félicité un^ route toute con- traire à celle qu'il lui prescrit, et u*a point de con- (ententient qu'eu s'o.pposant ^ ses volontés» Encore si. cette vie àvoit quelques charmes qui fussent ca- pables de le: contenter^ sa folie se)-oit en quelque &ÇPU pardonnable ! Mais Dieu CK>mme un bon père, qui CQnnôît le foible de. ses.en&u£|,{ et qui sait Fim- pression que font sur nous les dios^ présentes, a voulu exprès qu'eue fût. traversée de mille tour- méns, .pour .iwuB faire porter plus haut nos affec- tions. Que s'il y a mêlé. quelques petites douceurs , c'a été pour en tempérer l'apiçrtupie , qui nous.au- roit semblé insupportable sans cet artifice. ; Jugez par^à ce que c'est que cette yie. Il faut deVadresse et de l'artifice ppur nous en cacher ^lesiiiAi^^ci^;; ^t toutefois , ô aveuglement de. l'esprit humaiu i . Q'est elle qui nous séduit, ell^. qui i regardée ^^omMe dU fuWiÇF » ; qui leur faisait dite avep tfiçit àfi. r^ojlutipii.:; (hpia .1 v 6o ÏOUll tA FÊTSr dissoli^'i et esse cuniChristo (0 : « Je d^aire de me voir >> dégagé dès liens de ce corps pour être avec Jésus* » Christ » 9 qui dans iiâ état toujours incertain ^ dans une vie oontinuellement traversée^ mais dana les tourmens les plus àruels et dans la mort iaénie,K, les tenoit immobiles par une ferme espérance : spé ^îventes Wy « vivans par Tespé^^ânce ». Mais hélas t que je m'abuse de site de sa cdtére y comme la poudire est emportée M par un tèut*billdn (3) » . Cependant les justes se ré- jouirent avec Itii : te il les remplira de l'abondance (0 Philip. I. aSf. — (*) Rom. xii. la. — i}) P«. i. s , a» 3, ete. BE TOtrS LES «iLllTTS. 6t » de sa maison ; il les enivrera du torrent de ses dé- » lices (i) ». Ah! Seigneur , qu'il fait beau dans vos tabernacles ! Je ne suis plus à moi quand je pense, à votre palak; iheâ sens sont ratis et mon ame trans- portée ^ quand je. considère que je jouirai de vous dans la terre des vivàns. Je le dis encore une fois ^ et ne me lasserai jamais de le dire : « Il est plus doux » de passer ûâ jotir dàhs votre ihaison ; que d'être » toute sa vie dans les voluptés du monde (?) ». Seî- ^eur^ animez nos cœurs de cette noble espérance. Et vouS| âmes bienheureuses^ pardonnez ^ nous , si nous entendons si mal votre grandeur , et ayes agréables ces tdées glissières que nous lious fotthoni de votre félicité durant l'exil et la captivité de cette vie. Vous avez passé par les misères où nous sommes : nous attendons la fétîdté que Vous possédez : voua êtes dans le port : nous louons Dieu de vous avoir choisis y de vous avoir soutenus parmi tant de périls j^ de vous avoir coml^lés d'une si grande gloire. Se- courez «nous de vos prières; afin que novs allions joindre nos voix avec les vôtres , pour chanter éten nellement ]e$ louanges du Père qui vous fi élu^, àtH Fils qui vous a rachetés^ du Saint -{Isprit qui ,YOilf a sanctifiés. Ainsi soit-^l à jamais. W Pê. ^j^WJ^.Èâaûahi^^p 10^1^ ^11 >iirffi UJ ' t i.. i 62 PÔtTK LA PÊtE • s: III. SERMON POUR LA FÈTR DE TOUS LES SAINTS, t » « PRÊCHÉ DEVÀTÎT LE ROt. Gotiditions nécessaires pour être hetireuk : ik'êtré point trompés, ne -rien souffirir, ne rien craindre. Elles ne se trouvent réunies que clans le ciel. Nous nV serons plus sujets à Terreur, à la douleur, à l'inquiétude : parce que nous j verrons Dieu, que nous y jouirons dib Dieu, qiie âoafl néus reposeront à jamais en Diett. '• ■ ■ " . - ■ • ; ■■ "Ci sit peuft omnia iii omnibus. • ^ ■•■.•"» Dieu sera tout en tous, h Cor. xv. 28* S. . ■ ■ : ^ • . •,".■■• • ■ (jB que l'oefl û*a pâsapétçU^ ce que i'ôi'eaie 'n*ë pas 'oui%' de -qui jamais n'est entré dans le cœur dé rhomme ; c'est ce qui doit' faire aujourd'hui le sujet de notre entretien. Cette solennité e^t instituée pour nous faire considérer les biens infinis que Dieu a préparés à ses serviteurs ^ pour les rendre éternel-* lement heureux ; et un seul mot de l'apôtre nous doit expliquer toutes ces merveilles. Dieu y dit-il, sera tout en tous. Que peut-on en- tendre de plus court ? Que peut«on imaginer de plus vaste ou de plus immense ? Dieu est un , et en même » . t • > DE TOUS LE* SAriTTS. 63 temps il est tout i et étant tout à lui-même, parce que sa propre grandeur lui sufEt , il est tout encore à tous les élus, parce qu^ilremplit par sa plénitude leur capacité toute entière et tous leurs désfrs. S'il leur Ëiut un triomphe pour honorer leur victoire, Dieu est tout ; s'ils ont besoin de repos pour se délasser de leurs longs travaux, Dieu est tout; s'ils demandent la consolation, après avoir saintement gémi parmi les amertumes de la pénitence, Dieu est tout. Dieu est la lumière qui les éclaire ; Dieu est la gloire qui les environné ; Dieu est le plaisir qui les transporte ; Dieu est la vie qui les anime j Dieu est l'éternité qui les établit dans un glorieux repos. O largeur ! 6 profondeur ! ô longueur sans bor- nes, et inaccessible hauteur ! pourrai-je vous ren- fermer dans un seul discours ? Allons ensemble , mes frères ; entrons en cet abtme de gloire et de majesté. Jetons -nous avec confiance sur cet océan : mais s. implorons l'assistance du Saint-Esprit; et ayons notre guide et notre étoile , je veux dir0' la sainte Vierge que nous allons saluer par les paroles de fange, jii^e. \ . ■ r > • , . , . r Sire , on peut mettre en question si l'homme pour être heureux n'a besoin de posséder* qu'une seule chose ; ou si sa félicité est un composé de plusieurs -parties, et le concours de plusieurs biens ramassés ensemble. Et premièrement. il parôtt; qu'iin cœur qui se partage à divers objets , confesse, en se par- tageant ^ que l'attrait qui le gagne est foible, et que celui ^ui est ainsi divisé cherche plutôt sa félicité qu'il ne l'a trouvée. Que s'il paroît d'un côté qu'un 64 IfOVR 1.x f^TS «ettl objet noifs doit éontenter, parce qtfe nèns n'a- vons qu'an cOBur ; il Bemble aussi 'd'autre part que plusieurs biens nous sont nécessaires , parce que noils avons plusieurs désirs. En eflfet, nous désirons la santé , Ift vie , le plaisir , le repos ^ la gloire , ^a^ bondande^ la liberté^ la science^ la vertu: et que ne désiroûS'^nôus pas ? Comment donc peut-^on esî- pérer de featififeire par un seul objet une si grande multipliciié de désirs et d'indinations que nous nouiS laissons en nousrHiémes ? . > L'apôtre a ooncilié ces contrariétés apparentes dani le teinte que j'ai choisi \ puisqu'il nous y fait trouver dans un même objet > premièrement la sim- plicité^ parce qu'il est un; et tout ensemble la va- riété y parce qu'il est infini. IKett ^ dit^il , sera tout en tous. Il est un^ et il est tout. Il est tout, non« seulement .en lui-même par l'immensité de son es*- senœ^ de sa nature , mais encore il^ est tout en tous ^ par l'intompréfaensible fécondité aVec laquelle il se cooununiqué à ses créatures, friis Deus amnia in omnibus r «- Dieu sera tout en tous »«' Mais ce que Tapôtre saint Paul nous a proposé dans une idée générale, le docte saint Augustin 9LOIJIS l'expb<|ùè en particulier, loilsqu'interprétànt eè passage de ré|)ttre aux Corinthiens , il fait ce beau eominebtaire; «. Dieu^ dit'^il, sera toutes choses k » tous les esprits bienheureux , parce qu'il sara leur 9 commun spinsitaçlè , il sera leur commune joie ^ «. il sera leur commune paix » : C&mmune specta*- pii^iûn 0rit omnibus Deus ; oùmntuné gémdium erit mmnibus Dâus ; cominunis pax èritomnibus Deùs (0^ <0 «y. Aug* in Ps. tzzxiv. /t. 10^ tom, iv. co/. 697. Et ' Et c^es pour être heureux , selon les maximes de ce même saint, il faut n^être point trompé , ne rien souffrir , ne ' rien craindre* Car comme la vé« rite est si préeieuâe ,■ quelque bien que Tbommé possède >d*ailleursy il n'est pas assez riche s'il est tron^qpé , et il ^manque d'un grand trésor. Encore quil connois$e la vérité^ sans doute il n'est point content pour cela s'il souffre; et quoiqu'il ne souffre pas, il n'est point tranquille s'il craint. Là donc^ dans le royaume des cieux^ dans la céleste Jérusa- lem f il n'>y aura point d'erreur, parce qu'on y verra Dieu; il n'y aura point de* douleur-, parce qu'on y îouira :de Dieu ; il n'y aura pqint de crainte ni d'in- quiétude, parce qu!on s'y reposera à jamais en Dieu i ni bien, que jdu>us y serons éternellement biienheu- reux , parce que nous aurons dans cette vue le vé** ritable et le plus noble exercice de nos esprits : nous coûterons dan» cette jouissance le parfait contente* ment de nos cœurs; nous posséderons dans cette paiXjl'immuable affermissement dé notre repos. Voilà trois sublimes vérités que saint Augustin nous pro« pose f et que je tâcherai de rendre sensibles , si vous me donnez vos attentions ; afin que vous soyez con* vaincus jque comme il n'y a rien de plus libéral que Dieu qui nous offre de si grands dons , il n'y a rien aussi déplus ingrat^ ni de plus aveugle que l'homme qui ne sait pas profiter d'une teUe munificence. ' . . ■ ■ ^ . . t • ' . , . ^ A > PREMIEBj POINT. . Cl l'apôtre, saint Paul: a dit que les fiifèles sont un spectacle au monde, aux {mgi^s et aux hommes (0^ (>)/.Cbr.iT.9. • - : ï BOSSUET. XI. 5 1^ 66 . ,PO.UR lliii VETE • nous pouvons encore ajouter qu'ils sont un spectacle ^ Dieu même. Nous apprenons de Moïse , que ce grand ét.sage architecte ,i diligent contemplateur de S^QA pi^ppçf ouvrage^ à mesure qu il bâtissoit ce bel édifice au mondé , en admiroit toutes le& parties c Kidif^^em kLçem^uod esfet bona (<) : fc l^ieu vit que m Jla lumière étoit bonne » .-qu'en %y^mk compoflé lei^t^ ps^-oe q^^n Qif^ la, beauté de Tarrcbitecturt p^pil: f^.^nsile Wut^. et dan^ Vaaaeioblage pbiseiv^re que d^nslçç pai?ti9S: détaçb^a^iii avsoit ^encore eib- çl^teri ^ Fa^oit tirouyé parfaitement beau : Et enant 9fa^B bona, (t^.: €(t enfin qu'il s^étoit contenté luih- ]n4Q^^ ^^ çom^iderant dwa se% créatures les traits d^ sa. sag^çge e( l'^lïu^ion de sa bontés Ikf ais comme le '\n^^ et rbomme. de bien est le miraole de sa grâce et. Ji^ ^ef-d'ivuvrede sa main puissante , il est ^u;s$i Iç spectacle \^ plus agréable à ses yeux ; OcuU PomifU mp^r jmt^ Ç) : « Ijes lyeax de Dieu^ dit: If ^ saifit ^isialnû&te , sont attachés mr les justes 9; )ïQn^eul^men^ p^rOe q^*Âl veJUe'Snjrewx pour les pror t^ger , m4i$;^a(>o^e par^^ qWd^ aàné à les regarder du plus ^^t diçç ci^w comix^e;le.p]u&<:her €^jjst de ses çpmpla¥^U€^ « Navu^-Yous point vu, dithil, mon y Siçryi^euf; ioh^ Copier il «si 'droil^ et Juste/ et )^ ci^a^g^p^^pj; Diet^.^ ^ jtO!(ir: ^(^^j^^yr'f^otaclè : comme -il «e^lialk (0 Gen. 1, 4. — (») Ibid. 3i — (3) Ps. atxxiu. i5--.i4)ia^; i. «. i? DE TOÛ9 LES aAllffTS. 6j h les voir y il -veut aussi qu^îls le voîent: il les ravit par la claire vue de son éternelle beauté^ et leur monire à. découyert sa Téiité même, dans une- lu^ «liera si p«ire qu'elle dissipe toiUes les ténèbres et tous les nuages. M«â3 /qsk'estrce ^ idutes-ycms ,. qte^ la vérité ? Quelle image iiems.*e0 dd]iiie2-vaus?6oqs «pielle forme pa*^ wsàit*^^ Bxisihomma^l Mortels grossiers et diarnelSy nous entendons toutxiôttpordïemesit; nous voulons toujours des ima^: et des formeis msrtérielles. No' pourrai^ je atujourd^iiui évejiS^r ces jeox i^intu^ls et intérieurs y qnl sont câolié^ bien avant an ^âd-de voiare ame^ \^ détourner un woment de ces images^ ^^gnes et changeatites que ie^ sens impriment ^ e« ks accputnmer à pdPter la Vnër de la rente totote* pnne? Tentons ^ essayons , voyoïii^. Je^vbus demande penar: odb^ MessieniiS'y que vous 0oyez seulement at-^ lentifs.iL oe q«e vous Entes /'et iqise vons peo^i^ft à l'action qui nous rassembla dusi^s^oe Fiett SBLéPéi Itr vous préchjd la vérité ; et wusi^écoiiter ^ et cel^e que je vous propose en particulier ^^^eSt^iaèGekqplàesft kenreux qui n'est poiiit se^ à r^rcur^ evqwine se troaupe [jamais. Cette vérité est £$à>re et incontesp taSÂe t. elle n^a pas besoin def démdnàt^alifnx^e^ fimi en voye7x l'évldtooe. Mds, Mes^e^i^s^ 6(1 lavôyeij^ vous? €e, peut être daps^ mes paroles I nûlteraeât^ W9 le Oiioyeâ» pa^i Car oà la tois^â ttloinutoe ?f$ans donte dans wie iômièl*é in^érkfii^k qtiî «ne^ là dé*^ eouvref et^d^ès^^là aussi qneVoiis' là ^oy^â^'fé'ivbûs prie, siilvegHmoi-, Mèssieùrâ, et soyéWuh^^èisi âtfen-* tih à l^étât prftént cA voW êtes. Car i;ortwae> si je 6Ô POUR LA FÊTE VOUS montre du doigt quelque tableau ou quelque ornement de cette chapelle royale , j'adresse votre vue y mais je ne vous donne pas la clarté ^ ni je ne pais vous ini^irer le sentiment ; je fais k peu près le même dans cette chaire. Je vous parle ^ je vous aver» tis y j'excite votre attention ; mais il y a une voix se- crète de la vérité qui me parle intérieurement, et la même , vous parle aussi : sans quoi toutes mes paroles ne feroient que battre Tair vainement et étourdir les oreilles. Selon la sage dispensation du ministère ecclésiastique^ les uns sont prédicateurs et les autres sont aùditeurà : selon Tordre de cette occulte inspiration de la vérité', tous i^ont audi- teurs, tous sont disciples : m bien qu'à ne regarder que Textérieur, je paiie,.et vous écoutez; mais au. dedans, dans le fond du .cœur, et vous et' moi écou- tons la vérité qui nous parle et qui nous enseigne» Je la vois, et vous la voy^z; et tous ensemble nous voyons la même, puisque la vérité est une; et la même se découvre eiiicore par toiite la terré à tou^ ceux qui ont les yeu^^ ouverts à ses lumières^ fOa ne peut donc déterminer où ellerest, quoi-< qu'elle oe manque nuHe part. Elle se ;présente à tous I^s, esprits ; muis elle est en même temps àii* d^ççu^ de tous. Quç le$ hommest tombent dans Teiv pçijir:,. la- vérité subsiste toujours : qujls profitent^ o^ qu'ils puj;>lient^ quele9XrSiOonnoi9sanees.'Ci;Qissent oa,c^roi$sent; la. véritç>|i'augmf^te;KML ne. diminue. Toujo.urs une , tp^jp^rs^ég^^, tou|QKn?â imi^uable^ eUe juge^.d^ touA.e( ne. /dépend du, jugement de personne* ^ Chaste et .^dèlç ^ propire à chacun^ f>E TOUS LES SkllXTS. 69 sr quoiqu'elle ^soit commune à tous » : J?< omnibus commuais est, et singidis casta etst, dit saint Aygus^ tin(0. On est heureux quand on la possède; on ne nuit qu'à soi-même quand on la rejette. Elle fait donc également la béatitude et Je supplice de tous les hommes ; parce que « ceux qui se tournent vers 3 elle y sont rendus heureux par ses lumières; et que 9 ceux qui refusent de la regarder sont punis par 3» leur propre aveuglement et par leurs ténèbres » : Cum intégra et incorrupta^ et conversas lœtijicet lundne, et auersos puniat cœçitqte W. Voilà ce que c'est que la vérité; et mes Frères, cette irérité^ si nous l'entendons ^ c'est Dieu même, O vérité! ô lumière! ô vie ! quand vous verrai-je? quand vous connoitrai-^e X Çonnoissons^ous la vérité parmi les ténèbi^es qui nous environnent? Hélas! durant ces jours de ténèbres , nous en voyons luire de tenaps en temps quelque rayon imparfait. Aussi notre raison ^icertaine 91e sait à quoi s'attacher. > i&i 1^ quoi se prendre parmi ces ombres. Si elle se con- tente de sp^tre ses sens > elle n'aperçoit que l'écorce; si elle s'iettgâge plus avani;,; sa propre subtilité Ja confond., iies pluà doctes à*çbaque pas ne sont-ils ps^ conti^iits de demeurer court ? Ou ils évitent lés difficultés , ou ils dissimulent çt font bonne miné^ ou ils hasardent ce qui lèur^vient sans le bien en- tendre, ou ils^se trompent tisibletnent et succom- bent sous le faix. Dans les ^affaires mêmes du monde , à peine la vérité est-elle connue. Les particuliers ne la savent (0 De lib. AffH, Ub. n, n. 37', tùm, i-, C0/.601. — (•) Ibid, n, ^. €oL 600. •JÔ / POUR LA FÊTÉ pas , quoique toutefois îh se mêleiif de juger dé tout , parce qiiW û'oht pas Fét enduê et les rela^ tiens nécessaires* Céuiè qui sont dans les grande^ charges , étant élevée pltis haut , découvrent sadfe doiite de plus loin les choses ;' mais aussi sont- il^ e^poéés à des déguisement plus artificieux, «c Que Ji vous êtes heureux, disoit un atieieh , à sofci auiî » tombé en disgrâce ! dui , que "vous êtes heuréui » maintenant de tfavôîr plus rien en votre fortune » qui obligé à vous mentir et à vous tromper » î Felicem te , qdi fithil habei prùptàr qxiod tihi nièn*- iiàfurb) ! Que fèrai-jé? Oii ttie tôdrnerat^je , assiégé dé toutes peirts par Vbpittiott oïl par Terreur? Je mé défie des autres, et je tfosé* croire niol-^même mek pi-ôpres Inmières: À. péiiîe cfoîs-je voir ce qùè je vois et tenir ce que fe tfenfe;Uàht |'aî trouvé Souvent ftiâraiSttrn' fautive!'^ , . : ' Ah! fai ttdUvé un l-éWède pour me 'garantir rfè î'èprénr. Je Suspendrai mon esprit ;ei f[*etênant èil atrêt î^a n^iôbilité indiscrèie> et précipitée, je âoute^ tai dtt*moins,*6'ïl neiaWtpafe permis îdè'ôettndttrè âU vrai les choses;; Maiç j 6 Dieu! quelle fbiblesse et quelte ^misère! Dé' jcràïntfè de tomber, je n'ose soi^tîr de Ina pTaee ni me remuer; Trisèe et ^àiiki^rkble ref- fuge contre Terreur ^ tfêtre doriiramt de se jflorigér dans i'incertitiudé et' de d^éspérer de la vérité ! O félicité'de la vie fuiiire { Gftr écoutez ce qne promet Isaïe à ces bienheureux citoyensde là Jérusalem céleste : ïfùn ôùàidéi ultra soi tUus / ei'^iuntt ïua non mihueturW 't « Vôtre soleil naui*â jaitiâii -Ôé ?j couchant, et votre lune ne décroîtra p^as « ; c est-^ (0 Senec. ad LuciL JEpist. xlvk — ^ W Isai. x. 20. DE TOITS tlâS S^ÂrtlTTS. ^C ^^diré Acm^éttlement cfHe ia ^ijrilé votts 1uWa'46u* )ours^ .mdfr ei^coréqtt0 ^ot^ë eêptàt sërâ-totlfoiir^ uniformément et égàlBmeûi édaûfé< 0€(uUlefi$kitil de JOiêtaré jamais àéçn ^ )ft«tta& suâ pm ^ )aniA4s> tdàm^ ^ jamais détourné^ jamais ëbiéui par tes appi^eiicefi^^ jcuDaîs préi^enu m pi^éocMiu^ ! ' • ' ' ■ -^ ',> ^^ Je ne m'étopne {»a9.^.\ch]i>éliça^>y « sàml Qvé^oïrû de Naiôanze ies appeUe dieuxr ('i)'f .{iiiisifue ce titre ^ leur est biea mieux (ift qu'aux p«rînces tt pait/rois du monde ^à qui Datid Taitribue. « Jed^axjditxivoua n êtes des, dieux ^ et vôuf êtes* teiia:e]iûiiia du lrte£H T» Jlaut 9 : Ego difci, dii àUis , et ]fipi éxoHsir^m-^» fù^ {^). Mais remairqaèasr;ce <|u'il dit ensuite^ :Tonte4 fbis^ ajoate*1ril^ ô dieux dà diaiv et dé sang^. â dieux ;de terre, et de poussièrq ^ ne vous Iqitse^ pa» â^ouir par icette divinité pas&tigivc; ^\ émprttuttée .) « car enfin voû» ]riiolirre& ooimae des àionniiies y et » vous descendresb: du trque an tombeask », : J^ermnn tamen^ sicut hommes mori^aninij, t^- ^ut ixmus. de principibus ea«2èîeij..LaAia|eàté^ je Tav^nie^ n'est ja<< mais dissipée ni anéantie^ et cm >1^ ,vail ivmte en^tièce siUec revêtir: leni^iSUixîesseiira^ Le r6i:> disciàs<^Bè4iis ^ i;ie meurt jamais^ ^image de Dîen CRtvimmcH-t^le; mais . tependaiit : rfaRMf Jlie: t(mibe^ : n^^ ^om ne lec.SQJit.pas dans.le.s^ulcrev liji^en.^efli pas de la soHe dès citoyens immede mentir atKs: autres et de meiictîr. àr ^oiriuéme. . Vous doue y d bienheureux i es-> prits» qui régnez ayeic Jésus-Christ, vous n'êtes pliM» simplement des hommes^ puisque vous êtes telles ment unis à la vérité , qu il n'y aura plus désormais ni aucune ambiguïté,, aucune ignorance qui vous> lenveloppe, ni aucun nuage qui tous la couvre*^ ni aucun faux four, aucune fausse lumière qui ;vous dâ déguise 9 ni aucune erreur qui la combatte,: ni même aucun doute qui Tafibiblisse. Aussi dans: cet éàit bienheureux ne fandra^-t-il/point la. chercher par de grands efforts, ni la tii^r de. loin .comme par pia* chines et par artifice ^ par. une longue suite de consé- quences^ et par un grand circuit) de raisonnemens.' Elle s'offîrira ..d'elle - mèms .;/ et ; toute; pare^ tonte niani£eâ£e, aansvconfutsion^rsan^' mélange, « Nous 3» rendira;\dit. saint Jeaaiy semblables à Dieu^.paotse n. qtte.nouS'le verroQS tel qu'il est » : Qwt^^paruèritj sànMe» ei^rimus^ n^ia) ^idebimus eum sicuâi estW. ^ ' Mais écoute;fila suite de ce-beau passage : < « Celui 3» qui a en. Dieu cette e^éraiice,.se conserve pur y' » ahisi que Dieu même est ^) pur » : Ûmnis Hfui kabet hana speàt in eOjf sanùtificaiise, siautetsiUeiSiXMtatis' est>(3)^ Aien de «sow&é. n'entrera idànsJ le- royaume de Dieu. Il faudra pàsâer par l'épreuve d'^n eiQamen (0 Ps. cxv. a. — (») /. Joarî, m. a. — (3) Ihià, 3. '.■,,...• . . , 't •••.'.••}'.'■ ■ ' • ».>:•:■.•. .; {*) Bossuet suit ici Içt^sçte grec c^ans 9a yersîpn fnmjMisi^ , coqufie . il paroit par les deux mois ^ecs qu^il a écrits ei^ marge, «yr<{fiy fcyyic , qiii signifient , purificat, pUrui ; i^otxt lesquels' la VÔlgatQ' a y sancti/tcatf sanctus, JEdit, de D^orUm. . ^ ' ^ .,> • ,< \ tigour^ux ; afin qu'une si pui\e beauté ne poil vue , 9i approchée q^e, des esprits, pui^ ; et c'est ce qui &it dire au Sauveur des aaies dans Tévaffigple de oe |our : parmi vous i^)^^ Quoi ! pendant què'viau$^ne ttlif-^ dit«z que «ihair ëtjt^iie sang, comiii6ipâti#IScflitur0 sainte, les discours ^irîtuels prenf^rtartUls^en^vousI Par où s'insinueront les lumières pures et les diastes vérités du christianisme 7 La sagesse, que vous ne aherchéz'pas, desœtldi'a-t-dle de son^^ôné |four . vousèqseignér? Allto> faioinmes corrompus et ^ ce^^ Tupteurs/ purifiez vos yeux et vos cœurs, et peu à peu vos esprits s'accoutumeront' aux lumières de l'Evangile. -^ r^* ^ , Vivons dono diréjCiennementy^H^I la vérité noi^ 74 90VnilA VÀTS sera un jour âéoomvarte. Jamais tous n^aurez -tes-^ pire un air phis doux : jamais votre faim n- auf a été rassasiée par une manne plus délicieuse > ni votre soif étaûchée par un plus salutaire rafratchi^ sèment» Rien de plus harmonieux que la vérité; nulle mélodie plus douce ^ nul Concart mieux eii^ tendu :. nuUe beauté plus par&ite et plus ravisa ftemte* Quoi! me vanterez^ vous toujours l!éclat do cse teint? Yous vous dites .cbrétienne^ et vous étales avise pompe cette foagile beauté^ piège pour les autrei^ poison, pour; vous -t^niéme^ qui^ se vante: de trahier aprèà ses ks âmes captives^ et qtû voûsÊûl porter à vous-même un Joug plus honteux, iete»^ jetez uo peulesyôux^ chi^étiens^ sur eette immortrild beauté jque let* chrétien doit servir • GcAte beauté di-^ vine 110 montre k vos yeux ni une grâpe aiïi&»eUe> ti de» cfrnemens emprmtéa^y ni, u^e jeunesse lugir tive^ ni jan éobt, uue vivacité toiij^Ut^s^déf^Uinté^ LÀfiç tiço^yeja grâce: aveo ladu^ré^ 2 là se trouve ili mA)0rté «v^o 1^ douç^uarvc là se 4i*.<^^d k ;S«ûriej9|ç avç« ragréaWe.c 1% isç^ troiçiye rboun^teté :ftveç«le pUisir et : %tferrlartP»»« ^ Ç^^ Qe <|ud >l¥)lia ay^xis h If. 7.» .»<■«..<• V. > . . ,/ . 'I » . ; * . / SECOND POINT. . , . I . • ^ V. I . , ^ , . ' . . ■ -. r J » 1-» •• .« , l • I . . . ■•. . jDf toutes {)^§ ptfts^ld9svi%: ptosi.pIe^pOfd!iUusioD» c^t ia.JQie j;Lfttilft,§8^e n a j4tnpt^i$ ^atlé avec plus do mnSj, qii^ ^.qu^nd il a dit dans/rScdésiaste:^. qu'il 4^:estimoitik ris;uiAe,;err(9ur opicê anciéniie (0 Eccle, II. a. ...... x /> — .-' . / • '. . . r I désobéîsfiftiiG6^ iDieu h vqjqIu rejtiret. à soi: tout ce qu'Uâvoit itfpaQ^n. de solide «ontentemeiit sur lài terre ^ ei cette, f^ikë goattte de joie. par distinguer le. bônbeur de l'ame (0 s. Aug, in Ps, cxxxYi. n. 5, tom. iv, coL r5i6. "j6 FOITR LÀ f4t% ^ d'avec sa perfection : grand principe ! ) Mais fe SaintrEsprit prononce au co&traire que celni-là esl ins^Qséy (ipi se riéjouit dtas les choses vaines; que cehii-^là est abandomiéy maudit de Dien, qui se réjouit dans les. mauvaises-; et qu'enfin oa est mal^ beureuir^ quand on n's^e que les plaisirs que la Yaisancoddamne ou qu!elle méprise» * Il feat donc avant toutes choses considéi^er d*oii Bonsi vient la joîe ^ et quel en est le sujet. Et premiè* veihenty chrétiens , toutes les joies que nous donnent les biens de la terre sont pleines d'iHusicm' et de v»- nité* C'est pourquoi dans'Ussafiaires du monde ^ k plus sage est toujours celui. que la joie emporte lé moins* Ek^utes ht) hélle sentence que prononce TEc- -eléâastû|tte :: «:Lè fou,, dît-ili^ indiscret , inconsit- » dévéy fait sans. cesse- éclater son ris; et le sagel » peme rit-il doucement » : Faàms 'in risu exaltai vocem suant; mraxiiem sapiens vixtactié ridèbit{^\ En effet , quand^ ôo voit un homme emporté , qu'il puisse avoir .tronwé sur laterre.y en ce lieu de mort^ auoun véritaMe^ sujet dese.ré^ jouir. G':eat pourquoi il rit comme. 4in songe i s'anéantit quand » on se réveille , et qui {ait saec^àélt des nlaux trop » réelSiàlacoui1:ein^pqstureid'uneagréable rêverie Si FebUJfomaium isurgenîium ; Donu^^ in cwitatéiué imaginem ipsorum ad mhihâtn rédiges {Of Concluons d^nc, chrétiens , que si la f^cité est une joie, c'est une joie £6n4ée sur la vérité, Goùir J&tm devenu^ , comme la définit saint Augi^^tinC^). Telle est la joie>des bienheureux , non une joie seu^ lement, mais une joie solide et réelle, dont la- vérité W Ps. xjixii. ao. -i- W Coitfcsê, m. ^s cap. xxiii , ' foi», i, 9oL iSa. ^ft POUR LA FèxB e$i le fond , dont la sainteté est Tefiet , doitt Tëten* iiité est la dur4^. Telle est la ]<Âe des bienheureux ^ dont la plëni^ Ittde est i|i6oi0y dont les transports fiont încrace- yables et les e^eès toiftt dirais* Lohv de Botre idée \éi joies setoiSMUes qui troi^ient la raison, et ne pèr-»' metb^nt paSià Tane de se pos$éder; e» sorte qii*6a A'ofiep«s. dire cpi'eUe jouisse d'aiieon ï^en , puisque sortie deUe-fliéme el^ semble n'être plus à soi pout^ en )eaîr> Ici elle est tivepent touphée dans sott fond le plus intime , daas la partie ki plus déMcate et là plus sensMe ; tente hors d'eUe , toute à elle^neinè i possfédant iceluî.quî ia possède; 1^ raison toujours attentive, elt toiqûurt oontente. : IVtais^ioes &i)res^ œ n'est pas à moi de publier fies merveîUes , pepdaxit que le Saint^sprit nous re^ pr^^t^ ai vivemenit la |eie ti^mphnnte de la célesta Jérusalem , par la bouche, du prophète Isaïe^ . « Je » çr^saîy dit le Seigneur, tmnouwau^ oiel ec une ]» nouvelle rtense ; et toutes les angoisiBes aemnt ou^ » b}î^s et oetJpesrie^dronAiiaiRais d i ûèlmoni tf^^ 4iH9 9M^. a9giiiisiiiif priores , et non , ascendènt super ççr (^).* ¥ Mais «vous. fTiMift. ré}apiiiez.V et votx^ ame ^. nageiU daiais Ja l^'duraat tente FéteinntévdâDs les » choses qiie je crée ipoiir rotre iiontanin* >> ! ^^m»* ê^itH àt lemukufii^s m^fue ia fompitetmmn m his ^(M eg^^^r^ÛM ((.'Car jer&rai quew J^jrasalen»; ssra ^) toute tinnsporiéé d'iBLUégcesBe^et^^fueson^peuple 3>'Sei^.daw fo raYisfiQmasii:%': iQiiiVr ecjee* égo- créo j!ç^tlt9ai^m:e4i$HkuUonàm:j.jeé>papi^tttniefMs gmdiunH «Et mQi-Kn^n\e i^i^e réjouirai, ^aJ^rusaleipy et DE "TOUS XiKS 8AIKTS. ^g »'îe triompherai^ de joie dao$ la félicité àé mon » peuple » : Et ea^ukako in /^rusahm , ^t gmuhio Al pàpiUo mço. Yoilà de queUe wia»ièi^le Saiofr?E;sfmt ne^us re* présçate les joies de seis MjOiapus j^ie&ibeiuareiix,. Puis se tournant à c^^ qui $Qi^t ÇHir 1a terre , à TE^ise mi* litaute, i} les invite w cea teiwe» à prendie ps^rt s^iu^ :tr9xispprt$ de la Sftiisite et trioxni^^oAe Jérusa-» len^r « Réjoui$se%-vou^^ dit-U, a^vec elle , ô ¥ouj5 qui » Taîmef^ ; r^Qui^e^^vo^ ATeo eUe d'une grande 9 joie, et.$^çe^aiVep;elle par une foi yw ajbondiea » en délice» spirituelles.; paroe que le Sei^eur a » dit : Je ferai couler sur elk un fleuve de paii^ , et v ce torrent se débord^ifa mf^ aliondanioe ; toutes » .les.naticHifi de :1a tei^re y auront: part : et avec là a> même tendresse qu une mère caresse son enfant , » ainsi je vous consolerai , dit le Seigneur » : Lœta* mini cum Jermahm^ e^ ^mukMs «p <^4i innms yui diligi!Useam:.gawip^inim94gai44i0p.*. u^sugittisût repleamini c^ nb^re oompioiionis ejm ; vi muige^ai^ et delioUê aJfuc^Us.^ owmimmla ghria ^fm^ Quia hœc dicit Gominuâ.: Ecûe ego d^UmAo sv^er eam çuasiflui^iumpoois., et qmati torpenSent- mundankm gloriam g^mtium.m^». iQuùmodo n cm m0t0r klan^ dÙMtur^ita^egq aew»Jaber fuçs^riû^ QnsU Ofevir seroit insensible à oes divines tendi^ttesl AspkoAS.à ces joie&^céle^es, quifserfiutdlasitaiiipltts tlquoli^xiftea qa'eUes^ seDoat accompagmes 4l'*ujn. ipafdbit irepos, parce'ique nous ne les pciiiirroj^â4a^iiais.f>0rdce; Quit«r tons;, mes frère^, tp^s ui;^s ya^ ^plaisis»^ Q'e^t la (0/r. LXVi. i8, et^e^. 8ô POVR tk rhtt maladie qui les désire, a Hélâs ! que eet artisan de » troiàperies nous joue d'une manière bien puérile ^ » poul* nous empêcher , malgré toute notre avidité 9 pour la joie , de discerner d'où nous vient la véri<- 1» table joie » 1 Beu ! çuirni pueriUter nos iUe deci* piendi ariifex JuUitj.*.. ut non discemamusy gau^ dendi a^idi^ unde ^erius gaudeamus (01 Que de désirs différens sentent les malades 1 La santé re- lent j et tous ces appétits déréglés s'évanouissent. Sfe mettons point notre bonheur à contenter ces appétits irréguliers que la maladie a fait naître. Qu'a le monde de comparable [ à ces ineffables douceurs ] ? Mais s'il se vdnte de donner des joies , il n'ose pas même promettre de vous y donner du repos : c'est l'héritage des saints, c'est le partage deg bienheureux \ et c'est par où je m'en vais conclure. TROISIÈME POINT. « * , ■ Le repos étemel des bienheureux nous a été figuré dès l'origine du monde, lorsque Dieu ayant tiré du néant ses créatures, et les ayant arrangées dans une si belle ordonnance durant six jours, établit et sanc-^ tifia te jour du repos dans léqnel, comme dit la sainte Ecriture, « il se reposa de tout son ou« » vrage (^) »• Vous savez assez, chrétiens, que Dieii qui fait tout sans peine par sa volonté, n'a pas^besoin de se délasser de son travail; et vous n'ignorez pas non plus, qu'enTcoiïsacrant ce jour de repos, il. n'a pas laissé d^uisi d'agir sans cesse« (c Mon Père, dit » le Fils de Pieu, agit sans relâche (3) ». Et s'i^ (>) JuHan, Pâmer. aeJ^ii.'Cohtempl: lib: ii\ cap, auii', inter^Oper, ^. Prosp, — W Ge/i.,u. a. — » {}) Jqan, n. a. , cessoit ]>E frOtrS LIS SAINTS. 8i cessait un moment de soutenir l'univers par la force de sa puissance, le soleil s'égareroit de &a route, la mér forceroit toutes ses bornes • la terre branleroit sur son axe ; en un mot toute la nature serott en un moment replongée , je ne dis pas dans l'anaien chaos^ mais dans une perte totale et dans le non être; Quand donc il a plu a Dieu de sanctifier le s^tjjème jour y et d'y établir son repos , il a voulu nous &ire comprendre, qu'après la continuelle action par la* quelle il développe tout l'ordre dessiècles, il a désigné un dernier jour , qui est le jour inunuable de l'éter*! nité, dans lequel il se reposera avec ses élus : disons^ nûeuz f que ses élus se reposeront éternellement eii lui-même. Tel est le sabbat mystérieux , tel e$t le « jour de repos qui est réservé au peuple de Di^u », ^lon la doctrine de l'apure : Itaque reUnquitur sabbatismus popuJo Dei, dit la savante épttre.aux. J^ébreuxCO. , Le fondement de ce repos des prédestinés, c'est que l'éternité leur est assurée. Car, mes Frères, l'E^ ternel médite des choses éternelles: et tout Tordre de ses conseils, par diversesrévolutions et par divers çhangemens, se doit enfin terminer à un état im-. muable* C'est pourquoi après ces jours de fatigue, après ces jours de l'ancien Adam, jours pénibles , jours laborieux , jours de gémissement et de péni- tence, où nous, devons subsister et gagner le pain de vie par nos sueurs; nous serons conduits à «la cité » sainte, que Dieu, dit le même apôtre, nous a » préparée (^) » , et o^ le Saint " Esprit nous assure . (0 Hébn IV. o. — (») Hêbr, Xï..i6. . , BOSSUET. XI» 6 que « lious nous reposerdits à jàiÈais de tontes &os » peines (0 «« . Cest en vue de VéVitikltjé dé €6lt«^Utf triômphfttilé, que saint Paul l'appelle 4ciiae €ité ferme et qtit a » un fofid consulte» votre expérience^ > Je laisse les grandes paroles ^ f abandonne les. grands mouvez men^ de Fart orai^oire^ pour peser ^ec vous lea dKxses froidement et de sens rassjis. Dans cette inconstance des chos^ humaines^ et parmi tant d^ violantes agitatÎQiis ^m nous ^ trou-» blent ou qui noi^s inenacent, celui-là me semble heureux qui peut ^voir un refuge ^ et sans cela , chrétiens) nous sommes trop exposés aux attaques; de la fortune pour pouvoir trouver du repos. Par exemple^ vous vivez ici dans la Cour, et sans entrer plus avant dans Tétat de vos aàaires , je veux croire que la vie vous y semble douce; maig certes vous n'avez pas si fort oublié jies tempêtes dont cette mer est si sQuveji^t ^igit^e , qne vous osiez vous fier tout- à4ait.à cette bonace* Et c'est pourquoi je ne voi$ point d'hompe^ns^ qui ne se destina un lie^ de retraite, qu'il regarde de loin comme un port dans lequel il se Jettera^ qwtid U sera poussé par les vents contrsÂreâi. Mais q0t asile q^e voi^s vo^s préparez contre la fortune , 09I ^ntH>re de ^ofi ressori; et si loin qué. vous 4tflfiidieer votre prévoyai^e , jamais vous n'égalerez hes bbarreries. Yau« penserez vous (0 9fich. II. 10. 64 yo'tTRtA PiTÈ être muni d'un côté, la ruine viendra de l'autre; Vous aurez tout assuré aux environs ,- l'édifice fon- dra tout à coup par le fondement. Si le fondement est solide, un coup de foudre viendra d'en-haut qid renversera tout de fond en comble. Je veux dire simplement et sans figure , que les malheurs nous assaillent et nous pénètrent par trop d'endroits, ' pour pouvoir être prévus et arrêtés de toutes parts. Il n'y a rien sur la terre oîi nous m.ettions notre appui, enfans, *amîs, dignités, emplois, qui non- seulement ne puisse manquer, mais encore ne puisse nous tourner en une ameilume infinie; et nous se- rions trop novices dans l'histoire de la vie humaine , si nous avions encore besoin qu'on nous 'prouvât cette vérité. Posons donc que ce qui peut arriver, ce que vous avez vu mille fois arriver aux autres , vous arrive ausâi à vous-mêmes. Car sans doute, mes Frères, vous n'avez point parmi vos titres de sauve- garde contre la fortune: vous n'avez ni de privilèges, ni d'exemptions conti^e les communes foiblésses.. Fai- sons donc qu'il arrive que l'espérance de votre for-* tune, que votre bonheui*, vos établissemens soient troiiblés, renversés par quelque disgrâce imprévue , Votre famille désolée par quelque mort désastreuse ,. votre santé ruinée par quelque cruelle maladie ; si vous n'avez quelque lieu d'abri où vous vous mettiez à couvert, vous essuierez tout du long' la fureur des vents et de la tempête. Mais où trouverez-vous cet abri? Jetez les yeux de tous côtés; le déluge a inondé toute, là terre ; les maux en couvrent toute la surface ; et vous ne trouverez pas même où mettre. DE :TO.US ^ES:.5Al]SrTS. 8& ie pied; Il faut chereh^sr don^^,!^ moy^n Ss sortir de toute l'enceinte du monde. ' Il est = vpaVqu'il y* a une partie de nous-mêmes, sur , laquelle, ia. fortune n'avoit aucun droit ; notre es* prit, notre raison ^ notre intelligence;. Et p'est la lia^ute quenous. ayons faite : ce qui étoit libre et.inde-*. pend«ht/.Ddus:Tayons été engager dans les biens du monde r et: par-là) nous ravpn&;SO\imis. comice tout le reste aux prises de la fortune. Imprudent) la nature même a eiiseigne, aux animaux poursuivis , quand le corps e$t décpuyert, de cacher la te|e:; nous dont la partie ;priaçipale létoit naijurqllement à couvert de toutes les insultes ^ nouç la produirons toute au dehors y et ikmi^ ei^ppsons aux coups ce.qut tétoit inaccessttile: et.iin9rid94rpble. :Q]i]$ ^restent-il donc maintenant yi siûùii q»e démêlant du mUieu du monde cette partie immortelle ^.xH)usraUions établir dans la cité sainte queiDieu nous a pr^atée ?.. / Peut-être qu^.yousi pensenezr que vous njepouvex vous établir oùvous ipi^êtespas^ et.que je^vQus parle en vain delà terre;et de la âùret^dupàrt.^; Pendant qu» voii^ vogues au; milieu dsa ôsides..'Ëh.>}upî! ne voyez-yoi3s^pas>cé navicèqiû^ éloigné de son pprt^ bàtttt pw les y^tsel |)ar les flots ^ vogue dans uj}^ mer iiàéoniiu^'? Si les- tempêtes/ Fagitent ;^ si. les nuages couvrent le séleil ; âkirs le sage:pilo1^^ot*air gnant d'être emporté cotirtne des ^écueils-^ co^m^nd^ qu'on' jette Vànere $ et cette^wi^re^fadt trouver à sm vaisseau la' consistance parmi leâ fl^ts^.k terre. au. milieu des ot^des, et uneespè^^eid^ port assuré dans Vimmensité et dans le tumulte de Tocéan. Ainsi ^ 86 potm LÀ ï'èfiE ait le saint apôtre ^ tte an^t'é tocrée^ dont les cordages nie rompent jaxdaiiSy 4am la bienheureuse terre des vivans; et ent^yeis qu*ayftnt trouve un fond si solide^ elle isei'virâ de fondement assuré à votre vaisseau ^ jusqu'à oe qu'il ariîve au port. ■ : f : ' Mais^ -Afeteieurs^ pôur espérer, il faut ttieti, v^ti^e esprit e^ înlàlué de tant de belles $eiiteuc^yéicitites BÎréloquemm^nt eÉi prose et en vers;, qii'unjMonlaigne, )e le nomme^ vaut a débitées ; qui pr^fèrrënt lesaninlaux à rhonkme^ leur instinct à notre raison', lenruature simple , iuiio* cënte et' sans fa^d, c'çst ainsi qu'on parler à nos raffinememi^t à qoi' malices. JVEais; dîtes^înoà^ aobtil philosophe, 4|ui: voiis riez si finement die l'lû>mme qui s^ma^ni» être quelque chosé^' comptereB^vous encore pôlir i^ièû de connoltre Dieq ? Gonùolti^e uiie pTemièt'ë nature, aéâter son éternité^ adajiirer sa toute-puissance, louëf" ââ sagesse, s'abaskdomier à sa providence y obîéii^ & $à voioïité^ n^est^^e ritn qui (0 Hebn vi. 19. SE TOVB hiS SAINTS. 8^ xums dj^tiagMQ dfiç bâw$? T^çiis l^saiot^^ dont nous hpaoroos attjQiird'bMÀ l^ ^Qri^a^e mé^oijf^ y ontr ils vameudQat ^péré w Dieçi, çt pt'y Mt^ que les éipit curiens brutaux et le^ ^^mmh qm .ftki^t coonu (droHam^nt les. devoirs, da Vboiaiae ? Plulièt nit vpye^VQUS p^fl quQ $% nm partie de Jaoos^'ioéjiieft ti&DX ^ la A$iturj9 sensil^ky^ c^Ue q^ ooi^noît et qui ame ]>ieu, qui cops^quemment «ai semblable k lui y puisque lui^-mêioQ se oonnott et s'aime^ dépend l^^ssairem^nt de pli^s^ hauls principea l £1 donc ! que le^ él^nieu9 npus redemandent tout ce qu ils nous prétest , peurvù qxte Dieu puisse aussi nous redemauder cette aiM qu'il a faite à sa ressemi^ UwCe. P^ris9$iPt tputes les pensées que nous avons données âxu^ choses moiiellesf mais. que ce qni dtoit né capable. de ^ieu âoètimmQr^fl comme lui. Par conséquent > komoto setisiieilk)» iqni ne renonmd à Ift yie f»t«r«5 /que Jlarcfe l ... . V \ 9^ , VOVK lA pixB liWiMMMtMMvU-BiAa^a.1^*, IV.* SERMON POUR LA 1PÊTÈ DE TOUS LES SAINTS a * * • * ^ J^ désirs des natium ii^teH^ntei^ pour. ||^ fi^li«il^, I^qwf «mqr^ à cet égard. Où se trouve la véritable félicité j çn <|¥oi elle çon* «iste ^ québ sont les moyens pour- y paryei\|r j t[uelle est la yoîe ^ui Ut sit Deut omniâ ia dmoibtt»» Dieu sera tout en tous. I. Cor. xv. 28. LiE Roi prophète fait une demande dans le psaume trente-troisième , à laquelle vous jugerez avec moi qu*il est aisé de répondre. « Qui est Thomme qui » désire la vie et souhaite de voir des jours heu* » reux » ? Quis est homo oui vult mtam , diligit dies sidère bùnos{^)1 A cela toute la nature, si elle étoit animée, répondroit d'une même voix, que toutes les créatures voudroient être heureuses. Mais surtout les natures intelligentes n'ont de volonté ni de désir que pour leur félicité; et si je vous demande aujourd'hui si vous voulea^iêtre heureux, quoique vos bouches se taisent, j'entendrai le cri secret de (^) Ce sermon est imparfait. Il manque plusieurs feuillets dans Foriginal ; nous mettons des points, qui avertissent des lacunes qui s^y trouvent. £dU, de Déforis, (0 Ps. zxxin. 13. DE TOUS LES SAINTS. 9I VOS cœurs ^ qui me diront d*un cemmun aoSord, que sans doutç vous le désirer ^ et ne désirez antre chose. Il est vrai que les hommes se représentent la félicite sous des formes différentes > les uns la re^ dierchent et la poursuivent sous le nom de plaisir, d'autres sous celui d'abondance et de rickes^s, d*autMs sous celui de repos , ou de liberté ,; ou de gloire; d'autres sous celui de vertu. Mais enfin tou9 la recherchent , et Je Barbare et le Grec, et les nat- tions savivages et les nations pçlies et civilisées^ et celui qui 3e repose dans sa maison y et oeloi qui travaille à la campagne ) et celui qui traverse les mers, et celui qui demeure spr la terre. Nemd vottlo)i$ tous être heureux , et il b'y a rien en nous n^ de plus intime ni de plus fort, ni d^ plus naturel -que ce d^ir. A)outons-y , s'il vous platt, Messieurs, qu^il n*y a riep aussi d^ plus raisonnable. Car qu'y a^t-il de meilleur que de souhaiter le ïàéa ^ ci'est4i« nos devanciers; et je veux dire en.un mot^ Measieurs^^ que nous pouvons on imaginer des jours heur^u;^^ ou les espérer, ou les feindre , mais que noas ne pouvons jamais les posséder sur la. terre. Songez y ô enfans d'Adam^, au. paradis de délit ces, d'où vous avez été bannis par votre désol)éisT sance : là se passoient les jours heureux. ]Mb|î^ son- gez, 6 enfans de Jésus-Christ, à ce nouveau paradis dont son sang nous aouvertle passage : c'est là que vous verrez lès beaux jours. Cesoùt ici les jours de misères, les jours de sueurs et de travaux, les jpiurs de gémissèmens et . de (péniténée , auxquels noi|6 pouvons. appliquer ces paroles du prophète IsaSe-; Papule meus ^ qui te beatum dicuHt, îpsi te deci^ piunt{^) : « Mon peuple, ceux qui te disent héureuiç, » t'abusent et renversent toute :ta conduite ». Et encore : « Ceux qui font croire àce.pQuple qu'ij » est heurejux^ sont dès. troihpeursç et ceux dont » on vous vanté la félicité sont précipités, dsins/l'erf » reur » : Et eruni 4jui beàtèficant poputum istum seducentes et qiU beatificanturj prœcipit&ti{'^). . Doilc , mes Frères , où se trouve la féliéité et.ia vé^ «ritablevie, sinon dans la terre des vivans ? Qui sont les hommes heureux , sinon ceux quî sont avec Dieu» dont nous, célébrons aujourd'hui ia:féte2 Gejux-là voient de beaux jours , parée que !Dieu.est la lumière qui les éclaire. Ceux-là vivent dans l'aboiuianoe^ parce que Dieu est le trésor qui les. enrichit.. Ceuxr là enfin sont heureux, parce que; Dieu est le bien qui les contente, et quèlui séuliest.i'out à taus selon les paroles de mon texte :. Omnià in omnibus. VO Is, m. m. — (*) Issï^^.t^ ....;• DE'^brS tfeS SAINTS. gi " Saint Augustin explique ces mots de Tapôtrè par une excellente paraphrase : Commune spectaculum trk omnibus Deus, commune gaudium erit omnibus Deus, communis pax erit omnibus Deus {^) : « Dieu, » dit -^ il , tiendra' lieu de tout aux bienheureux : ;» 3 sera leur conmiun spectacle, ils le verront : il » sera leur commune joie , ils en jouiront : il sera .«leur commune paix, ils le posséderont à jamais » sans- inquiétude et sans trouble ». De sorte qu ils seront véritablement heureux , parce qu'ils auront •dans cette vision le plus noble ei^ercice de leur esprit, dans cette jouissance là joie parfaite de leur cœur, dans celte paix raffermissement immuable de leur repos. C'est ce que nous a dit saint Augustin. ...... Ecoutes l'apôtre saint Jean : Dilectissimi , nuncfilii Dei sunius, et nondum apparuit çuid erimusW : ce Mes bien-aimés , nous sommes enfans de Dieu y et » ce . que • nous . devons être un jour ne paroît pas » encore ». Ainsi ce n*est pas le temps d'en discou- rir. «Tout ce que nous savons, c'est que. quand » notre gloire paroîtra, nous lui serons semblables; » parce que nous le verrons tel qu'il est » : Scimus ijuoniam cxim apparuerit , similes ei erimus, quo-- rtiam videbimus eum sicuti est. Comme un nuage que le soleil perce de ses rayons, devient tout lu- mineux , tout ^datant ; vous y voyez un or , un brillant : ainsi notre aiâ'é^exppséeà Dieu, à mesure qu'elle le pénètre , elle ' eh est aussi pénétrée : et iious devenons dieux en regardant attentivement la Divinité. Deus diis unitus^ dit saint Grégoire de, (0 Enar. in ,Ps. ixxxiv, ./i. lo^tom^iv, col, 897'.^- (») /. «Tbo/i. 111. 8. •1 g4. • vPOUK LA PÊTÏ NazianseCO; un Dieu uni à des dieux. Fïdèèiiur Deus deorum in 4$ion (^) : « Le Dieu d/^s dieux sent ;> vu en 6ion »/Dieu^ inat$ Dieu dêi dieux, parce qu'il l«s fera daa di^ux par la claire y ue de «a fece. « («) Lorsque Tœil vif et pénétrant de Tame à décou^ )i vert d'une manière certaine piumenrs choses vraies » et Invariables^ alors elle ^ porte de tout sônpoida » sur lit v^îté même ^ ptv laquelle tout lui est 2) montré^ et s'y âxaot ^ elle laisse tout le reste n commô dans Toubli ^ pour jouir dans la vérité »* seule de t0ute$ choses à la fois. La vérité est pro-»- » che de touj oeux qui du monde entier sd conrer- » tissent i elle pat un amour sincère ; elle éist éter-* » nelle pour tons : ssmfe être dans aucun lieu, elle » n'est jamaiié absente. Elle avertit au dehors , «lie o enseigne au deidans* Elle change en mkfnx tons » ceux qui la voient ^ et ne peut être changée en mal » par Gcnx qui rapprochent. Personne ne la juge s (Ô Orat. XXI, totn. I, p, 374- ipist, LXiii, ihid. p. 820. — (») Ps. Ixxxtii. 7. C*') Fo^s acies mentis et végéta, cujn ipvlta vera^et iacoiiimuta<* bilia certa ratione conspexerit, dirigit se in ipsam veHtatem quà cAiIcta moMti^nta^, eiqne inliabréilts^ tanqttàtt ôbliviscituf CiaËteta, et kk iUâ rnsmi owmknM fitdtttr (>)...... Xte fôt« taiMdo ad Bé ê^ftts»^ c{ui diljguiit eam» pmnibus prmni^ ast, omaihu» 9el*pit9ni« : ndJo loco est, nosquam deest : forb admouet, iatùa docet;cerQeptç9 3e cofùnNitaft otCkiies in «îeliu^, à nuUo în deterius tommutaiur : nullos de iltà (Odkait, aiilluâ sfaie flMi {«tdtcat beiM v^). Montés nostrar sdiquaoda tmm pli]# vHUnt , altqiiawlaniiiiÉi» «^ «s hflic fetentnr se e^e mutabiles; cùm illa in ae manens ocuc ftrpficîat cj^ plus k Aobis yidetur, nec deficiat cum miniis» sçd integrs^çt inccurrupta, et «oayei^sos laet&cct lottiiae, et âvétâos puiîiat taecifate C^. (i) s, Aug. de Uk. Arb. lit. 11 , m 36, loi*. t,cùLêoi.'^ (>) /^«rf. w. 37. — (3) Ibid*. n. 34 1 <^o^' 600. DE TOUS X.ES 5ÀIINTS. ^5 Il p^MUne ne' juge iâeii sans elle. Nos espi^its la » voient tantôt plus^ tantôt moins ; et de là même M ^'avouent muiibles^ poi^tté la ,véiité deineiirant 1^ en soi^biéme tovjonrs immuable ^^ ne gagne rien » quand nou$ H voyons davantage /et ne perd rien I» quand noua l'apercevons moins. Maïs toujours p entière et inaltérable ^ ^e réjouit par aa lumière » c^ux qui ise tournent vers elle , et punit par l'a^^ ^"veuglâment ceux qui lui tournent le dos ». Rien de plus harmonievcz que la vérité : nulle mélodie plvis*douce : nul parfum plus agréable ^ non [ pour ] «ceux qijiî voient la saperfide...* . Qui ne diésiré pas ? qui ne gémit pas? quine sou* pire pad dans cette vie? Toute la nature est dans rindigéufce. Gloire, puissance , richesses ^ abon- dance y noms supei^es et magnifiques ^ disses vaines et stériles. Les biens que le monde donne ^ accroissent Certains désirs et en poussent d^autres : semblable^ à ces viandes creuses et légères , qui pour n'avoir que du vent et non du suc ni de la substance, enflent et ne nourrissent pas , et amusent la feim plutôt quelles ne la contentent. Les grandes fortunes ont des besoins que les médix>cres ne connoissent pas. Cette avidité de nouveaux plaisirs, de nouvelles mventîons , aiarqne de la pauvreté intérieure de Famé. L'ambition compte pour rien tout ce qu^elle tient. Ne vous laisser pas éblouir à ce» ap^m^enoes : ce qui -est ridielDa&t «ouvert par le dahors , n'est pas tonjonrs rempH au dedans; et souvent ce qui semble regorger , est vide. "^ Voulez-vous entendre la plénitude de Ja joie des saints? Alléluia j. Amen, louange à Dieu. Ils ne q6 FOU& LA FÊTE prient plus , ils ne gémissent plus : fn patrid nuUus orandi locus, sedtantkm laudandi; qùia nïhil deest: çuod hic cre^tÙT:^ ibi videtur: guodhic pelùur y ibi accipitur (0 ; « Dans la patrie il n'y a plus lieu à » la prière , mais seulement à la louange ^ parce » qu'on n'y manque de rien. Ce qu'on croit ici ^ là I» on le voit : ce qu'on demande ici^ là on le reçoit ». La créature ne soupireplus et n'est plus dans les dou- leurs de l'enfantement. Elle ne dit plus : « Malheu- » reux homme que je suis ! qui me délivrera de ce j» corps dé mort i?) » ? Elle loue , elle triomphe , elle rend grâces. Amen, est verum : iota actio nostra, Amen et Alléluia erit (3). « Amen, cela est vrai: » toute notre action sera un Amen, un Alléluia. M (^) Mais n'allez pas vous attrister en considérant » ces choses d'une manière toute charnelle ^ et ne ♦ (0 1^. Aug, Serm. eux. /i. i. — C*) Monté vu. a4' — (^) S. Aug»^ Serm. CGGtxii, n, 29, tom. y, coL i435e£ i436. (") Sed nolite iteiton camali cogitatione contristari , quia si fort^ alîcpns vestrùm steterit et dixerit quoûdie, Amen etÂlleluia, taedio marcéscet et in Ipsis vocibius dormitabit Non sonia transetintibua dicemus", Amen, Alléluia, sed afiectuanimi.Quid est enim Amen? Quîd Allelaia? Amen, est verum : Alléluia, laudaie Deum Deos yeritas est, incommutabilis, sine defectu, sine provectu, sine detri- mènto, sine augmento, sine alicujus falsitatis inclinationé, pei^pe- tua etstabilis, et samper incomiptibilis manens Amen utique dicemus, sed insatiabili satîetate. Quia enim non deerit aUquid, ideo satietas : quia vero illud quod non deerit semper delectabit, ideo qusdam, sidîci pofcest, insadabilis satietas erit. Quàm ergo insatiabiliter satiaheris yeritate, tam insatiabili veritate dices, Amen (>) Yacate «t videte Sabbatum perpetuum (*)...... Et baec erit vita Sanciorum, baec actio quietorum v^) Stabilitas ibi magna erit, et ipsa immortalitas corporis nostri jam suspendetur (i) s. Aug. Serm. cccixii, »• 29, t^i suprà, •— {%) Ibid. n. aS. — (3) IhUt, n. 3o f eoL li^ij» '» dites DE TOUS LES SAINTS. gj » dites pas ici que si quelqu^ua entreprenoit , étant » debout y de répéter toujours ^ Amen^ Alléluia, » il seroit bientôt consumé d'ennui^ et s^endorini* » roit enfin tout en répétant ces paroles. Cet Amen ^ » cet AHeliùa ne seront point exprimées par des » sons qui passent y mais par leé sentimens de Famé » embrasée >d'amour. Car que signifie cet Amen ? » que veut dire cet Alléluia} Amen, il est vrai; » ^//e/uia^' louez Dieu. Dieu est la vérité^ im«^ » muable, qui ne coiinoit ni défaut, ni progrès , ni » déchet y ni accroissement ,• ni le moindre att^^ait )i pour la fausseté : éternelle et stable , elle defmeure n toujours incorruptible. Ainsi nous dirons effectif » vement Amen , mais avec une satiété insatiable : » avec satiété, parce que nous serons dans une par- si faite abondance; mais avec une satiété toujours » insatiable , si Ton peut parler ainsi , parce que ce » bien , toujours satisfaisant, produira ea nous un. » plaisir toujours nouveau. Autant donc que vous » serez insatiablement rassasié de la vérité , autant » direz-vous par cette insatiable vérité , Amen , il » est vrai. Reposez-vous et voyez : ce sera un ;sabbat » continuel. ïlt telle sera la vie des saints, telle » l'action de leur paisible inaction. Là il y aura une » grande stabilité, et l'immortalité même de notre a» corps sei^a attachée à la contemplation d^ notre » Dieu. Ne craignez donc pas de ne pouvoir tou* » jours lou'et, celui que vous pourrez toujours » aimer. in coBtenàpktîoiie Det.^.^.. Kàîî timoré ne non possi» sempèr Iaa<« dare , qoem semper poteris amare (>). (i) In P$. Lzxziii y n. 8 , tom, it.| col, 884'. ■ >'^ . ' . BOSSUET. XI. 7 g8 POUR LÀ FÉITE D W Qttan4 on dit que tout le reste nous sera p désormais soustrait ^ et que Dieu fera le sujet con* u tinuel de notre délectation , Tame accoutumée à » se délecter dans b multiplicité des objets, se trouve » comme angoissée^ Cette ame charnelle , attachée » à la chair, dont les ailes engluées par ses mau- » vaises cupidités , Vempéchei^t de voler vers Dieu , » se dit ; De quoi JQuirai^je quand je ne mangerai , » ne boirai , ni ne vivrai plus avec ma femme 7 ^ Quel plaisir me restera-t^il alors 7 CTest la maladie » eï 9on la santé qui ^ vous fait goûter ce plaisir » imaginaire* Les malades sont sujets; à certaines » envies.. Ils brûlent d'ardeur pour une telle eau ' (') Quando dicitar quûd cœtera subtrahantur et solus Deas erit qtto delectemur, qaasi angustaïur anima quae consuevit mulds de* lectari, et dicit sibi anima camalis» eami aâdlcta» visoo malamm cupiditatum involatas pennas habens ne vplet ad Deum, dicit sibi^ Qnid mihi erit ubi non manducabo, ubi non bibam, ubi cum Qxore non dormiam ? qnale gaudiam mihi tune erit ? Hoc gaudiom tuiun de sgritucUne est, non de sanitate I^nt quèedam aegro- tantiuin desîderia : ardent deaideriû âut oliiotijiu fi>ntiâ/aut «dicujitf pomi; et sic ardent iit eadstiment quia. frui debeant desideriiiB suis. Venit sanitas, et périt cupiditas : quod desîderabat, fastidit; quia hoc in illo febris quaerebàt...... Cùm multa sint aegrotantinm desideri^ quas iita SAnitas tollit : sic oomia toUit immortiditas^ quia saQita^^ nostra immQrtalit^s est (0» Spes laetat nos» nutrit nos, confirmât nos. « Bossnet ovoit placé dans son mantiscrit ces ttxu^ latine , dans Tordre çu^z^ovs les rangeom ici. Céteient aution de matériaux qui dévoient servir à compléter son discours : ils nous, gnt paru mér^ ter d^ètre ici donnés de suite, pour mieux faire sentir le dessein de Fauteur y qui en avoit lui-même mis en français quelqUed phri^ef^« qn^ nous a^oiqfs ^soio de coosçrT*^ claiu im^fv traduc tion. £dit. de Déforis, m (i) S, A**g' Stm, çcLT, II. 7, eçl. toSt «l t«54* DE TOUS LES SAINTS* Qg » OU pour un fruit de telle espèce , et les souhaitent » si passionnément qu'ils s'imaginent devoir jouir de » Tobjet de leur désir. La santé revient et ces appé<^ » tits s'évanouissent. Le malade commence d'avoir . » du dégoût pour les choses qui lui causoient un D appétit si immodéré; parce que ce n'étoit pas » lui y mais là fièvre^ mais la maladie qui cherchoit » ces choses. Or comme il y a beaucoup de désirs » de malades que la santé dissipe ; ainsi l'immorta» » lité enlève toutes les cupidités , parce que notre » santé consiste dans l'immortalité. L*espérance nous ^ allaite y nous nourrit, nous fortifie ». Les esprits inquiets n'entendent pas cettexjoie? E TOt^S LES SAllCTS. llOt â cette vérité nous délecte quisiind elle nous' est ex- primée par des sons qui passent ^ combien nous ra-* vira-t-elle quand elle nous parleria de sa propre voix âernellement permanente ? Ombres y énigmes y im* perfection [ici bas]. Quelle sera notre vie lorsque nous la verrons à découvert ! Ici nous proférons pli»^ sieurs paroles y et nous ne pouvons égaler même la simplicité de nos idées : nous parions beaucoup , et disons peu. Combien donc sommes-nous éloignés de la. grandeur de Tobjet que nos idées représentent d'une manière si basse et si ravalée ? Et toutefois cette expression telle quelle delà vérité [ nous plaît]. Là une seule parole découvrira tout : Semel locuius est Deiis (i> : « Dieu a parlé une fois », et il a tout dit. Il a parlé une. fois , et en parlant il a engendré son Verbe, sa parole , son Fils en un mot. C'est en ce Verbe que nous verrons tout : c-est en cette pa- role que toute vérité sera ramassée. Et nous ne con* cevons pas une telle joie ? Facate etmdete: « Restez 9 en repos et voyez » : sortez de l'empressement et du trouble , quittez les soins turbulens. Ecoutez la vérité et la parole : Gustale.et videte : Goûtez, et voyez combien le Seigneur est doux ; et vous con- cevrez ce ravissement , ce triomphe , cette jok* in- finie, intime y ^e la Jérusalem céleste. Mais 9 mes Frères y pour parvenir à ce repos , il ne nous faut donner 'aucun repos. Nul travail quand nous serons au lieu 4e r^>os: nul repos tant que nous serons au lieu de travail. Pour êjre chrétien, il faut seiitir qu*op est voyageur ; et celiii-ïà ne le connoît I02 fOVB, LA PitB pas, qui ne court point sans relâche k sa bienhen- rense patrie. Ecoutez un beaumot de saint Augus- tin : Qui non gémit peregrinus, non gaudebit ciuis ( ' ) : «Celui qui ne gëmit pas comme^ voyageur, ne se 3» r^ouira pas comme citoyen ». Il ne sera jamais ha- bitant du ciel y parce qu'il séjourne trop volontiers sur la terre ; et s'arrêtant oii il faut marcher y il n'arrivera pas où il faut parvenir* Mes frères , nous ne sommes pas encore parvenus, comme dit le saint apôtre W ; notre consolation c'est que nous sommes sur la voie. Jésus-Christ est « la » voie 9 la vérité et la vie (^) ». C'est à lui qu'il faut tendre, et c'est par lui qu'il faut avancer. Mais, mes Frères , dit saint Augustin , « cette voie veut des l> hommes qui marchent » : F^ia ista annulantes quœ- rit: c'est-à^ire des hommes qui ne se reposent jamais, qui ne cessent jamak d'avancer ; en un motdeshommes généreux et inSsitigables : Fia ista ambulantes çmub^ rit. Tria sunt gênera hominum quœ odit; remanen- tem j retrb redeuntem , aberrantem (4) : Ecoutez : ce Elle ne peut souffrir trois sortes d'hommes ; ceux » qui s'égarent, ceux qui retournent^ Ceux qui s'ar^ » rétent » : ceux qui se détournent , ceux qui s'éga- rent^ ceux qui sortent entièrement de la voie : ceux qui suivent leurs passions insensées, et qui se pré-- eipitent aux péchés damnables. Je n'entreprends pas de vous dire tous les ^are» mens et tous les détours ; mais je vous veux donner (0 In Ps. €XLyiii. ttm 4> iom, iv, col. i&]5, — (») Philip, m. la. •» (') Joan. ziY. 6. — > (4) Semu de Canlic, novo^ n. 4» ^^^ vi > co/. 59a. BE VOUS CES skiwrs, io3 une marque pour reconnoitre la voie , la marque de TEvangile ^ celle que le Saoveilr nous a enseignéeé Marchez^voùs dans une voie large : dans une voie spacieuse: T marche -t- on à son aise? y marche^ t-on avec la troupe et la multitude , avec le grand monde? etc« Ce n'e$t pas la voie de votre patrie. Vous n'êtes pas sur la voie ; c'est la voie de per-p dition ; le chemin de votre, patrie est un sentier ëtroit et serré. Le traifi et Tëquipage embarrasse dans cette voie; je veux dire rabondanee^ la oom-^ modité. Les vastes désirs du monde ne trouvent pas de quoi s*y étendre. Les épines qui l'environnent se prennent à nos habits et nous arrêtent. Tous les jours il nous en coûte quelque chose ^ tantôt un désir et tantôt un autre ; comme dfins un chemin difficile le train diminue toujours ; et tous les jours dans un sentier si serré, il faut laisser quelque partie de notre suite, c'est-*à-dire quelqu'un de nos viœs^ quelqu'une de nos passions ; tant qu'enfin nous de^ meurions seuls, nus et dépouillés, non * seulement de nos biens, mais de nous «* mêmes. C'est Jésus*' Christ, c'est l'Evangile [qui nous le disent]. Qui de nous [ refusera de le croire ? j Tous les jours plus à l'étroit Ceux qui retournent en arrière, ils sont sur la voie, mais ils reculent plutôt qne d'avancer. En« tendons et pénétrons : Vous avez embrassé la per^ fection , vous avez choisi la retraite , vous vous êtes consacré à Dieu d'une façon particulière, vous avez banni les pompes du mpnde, vous avez appréhendé de plaire trop. Vous avez recherché les véritables I04 ' iPOtTR LA FÏTt orûêitfens d'une femme chrétienne y c*e&t-à*dire la retefaue et la modestie , retranchant les vanités et le superflu. La prière^ là prédication^ les saintes lec- tures ont fait vôtre exercice le plus ordinaire. Vous vous lassez datis cette vie ; vous ne sortez pas de la voie y vous ne vous précipitez pas aux péchés dam-* nables; mais vous faites néanmoins un pas en ar- rière. Vous prêtez de nouveau l'oreille* aux dange- reu;sés flatteries du monde j vous rentrez dans ses |oies^ dans ses jeux et dans son commerce; vous prodiguez le temps que vous ménagiez; vous otez à la piété ses meilleures heures. Si vous ne quittez pas votre modestie ^ vous voulez du moins qu'elle plaise^ et vous ajoutez quelque chose à cette impli- cite qui vous parott trop sauvage. Ah! cettç voix intérieure du Saint-Esprit qui vous poussoit dans le désert avec Jésus-Christ, c'est-à-dire à la solitude et à la vie retirée, vous la laissez étourdiç par le bruit du monde, par :Son tumulte , par ses embar- ras : vous n'êtes pas propre au royaume de Dieu. ) Luc. iz. 6a. — («) Gen, xxx. 26, DE TOUS LES SAINTS. Io5 4 à la Tocation divine , à cet esprit généreux qui ne sait paint se relâcher ni se ralentir : vous ramol* lissez sa force, vous retardez sa divine et impétueuse ardeur ; et par une juste punition il vous abandon*- nera à votre foiblesse. Vous aviez si bien commencé ! Vous vous repentez d'avoir bien fait : vous faites pénitence de vos bonnes œuvres y pénitence qui ré- jouit non TEglise , mais le monde ; non les anges , mais les démons. • Mais il y en a encore d'autres : elle ne souffre pas même ceux qui s'arrêtent , ceux qui disent : J'en ai assez fait, je n'ai qu'à m'entretenir dans ma manière de vie : je ne veux pas aspirer à une pluis haute per- fection , je la laisse aux religieux : pour moi je me contente de ce qui est absolument nécessaii'e pour le salut éternel. Nouvelle espèce de fuite et de re- traite : car pour arriver à cette montagne, à cette sainte Sion , dont lé chemin est si roide et si droit, si Ton ne s'efforce pour monter toujours, la pente nous emporte et notre propre poids nous précipite. Tellement que, dans la voie du salut, si Ton ne court, on retombe; si oa languit, on meurt bien-* tôt ; si on ne fait tout , on ne fait rien : enfin mar- cher lentement , c'est rendre la chute infaillible. Ne menez pas une vie moitié sainte et moitié profane, moitié chrétienne et moitié mondaine, ou plutôt toute mondaine et toute profane ; parce qu'elle n'est qu'à demi chrétienne et à demi sainte. Que vois-je dans ce monde de ces vies mêlées ! On fait profession de piçté, et on aime encore les pom- pes du monde. On est des œuvres de charité , et 106 POUR LA FÊTE on abandonne son cœur à Tambition. ce La loi est » déchirée , et le jugement ne vient pas à sa per- » fection » : Lacerata, est lex, et non pen^enit ad fi- nira judicium (0. La loi est déchirée y rEvangile ^ le christianisme n'est en nos mœurs qu à demi ; et nous cousons à cette pourpre royale un vieux lam*- beau de mondanité* Nous réformons quelque chose dans notre vie ; nous condamnons le monde dans itne partie de sa cause ^ et il devoit la perdre en tout point, parce qu'il n'y en a jamais eu de plus déplorée. Ce peu que nous lui laissons marque la pente du cœur» Ecoutez donc TEvangile : Contendàe W. c< Efibr* » ces -vous». En quelque état [que vous soyez], te £aiites effort » , contendite. Si pour avancer à la perfection , combien plus pour sortir du crime ? Marchez par la voie des saints : ils ne sont pas tou» au même degré, mais tous [ ont pratiqué] le même Evangile. « Il y a plusieurs demeures dans la mai- » son de mon Père (3) » , mais il n*y a qu'une même ▼oie pour y parvenir, qui est la voie de la croix , c'est-à-dire la voie de la pénitence. Si cependant Dieu vous frappe , etc. , ne vous laissez pas abattre* « Ne » craignez pas, petit troupeau » : Nolite timbre ^ pusillus grex (4). Il vous-corrige , il vous châtie; ce n'est pas là ce qu'il &ut craindre : iVe timeas flagellari, sed exhceredari (5) : « Ne craignez pas » que votre Père vous châtie : craignez qu'il ne vous CO Hah, I. 4- — W Luc. XIII. a4. — (') Joan. xiy. a. — (4) Zac, zii. 3x — (5)5. jiug. in Ps» LxxxYiii. Sèim. n, n. 3, tom. iv. DE TOUS LES SAIKTS. IO7 3) déshérite ». En perdant votre héritage^ vous per- drez tout ; car vous le perdrez lui-même. Et ne vous plaignez pas qu'il vous refuse tant de biens qu'il accorde aux autres. Si vous voulez qu'il vous exauce toujours y ne lui demandez rien de médiocre y rien moins que lui-même , « rien de petit au grand » : ji magno parva (0 : son trône ^ sa gloire, sa vé<* rite, etc. (0 s. Greg, Pfaz. Ep. cyt, tom* x, p. 849» edit, 1609. io8 roua la fête FRAGMENT D'UN DISCOURS SUR LE MÊME SUJET, Oh à r occasion de la solennité desJ>ienheuweux, il est parlé des fidèles qui achkvent de sa purifier dans le purgatoire. Comment leur sainteté est-^lle confirmée. Puisque TEglise unit de si près la solennité des bienheureux qui jouissent de Dieu dans le ciel^ et la mémoire des fidèles qui , étant morts en notre Seigneur sans avoir encore obtenu la parfaite ré- mission de leurs fautes y en achèvent le paiement dans le purgatoire; je ne les séparerai pas par ce discours ; et je vous représenterai en peu de paroles quel est l'état oii ils se trouvent. Je Tai déjà dit en deux mots , lorsque je vous ai prêché que leur sain- teté étoit confirmée, quoique non consommée en- core. Mais encore que ces deux paroles vous décri- vent parfaitement l'état des âmes dans le purgatoire , peut-être ne le comprendriez-vous pas assez , si je ne vous en proposois une plus ample explication. Disons donc, Messieurs, avant toutes choses ce . que veut dire cette sainteté que nous appelons con- firmée : et afin de l'entendre sans peine, posez pour fondement cette vérité, qu'il y a une difi*érence no- table entre la mort considérée selon la nature , et la mort considérée et envisagée selon les connois- sances que la foi nous donne. La mort considérée DE. TOITS LES SAINTS. IO9 selon la nature y c'est la destruction totale et der- nière de tout ce qui s'^st passé dans la vie : In illd die perAunt omnes cogitationes eorum (0 , ce En ce » j(mr4à toutes leui% pensées périront ». [ Le Psal- miste ] regardoit la mort selon la nature ; ' mais si nous là considérans d'une autre manière y c'est-à- dire selon les lumières dont la foi éclaire nos enten- démens^ iioùs trouverons , chrétiens^ que la mort^ au lieu d'être la destruction de ce qui s'est passé 4ans la vie, en est plutôt la confirmation et la ratifir cation dernière. C'est pourquoi le Sauveur^*) a dit: Ubi cedderit arhor , ihi erit {p) : « Où l'arbre sera » tombé ^ il y demeurera pour toujours 9. C'estrà- dire , tant que l'homme est en cette vie, la malice la plus obstinée peut être changée par la pénitence , la sainteté la plus pure peut être abattue par la con- voitise.' Gréinis^lez, fidèles serviteurs de Dieu, de vous voir en ce lieu de tentations , où votre persé- vérance e^ toujours douteuse , à cause des combats continuels où elle est exposée à tous momens. Mais quand est-ce que vous sereJB fermes et éter- nelleinent immuables dans le bien que vous aurez dioisi ? Ce sera lorsque la mort sera venue confir- mer et ratifier pour jamais lé choix que vous avez fait sur la terre de cette meilleure part qui né vous sera plus ôtée : grand privilège de la mort qui nous affermit dans le bien , et qui nous y rend immuablèsi» Que si Vous voulez savoir, chrétiens, d'où lui vient cette belle prérogative, je vous le dirai en un mot (0 Ps. cxhv. 3 — («) JEccles. xi. 3. C^) Cest FEcclésiaste qui dit ce f*ès pkr une stiité Àéeésisàire 5'trtié Victdirè ^ ithiâti'è et ai gfo#îéù^é> i) ^^lirsi àt^t hl fij^mute et rèïnfyiré âé là moti. Âiùsî t'àpôtre ^'é-) crié : ^îé ^resèàte ; èi au milieu de ce^ âètlê" rfê* cô^TtiptiônVf œuvre de iibtfé immortalité 5é prépare. Que aevons-nous faire pour concourir 9 1 opération ae la grâce* qùî nous ressuscité ? L'Écri- ture nous proposé trois principes dé résùrréctîôn i la ^àrôlé dfe Jésiis-Ctirîst , te corps âé Jesûs-Christ , réôprié de Jàus-thf ist. ta parole dé Jésus^Chrîst : * lie iétap^ ^iéné oh i6ik cèul qui sont dafn^ lé^ » ^pûitrê^ etitènc(i:'ofi< la vôiî du Mk âfë Dîèù » : rénit hora in qua omnes qui sunî m monurhentis auÉiént a)ôcèm Éîlii Èéi W. Le cloi-ps dé iesus- W /. Cor: «V. 5Î. «^ W /S*i. V. àé.* Il6 SUR LÀ HÉSURRECTION DERNIERE. Christ : « Celui qui mange pa chair a la vie éter* » nelle, et je le ressusciterai au dernier jour » : Qui manducat meam carnem habet vitam œternam , et ego resuscitabo eum in noifissimo die ('). L'esprit de Jésus-Christ : a Si l'esprit de celui qui a ressuscité » Jésus habite en vous^ celui qui a ressuscité Jésus- M Christ d'entre les morts , donnera aussi la vie à D. vos corps mortels par son Esprit qui est en vous » : Quod si Spiritus ejus qui suscitai^it Jesum à mor'^ ijuis:, habitat in vobis, qui suscitayit Jesum 4 mor- tiUsj mtnficabit et mortalia corpora vestra propier inhabitantem Spiritum ejus in vobis C^). Ce que nous denaande cette parole : ce que nous devon§ à ce corps : ne qu'exige de nous cet Esprit. PREMIER POINT. Nous voyons dans l'EvangUe deux paroles du Fils de Dieu qui sont adressées aux morts ; l'une à la fin des siècles y l'autre durant le cours du siècle présent. Ecoutez comme il parle au chapitre cinquième de saint Jean : « En vérité, eH vérité, je vous le dis, 3) l'heure vient, et elle est déjà venue, où les morts » entendront la voix du Fils de Dieu ; et ceux qui » l'entendront, vivront » : Amen, amen dico vobis, quia venit hora, et nunc est, quando mortui au- dient vocem Filii Dei; et qui oudieHnt, vi\fent(?). « L'heure vient, et elle est déjà ». Remarquez; donc cette parole ne regarde pas la consommation des siècles. Les morts entendront la voix du Fils de pieu ; c*est ce qu'il a dit auparavant : « Celui qui » écoute ma parole, et qui croit à celui qui m'a (0 Joan. VI. SB. — W Rom* yxh. i i . — P) Joam v. a5, • StTK LA RÉStmRECTlOir DERNIERE; II7 » envoyé, est passé^(*) de la mort à la vie » : Transiet de niorte ad vitam. Mais voici encore une autre pa- role : « Llieure vient »^ il ne dit plus , •« Elle est » déjà ; que tous ceux qui sont dans les tombeaux >> entendront sa voix , et ceux qui auront bien fait » sortiront pour ressusciter à la vie, et ceux qui » auront mal fait sortiront pour ressusciter à* leur » condamnation (0 ». Voilà doncdeux paroles adres- sées aux morts , parce qu il y a deux sorteS' de morts; ou plutôt il y a deux parties en Thomme, et toutes deux ont leur mort. « L'ame, dit saint Augustin W, » est la vie du corps , et Dieu est la vie de Famé » r ainsi comme le corps tneurt quand il perd son ame, l'esprit meurt quand il perd son Dieu. Cette mort ne nous touche pas, parce qu'elle n'est pas sensible^ et toutefois , chrétiens , si nous savions pénétrer les choses , cette mort de nos corps qui nous parôît si cruelle , suffiroit pour nous faire entendre combieh celle du péché est plus redoutable. Car si c'est un si grand malheur que le corps ait perdu son ame, combien plus que l'ame iàit perdu sgn Dieu? Et si nos sens sont saisis d'horreur en voyant ce corps froid et insensible , abattu par terre, sans force et sans niouvemént;' combien est -il plus horrible de contempler l'âme raisonnable , tadavre spirituel et tombeau vivant d'elle-même, qui étant séparée de Dieu par lé péché, n'a plus de vie ni de sentiment que pour rendre sa mort éterneire î C'est donc à •- (*) Bossuet remarque dans son manuscrit > que le grec porte 1& passé : transiuU, £diu de Déforis, (0 /oan, V. a4> ^S> ^« •" W Sérm. cclxxul ». i, tom. v, coL iio5« Il8 5II& l'A RÉSURRECTION BERNIERE. c^^ motfs spU'Uuelç ^ p'eçt a^^ amjds pécheresses qtn^ J^^§^Jwi§t i^cjf/eg^e sgi y w p/PW 1^3 appeler k h p^pifen/ce. ^^/?^ hgra^ ^tnunc m ; « li']i.eure.Vji^iM: ^ 9 et elle est dé^^. jQjije si vowis mé dei» w4çz 4'^ x^ w* qu'il /ndre^e ^Dicore à 1» 1^9 4q$ sAbcdies iiine secQode parpU dpx muorJis qui sont gîsanfi iet ensevjslis dans les tpwihifviiry ^ )e yious le dirai eo m» xaot^ parce que la ckos^ :est f ssee iConAU^. L'aus/è a pécM par le mimsfaère .M S)4me ea ^quelqui^ sorte par ^'instigatioa du corps; et jc'est pourquoi il e^t ju^te cpiVUe soit pxxsm «y«c $ou pompjii/ce. L'^m^e s'^t au^i ^ervie .d^us)/e;3 bouues çeji^ypeç-du mipi^t^èm du corpç qu'elle a prji^ mP^ d« dopptfir; nfiu, Aowoae dU Tapôtrp (»), quç Ja jwt |iQ? 4e Piieu s'as^u^ettU à i^l^-p^éms uos m^i9ii>¥e» » et leur f jif por.t,f^ àç jia ff^^je^é ixt Çfliuy^uj: : a éto^t justp q^e le Fijs de I^ieiji f yant pris ua ciorps ajaspi bjefi qu- jua^ agi^, ^ sfjr^ijit ipri rhomm^ tf^ut eptjier ^ sa diyiçe. pp^op^^ej :il-fi^ sentir §a puissance au corps e)t ^ l^ajoaev: efiqjji'^ sou-t xait jr'^omme touj; entier à Fautiarite 4p |0f^ ti'j^unaL €'iest pourqu^o^ aprjbs ^yoir paji^lé ai^f i^p^f^ spiri-^ tuejis po^r rjessusciter leur^ âmes y û p^le ^ la fia des siècles aux morts gisans dans les sépulcres , pour les en faire sortir et leur rendre la vie : Et auiaudîe- rintj vivent : « Et ceux qui l'entendront, vivront ». (0 Jtom. VI. M7^ XA. ]^^|LRX;CT](09r DERIflÈRE> ^IQ ' Qm9p4 4oi?.c ççtte 1^?^^JB idesTAÎè^e s^ra arrivée ^ »jrol^i^ §e^gweux;» ; ifi ^ïS^-Ai/Cfuce^C?;». TiWVs Jia yg^f S^m fie jlf AEtr^e, gt j^ Jf 5îfi^ 4eui> des ffiçr# , ^t .^^ç ^'«pgijpn^yr ^y fflÇn^P^ jtt^fit, qu'un pqint ^«y^t i§fisjf#jt. U«jMji^t dejson 4oîgt Içs f9A4^€^ 4^ Igk Afyrrp : ^>^ftixeriB,enitifir ^^^t S0IU3 » maj», ^ Ifti , ,^ ia îl^/i aiitr^yc^i: nçs çq^ps dsMis Je A;ié$pt mèvfie -d'oè »a 4c83 a ikés pwr .^ pa^rçle ^ Joe les dftisâer» »pas jéchapper jksa .pui$â9ff<«^ >si nii- lieu de ses créatures* Car >ceUe matièfje.4^4)Ps,çQrps 120 SUR LÀ néfitJRREGTIOSf DERmi^RC• n^est pas moins à lui pour avoir changé de nbm et de forme : ainsi il saura bien ramasser les restes dispersés de ]K)s corps qui lui sont toujours chers ^ parce qu'il les a une fois unis à une ame qui est son image y qu'il remplit de sa grâce ^ et qui sont tou^ jours gardés sous sa main puissante , en quelque coin de l'univers que la loi des changemens ait jeté ces restes précieux. Et quand la violence de la mort 'les aur€4t poussés jusqu'au néant. Dieu ne les auroit pas perdus pour cela; caïf % il appelle ce qui n'est ?» pas avec la même facilité que ce qui est» : Vocrnis ea 4juœ non swit, tançuam ea qwB sunt (<)• Et Ter* tuUien a raison de dire que « Le néant est à Im » aussi bien que tout » : Ejus çst nffdbim ipsumj, cujus et totumi^X Ayant donc ainsi rétabli tes eopps de ses bien* aimés dans une int^ité parfaite y il les réunira à leurs âmes saint^, et ils deviendront vivans ; il bé-^ nira cette union, afin qu'elle ne puisse. plus être rompue, et il les rendra immortels. Il fera que cette union sera tellement intime, que les corps participeront aux honneurs des âmes ; et par - là nous les verrons glorieux. Tels sont les magnifiques présens que Jésus -Christ fera en ce jour à ses élus *par la puissance de sa parole. Il les fera sortir de leurs tombeaux pour leiir donner la vie, l'itomor- talité et la gloire; lai mort ne sera plus, et toutes *les marques de corruption seront abolies : N'omis-' sima inimioa destruetur mors. O puissance de Jésus- Christ! ô mort glorieusement vaincue! o ruines dn genre humain divinement réparées I 0) /îcm». IV. 17. — W Apokfg. n. 45. St& LÀ nÉStRRECTION DEANIERE. 19.t Mais y mes Frères y avant que la mort soit anéan- tie, il faut que le péché soit détruit , parce que c'est par le péché que la mort a régné sur la terre. Soth- Venez-vous donc, mes Frères , de ce que nous avons dit au commencement y que Dieu n*a pas fait la mort : au contraire comme il a créé Tame raison«- nable pour habiter dans le corps humaiiï y il avoit voulu au commencement que leur union fait indis* soluble ; et c'est peut - être un des sens qu'il faut donner à cette parole du Psalmiste : Corpus autem aptasti mihii^) : « Vous m'avez approprié un corps » : de même que s'il eût dit comme en son nom au créateur : O Seigneur , vous avez fait mon ame d'une nature bien différente du corps; car après avoir formé ce corps avec de la boue , c'est-à-dire avec une terre détrempée, ce 9'est plus ni de la terre, ni de l'eau , ni du mélange du sec et de l'hUmidé , ni enfin d'aucune partie de la matière que vous avez tiré l'ame que vous avez mêlée dans cette masse pour la vivifier. C'est de vous-même, c'est de votre bouche que vous l'avez fait sortir ;' vous avez soufilé un souffle de vie , et l'homme a été animé , non par • • » ■ < l'arrangement des organes, non par la température des qualités, non par la distribution des esprits vitaux , mais par un autre principe de vitalité^, que Dieu a tiré de son propre sein par une nouvelle création, toute différente de celle qui a tiré du néant et qui a formé la matière. C'est pourquoi quand il veut former l'homme, il recommence un nouvel otdre de choses, une nouvelle création : JPa- ciamus hominem {^) : « Faisons l'homme ». C'est un (0 Ps, xzxiz. 7. Heb. x. 5. — C*) Gen» i. a6. 13^ SVX.- LÀ AÉSXIim^GTIOir BEKiriÈIlE. a^trepuyrage, ^n^ autfe m9fiàhf^.4^rfil9f-^ de Jtoat •Que si qej^e ^éç^og^e gie XW? PW^P |M^, j'|ij.Q.«ir les autre? rais9jp?.q#i pou? jB(9n*rea^t(C)eJ,tç yérijé, g îlCïfe ^a^ftte j c'gst ^e pieu ^'a j^u^^e k .^n w««e> gu'elle e$t paft^fâpfffjte de la yie d^ Pi)^ î A^e vijt eu qu^ftu^ ^çw ^Çffpie Av», P^F/qe .q^>lie y^ d$: rai^çjj $t d'iffXs^ig^ac^, # ^ij^e JÇiçu ^> fmAw ^r f/aWe ^e l^Vfter et ^ ^@ c9Jv»SÎ*re„ copjfflç lujr iD^me s'iaiijayB et ;^ ççooplijt, Çjafit .|M>Mquo^ étaiM: faite à «ofli inpia^ej, ^ ^a^ l^çe psf sop Jfwid à wi| iijamculeU^ Yr^f^^ » .<^ ^e tiei^ po^i>t jK>n ét^e ,dç la çajtjère, et ^'«5st jiçipt .-^sujini^ .à «e» loi» : dP sor^ q»>Ue fle j^i# p^w^, quf^qs^ dbî»BgeBiq# .qj^i af r^v^ ysu^r^e^pu^ d'elJle , ,f* fiv« SW* P^fts ffqtomr l>er dans J,e ^p^éapt, si ^ galef? ^^ç oelïM i^ui ïai ^ lir^e, .^ ^yi l'ay^fupit J^te à ;§oi^ w^ge» l'atj^**^ f» ii?j-fl?le^ SfWfPfi à fiOlPPCTqcJl^e, iâ<(i<^ Isi flPiî»» toot T^ofjf^is , comme ^le .est d^j;^ L^ 4e^a;le,r .9r4f ^ .de? ijil^^ngçiî jintel^geft^es , ^'est en elle qpQ §0 &>'^ l'SWW â9V .et ser|t de nature à y être unie. Là en descendant toujours ^IXE LA RÉaumiECTION QE|LiriÈftE« )2} par Aeg^ih ,4^ pprfeU k Timpurf^, oji airive mé- où le^upérâm: ol VidtHmw iê l/^ignoul; Qt is^ too.^ cbsnt Car j/9 i:Fx>if qM'x>9 pj^i)t i$ti|;em)r^ fMifimenA que tout ièst flifposié àm^ l^ ufJLwG fiômiP^ par .4e.- gîr^ , et ipie le premûx piwcipe iiôume l'être et ^e D^papd W-méine |>ar cet pr^re et f^japm^ 4^ i^rQcl^a ea pno/ciie. Ainsi j'aioe rai^PD^M^ ^ jtroMrer^ Aar liireUeineiit unie à ui^ €:Qrp3. /? Yq»^ 91 V^ appr.Q-r i prie ttn CQsps ^ ; Corpus ÏH4em ^piosti m&4' , Mais ce mot d'iippropri|dr Wk fiprpis a .uœ plus pârticidi^re ^âpiifiiîatix)» : jcar tf (Sufl: iM>w per£ma4.er que Famé Raisonnable' parie et ilit à sou Créateur : Gomme vous fu-avez fitite immorteUe ep n^e créaiait à voitre imagé , yous m avez aussi appnopiif un corps si bien assorti avec ipoi, i{ue iptre paix et jaotre Union serçit éteraeile et inviolable y si le picbé ve- nant énfjre ideux n*eOt troublé qetfce .c;(^e$t^ barJOi^Q- nie.'Cômnie&t est-ce que le péohi^ a <¥9U9i 4^i^ choses si bien assorties? H j^ aiftî de l'jefi^eAike par cette excdAenie doctriui& de saûtf Afigustio : iQar ^ dit-il, c'est une loi ipmtuâbled^ ta justice itfvine, que le mal que nous ol^isis^^ons soit pyi^ji par un mal gue wm& Inaii^spii». De sorte ^pe c'a ^ ,^9 ordre ifès-ffiste quVtant aUis aii i^éài^ par j^otre choix y la mort nous ait suivis contre notre gri^ , et que ce notre ame fût contrainte de quitter son jcorps 3» par une juste punition de c^iipr'eUe ^ iibandonné » Dieu par une dépravation volontaire y^ : ^pirù£us, thesauri ir^quitcftis çui décorant te, {'^). Tu croisi te les être appropriés par l'usage de tant d'années : » (x) 1$*. Eucher. HonUL de pi»nit NinwiU BibUot» PP' tom, yi , eol. 646. — W Mich, yi. lo. Z26 SUR hA SÉSUmtBGTIOTr BEltlTlÈlLË; tout retfver^ Mafis releveat-voiis , sortez dé èësifr^ bupauxy sulutaires tombe'Àiu de? pîâaiténls^ wëitéi à la tajûle à^s eafyns^ tenez à hr yie ^ VM^ an piM véritable qiTe Moïse n'a pu doniier k iï6$ ]^èré^ ('): venez au corps de Jésus ^ qui est les^oènd prittcipè de, résurrectiQa et dé' vîe. éÉCÔHï) POINT. Le o6rps , dé Jésus *• Ghrist e!9t pi^énfièréiBént lé modèle dé notre résirrrectkifcr.' ^éI drcbifécle qifi bâtit un édifice^ se propose un phifh et nû tàé&hle : Jésus - Christ se jfiropé^è stm j[ir6prè Mrp^ : it H 3» traniforméi^a riôtre eovpà t6t}t t^i) et âbfèét qu'il » est^ afin de lé rendre coitfttûie iiàû cèrffâ glo^ » riens! » : BefsrmMit totjfm hUfnttieàtik kdétriè cbhfi^ratùm carpori èlkrMtii sÙië ^1, Il éft étt s/é-' eorideodent le gage: «Si l«s Mùi:\AtÈé reâév^^titéftt «> points Jésd&^Gfarist n^^st dont^ point i^cftetiséKé » i £i mbrtxd non remrguàts tiétfks ^^rHbiè fé^ut^ ràxit (3) : rf les prémices dé la fési»*tèièti9if » : PH^ mitiœ dormentiUm iff) : le gtàin de ftôffîéfit. t^ À k » fin des siècles^ dit ètàhi Adg^stifi ^ tout lé genre » humlain ^ té^efa ^àtoMê ùnè âéfrlë Af^soù; Fé^^ » eA a été farift d^^ lé pritÈèipsil ^kiA >y : Séd ^ëhts- ris humàfii iuiJ^ ififiàè itêcûl^ MJÉèsi^ àisurgà: tëh^ tâtiihi en ëJcpèhMefUum ik pfîriéipdli gi'dAd i^h îi est en tfoi^iëi^' lîéû lé i^nUèipe d'iâtôrrti^to^ H Ltt côrra^tfôYî f^kf îê ^an^ : dé iRêiiïk ^iAïMlai^ mé. VK>k viè&i Sbht t^é om meùtifà ém ai- (0 Joan. VI. Sa. — (») Phàip, ni. 3 1 — (3) /. Cor. xy. 1 3.-- (4) lUà, ;iS.— W^y. Aug.SèM. cidott. h. Id; ftjiii t,*i^t ^i i. ^ ffiJS. Cyril Alex, in Joan. lib. ir* cap. ii. SVH LA AÉStrBRECTlOir DïlRïflÈAÊ.' t^'J stijettî à la corroptidfn*? .[ C'est- qûé nôïisr portons une] èhaîf de pfdiif^ r de Hl àhàf^ éinûtiàîté^ et de maladie?; Âlhrz dafi^ 1^' hô^if â^' dù^aiit èes samty pmr^ ]^w y eoîrtetft|)*éï' ïè Sp^àihciè âê tlit- flrmhé hmnâiïiie : lit Wvis ifërtét éh èomhiêfi âë sortes la maladie se jotxè de rtm cotps^ IM elle ^ènd , là eUe retire;' là eHe rélftéive^ là elle' èfngotrrdit; là die dotie ntr cxhps perckiîd et ifiiiôÊrbife / là elle lé secode totft eâtier pdf le ttëtalAëiëéût. tîiôjAhW variifté l diversité sui*prèn^té ! Ghfëtiehs?, è'ést la maladie qoi se )Otf è e^tnè il lui* ]f>lint de' iioâ corps ^ qne lé p^é k alif»«îd6fifiés hÉèÉ ôrûèlléî^ Mzàrrérîés. 0 homme , «râsidère te p^u qù\e id è§^ të^éë lef peu que tû vâmt : tieft9 tfppf @nft^e Isl I^té fofaé^te des maux drynt ta fbft^ê^é eât iHéMcéë: Et làf fôr- ftmé p6k^ être égtflenkftft oMf «fgé^^ ; ne sir fend p«smc»tts fècôtide étié^éiS^iSiëlM flbÛâlx: Ire iècôixfi qû'ôff leur dontié ,• iàiâgé dû gf ànd^ *eéô*à« qtie^ 1^ dèiflfèr^ tfft }6iS^ JëàiksMOln'iàt ëit lès' àfiràncftis^ iùm t^ùt-à-fât. MaAs ëti sMeû&ax^ if fëiif qU'ïlé tôtfkbênt pcittr être i^éftoiivèlë^^ lE^ îlef lai^èi^biif S h terfê (fdë ledt m^AnSië éi kut tattûfiiSti. È fimt nvtêté tbrp^im déttûit ^Bsqffk la poiis^fêi*ë; k daàt cteffgèrft de Mttrré/ îë eé^]^ ^i^étrd^a M adtre nbm;' llilâmè ^âifi d^' ckAà^tè Hê M dfèméii- rer» pêà Ibif^^tm^^^ l^ àhi&if ^vféMéar ifâ j^ iië sàig qt&i qui if& t)Ms dè^ îîôiii datfiH^ sHtfceiiië îatH^é : ttfM il est! Vt^r ^tfé tout méthrf èrf ètif jèfèiiu^â cëâ térm^ fitnètif ëâ p^ lefà^ëB dtt e:l^n)i}6!^ 6eii MU heureux restes : Post totum ignobilitatis elogium > caducce in originem terrant^ et cadaveris noniënf /^ 128 SUR LÀ EéstJRRECTION DERNIÈRE» et de isto çnoifue nomine pèriturœ in nullum indê jamnùmêniin omnis juin vacabuti mortem (0. Mais^^yioit pantic^é^u corps du Sstuveur, prin- cipei de vie , [ne participons plus au péché, principe de mort ]• Nous recevons par le baptême un droit r^fl ^i':^iOM;,ii9^ k.pçïd^(€^éyajp|;i]^Ue participation. J^ç^ ^nifijWpn^rrtp^Wi^Sf .4^ns }a. communion du 3f^&iQ^i^ ^n-seiiloinent < di^s Fai^uelle participa- ,^jçi^ ^ jaadSr^ans^Jb^di^oit jâ^'QQimaiuiic«% ;,^ Jh l^^ ^^ypH^^ii^i^^ pow la /oriiiQafîon , maê ^.iBP^r, ler&^tgP^W^ ï^W^jBÎgv^eiir po«rtle corps ^ : £b^u^nn^'(^^^'^0f¥MI«'^ ^A* Domino , et Dominas ççifH}ri (^.« ' U k^ i^ptre covps^ moIUiiUq; au sien , .mi^ Jrei9|)i!«. Sqf^ ^mplià»ib0c:(?h ce détruisez ce }} temgi^ 9^ .J^ou$.4ê9^i3os^ Twner commei un temple av^ .bienséance , je Je ireux J^mt^apotais toujours 4^vçç dig^té; rieade vjain^rîeH'd^^o&Ae. Donc, Q çainte «ch^ete, fleur de Ja ^^rtu^ oiutetment im« iHQiiiel des coi^s mortel^, mtr^pe .assurée d'une ame^ bien faitie et véritablemâpi généreuse , protec- trice de la S£kinteté,et de la fo^ muliieUe dans les nijSLriage$;> fîdèjbs dépositaire 4^ Ja pureté du sang, jpt qui SQttle. en, sait conserver la traoe; viens con- sacrer, ces corps corruptiUeS) viens leur être \m banmQ étemel et un sieste, préservatif contre la : i^ytért:^de ÎRes:tar^, iî. 4- «^ f*) /• Ctr- Vi. i3. — W Joan. w. 19- corruption; «HE LÀ RÉSURRECTIOir DERl^ÈHE. Z29 (M>miptian^ viens les disposer à une sainte union avec le corps de Jésu^Christ; et fais qu'en prenant ce corps , nous en tirions aussi tout l'écrit. TR^OISIÈME POINT, ' Jsrai dëjà dit, lues Frères , mais il faut le dire encore une fois, que dilrant ce temps de corrup^ tion Dieu comjtnefacé déjà danâ nos corps Voavrage de leur bienheureuse immortalité. Oui , pendant que ce corps mortel est accablé de langueurs et d'infirtnités ) 'Dieu y fette intâîeurement les prin- cipes d'une consistance immuable ; pendant qu*il vieillit. Dieu le renouvelle ; pendant qu'il est tous les jours expbsé en proie aux maladies lèS plus dan* gereuses et à une mort tiis*certaine , Dieu travaille par son Esprit saint à sa résurrection glorieuse. De quelle soii;e s'accomplit un si grand mystère ? Saint Augustin qui l'a appris du divin apfrtre, vous l'aura bientôt expliqué par une excellente doctrine. Mortels y apprenez votre gloire : terre et cendre, écoutez attentivement les divines opérations qui se commencent en vous. Il faut donc savoir , avant toutes choses, que le Saint-Esprit habite en nos âmes , et qu'il y préside par la' charité qu'U y ré- pand. Gomment cette divine opération s'étend-elle sur le corps ? Ecoutées xta mot de saint Augustin , et vous l'entendrez. « Celui-là, dit ce saint évéque, «possède le tout', qui tient la partie dominante » : Totumpossidet ; quiprihcipaleteneti}). « Or en nous, » poursuit ce grand homme, il est aisé de connoître (0 Sêrm» GULXy n. 6, tom. V, ooL 777* BOSSUET. XI. Q 3» que c^e^t Vaioe qui tieqt la premiàrç place ^ et » que. c est à elle qu apparti^at Fempiaif i>. Be ce$ deux prinâpes si elaûra^ À i]idahitabl«&) ^sa^ut Au» gustin tire aussitôt cette conséquence facile : « Dieu » tenant cette partie principale , c'est-à-dire Tame » et r^PK'ifi? t^ 1^ m9y^p, 4^ »f ifewr, iJiM PlQt en 3) pos^içyçsiop ^U,p%t,w^ ioJg^rieure. ^^^^ p^irk i^j^ra du princp, ij s'açq^i^^ s^^ l^^^ti.^ d^m^ftat fiur î'appie qpi ^st 1^ naaX^^e^ ^ ii f4tf^4 ^ n^^ sua? le CQ]:^^ V^MJ^tti^ ^^Qj! :^D^#pQ ft §m iftfît: e^ po^siessiQn, Ce$i.t ai«sij|i^,Q^a,c(^pÉ;;eft,r^RfM|iY<îW nar l'a^grifîe 4u çlftTÎ^Wf»»^^ ïî^lwig^^» .wât^^ heuveu§eî|[ip^;^f ^t jj^a^^ e^ ^^Jftti^^qrei. m«ipf.ri>iiy la nature il étp^ k X4^^% pftv ^a «ppu^tripik, il pwr voit gu vjçe; ^ |iar J^. ,€VW^^ f t fe f«tt^ il «8* à y se, fait; cq^i^e. u^ s^pi»^ PMrâgf^ «toe nolarp çsprit et Vçsprit de Ijiiw; m ^Mi.fwtqn* « eâlni qui » s'attache, ap 4iviw B^vit t; â^mf^tt ^j^^j^fim^ esprit »,a^v^c P^u » ; Quifi^l¥»r^t f^mm»^ i^u9 spiHius esti^).^ Et ep^m^ 9% yQ}i:^.4i| Twlullifiii^ dwfiks uiariages , que la fqpijw rqçd §q)^ épi>iw. flMiKrft de 3es.l|i^n^^, ^t lui i^n jcM« J'^W^g^f ^vm V^m» .W s uniss^pt h Vesprit 4^ î)if u» ^t.§^ s<^u,ir^|;iwt è 1»* çoipiQP à ?oi^ épc^l2j;, lui,trgn$p^t§js^^,touJ|.|o» bicQ qocap^ p'tapt k fi^ef ^t 1^ waîJpe d^ pôiSe ijp»-: iQunauté bieuhe^rçjasçu ^It^ çkaiiK )h,miit. ditT^i^ >? tulUen, çpp[U3çie we partie, 4§ ^^ dot ^ et ftu.li^a >îdevieu,t.,sçrvap|e de l'esprit .d§ J>i^U»v:iS«fWf*^iît animam nuAentem spiritui caro^ ut dotale manci-- CO /. Con VI. 17. SVR LA EÉSVRnECTION DERKIÈ^IE. l3t pium; eijam rum a^ipuBfymuUf.^^ sç(t spirît(is (0. En e$çt ne yoy^z-yqHS pd$ ^^q Iç ço^ps di^ chrétieix cbac^e 4^ n^atu^e , çt qu au Ueu d.'étt'^ sÎEiiplement{ lV)rgaQie çle Vame ^ H devient Tipstrumeut fidèle de toutes ^e^ Saintes yolop^s que D^u ppqs inspire ) Qu es^çe qu^ 4oQQe V^iipv^jie ^ $i oe n'ast la main ) Qa est-ce qu^ eqi^eçse s§s pecUe^., §i ce n'est U bou-i ql^ ? Qa'^t-ce qui le^ plei%r<^; si çç n'e$t les. yeux 3 Qi:^'e^t-çe ^ui.br% 4h ?^1ô de Ï>ie4, SÀ ce West If^ çœup ? En uii mot , 4it le 9iiii^t 9p9tï*e) « toiiis noa » membres sont consacrés à Dieu^ ^t doivent être yses hpstiçs vivan;^ (^ ». Qfû ç^^ y vÀ ^PQ^^^ yiolencâ » ni Fç^rt ^e^ \^ ç^r^iTi^qa ip^e peufe phi^ lies hii en^t leyerj 1^^\ m l?r:4 ï>iôu reptçeç^ (kns soft l)ién, et retirer^ s^^ ^pa^ij^e, L^ Fil$ d^ ï^ ^ pfltPAOftç» que <^ wl ft^ pwtj r^R ifayiff des mainç dja son PJft'^. »i^9P ?^e, 4if7Îl,; qst,pi«s gr?^ qu| tçUte k Wi (^t!. E.t en, egîfi^ ^çf, nmiRç-^n^t^i pui^jR^çs^ pnUa forqç np ;\e^, pp^t y^ingre ç iffW f§iW, U/lbw teijMF pris^ ^ipsi D^^ft ay^nt mis fur i;^ çç^rf^ P* «ftii» fouveram^ v ^Vn etj^nt ^is} par ^ç^ Ç^it.s^t ,. que VEcriture «^ppçUe sim doigt , et en étant déjà ^a W Tert^ de Anima, n. 4i. — C») Mom» xiu i. — ^') /<^f» *• 3»9r t34 ^tJR LÀ. KÉStlURECTION DEftilriERË. à nous à préVéîiir : « Je meui's tous les jours » , dît lupôti-e: Qu&tiSie ¥noYior{^). Par là Jirémière union FâiAe éÀ è*i l^risbA et 'è^ îsèVvîtudé, Ife dotpê k do^- mine^ et s'entend le lôâîtte; SecfoViotiâ ice jotig , ti- lfi€^s^&tà de CeXté ItiAi^è dépé^dâncfe : il lé fera uneautre'uiiioh i>ûr îarquélle l'Orne domiûér)^. ccËtft^ s difôQS^Vioti^ y!:hbqt!ie fôiH*> iltt ^aîflt Ànibrôise^ k ^ mourir, bfin 'que -notice afche ^ai- cette sépat^ation n-apprefine \ ^ l-eifréfr des cto'pMît^ côf^poréltes; «qu'éleva ^à-aë^ii:^ dès^éi^^V Icfs 4licliâ^%)oiï^ tèt^ ^riestres »é jiais55éiil i'IittéftndVe ifet Is^ <^ltër> et s> qu'elle è^ôUVe aihsi Une 'Sbi^é lié mc^rt ^ -àhn de b» «e ^îitt èncbarÈh là peîtfé. ^te midrt \i. 'Sft çlië- îiàinkus Usits 9h Wê!^& àffhctùsçtéè î^ér$êhii'^ lâpér muni y qûiifn di^mii}^ , ^égrègàimiéfh à cètp&réis cupiliitéàibiés ^ 'ànirhià 'no!^r^ ire "disèài ^xtMhe^e > et 4fuasi in sublimi îocata ^ çub terrenœ eutiY'e lihîSùïés m èdfH ^i Jgi«(SlifÊA^ mentis ihmgîmrk},^nk^p(xmnk mo^ï ih^Ur^tàti'^). C'est pMfi^br daiifi^ k f^btihiSCidlk V|ai ^E(t dbÂtttfë à b^U^ atoé d'àttittae^- -et *e toouf^ît tes br^iïês febrflôi^ > )e «n»étoe isâint ^ Ahlbi*dil^ ^venil d^ Wè ^ ^lotf^ pa^ tcytft-^filit^âédiak'èl^ê'ii^^è Wêter^as aVéc ^k-: Non t?rètfeûf♦tt^i Attfc '^èbf-poH l^'¥ièc ïnîàcWèhm k^ktk itlo àMtnàrrt >tc^'^â^(^)?^^s |yM6t ({iië âôiH lé^ toùchiôift tftiïie-^aai ïé^të tttiûrafe AH inaftriiîbeht de tonJiiq*è;: SiMMii), tà ïià mcèifà, "êi^iits "sithit 'néh^ùriim ^àhb^, Hh phlsa^bciÀiù titiàs pasiUûHès^ (4X ' Gh iè piqué *e dëiîbàtessê -, febttiiié ôh ^ '^Ikjuè co/. ii44*'~'^^^ -^^ hon* MorU cap» ix> iz. 4o> ^ coL 4o& «^ (4)7^4W. ca/j.vii, n. a;, co/. 4oi- * ' ♦ •. . . .1 Domino**., B4>nam voluntatem haiemu^ fP^^ P^r regrinari à corporfi^ et- prççsentfis ^se m4 Don^ip, Tiumi^) : a Nous savons que pendaut quc^ nom » habitons ce corps , nous sommes ^ign^s . 4u S^^ »gQeur««... Nous aimons mieux sortir de j^a, vu^soq. 3» de ce G^ps poHT aJUer habiter aypc le Seigii^uf^if Car tant que nous sommes daiis le, coçps; ^R^ VQjagçons loin. 4^ Dieu; et, quand jcvaus ^oiQu^ieç avec J)ieU| Oious voyageons loin du. corps, X'ufi nous ne sommes pas induits à le croire par des » conjectures douteuses, mais nous le savons très- (0//. Cor. T. 6,8. l38 SUR LA. HÉSUARECTION BERmÈRE. » assuré^ihent et avBC une entière certitude, que si » cette inatèoii Aè tètre et de bbùè dàhs laquelle i> nofus habitons, est detrtiite, nouS avons line a\itrè 5> maisY5n '^âi W^t'jiài Mtîé ^e thài^ â'hôtaHtie , la^ b quelle ttcmà ëà prépàfêè M cfîél (i) $>. 0«6ttduitè miséricordieuse ifé cfelùi qui ^)f6ferVdit à tôW Vibà bè»- soins! « Il si d^^ih, dit tàkdëlMi^éi^: saiiht Jëàii » Chryso^ôïàeîC^) , '*e répam* la ttaîistoiîi ^tfîl nbuè » a donnéte : peWdâîll t|ti'il k dëttiiit et qtf il la ren^ » verse pour kl ifebàtîr toute nè1i\fe , il est nécessaire » (Jpue ootos . Cé^r que fôrtôhis-hdus dans ce tuihuké et daths *èfette pbbdre ?Et lui^-même nous offre son palais, 3 iïckts y dontte un ap'paï'tëinetit pour nous faite àttfemh'e eh fepôsf l'fentière rëparaK^ lion de kotre âncieh édifice. Wè fei'aignolis donè rien , tnes Frèk'es ; sôtt-gétths éétflertreîA à bien vi^e t car t^ttt est en sàrél^ptour te fehrétien. Tû ti'osefe pas, chrâfen^ tute défiés de ttes ^uviiesj^ songe donè à cettte assurance. ..... (») //. -Cor, V. I. -r- W'^oi7«7. in dict. AposU De dormleatibufi, rtc. I. •■ '• • - '' ■•* '• '• tom I, pag^ 764. . . r 1 >< r -. » i Sun LA. IfÉCESSin^ DE TRAVAlia^BE k SOIT SALUT. l39 POUR LE t.^ DïivtotHË tiÉ L'Agent; #RÊtHË 'dfeVAïii: ti&ïioï. Sût îa'Aééé^Hé^^eisimtje ié'b^eSJ^, Ue'sô^ delihf^gàeiir, el de ivttv^affîer kaaé délbi i von 'biJhi. tm/^9^^t^u*^i/%^^^^^^^ Hora'estjam noç de somno surçere. *, - , //lejf ^^m;>^ désofyneds quèftâé^ ivôiài rë^SKèfns ifc ^<^^>^ li£ croira-t-on > ai ;)e Iç idàs^ qtte presque toute la 112^ turc Ijliumaine tôt endormie^ et qu'ctè milieu ^e cette action $i vive ôt.|i. empressée qui plurôît j[)iineipale'- ment à la cour y la plupart des hon^mds langcn^sest au dedans du ^ idG^r dans une àibrieile léthargie? Nul Qe Vf (lie véritablement:^ que celiili qui test at- tentif à ^u saluty lEts^ii' est àinbi^ chrétiens^ qu'il .y eu a ^afis cet aûklitbiré qU'uù prefèud sommeil appesantit! quHl.jr en a fqiii eé pi*étaht rorëiill'e nwteudéiitptt^vjejt^ne voient pa« :eii bûvfnfit les yeux y et qulpeut-^reinHliietà^bsemeiit.nè ste ré- .veilleront pais encore à mloii discoursl ! t;'est d'inteo- iM)PL..4e FEglise de.lei ttrcr aujourdliu| de ce pei^ i> l4o sua ^A KÉÇESSITÉ nicieux assoupissement. C'est pourquoi elle nous lit dans les saints mystères de ce jour , Thistoire du ju- gement dernier; lorsque la nature ëtonnée de la majesté de Jésus-Christ'^ rojnpi^a tout le concert de ses mouvemens , et qu on entendra un bruit tel qu'on peut se Fimaginer pafmi de si effroyables ruines^ et dans un renversement si affreux. Qui- conque lieVéVeiUe pas à ce bruit terrible, est trop profondément assoupi^ et il dort d'un sommeil de mort. Toutefois si nous y sommes -sourds, l'Eglise pour nous exciter davantage , fait encioi^ retentir a nos oreilles la parole de l'apôtre; Le^ grand Paul mêle sa voix au bruit confus de l'univers , et nous dit d'un ton éclatant : Q fidèles, « l'heure est venue » de nous éveiller » : Hora est jam nos (fe spmno surgere. Ainsi je tie crois pas quitter l'Evangile, mais en prendre l'intention etTesprit, quand j'iu*- terprète Fépître que l'Eglise lit en ce jour. Fasse celui pour qui je parle , que j'annonce avec tant djB Sorcé ses menaces et ses jngèmens, que ceux^qùi dorment dans leurs péchas se réveillent et se con« vertissent ! C'est la grâce que je lui démande par ies pirières de la sainte Vierge. * V C'est une vérité constante* que FEcriture a éta- blie et que réxpérience a justifiée, que la cause de •tous les cribids et de tous les nialheurs de la vie hu^ inaine,. d'est Je défaut d'attention et de vigilance. Si les justes ;tombent si sourenit, pei*deht la gnâcè .après une longue pet^évérance y •c'^t qù'ild s'endor- Ineat dans la vue de leurs bonnes oeuvfeSwills pensent avoir Vaincu :tout-à^it' leurs- mauvaiis désirt^ : la confiaiicequ'IU onten ce icainiey fait qu'ils' abdo^ DE TRAVAILLER A SON SALUT. ï/^l donnent le gouvernail , c'est-à-dire qu'ils perdent l'attention à eux-mêmes et Hi la prière. Ainsi ils pé- rissent misérablement , et pour avoir cessé de veil- ler , ils perdent en un moment tout le fruit de tant de travaux. Mais si l'attention et la vigilance est si nécessaire aux justes^ pour prévenir leur chute fu- neste f combien en ont besoin les pécheurs pour s'en relever et pour réparer leurs ruines? Ç'çst pourquoi de tous les préceptes que le Saint-Esprit a donnés aux hommes , il n'y en a aucun que Ip Fils de Dieu ait répété plus souvent , que les saints apôtres aient inculqué avec plus de force , que celui de veiller sans cesse. Toutes les épîtres , tous les évangiles y toutes les pages de l'Ecriture sont pleines de ces paroles : «Veillez^ jpriez, prenez » ^arde, soyez prêts à toutes les heures ^ parce » q«ie vous ne savez pas à laquelle viendra le Sei- » gneur ». En effet, faute dé veiller à notre salut et à notre conscience , notre ennemi qui n'est que trop vigilant, et nos passions qui ne sont que trop attentives à leurs objets, nous surprennent, nous emportent , nous mettent entièrement sous le joug^ et traînent nos âmes captives devant le redoutable tribunal de Jésus -Christ, avant que nous ayons seulement songé à en prévenir les rigueurs par la pénitence. Cest ce dangereux assoupissement que craignoit le divin t^salmiste , lorsqu'il faisoit cette prière : « Eclairez mes yeux , ô Seigneur , de peur » que je ne m'endorme dans la mort (0 ». C'est pour prévenir l'effet de cette mortelle • léthargie , que l'apôtre nous dit aujourd'hui : ce Mes Frères^ C«)P*.xii.4. l42 SUR LA IVÉCSSSITÉ ». rhe.mre e$t yeuuç, de vous réveilier ^ ^fxtr^ Siomn - • ) . . . tQV^t çiivs^iflblQ le $qmaçil et la lang^€;^p j U çonx- meU (pii ftPMSy ri^pA WS^ftsibles; la» langii^i^y qui i^ous empêc^aipt, 4^ niçjus. ^yçillep toutrà-f^it et der uous lev,ejf prcun^^e^ut j^ npi^s r^plçjage de,aau-i ve^u d^v^ ^^ sq^wpil. J[e v^p^s «gM>^tFf rai e^i deux, pojiatsi^ premîèrexaei^t,. p^wr^ieins, x\ je vo^s parl^. Ai^isi après avoir éve^yi^' çQviiJf, qHidprjû^e^t d^nç k^r^ pécjié^, je tâ- cherai dfî 'YWpre. les ^elf^i^ d^ e^^ç q^i di^u.tent trop IçRg-teiap?, avec leqp paires*?. Voilà suapje- ms^nt^t ftn;peu;dj3 mots, te partage d«^ Qio^uiS. Ppnneç-jçapi. 4» Hipi^s ya$ at^^ttojo^ dana un çBa^ çpwp ftùi U ft^git d^ ïatt^ntipn dUe^inâm^. PREMIER POINT. f 4riN gV»ft PfiT^onue pe crp^e q^^ pfesç n% lerime} l^eç.de ^ p^ijiçg^" p^ ^ ftie^, qu d'y p^o.spç ^ns. çon^id,ç'r^f Çqift|j^içi» ce?t, ixsxç, ç)^q^ ^eçr^)lç de tppir ^er §njr^ Sjep colins ^ i'en.ïfepr^n<}s ^^ vou^ feir^f voi« qiie pe çriift^.^sl; wç espèce d'ath^éi^ççiç, . />»^iî wipimi 1^ ^r iViwt ^«« ^i4y> 4iî le P^\^fflçi i^Mî 9 Vwse«fê4 51 dit e^ I9Ï q<«»i7', ij u y « V p9iWt,4ej Qieu >^- Ï^M §êjo|^ P^e^^iiQug Qt^mgr^ntî que nous pouvons nous rendre coupables en plu- DE TRAVAILLER A 80lf $ALt7T. t^i siecrrs façons de cette erreur insensées, par erreur, par volonté, par <^}9b\i. Il y a Ç9 premier lieu les athées et lesi libertins, qui ctiseQto^vear^em^tqMeteschoscç vont ai) l^ard; at à Tav^nture , ^a^^ Qi^dre, sans gou- verneœ^pt^ sap^^9i&4uite supérieure. Insensés, qui dans Fçmpire 4e Dieu ;| parmi ces. quvrages , parmi ses bieqfaitSy ps€u;it d\re q\^'il n'est pas, et ravir l'être à celui par l^uel subsiste toute la nature ! La terre porte pçUt c}e tels mopst^j-e^ ; les idolâtres Qiémes et les infidèles les Qnt çp horrf^ir. Et; lorsquç dans la lumière du christis^pj^e on en' découvre quelqu'un, on en doit estinp^er la ^çncontre ^malheureuse et abomina]>}e. Mais q^^ rhomnie de plaisir, ^e^suel, qui lajs^^ dQnûaer If^ ^n^ f t ne son^e qi|'à ]^^ sa^^ tisfaire^ prenne gar^e que .Dieu ^e Ip livre telle-f ment k leur tyrauni^ , qu'à la (in il vi^nuf ^ croire que ce qi^i n'^t pas seiiisibl^ p'^t pas réel -, que ce qu'on i^e voit ni ^ç touche 7 p'çst qu'eue ombre e( un fantômo ; ^% que les idéçj^ sensibles prenant 1^ dessus y tQUt^ les autv^s ue parois^pt 4ûilteuses pii tou|-k*fait vaines : car c'est là q^^ ^14 conduits in-? «en^^blewpnt cpu35 qwi lai^sçnt dpïpineî- ]^ §eq? ^t; ne pêus.eQt qu à lq§ s^tisfairf • On en voit 4*a^tr(gs , dit le dQClÇ Thépdoret (0| qw ije vieunent pas jusr qu'à cet exqè^ de i:iier la divii^U^ } mais qui pressés et incommodés d£(ps feurç pasçion^ d^réglée^, par ies loi^ qvii les cputraigneut , par ç^s menape^ quji les étoaneut , par h çraiutiç d^ Sfis jugepo^en^ qui le^ troubjeut , de^ir^roiçut quç Dieu nç fl^t Pia^ : bien plu3, ils vpudroippt pouypir çrpjrp quiç Dieu u'e^t qu'un i^om , et djs^nÇ 4^0$ leur ççpw , upp p^y per^ (*) In Ps. LU. tom, i, p. 6«3^ l44 5^^ ^^ NÉCESSITÉ suasion ^ mais par désir : Non est Deus ; a II tlj, a » point de Dieu »* Ils voudroient pouvoir réduire au néant cette souix^e féconde de Tétre. « Ingrats et » insensés y dit saint Augustin ^ qui , parce qu'ils » sont déréglés^ voudin>ient détruire la règle ^ et » souhaitent qu^il n'y ait ni loi ni justice » : Qui dum nolunt esse justi, noluni esse veritatem çud damnantuf injusti (0. Je laisse encore ceuX-ci, et je veux croire qu'aucuns de nies auditeurs ne sont si dépravés et si corrompus. Je viens à une troisième manière de dire que Dieu nVst pas, de laquelle nous ne pourrons pas nous excuser. Voici le principe que je pose. Ce h quoi nous ne 'daignons penser est comme nul à notre égard. Ceux-là donc disent en leur cœur que Dieu n'est paS| qui ne le jugent pas ^igne qu'on pense à lui sérieusement. A peine sont-ils attentifs à%i vérité quand on prêche , à sa majesté quand on sacrifie , à sa justice quand il frappe , à sa bonté quand il donne; enfin qui le comptent tellement pour rien, qu'ils pensent en effet n'avoir rien à craindre , tant qu'ils n'ont que lui pour témoin; Qui de nous n'est pas de ce nombre ? Qui n'est pas arrêté dans ses entreprises par la rencontre d'un homme qui n'est pas de son secret ni de sa cabale? Et cependant ou nous méprisons j ou nous oublions le regard de Dieu. N'apportons pas ici l'exemple de ceux qui rou- lent en leur esprit quelque vol ou quelque meurtre : tout ce qu'ils rencontrent les trouble , ei la lu- mière du jour et leur ombre propre leur fait peur. Ils ont peine à porter eux-mêmes l'horreur de leur (0 In Joan, Tn xc. n. 3 , tom. tu y col, 731. funeste DE TRAVAILLER A SON SALUT. iJ^^ funeste secret: et ils vivent cependant dans nne sou- veraine tranquillité des regards de Dieu, Laissons ces tragiques attentats ; disons ce qui se voit tous les jours. Quand vous déchirez eh secret ceux que vous caressez en public 5 quand vous les percez de cent plaies mortelles par les coups ihcëssamment redoublés de votre dangereuse langue; quand Vous mêlez artificiéuàemènt lé vrai et le faux pour don* ner de la vraisetiiblance à vo^ histoires malicieuse?; quand vous violez le sacré dépôt dii secret qi^'uii ami trop simple a f ersé tout entier dâhs votre coeur et que vous faites servir à Vos intérêts^sa confiance qui vous «bKgeoit à penser auk sieùs V comîien prenez-vous de précautions pouï^nç pcMnt parôîlrê? combien regardez- vous à droite et S' gauche ?lEt si vous ne voyez pas de témoin qiii puisse vous re^- procher votre lâcheté dans le monde, si vous avez tendu vos piégés si subtilement qii^ils soient imper- ceptibles aux regards humains, vous dîtes : « i^ui »nous a vus » ? Narrauerunt ut ahsconderent la^ queos; dixerunt, Quis vîdebit eos (i) ? conime dît le divin Psalmiste. Vous ne comptez donc pas parmi ks voyans, celui qui habite aux cieux? Et cepen- dant entendez le même JPsalmiste : « Quoi ! celui » qui a formé Toreille n'écoute-t-il pas ? et celui » qui a.fait les yeux, est-il aveugle » ? Quiplantàvit auremnonMudht, aut quifinxà ùculum^ non con^ siderati^) ? Pom-quoi ne songea-vous pas qu'il est tout vue, tout ouïe , tout intelligence 1 que vos pensées lui parlent , que votre cœur lui découvre («) Ps, Lxin. 5. — W Ps. xaii. g. BOSSUET. XI. ^ 10 i^6 suK LA hécessité tottt^ ^e votre propre conscience eât sa surveii-* lante et son témoin contre vous-même ? Et cepen-< dant 60US ces jeux si vih, sotts ces regards si {)er-« çans, vous jonissea sans inquiétude du plaisir d'être caché : vous vous abandonnes à la joie , et vous vivez en repos parmi vos délices criminelles ^ sans songet* que celui qui vous les défend ^ et qui voua en a laissé tant d'innocentes ^ viendra quelque, jour înopinéiiient troubler vos plaisirs d^une matiiàre terrible par leà rigueurs de son jugement ^ lors» qua. vous l!attendre2. le moins. M'est-^œ pas mànin festei^ent le compter pour rien ^ et « dire en son ]^ctôur insensé^ Il ny a point de Dim » ? Dixà insipiens in corde, suo : Non est Dtuà* Quand )e recherche les causes profondes d'tin si prodigieux oubli ^ et que jô considère en mtoi-t-même! d'où vi^^t que Fliommè £l sensible à ses intérêts y et si attentif à ses afFaii^es y perd néànmoiés de/ vue si Êiciiement la chose dot, monde la plus néces^ure^ la plus redoutable et la plius présente ^ c'est ^ à ^« dire Pieu et sa jUstlice ; voièi ce qui me. vient en la pen^ $ée.. Je tiH^uve quenotte esprit dont les bornes sont si étroitisa , . n'a pas une assez vaste compréhension |>our» siélendre hors de son enceinte : c'est pourquoi il n'imngihe viVeib^t que ce qu'il msent en lui^ inéme> et nou^ fait juge» dés choses qui nous envi^* ponnent > par ntitre propre disposition. Celui qui est en colère, croit que to^t le «nonde ^st ému de^l'injure que lui seul ressent/ pendant qu'il en fajtigue touiiesles oreilles. On v(^itqttie lé paresseux qui laisse aller toutes choses avec nonchalance, ne DE TR:àrÂiLiB& À &oy salut. i47 s'iiâagine jaïnâis :combieb vive est racUvittf àe ceuk qui attaqfuent sa fortune. 'IVndant qu'il dort à boiI aise et q«'fl .se repose , il croit que tout dort aved ht^ et n'est réveillé qtie ff^ le coup^ G^est uùe illu« flbn . sentblable y mats bien plus univei^elle ^ qui peratiade à totxs les pécheurs ^ que pëhdatA qu'ils languissetit dang rdsiveté, dàuë le plaisir > dani Fioipéiiit»â^e) la justice divine languit au^st; et qu'dle est tout -à* lait endormie. Parce quUb ont oublié Dieu y ik pensent aussi que Dieu les oublie t Dùttùénimin corde su», t^Uins ^t Deias (0 \ a Gar » il a xlitioU' son ooear $ ï)ieisi l'a oubUé ^. Mais leur ert^ur est «eatlréme : si Dieu se tait quelque temps > il ne se taira pas toi^^urs. a Je veillerai y dit- il y sut » l^g pécheurs y pour leur uiàL^t non pour leuÉ » bien s» i f^igiiaiù super ^eùs in mahan et non ik hnum W. f ai été patient ^ j'éelaterai tout à coup } » lMg-4»mpe j'ai retenu ma colèire dans mon sein , » à kk fin fenfonterbi ^ je dissiperai mes ennemis ^ et « tes envelopperai toul^ eâséuiblé daim une inémé « t«ngeuDce a z TaaU M^mper^ sikd, paîièns fui} êkwpànmriBfiS hçuat^ Jissipùio et ahsorbebù si^ mul {^)% Paroondétjuent^ diriéliens^ ne prenons pd6 son silence p>ôur uft àveu^ ni sa patience pouriiii pardon ^ni sa lo»^«e dissithulation pour un oublia ni sa boat<é pour une feîblesse* il attend parée qu'il fstl miséricordieux; et si- V^n méprise ses miséri^ cordes y souvent il attend encore et ne presse pas sa vengeance; parce qu^il sait que ses mains sont («) Ps. IX. 54. — ' W /w. xLir, V), — {^) is, xtii. t^i ' i48 - SUR LA NÉCESSITÉ inévitables. Gomme un roi C"^) qui sent son trône a0ermi et sa puissance établie^ apprend qu'il se machine dans son Etat des pratiques contre son service y de secrets desseins de révolte; car il. est ms^lâisé de tromper un roi qui a les yeux ouverts jet qi;i veille : il.pourroit étouffer dans sa naissance jcette cabale découvert^; mails assuré de lui-même et de sa propre puissance , il -esit bien aise de voir jusqu'où iront les. téméraires complots de ses sujets infidèles^ et ne précipite pas sa juste vengeance, jusqu'à ce qu'ils soient parvenus au terme fatal' où il a résolu de les arrêter. Ainsi, et à plus forte rai- son , ce Dieu tout-puissant , qm du centre de son éternité développe tout l'ordre des siècles, et qui, sage dispensateur dès t^emps, a fait la destination de tous^ les momens devant l'origine des choses, n'a rien à^ précipiter. Ceux-là se hàtent« et.se préci- pitent, dont les conseils sont dominés par la rapi- dité des occasions , et emportés par la fortune. U n'en est pas ainsi du Tout -puissant. Les pécheurs sont sous ses yeiix et sous sa main. Il sait le temps qu^il leur a donné. pour se repentir^ et celui où il les attend pour les confondre. Cependant qu'ils mêlent le ciel et la terre pour se cacher, s'ils pou- yoi^nty dans la confusion de toutes choses; que.ces femmes infidèles et ces. hommes corrompus et cor- rupteurs se couvrent/eux-mêmes, s'ils peuveùt, de toutes; les ombres de la. nuit; que ceux qui s'en^ {*) Semblahle à celui qui nous honore de son audience. Ces mottf 'qui désignent que ce sermon à dû être prêché devant le roi , sont effacés dans Iç manuscrit de Fauteur. £dit, de Décris, DE TRAVÀILLERVa soir g/LtVT. i49 tendent si bien pour conspirer à leur perte, enve- loppent leurs intelligences déshonnétes dans l'obs-^ curité. . d!une intrigue impénétrable : ils seront' découverts au jour arrêté; leur cause sera portée^ devant le tribunal de Jésus-Christ , où leur convic- tion ne pourra être éludée par aucune excuse, ni leur peine retardée par aucunes plaintes. Mais j'ai à vous découvrir de plus profondes vé- rités. Je ne prétends pas seulefment faire appré- hender aux pécheurs les rigueurs du jugement dernier, ni les \supplices insupportables du siècle à venir. De peur . que le repos où ils sont dans la vie présente, ne serve à nourrir en leur cœur aveugle et impénitent l'espérance de l'impunité, le Saint-** Esprit nous enseigne que leur repos même est une peine. Pécheurs, soyez ici attentifs. Voici une nou- velle manière de se venger qui n'appartieot qu'à Dieu seul; c'est de laisser ses ennemis en repos ^ et de les punir .davantage par leur endurcissement et par leur sommeil léthargique, que s'il exerçoit sur eux un ^châtiment exemplaire. 11 est donc vrai^ chrétiens, qu'il arrive souvent qu'à force d'être ir- rité. Dieu renferme en lui-même toute sa colère; en sorte que les pécheurs étant étonnés eux-mêmes de leurs longues prospérités et du cours fortuné de leurs affaires, s'imaginent n'avoir rien à craindre et ne sentent plus aucun trouble dans leur con- science. Voilà ce pernicieux assoupissement , voilà ce sommeil de mort dont j'ai d^jà tant parlé. C'est ^ mes Frères, le dernier fléau que Dieu envoie à sesenue^mis; c'est.le comble de tous les malheurs, c'est la plus prochaine disposition à l'impénitence l5o aUR hX NÉCESSITÉ finale et à la niitiQ dernière et irr^niëdiable. Pour r^ii tendre, il fatit reinarqner que c'est une exo^U lentç piaxin^ de$ saints docteurs^ a Qu'autant que >» les pécheurs sont rigoureux censeur» de leurs XL vices ,. autant Dieu se relâche en leur faveur dé >» la sévérité de ses fugeinens ^ : In quanfum non pepercerU ti&i, in taH$um tibi Deus^ crede , par* cet (0^ En ç0et> çoiÂnié il est écrit que Dieu aime la justice et déteste Tiniquité, tant qu'il y la quel-* que chose en noua qui crie contre les péchés et s'élève coi^tre les vices, il y a aussi quelque chose qui prend le parti de Dieu; et cW mîe disposi- tion favorable pour le réconcilier av^c nous. Mais dès que nous sommes si malheureux que d*étr^ tout- à*fait d'accord avec nos péchés; dès que, par le plus indigne d0s attentats, noiis en sommes v«ous à c^ point que d'abolir en nous-mêmes la sainte vérité de Pieu,:r)mpression de son doigt et de ses lumières, la marque de sa justice souveraine , eii renversant cet auguste tribunal de la conscience qui condam- poit tous les crimes^ c'est alors que l'empire de Dieu, est détruit, que Taudace de la rébellion est consommée, et que nos maux n'ont presque plus de reiïiçd^. C'est pourquoi ce graud Diçiu vivant, qui .^it que le souverisLih bonheur est de le servir et de lui piaire:, et qufe ce qui reste de meilleur à ceux qui se, sont 'Soignés de lui par leurs crimes , c'est d'être troublés et inquiétés du malheur de lui avoir déplu; après qu'on à méprisé' long-temps Ses grâces , ses inspirations , ses miséricok^dieux avertis- semeQS, et les coups par lesquels il nôuâ a' frappa i^) TerUdl',dePamtenti4, Hf lo. DE THÀyAlI^LEiB, À,' aOH JiÀLTTT. iÇl 4e tem^ Wi tomps , . oloii ei^pore J)quç noqs piii^iûr % toutQ rigueur ^ iAai$ seulei^^t pour nous re Yeil'- Ut ; prc^d ebfiiQ cette deitoière résolution pouf $e veuger des^ Wms»e$ ingrats ^t trop ioseiisi))lea ; H retire, ses saintes lumières , il les aveugle ^ il les emluriiit ; el leur laissent oublier ses divins pré^ ceptosy il &)tt qu'en métpe temps ils oublient et leur s^ttt et enx - menues. Encore que cette doc^ teiue pftrôissé aœaz établie siir l'ordre des jugemens de Dieuv je penserai n avoir rien fait si )e ne la pi'ouve dairemait : il faut que ^e vous montre dans ^n Ecriture le progrès d^un si grand Jx^A. Le prophète Isaïe nous .le repi^ésente tenant en sa main une coupe , qu^il appelle la coupe de la > co»- lère de Die«i : Bibisti àê manu Domini ctdieemirm ejus ()) : ce La main du Sdignour vous a Êôt boire » la epupe de sft eolèré «. EUe ^t^ dit^^il, i^mplie d'un breuvage qu^il veut taire boire aux péckeurs \ m^iis d'un bresuvage fanneux oomnifi d'un vin nou- veau , qui leiir monte à la tête et qui les enivre. Ce breuvage qui enivre les. pécheurs ^ qu'est^^ce autre chose, Messieurs^ que l«ttrs.pedn& mêmes et leurs désirs emportés auxquels Dieu Içs abandonne t Qs •boivent comme un premier verre^^ ei peu àipeu bi tête leur tourne; o'estf-àrdire que dans rar(l@ul' de leurs passions, la réflexion à demi éteinte n'envoie que dés lumières douteuses^. Ainsi l'ame n'est plus édairée comme auparavant; on ne voit pliia les vérités de la religion y ni les terribles jugemens de Dieu y que comme à travers d'un nuage épais. C'est ce qui s'appelle dans Iqs E)critures « l'esprit, de ver- (0 /«. u. 17. iSa auR LÀ irÉcEssifé » tige (0 »^ qui rend les hommes clmncelailâ et mal assurés. Cependant ils déplorent encore leur foiblesse; ils jettent quelque regard du côté de la vertu quils ont quittée. Leur conscience se réveille de temps en' temps ^ et dit en poussant un secret soupir dans le cœur : O piété! ô chasteté! ô inno*« cence! ô sainteté du baptême! 6 pureté du cfaris^ tianismé ! Les sens l'emportent sur la conscience : ils boiyeîit encore , et leurs forces se diminuent , et leur vue se trouble. Il leur Teste néanmoins quelque connoissance et quelque souvenir de Dieu. Buvez , buvez/ô pécheurs, buvez jusqu'à la dernière goutte, et avalez tout jusqu'à la lie. Mais que trouveront^ ils dans ce fond? « Un breuvage d'assoupissement, » dit le saint Prophète , qui achève de. les enivrer » jusqu'à les priver de tout sentiinent » : Usquead Jundum calicis soporis bdbisli^ et poiàsti usque ad Jœces W. Et. voici un effet étrange : « Je les vois, » poursuit Isaïe, tombés dans les coins des rues, si » profondément assoupis, qu'ils semblent tput-à** » fait morts » : Filii lui projecti sunt^ dormierunt in capite omnium viarum (^). C'est l'image des grands pécheurs, qui, s'étant enivrés long-temps du vin de leurs passions et de leurs délices crimi- nelles ,^ perdent enfin toute connoissance de Dieu et tout sentiment de leur mal. Ils pèchent sans scru- pule : ils s'en souviennent sans douleur : ils s'ea confessent sans componction : ils y retombent sans crainte : ils y persévèrent sans inquiétude : ils y meurent enfin sans repentance. Ouvrez donc les yeux , 6 pécheurs ! et connoissefi J DE TRAVAILLEIL A SOK SALUT. l53 Fëtat où vous êtes. Pendant que vous contentez vos knauvais désirs, vous buvez un long oubli de Dieu; un sommeil mortel vous gagne , vos lumières s'étei* gnent , vos sens s'afFoiblissent. Cependant il se fait • contre tous ^ dans le cœur de Dieu , un « amas de. » haine et de colère » : TTiesaurizas tibi iront (')^ comme dit Tapôtre : sa fureur long-temps retenue fera tout à coup un éclat terrible. Alors vous serez réveillés par un coup mortel , mab réveillés seule-* ' xaent pour sentir votre supplice intolérable. Préve- xiez un si grand malheur; éveillez- vous , Theure est venue : Hora est jam nos de somno surgercm Evûllezrvous pour écouter Tavertissement^ de peur qoLon ne vous éveille pour écouter votre sentence* Ne tardez pas davantage : cette heure où je vous parle doit étre^ si vous êtes sages , Theure de votre réveil. C'est ma secotide partie. SECOND POINT. Jésus- CflftisT commande à ses ministres de dé- noncer à tous ceux qui diffèrent de jour en jour leur conversion, qu'ils seront surpris infailliblement dans les pièges de la mort et de Tenfer ; et qu'à moins de veiller à toutes les heures, il viendra une heure imprévue qui ne leur laissera aucune ressource. Ecoutez, non la parole des hommes, mais la parole de Jésus-Christ même , en saint Matthieu et en saint Luc (3) : (c Veillez , parce que vous ne savez pas à » quelle heure viendra votre Seigneur. Car sachez a» que si le père de famille étoit averti de Theure à 1» laquelle le voleur doit venir , sans doute il veille- 0) Rom. xi« 5. •— (0 Matth. auuy. 4^9 et seq, Luc% xii. SQ/ee^e^. l54 SUR LA NÉCESSITÉ i» roit et ne laisseront pas percer sa maisoQ. Vo¥i ^jàônc aussi soyess toujours prêts, parce que le Fib » de rhomme viendra à Theure que vous nepeuscï » pas. Qui est le ^erriteur fidèle et prudeat que son À maître a âabli sur toiis ses serviteurs , afin qu il 3» leur distribue dans le temps leur nourriture ? » Heureux est ce serviteur^ si son maître à son ar^ i^ rivée le trouve agissant de la sorte \ Je vous dis » en vérité qu'il rétablira sur tous ses; biens. Mais si » ce serviteur est méchant /et q^'il dise en son oosur : »Mon maître n'est pas prêt à venir v et qu'il comr » menée à maltraiter ses cocppagnons, et à manger^ i» et à boire y et à s'enivrer ^ et à mener une vieoii^ » solue : le maître de ce serviteur viendra au jour » auquel il ne s'attend pas , et à Theure qui) ne sait » pas > et il le séparera et lui donnera le partage » des infidèles et des hypocrites. C'est là qu'il y » aura des pleurs et des grincemeiis de dents )>. Cette parabole de l'Evangile nous découvre en termes formels deux vérités importa ntes% La pre- mière que Jésus-Christ a dessein de nous surpren- dre ; la seconde que le seul moyen qu'il nous donne jpour éviter la surprise , c>st de veiller sans relâdie. Td est le conseil de Dieu , et la sage économie que ce grand Père de famille a établie dans sa maison. Il a voulu avoir des serviteurs vigilâns et perpé- tuellement attentifs. C'esC pourquoi il à disposé de [telle] sorte le cours imperceptible du temps, que nous ne sen-tons ni sa fuite ni les larcins qu'il nous feit ; en sorte que la dernière heure nous surprend toujours. Il faut ici nous représenter cette illusion trompeuse dutqmps, et la manière dont il se joue DE TRÀVAILI'ErR A SON 3ALUT. |5S de; notre foible ifn^igir^aliot)' ,1^^ temps » dit saint Augustin (0^ est un^ £oible imitatian de rétemité. Celle-ci est toujours la ï»ême : ce qurele temps n« peut égaler par sa coQsîstaDce.^ il tache de Timiter pai; la çuçcessiQn, $'ii nous dérobe un |ows il en Tend subtilement un autre seinJbJabjey ^i qûhi empêche de regretter celui que nopa venons d« perdre* C'qst ain^i que ^ temp^ pqus joue et nom cacho sa rapidité. Ce&t aus^i peut-^tre en cela que condste cette malice du temps dn^t Tap^tre nous; avertil p^r ces. mots : «Racheta le temp^^ dit-*il^ » parce que les jours sont mauvais(^) »; ç^est-^à^re trompeurs et malicieux. £n efiet le. temps nous .trompe toujours; parce qu'encore qu'il varie sans ce^se^ il montre presque tojujours un Xf^me visage , et que Tannée qui est écoulée semble ressusciter .dan& la suivante. Toutefois une longue auite nous découvre toute Timposture. Lea rides sur notre front f les cheveux gris , les infirmité ne nous lont que trop remarquer quelle grande partie de notre être est déjà abîmée et engloutie. Mais dans de si grands changemens le temps afiècte toujours queir que imitation de' l'éternité : car^ comme c'est le .propre de réternité de conserver les ohoses dans le niéme état ; le temps pour en appi^ooher ^ ne nous dépouille que peu à peu , et nous mène aux .extrémités opposées par une pente si douce et tel- lement insensible , que nous nous trouvons engagés ,aij^ milieu des ombres de la mrort , avant que d'avoir songé co^Qime il faut à notre conversion. Es^chias ne sent point écouler son âge, et dans la quai an- Ç") InPf. ix. «. 7, tom* iv, çoL 4a. — W -^ph» v. i6. l56 Sun I.A NÉCESSITÉ tième de ses années , il croit, qu'il ne fait que de naître : Dum adkuc ordirer, succidit me (0 : « Il a » coupé la trame de mes jours , que je ne faisois ^ que commencer». Ainsi la malignité trompeuse du temps fait que nous tombons tout à coup et sans y penser ^ entre les niains de la mort. Pour nous garantir de cette surprise ^ Jésus -Christ ne nous a laissé qu un seul moyen dans la parabole de l'Evangile ; c'est celui d'être toujours attentifs et vigilans. «Veillez, dit -il, sans cesse, parce que i> vous ne savez à quelle heure viendra le Sei- » gneur ». Ici l'on ne peut s'étonner assez de l'aveuglement' des hommes , qui ne sont pas moins audacieux que le fut autrefois l'apôtre saint Pierre , lorsqu'il dé- mentit la vérité même. On ne lit point sans éton- nement la témérité de ce disciple , qui , lorsque Jésus-Christ lui dit nettement qu'il le reniera trois fois , ose lui répondre en face : « Non , je ne vous » renierai pas (2) ». Mais cessons de nous étonner de son audace y qu'il a expiée par tant de larmes : étonnons-^nous de nous-mêmes et de notre témérité insensée. Jésus-Christ nous a dit à tous en paroles claires : Si vous ne veillez sans cesse , je vous sur* prendrai. Et nous osons lui répondre : Non , Sei- gneur, nous dormirons à notre aise; cependant nous vous préviendrons de quelques momens , et une prompte confession nous sauvera de votje colère. Quoi! le Fils de Dieu aura dit que la science des temps est l'un des secrets que son Père a réservés en sa puissance (3) , et nous voudrons percer ce (»; Is, xxxYiii. xa. — • (*) Mauh, xxvi. 33, 35. — ^) Act, r. 7. DE TRAVAILLER A SOK SALTJT. 187 secret impénétrable ^ et fonder nos espérances sur un mystère si caché, et qui passe de si loin notre connoissance ! Quand Jésus -Christ viendra en sa majesté pour juger le monde , mille éyénemens ter- ribles précéderont : toute la nature se remuera de- vant sa face; et cependant Tunivers menacé de sa ruine totale par uç si grand ébranlement , ne lais- sera pas d'être surpris. Il est écrit que ce dernier jour viendra comme un voleur; et quil arrivera sur tous les hommes y comme un lac^t oii ils seront pris inopinément : tant la sagesse de Dieu est. pro* fonde à nous cacher ses conseils ! Et qous croirons pouvoir sentir et apercevoir la dissolution de ce corps fragile qui porte sa corruption en son propre sein ! Nous nous trompons y nous nous abusons ^ nous nous flattons nous-mêmes trop grçssièrement. La mort n^e viendra pas de 'loin avec grand bruit pour nous assaillir. Elle s'insinue avec la nourri* ture que nous prenons, avec Tair que nous respi- rons, avec les remèdes mêmes par lesquels nous tâchons de nous en défendre. Elle est dans notre sang et dans nos veines ; c'est là qu'elle a mis ses secrètes et inévitables embûches , d^ins la spurcei même de la vie. C'est de là qu'elle sortirai tantôt soudaine , tantôt à la suite d'une maladie déclarée; mais toujours surprenante et trop peu prévue. L'ex-* périence le fait assez voir; et Jésus- Christ nou$. a dit dans son Evangile que Dieu l'a voulu de la ^orte* C'est par un dessein prémédité qu'il nous a caché notre dernier jour^ ce afin, dit saint. Augustin , que » nous prenions garde à tous les jours » : Latet ulUr xSS àUK LA JStÉCTaSllfÉ Wius dies, ut oiserventur omîtes dies (0. Puisqu'il a entrepris de nouis surpreûâre si noiis d« veilloits; Seron^-Dous plus industrieux k prévenir la main dé Dieu^ qu'il ne isera protopt à fi-apper son coup? Oit crojrons-nous avoir contre lui d'autres pi^cautionss et d'aiitres moyens que celui qu'il hoas a donné , de veîUcr toujours ? Quelle folie ! quel aveuglément ! ^uel étourdissément d'esprit! et quel noin dôiine* rons^nous à une si haute extravagance ? Permettons néanmoins aux hommes^ si vous le vbu« le» , de goûter paisiblement le pliainr de vivre j ac-* cordons que k jeunesse puisse se promettre de longs joints, et ne lui ^pVions pas la triste espérance dèi vieillir. Pehséîs-vous qu'on doive fonder sa future conversion sur cette « attente ? - Détrompez - vous ; chrétiens, et apprenez à vous mieux connoltre. Telle est la Mtui^ de' Votre àttfé et de votre vo- lonté, qu'elle ne peut, étant libi^e, être forcée par ses objets, lUaiii elle s'engage elle-même, fille se fait éommè des liens de fer et une espèce de^nécei- ifeîlé par ses acteà : c'est ce qui s^appelle l'habitude ; doUt je Ae m'éfefadrai pas à vous décrire la violence trô|> éohnûé et ti*6p expérimentée. Je veux donc bien vous confesser qu'il ^ d une certaine ardeur des passions et une force trop violente de la nature , que l'âgé peut tempérer. Mais cette seconde nature qui -se forme par Tbabitude, mais cette nouvelle ardeur encore plUé tjranniqùè qui naît de l'iaccow- tomance \ le temps ne fait que Taccrôître et l'a&èr^' mir duVantage. Quelle folie, de iaiâsèr fortifier un {}) Serm» zxjlvl, n.i, tom, y, coL 199. DE TRA^VÀILLEll A SON SALUT. iSg ennemi qu*on veut vaincre ! Ainsi nous nous trom-> pons déplorablement , lorsque nous attendons du' temps le remède à nos passions^ quela raison noua présente en vain. Si nous* n'acquérons par vertu et par un effort généreux la facilité de les vaincre y> ù'e&t une folie manifeste de croire que Tâge nous la donne. Et comme dit sagement rEociésiastique / que les pécheurs endormis ont le plue à- (^aindre. Pour eux ils n'ap^ préhendent que la mort sittute ; et comme ibivëu|entl se persuaderai malgré Texpérienc^ et tous lés exem^^ pies , qi^e • leur vigueur présente les e&i gavaiitit ^ ils découvrent toujours dû temps' devant &aké Af!ov-« tels téméïM^es :et ^ :peu . préVoyans f- tfai i crajrôJUL que Ja ju^^ce : divine n'a qu'im nfojrfinjpdç'noiis perdre J M'on , mjes Frèreà/ ne le'croje^rpa^. ffaHtf sommes souvent ^eondamnâ; etisouventiipimisiltërâ riblementy avatitrvqîie là. veDgesmce soj défiittré'y avant même que nous la sentions; .Et x'èrtesruoa» . pourrions . enten^^ei . cette véi^ité ; {iar '■ l 'eixeiiiple detf choses humfiinbs.' On ne dit pasfitou^oai^cjoax crimin nek la misère de leur: triste ^étât :'sôuvent ^n les voit pleins de coàfian(ie> |)ieJidaiKt que.*léurijnort estiié-l solue. Leur sent^iC^inett piâsbp!roxtoncée.^:mais eiie/ est d^)kéçii?i(e :diW9re^pi?it4iÂ4"ge&ii!X^ s'est itroiivé perdu à kfpc)|ir,^i$t etttièrommit/ wcJu«f;desfgcâcBS|r dont le crédit isiibsîstoit appairemmeiirjl. Si Idiji^stiçc) des hopimes 4 seç ;$§<:retejft^f^ I9y$tàrfiâ^ W|ustii2ei divine nfaurarlrdle pasiauiMs»Jesisiens?,.piii^,«san$ doute, et ti^n, pins- terribles. Mais. ii.feijit^réî^WijR par lesEcritwes> ïepijteia&^donfi'Ceiqwi ^*.éàrit .au DeuJtéronomjB.j « S?icfeç^ que teiSj^gR^W^viatriç Jiiph p punit iucontment cwx qm teJ»aï^eptî,:efci|e^jdi(rf » fère pas à. les perdre, leui? rçh4««>t,4ans. le;|T3ipn » ment méme,ce Qu'ilsm^it^n^» jj/t^é/^^/îrf.Q^i^^ tibus se, statim ut disperdat eos ^ et ultra jion d\ffe^ BOSSUET. XI. I I rat^ protinus eis restituems çuûd merentur (0. PesecS'. ces. mots : mcontineot^ s^ps diilfèrer, dam le mo* ment même. Est-tl vrai que Dieu punisse toujours de la sor|;e ? Il n'est pas vrai, si nous regardons, la vengeance, qui éclate: il est vrai si^ nous regardons les .peines, cachées, qvus Dieu envoie à ses ennemis | peines si grandes et si terribles^ que je vous ai dé* jpiontrées: dans ma première partie* Celui qui pèche est puni sans retardement; paroe ^^ue la grâce se cetiredans le mottient même; parce qne. sa: foi di-f minne^'jqu'.ui;!. péché ep attire un autre , et qu'on tombe toqjauTS plus facilement aprè;s qu'on est aft &nbli< par cpile première, dante; Telles sont les peines ^âb^ei) qui ^mant le crime dans l'insta^. qu'il est commis' G'est que ces hommes coritimpus perdent toute cjEtainté de JQiea, Q?est-«à''dire^.tout le frein de leur licence. ;;i)ef £e(mmp^ achèvent de perdre tout ce quil Jeair reste, de >m6desti6,i cfest^dire tant Voi:nementi.de'l)êu]r'seiBe;..£i!iÇ]:^ le orime n'a plus p6iip nou$ une faiee)#i^nge qui nous épouvante; mais il^est devei^i, çirs^éui^^useBùlent famili^^ et n ^étonti^-pluii: net^e^ am^ endurcie^ M^'^|^lez-vou4 pas^d^la on .gvand supp^ke? Quoi ! dit le grand saint> j^glistin ; >i ^«xrsqik oôns péchons^ nous étioQSt foa|)p^à -rinstàn&'d'ttHîe sondaine^' maladie^ si BOUS andonne pur uue juste punition , nous ne senttdns pas sa main vengeresse > et nous oroyons qu il nous' pardonne et qu'U Aous épargne : Si fms Jurfi^m Jkciens^ta^ ^m QçuhwiperdùUssût^ omnes dieerentDewn p^rc^-^ sen4^m vindicassei Qcubun cordU ammt, eteipe^ percme pt^uilvr Dem, (07 Que nous sert de vivre et de sùb^ster aux yeux des hommes , si cependant uotts sommes morts ) perdus devant Dieu et devant ses anges? Nbmcn habes quod vivias ^ et moriuusi es (3} : et On vous appelle vivant ; mais en effet vous » étesmoirt ». Pour £ûre mourir un arbre, il n'est pas toujours nécessaire qu'on le déracine. Voyez ce grand chêne desséché -qui ne pousM plus, qui ne fleurit plus y qui n\i plus de glands ni de feuilles; il a la mort dans le seinet dans la racine ) i\ n'en est pas moins ferme sur $on tronc ; il n'en éteiid pas moins se& vastes rameaux. Chrétien dont le cœur est endurci , voilà tun image. Bois aride , Dieu* n'a pas enaore frappé ta r»dne, et né t'a pa& précipité de ton haut pour te jeter dans le feu ; mais il a re- tiré L'esprit de vie. Craignez donc, péchemr endormi , craignez le denùer eûdureissement. Eveillons^nôus, il est temps. Pourquoi endurcissçz-vous vos cœurs comme Pha* Tsou? ËveiUez^vous sans délai , puisque chaque dé* (0 S^Aug, in Ps. LYiiy B. 189 fou». XV9 eoL 553. •« C') Apoc» m. i. l64 S^^ ^^ NÉCESSITÉ lai aggrave vos peines. Car attendes - vous à vohs éveiller que vous soyez retourné parmi vos plai- sirs ? Et quand faut-il que le chrétien veille , sinon quand Jésus-Christ parle ? Faites réflexion sur vous- même ; pensez-vous être bien loin de cette mortelle léthargie, de cet endurcissement funeste , dohtvouJ êtes menacé si terriblement par tant d'oracles de l'Ecriture? Songez à vos premières chutes : votre cœur vous frappoit alors : Percussit eum cor Da- vid (0 : « David fut frappé au cœur ». Vos remords étoiënt plus vifs et vos retours à Dieu plus fréquens; Vous périssiez y mais souvent vous versiez des larmes sur votre perte, et vos tristes funérailles étoient du moins honorées de quelque deuil. Maintenant vous paroissez confirmé dans votre crime : les saints âvertissemens ne vous touchent plus; lessacrémens vous sont inutiles. Craignez enfin, chrétiens, que Dieu ne vous livre au sens réprouvé, et que votre ame ne devienne un vaisseau cassé et rompu qui ne puisse plus contenir la grâce. C'est de quoi sont menacés par le Saint-Esprit ceux qui profanent les sacremens par leurs rechutes^ et qui entretiennent leurs mauvais désirs par leur complaisance. « Je les » briserai, dit le Seigneur, comme un pot de terré, » et les réduirai tellement en poiidre qu'il ne res^ » tera pas le moindre fragment , sur lequel on » puisse porter une étincelle de feii, ou puisei* une » goutte d'eau » : Comminuetur sicut conteritur îa^ genafiguli contritione penfolidd : et non inifenietur de fragmentis ejus testa in qud portetur igniculus de incendio, aut Iiauriatur parum açacù de fovèa (3). DE TRAVAILLEll A SON.SÀLUT. l6S Etrange, état de cette ame cassée et rompue Î.Elle s*approche du sacrement de pénitence et de ce fleuve de grâce qui en découle; il ne lui en demeure pas une goutte d'eau. Elle écoute de saints discours qui seroient capables d'embraser les cœurs; ejile n'en rapporte pas la moindre étincelle. C'est un vaisseau tout-à-fait brisé et rompu ; et si eUe ne fait un dernier effort pour rappeler l'esprit de la grâce, et pour exciter la, foi endormie , elle périra sans ressource. Ah! mes Frères, j'espère de vous de meilleures choses , encore que je parle ainsi. Quoi ! ma parole est-elle inutile? L'esprit de mon Dieu n'agit-il pas? ne se remue-t-il pas quelque chose au fond de vos cœurs ? Ah ! s'il est ainsi , vous vivez , et votre santé n'est pas déplorée. Ne perdons pas ce moment de force : donnez des regrets , donnez des soupirs ; ce sont les signes de vie que le céleste médecin vous demande. Après laissez agir sa main charitable. « Car pourquoi voulez-vous périr? Je ne veux point »la mort de celui qui meurt : convertissez-vous et » vivez-, dit le Seigneur tout-puissant » : Et quare moriemini, domus Israël? qiiia jiolo mortem mO" rientisj, revertimini etvi\Hte (0. Mais je n'ai rien fait, chrétiens, d'avoir peut-être un peu excité votre attention au soin de votre salut, par la parole de Jésus-Christ et de l'Evangile , si je ne vous persuade de vous occuper souvent de cette pensée. Toutefois ce n'est pas l'ouvrage d'un homme mortel, de mettre dans l'esprit des autres ces vérités importantes : c'est à Dieu de les y gra- (>; JSzech, XYiii. 3i , 3a. l66 SUR Li. irÉCESSITÉ ver. Et comme je n'ai rien fait aujourdlim que vous Imiter ses saintes paroles^ je produirai encore en finissant ce qu*il a pronoùcé de sa propre boudie dans le Deutérotiotne. «Ecoutez, Israël; le Sei- » gneur votre dieu est le seul Seigneur. Vous L'ai- » merez de tout votre cœur, de toute votre ame » et de toute votre force. Mettez dans vôtre cœur A mes paroles et les lois que je vous donné aujour*- 3» d'hui : racoute^les à vos enfahs et les méditez en » vous-même , soit que vous soyez assis dans votre » maison , soit que vous marchiez dans le cheihin » : Sedens in domo tuâ et ambulans in itinere , dor-- miens utcfue consurgens (0« très et pour la vie retirée. Ce précepte formel a ^té écrit pour tout le peuple de Dieu. Les Juife, tout charnels et gros&iets qu'ils sont, reconnoissent en* core aujourd'hui que cette obligatioii indispensable leur est imposée. Si nous prétendons , chrétiens^ que ce précepte ait moins de force dans la loi <{e grâce y et qùef les chrétiens soient moins obligés k èette attention que les Juifis^ tious déshonorons le christianisme, et faisons honte à Jésu»-Christ et à l'Evangile. Le feux prophète des Arabes , dont le paradis est tout sensuel , et dont toute la religion n'est que politique, n'a pas laissé de prescrire à ses malheureux sectateurs d'adorer cinq fois le four ; et tous vojez combien ils sont ponctuels à cette ob*- servance. Les chrétiens se croiront-^ils dispensés de penser à Dieu , parce qu'on ne leur a point marqué des heui^es précises? C'est qu'ils doivent veiller et prier toujours. Le chrétien doit veiller et prier sans cesse, et vivre toujours attentif k son salut éteméL Jfe pensez pas que cette pratique vous soit imposa :âble : le passage que j*ai récité, vous en donne un infaillible moyen. Si Dieu ordonne aux ISraéEtes de s'occuper perpétuellement de ses saints pré*- ceptes , il leur ordonne auparavant de l'aimer et de prendre à cœur son service. Aimez, dit^il, le Sei- gneur, et mettez en votre cœur ses saintes paroles. Tout ce que nous avons à cœur nous revient assez de soi-méoie, sans forcer notre attention, sans tourmenter notre esprit et notre mémoire. Deman- dez à une mère s'il faut la faire souvenir de son fils unique. Faut-il vous avertir de songer à votre for- l88 SUR LA; IfÉCSSS^ITÉ - r tune et à vos affaires ? Lorsqu'il semble que votre esprit 'spit ailleurs, n étes*vous ; pas toujours vigi- IftDSy et. toujours trop vifs. et secrètement at;tonti& sur cette matière , sur laquelle le moindre. mot vous éveille 7 Si. vous pouviezi prendre à cœur votre salut étemel ^ et vous faire une fois une grande affaire <)e icelle qui devroit être la seule 5. nos salutaires avertissemens ne vous seroieiit pas un, supplice^ et vous penseriez de vous-même mille fois le jour à un intérêt de cette, importance. Mais cejtes ni nous n'airaonsi Dieu^ tii nous ne songeons à nous-mêmes, et ne sommes chrétiens' que de nom. Excitonsruous enfin 9 et prenons à cœur notre éternité. . Grand Roi, qui surpassez de si loin tant d'au* gustes prédécesseurs, que nous voyons infatigable- ment occupé aux grandes affaires de votre, Elat qui embrassent les affaires de toute l'Europe; jeprop9se à ce grand génie un ouvrage plus important et un objet bien plus digne de sojn attention : c'est le ser- vice de Dieu et votre sàlut. Car, Sire, que vous ser- vira d'avoir porté à un si haut point la gloire de votre France, de l'avoir rendue si puissante par mer et par terre, et d'avoir fait, par vos armes et ppr vos conseils, que le plus célèbre, le plus ancien, le plus noble royaume de l'univers, soit aussi en toute manière le plus redoutable ; si après avoir rempli tout le monde de votre nom et toutes les histoires de vos faits, vous ne travaillez encore à des œuvres qui. soient comptées devant Pieu, et qui méritent d'être écrites au livre de vie ? Votre Majesté n'a- t-elle pas vu dansl'évangile de ce jour, l'étonnenlqnt du monde alarmé, dans l'attente du jour effroya^ DE TRÂVAlLIiER À SON 8ÀLUT. • l6g Ue OÙ, Jésus-Christ paroitra en «sa majesté ? Si les astres^ sî les élém^ns, si ces grands ouvrages , que pieu semble avoir voulu bâtir si solidement pçur le$ faire; durer toujours, sont menacés de leurruine, quç deviendront les ouvrages qu'auront élevés des mains mortelles ? Ne voyez-vous .pas. ce feu dévorant qui précède la face du j.uge. terrible , qui abolira en un même, jour et les villes, et les forteresses, et les citadelles, et les palais, et les maisons de plaisance, et les arsenaux, et le$ marbres,. et les inscriptions, et les titres, et les histoires, et ne fera qu'un grand feu et peu après qu'un amas de cendre de tous les monumens des rois? Peut-on s'imaginer de la gran- deur en ce qui ne sera un jour que de la pous- ^re ? Il faut remplir d'autres fastes et d'autres annales. Dieu, Messieurs, fait un journal de notre vie : une main divine écrit ce que nous avons fait et ce que nous avons manqué de faire, écrit notre his- toire, qui nous sera un jour représentée et sera re- présentée k tout l'univers. Songeons donc à la faire belle. Effaçons par la pénitence ce qui nous y cou- vriroit de confusion et de honte. Eveillons-nous, l'heure est venue. Les raisons de nous presser de- viennent tous les jours plus fortes : la mort avance , le péché gagne , l'endurcissement s'accroît ; tous les momens fortifient le discours que je vous ai fait , et il sera plus pressant encore demain qu'aujourd'hui. L'apôtre le dit à la suite de mon texte : Propior est nostra sahis (0 : « Notre salut est tous les jours (0 Bom. XIII. a. 170 SUR LA. IféCESSITé DE TftATÀILLEm À SOV SJOsVT, b plus proche ». Si notre salât s'approche ^ notre damnation s'approche aussi -, Fun et l'autre marche d'un pas égal. « Car comment édiappercms-nous, t dit le même apôtre , si nous négligeons un tel » salut » ? Quomodo nos effugiemus, si tanlam ne^ glexerimus saliUem (07 Faisons donc notre salut, puisque Dieu nous envoie un tel Sauveur : Jésus- Christ va venir àu monde « plein de grâce et de vé« » rite (^) » : soyons fidèles à sa grâce et attentifs à ia vérité, afin que nous participions à sa gloire. / àUll LA IrlGILANGfi G H tlÉTIENIÏE. Ï7I ABRÉGÉ D'tJK SERMON SBR LE MÊME TEXTE QtlE LE PÇÉCÉliÉNT, , ... . ,' . , < ' • ... Bréché à Thôtel de LoDgueviiie , eiécrU^pres^ xwoir Jtt^ Gdmme porte le manuscrit y ' *■ ■ ■ ' * , ' ■. ■ " ' • . SUR LA. ViGHANŒ CHai£TIENl!«Ë. Hora est jam nos de somnx) sargere : nuac enim propior est nofitra salu$ quàm cùm credidimus* L'heure ^esi déjà venue de nous t^veitter de notre assou-* pissement; puisque nous sommes plm provhes de notre . ^aiut que lorsque nous avons reçu la/où Rom^ xiii. 11. ouivRE en chaque temps de l'année les dispositions que l'Eglise marque à ses enfans dans les épîtres et les évangiles. Dans r Avent ,. se préparer à l'avènement de Jésus- Christ : il est déjà venu comme Sauveur, il faut Fat- tendre comme juge. Propior est nostra salus ; « Notre salut est plus » près » ; donc notre damnation. « Comment pour- » rons-nous l'éviter, si nous négligeons l'Evangile » du véritable salut » ? Quomodo nos effugiemus , si tantam neglexerimus salutem ? Quam ciim credidi- musi^) : [Notre salut est plus près] que lorsque nous avons commencé à croire , à nous donner à Dieu, à nous convertir. (0 Jleb. ïu 3. 1^2 SUR LA VIGILAirCE . Ce qui nous a fait résoudre ^ cest qu^on nous a fait entendre (0 j Hora est; « L'heure est venue ». A présent le jugement est encore plus près : donc à plus forte raison [ c*est encore plus l'heure } : Hora est. Hora est :  toutes les heures : demain encore plus qu'hier, etc. parce que l'heure approche tou- jours, et que le temps presse davantage. Hora est nos de somno surgere : « L'heure est » venue de nous réveiller de notre assoupissement ». Le sommeil des pécheurs , le sommeil des justes. Les pécheurs dans l'oubli des jugemens de Dieu. Ils s'imaginent que Dieu dort, parce qu'ils dorment eux-mêmes : nous jugeons des autres par nous- mêmes. Le paresseux qui laisse aller les choses, ne s'imagine jamais l'activité de ceux qui sont con- traires à ses prétentions. Pendant qu'il dort, il croit que tout dort; et il n'est éveillé que par le coup. Ne croyons pas néanmoins que Dieu soit comme nous ; ne jugeons pas de lui par nous-mêmes, f^igi- labo super eos in malumW : « Je veillerai sur eux » pour leur malheur ». Ei^igila^^it adi^ersiim te (3) : « Il s'est réveillé pour s'élever contre vous ». Le breuvage d'assoupissement. Le sommeil des justes. Ils s'endorment dans la vue des bonnes œuvres qu'ils ont faites : dans la vue du calme , ils lâchent la main , ils abandonnent le gouvernail ; ils perdent l'attention à eux-mêmes et à la prière : ils s'appuient sur leurs forces : ils pé- rissent. . Le Deutéronome [ ngus inculque fortement ] (») S. Chrysost. hic» — [^) Jcrem. xliv. 27. — P) £zech, vu. 6. CHKÉTIEWirB. 1^3 rattention que Dieu oblige d'avoir à sa loi. « Ecou- » tez, ô Israël : Le Seigneur votre Dieu est le Dieu » unique : aimez donc le Seigneur votre Dieu de » tout votre cœur, de toute votre ame, et de tout » votre pouvoir ; et que toutes les lois que je vous » prescris aujourd'hui demeurent gravées dans votre » cœur. Vous les apprendrez à vos enfans, et vous » vous en entretiendrez, soit que vous demeuriez » dans vos maisons , ou que vous marchiez en » voyage , soit que vous soyez couchés ou levés. » Vous les lierez à votre main comme le signe de j> votre engagement ; et vous les placerez sur votre » front pour les avoir entre vos yeux. Vous les » écrirez aussi à l'entrée de vos maisons , et sur les » jambages de vos portes (0 ». [Or cette attention ici prescrite doit être ] plus grande dans la loi nou* velle, parce que nous sommes chargés d'une obli- gation plus précise d'aimer; non chargés, car ce n'est pas une charge, mais l'allégement de tous les fardeaux. ' . Ce n'est pas assez d'être attentif dans le mal pour en sortir , dans le péril et la tentation poW la com» battre : F^îgîlate et orate , ne irOretis. in tentation nem W: n Veillez et priez, afin que vous n'entriez » point en tentation ». Faute de cette attention l'ame périt ; elle est à l'abandon. On ne conçoit pas assez quel crime c'est que cette omission et ce défaut d'attention. [ Le prophète Isaïe nous en représente toutes les funestes suites par ces paroles remarquables ] : Ciihara,, eiljrra^ettjrmpa-^ num.^ et tibia j^t vimim in convivOsYvestris : et ojÀi^ (0 Deuun VI. 6. xi. i8. — («) Mauh. xxyi. 4i. _ . 174 ^^^ b VXQILàirCE Dofnminon resfi,iejiiis , nec opéra manumn ejus eori* sideratis. Propierea captiyus ductus est pçpulus meus ,^ çuia nofè habuit scienUam.^^K* Propterea dil0ta{^it iftferrms aniwiam suamyei apenut os suum €ièsque nllo (efrninQ • et descendent fortes^ ^jus, et populus ejus j, eisuèilimes glorîosiçue ejus ad eum (0<: « Lq luth et U harpe .y. les tamboura et les flûtes se » trouvent av^^ le vin à^^nçi» vos festins } vous a'êtes » point £^tten tifs k Vcçuvre du Seigneur ;. vous ne » considérez poi^t les ouvrages de ses n^ains. C'est » pour jcela que moB peuple sera emmené captif, » paroe qu'il n^^a point eu rîntellîgence.... C est » pour^ cela que Venfer a étendu ses . entrailles et » qu'il a oi^vert sa gueuje jusqulà Tinfini -, et to«t ce ^ quil y a de paiissant, d'illuatre et de glorieux 3) dana Isiraël avec tout le peuplé y descendra en » foule »... l}ne place coniiée [ à des soldats qui ne veillent pas est toujours ep péril ] : la négligence [ du com-^ mandant la laisse ] sans garde : elle est livide aux ennemis en tant qu'en lui. Les trésors sont déjà piUés ; leB'bommes ne jugent que par les événement màlheuireux. ' ' Ceux qui ont en. garde votre vaisselle, vos pier» reiiiies^ vos.trésorii, s^ils négligent de lés garder , les perdent en tant qu'en eux est y encore que le voleur ne vienne pas. On ne le^ châtie p|is néanmoins tou- jours y :parce que ron n'aperçcàt la faute de cette négligence que quand le malheur est arrivé. Alors on crie y alors on s!échaufiè : {a faute n'est pa ne faut-iL ,pas que la main de Dieu Iç remue ? » Mais cependant il. ignore encore par qui. il a. été n éveillé » : Faoenim hominem primb nihil çuœf rettiem } seamdkik wtaniweterem seductorid.secuT ritiUe rviventaiiy nihil putantem aliud esse post hanc viUmi ^uando^e finiendam , negUgentem quemdam eiso^rdetn,:, obmtum çorhabeniem iUfcchrisrnun* di, et mortiferis deleçtationibus consopitum : ut excitetur iste ad. çuœrfindam gratiam Dei, utjiai sollicitas ^ et tamçuam de somno ei^igilet ^ nor^ne \^) In Ps. CYif n. 1^9 fomsvrj col: \ùo6: 1^6 SUR LA VIGILANCE manus Dei excitât eum? sed tamen à çuo sit exci^ talus Ignorât. JTîgilàte^ attenditè (0 : « Veiflez , prenez gardé :p à vous ». Faire' garde comme îg:- (^) atffWjMTw 6vp»r. Bossuet a insëré dans sûû manuscrit ces mots grecs tirés dç saint Clément d^Alcxandrie* £dit, de DéfoHs, coins chuétiendte. i^^ » coins de cet habit un ruban dé couleur hya- 3» cinthe : afin que la Toyant ils se souTiennent de' » toùà les préceptes du Seigneur, et qu'ils ne se » laissent point aller à cet égarement de leur cœur » et de leurs yeux , par lequel ils se prostitueroient » à divers objets ». Défendu de suivre ses yeux, Per res varias fornicantes ; une ame prostituée à tous les objets, que tous les objets emportent. La râlexion : Tame toujours attentive. Lucema^ ardentes in manihus vestris (0 ; « Ayez dans vos » mains des lampes ardentes ». Sur quoi Origène ? Semper tièi ignisjfidei, et tucema scieniiœ accensa sit (^) : ce Que le feu de la foi brille toujours en » vous, que la lampe de la science y soit toujours « ardente ». Invitaris per hoo {per ritum preQandi nd orientent ) 14^ orientent semper ctspicias , unde tibi oritur soljustitiœ, unde semper lumen (jfidei) tibi nascitur.,.^ ut semper in scientiœ luce verseris, . semper habees diemjidei (3) : « Cet usage de priçr* » vers l'orient vous invite à regarder sans cesse cet % orient d'où se lève toujours pour vous le soleil de » justice , d'où vous vient continuelleaient )a lumière 3» de la foi , afin que vous soyez toujours environnés » de son éclat , que le jour de la foi luise sans cesse » pour vous ». Ceux qui ne trouvent point de plus grande fa- ti^e que de songer à ce qu'ils font ; ce n'est pas une vie chrétienne , ni même raisonnable. Cette attention n*est pas difficile : c^est une attention du cœur, non de l'imagination. (0 Ltic. xu. 35. -^ (*) Honu iv. in Levit. — ? C^) l^iJ^ Hom, xx. BOSSUET. XI. 12 N 1^8 SUn LA VIGILANCE CHRÉTIENNE. Il ne faut pas dire à une mère qu'elle pense à son fils ; à une femme, à un mari qui lui est cher. Elle ne fatigue pas son cerveau pour rappeler cette pen- sée à sa mémoire; son cœur le fait assez ; et cette pensée ne la fatigue pas, mais la délecte et la soulage. Nox prœcessit, dies autem appropinquauit (0 : ^^^» Tune videbunt Filium hominis venientem in nube^ cum potestate magnâ et majestate. Mors ils verront venir le Fils de thomme sur une nuee^ avec une grande puissance et une grande majestés Luc. XXI. 27. jLiiKcoRE que dans le moment que notre ame sortira du corps elle doive être jugée eu dernier ressort , et laSaire de notre salut immuablement décidée ^ toutefois il a plu à Dieu que nonobstant ce premier arrêt , nous ayons encore à craindre un autre exa- men et une terrible révision de notre procès au (*) En 1669, c^est la date que porte le manuscrit. ](8o SUR LE lUGLElCElfT DERITIER. jugement dernier et universel. Car comme Tame a péché conjointement avec le corps y il est juste qu'elle soit .jugée aussi bien que . punie avec son complice , et que lé Fils de Dieu qui a pris la nature humaine toute entière , soumette aussi Thomme tout entier à l'autorité de son tribunal. C'est pour- quoi nous sommes tous ajournés après la résurrec- tion générale pour comparettre de nouveau devant ce tribunal redoutable ; afin que tous les pécheurs étant appelés et représentés en corps et en ame, c'est-à-dire dans l'intégrité ,d^ leur nature, ils reçoivent aussi la mesure entière et le comble de leur supplice. Et c'est ce qui. donne lieu à ce dernier |ugement qi;ii nous est proposé dans notre Evangile. Mais pourquoi ces grandes assises ^ pourquoi cette solennelle convocation et cette assemblée gé- nérale du genre humain ? Pourquoi , pensez-vous y Messieurs^ si ce n'est que ce dernier jour, qui est appelé dans, les saintes Lettres y « un jour d'obscun » rite et de nuage y vus jour de tourbillon et de » tempête y un jour de calamité et d'angoisse » , j est aussi appelé « un jour de confusion et d'igno- » minie (*) » ? Voici une vérité éternelle : il est juste et très-juste que celui quj fait mal soit couvert de honte ; que quiconque a trop osé soit confondu ; et que le pécheur soit déshonoré, non-seulement par les autres, mais par luî-méme, ç'est-àrd.îre par la rougeur de son front, par la çoi^fvision de ^a face, par le reproche public de S£^ conscience. Cependant nous voyons que ee$. péjcheurs , qui ont si bien mérité la honte, trouvent souvent le SUR £E JUGEMEirT' DERNIERi x8l liioyen de l'éviter en cette vie. Car ou ils cachent leurs crimes y ou ils les excusent^ ou enfin bien loin d'en rougir y ils les font éclater scandaleusement à la face du ciel et de la terre y et encore ils s'en glo* rifient. C'est ainsi qu'ils tâchent d'éviter la honte ^ les premiers par l'obscuriië de leurs âétioni^, le6 seconds par les artifices dé leurs excusëiSy et enfin les derniers par leur imjiudence. C'est pour cela que Dieu les appelle ail grand jout* de son jugement. Là ceux qui se sont caèhés^ seront d^bouvërts^ là ceux qui se sôtit el^cusés ^ seroîit convaincus ] là ceux qui étoient si^ fiers et isi insQléns dàds leurs crimes ^ seront abattus et atterté^ : et ainsi sera rendue à tous ces pécheurs > à ceux qui trompent lé monde y à ceux qui l'amusent par de vains prétextés , à ceux qui le scandalisent; ainsi, dis- je, leiir sera rendue à la face de tout le genre humain , des homme^ et des anges , l'éterneUe confusion , qui est leur juste salaire , leur naturel apanage qu'ils ont si bien mérité. PREMIER POINT C^). « L'iwsEifsÉ à dit en son cœur : Il n'y à point dé » Dieu » : Dixit insipiens ih corde siio : Non est Deus (0- Les saints docteuts nous enseigheiit que nous pouvons nous rendre coupables en plusieurs façons de cette erreur insensée. Il y a en preiiiief* lieu les athées et les libertins qui disent totlt èuVer- (*) Le commencemeni et la fin du premier poin.! de ce sermon , sont tirés presque mot pour mot de celui qui précède : nous avons cru devoir laisser Tun et Tautre tels qu^ils sont, pliuôt que de les morceler. Edit. de Versailles, (0 P#. LU. I. l8a StJK LE JUGEMENT DERSTIEK. tement que les choses vont à l'aventure , sans ordre, sans gouvernement y sans conduite supérieure. In- sensés, qui dans Fempire de Dieu, parmi ses ou- vrages, parmi ses bienfaits, osent dire qu'il n'est pas , et ravir l'être à celui par lequel subsiste toute la nature! Il y a peu de ces. monstres : le nombre en est petit parmi les hommes ; quoique , hélas ! nous pouvons dire avec tremblement qu'il n'en paroît toujours que trop dans le monde. Il y en a d'autres , dit le docte Théodoret(0, qui ne vont pas jusqu'à cet excès de nier la divinité; mais pressés et incommodés dans leurs. passions déréglées par ses / lois qui les contraignent, par ses menaces qui les :étonnent , par la crainte .de ses jugemens qui les trouble , ils désireroient que Dieu ne fût pas ; ils voudroient même le pouvoir croire ; ils voudroient pouvoir croire que Dieu n'est qu'un nom : et ik disent dans leur cœur , non par persuasion , mais par désir : Il n'y a pas de Dieu, (c Insensés, dit 5> saint Augustin (2) , qui , parce qu'ils sont déré- » glés , voudroient détruire la règle , et souhaitent :» qu'il n'y ait ni loi, ni justice, à cause qu'ils ne » sont pas justes ». Je. laisse encore ceux-ci; je veux croire qu'il n'y a aucun de mes auditeurs qui soit si dépravé et si corrompu. Je viens à upe troisième manière de dire que Dieu n'est pas, de laquelle vous avouerez que la plupart de mes auditeurs ne se peuvent pas excuser. Je veux parler de ceux qui en confessant que Dieu est , le comptent néanmoins tellement pour rien , qu'ils pensent en effet n avoir ^0 In Psalm. m. tom, i, p, 6o3. — (») Tract, xc. in Joan, «.3, tom. ni, col. 721. SVK LE JUGEMENT DERlflEll. l83 rien à craindre, quand. ils n'ont que lui poùi: té- moin. Ceux-là. manifestement comptent Dieu pour . rien ; et ils disent donc en leur cœnr : Il n y a point de Dieu. * Eh! qui de nous n'est pats de ce nombre? Qui de nous n est pas arrêté dans une action malhonnête par la rencontre d'un homme qui n'est pas de notre cabale ? et cependant ^e quel front savons - nous soutenir le regard de Dieu? N'apportons pas ici l'exemple de ceux qui roulent en leur esprit quelque noir dessein; tout ce qu'ils rencontrent les trouble ^ et la lumière du )oùr et leur ombre même leur fait peur ; ils ont peine à porter eux-mêmes l'hoti^eur de leur funeste secret ^ et ils vivent cependant dans une souveraine tranquillité des regards de Dieu. Laissons ces tragiques attentats^ disons ce qui se voit tons les jours. Quand vous déchirez en secret celui que vous caressez en public; quand vous le percez incessamment de cent plaies ^ par. les coups mortels de votre dangereuse langue ; quand vous mêlez artifieieûsement le vrai et le faux pour donner de la vraisemblance à vos histoires malicieuses; quand vous violez le sacré dépôt du secret qu'un ami trop . simple a versé tout entier dâtis votre cœur , et. qiie. vous faites servir à vos intérêts sa confiance ^ qui vous ^obligeait à penser aux siens ; combien de: ptécautions pour : ne^ point: paroître / combien regardez-vii^S:.à. droite et à gauche ? Et si vous ne voyez pas de témoin qui yous puisse reprocher dans le monde votre lâcheté , si vous avez tendu voâ piégea si subtilamènt. qu'ils soient imper-*^ ceptibles aux regards humains , vpus . dites ; Qui l84 3UII LB JUGEHEUT PE&NIEA» nous a yvLsl Narrayerunt m absconderent Uufueos, diocerunt : Quù "videbit fios (0 ? « Ils ont consulté » eosejpble sur les moyens de cacher leurs pièges^ » et ils ont dit : Qui pourra les découvrir ?j ? Vous ne comprenez donc pas parmi les voyabs celui qui habite au ciel?. Et cependant entendes le même P^almiste. « Quoi! celiJÎ quia formé roteille, n'é-* nè coute-t-il pas ^ et celui (|ui a fait les yeUx est-il 9» aveugle >^ 1 Qui plantauit wtrem non aadiet^ ont quifinxit oculum non considérât (?) ? Au oontraii^e |xe savet^votts pas quil est tout vue, tout ouîe^ tout intelligence 7 que vos pensées lui parlent^ que votre cœur lui dit tout , que votre conscience est sa surveillante et son témoin contre vous ? Et cepen- dant sous ces yeux si vifs et sous ces regards si per-*- çaiiSy vous jouissez sads inquiétude dii plaisir d'être caché ? N'est-ce pas le compter pour rien, et a dire u en son cœur ini^kiséy II n'y a point de Dieu » ? JDixit insipiens. in corda suo : Non est Deus. , Il n'est pas juste^ Messieurs^ que les pécheurs se sauvent toujours, à la faveur des ténèbres^ .dé la ^onte qui leur est dué. JMon , non , que ces. femmes infidèles et que œa hommes, corrompus' se couvrent, s'ils peuvent , de toutes les ombres dé la nuit , et enveloppent leurs actions déshonnétes dans l'obscu-^ rite d'une intrigue impénétrable; si faut-il que Dieu les découvre un jour et qu'ils l)oivent la confusion^ car ils en sont digues* C'jest pourquoi il a destiné ce dernier )oùr ce qui percera les ténèbres les plus » épaisses, et manifestera, comme dit Tapôtre , les )» conseils les plus cachés » ; Qui et illuminabil <0 P^. WIU..4*— WA^3^cm.9^ : ^ $U)L LB JVGEMEUT DEHKIEK. l85 ttiscondita tenebrarum , et rnanifestabit consilia cordium M. Alors quel sera Tétàt des grands du inonde qui ont toujours vu sur la terre et leui^ sentimens applaudis et leurs viœs mêmes adorés ? Que deviendront ces iiommes délicats , qui ne peuvent supporter qu'on connoisse leurs défauts , qui s'inquiètent , qui s'embarrassent , qui se décon* certent quand. on leur découvre leur fdible? Alors ^ dit le prophète Isaïe ^ « les bras leur tomberont de a> foiblesse » : Omnes manus dissolventur ; « leur » cœur angoissé défandra »,: omne cor hominis contabescet : « un chacun sera confus d^ant son » prochain » : unusqimque stupebit ctd proximum suum (^) ; « les pécheurs mêmes se feront honte » mutuellement^ leurs visages seront etiflammés a t faciès ûombustœ vulias eoruni (^) ; tant leur face sera toute teinte et toute couverte de la rougeur de la hoate. O ténèbres trop courtes ! ô intrigues mal tissues ! ô regaixl de Dieu trop perçant et trop in* justement méprisé ! ô vices mal cachés I ô honte mal évitée ! Mais de tous les pécheurs qui se cadieht^ aucuns ne seront découverts avec plus de honte que les faux dévots et les hypocrites. Ce sont ceux- ci , Messieurs, qui sont des plus pernicieux ennemis dô Dieu y ^ui combattent contre lui sous ses étendards. Nul ne ravilit davantage l'honneur de la piété, que l'hypocrite qui la fait servir d'enveloppe et de cou- verture à sa malice. Nul ne viole la sainte majesté de Dieu d'une manière plus àacrilége que l'hypo*- (") /. tor.iv. 5.— W/mi. xui. 7 et 8. — {^) Ézech. x^ti. Sa; l88 SUR LX: IVeEuÉNT lyERKIGR^ qu'ils intriguent y qu'ils mêlent le ciel et la terre pour se cacher dans la confusion de toutes choses ; ils seront découverte au jour arrêté, leur cause sera portée aux grandes assises générales de Dieu, où comme leur découverte ne pourra être empêchée jpar aucune adresse, aussi leur conviction ne pourra être éludée par aucune excuse. C'est ma seconde partie , que je joindrai pour abréger avec la troi* sième dans une même suite de raisonnement. SECOND POINT. Le gi«and pape sûint Grégoire , dans la troisiènie partie de son Pastoral , compare les pécheurs à des hérissons. Lorsque vous êtes éloigné^ dit41^ de cet Animal , et qu'il nei craint pas d'être pris , Vous Voyez sa tête, ses piedis et son corps; quand vous sapprochez pour le prendre, vous ne trouvez plus Qu'une masse tonde qui pique de tous côtés, et celui que VOU& découvriez de loin tout entier, vous le |>erdez tout à coup aussitôt que vous le tenez entre Vos mains s Intra tenenlis manus iotum simul amiu iàur-j quôd iotum simUl ante mdebatur (0. C'est Timage, dit saint Grégoire^ de l'homme pécheur qui s^enveloppe datis ses raisons et dans ses excuses. iVous avez découvert toutes ses menées et reconnu distinctement tout l'ordre du crime ; vous en voyez les pieds , lé corps ^t la tête. Aussitôt que vous jpensez le convaincre en lui racontant ce détail ; il retire ses pieds, il couvre tous les vestiges de son entreprise ; il cache sa tête , il recèle profondément ses desseins; il enveloppe son corps, c'est-à-dire (i) S. Greg. Hfagn, Pastor. part, m, cap. xi, tàm, ii, coi. 4S., SUR LE XUCEMEKT DERNIER. 189 toute la suite de son iatrigoe dans le tissu artificieux d'une histoire faite à plaisir. Ce que vous pensiez avoir vin si distinctement , n'est plus qu'une niasse informe et confuse, oii il ne palroit ni commence-»' ment ni fin; et cette yërité si bien démêlée est tout à coup disparue : Quitotumjamdeprehendendô ^vide* rat, tergii^rsatione prava^ defensiùnis iltusus^ totutn pariter ignorât (0. Cet homme que vous icroyiei si bien convaincu , étant ainsi retranché et enveloppé en lui-même , ne vous présenté plus que des pi- quans; il s'arme à son tour contre vous, et vous ne pouvez plus le toucher sans que votre main s&it ensanglantée > je veux dire san$ que votre honneur soit blessé par mille sànglàns reproches contre votre injurieuse crédulité et contre vos soupçons témé«- raires; C'est ainsi que font les pécheurs : ils se cachent ^ s'ils peuvent , comme fit Adam ; et s'ils ne peuvent pas se cacher non plus que lui, ils ne laissent pas toutefois de s'excuser à son exemple. Adam , le pre- mier de tous les pécheurs , aussitôt après son péché s'enfonce dans le plus épais de la forêt , et voudroit pouvoir cacher et lui et son mme. Quand il se voit découvert, il a recours aux excuses. Ses enfans, malheureux héritiers de son crime , le sont aussi de ses vains prétextes. Ils disent tout ce qu'ils peuvent ; et quand ils ne peuvent rien dire, ils rejettent toute leur faute sur la fragilité de la nature, sur la vio-i^ lence de la passion, sur la tyrannie de l'habitude. Ainsi on n'a plus besoin de se tourmenter à cher- chep des excuses , le péché s'en sert à lui-même et {}) S* Greg. Magn. Pastor. ubi suprà. 190 SUR LE JUGEMENT DERNIER. prétend se justifier par SQn propre eiQcès. Mais quand aurai-je achevé , si je me laisse engager à ce détail infini des excuses particulières? Il suffit de dire en général ; Tous s'excusent , tous se dé- fendent ; ils le font en partie par crainte , en partie aussi par orgueil , et en partie par artifice. Ils se trompent quelquefois eux-mêmes, et ils tâchent après de tromperies autres. Quelquefois convaincus en leur conscience de Finjustice de leurs actions , ils veulent seulement amuser le monde par des raisons colorées; puis 5e laissant emporter eux-mêmes à leurs belles inventions , en. les débitant ils se les impriment dans l'esprit , et adorent le vain fantôme qu'ils ont supposé pour tromper le monde, en la place de la vérité;. tant Thomme se joue soi-même, et sa propre conscience : jideo nostram quogue, conscientiam ludimus, dit le grave TertuUienCO. Dieu est lumière ,.Dieu est vérité, Dieu est justice. Sous Tempire de Dieu, ce ne sera jam^ par de faux prétextes, mais par pne humble reconnois* sance de ses péchés , qu'on évitera la honte éter- nelle qui en est le juste salaire. Tout sera manifesté devant le tribunal de Jésus -Christ. Une lumière très-claire de justice et de vérité sortira du trône , dans laquelle les péclieurs verront qu'il n'y a point d'excuse valable pour colorer leur rébellion ; mais que le comble du crime , c'est l'audace de l'excuser et la présomption de le défendre. Car il faut. Messieurs, remarquer ici une doc- trine importante : c'est qu'au lieu que dans cette vie notre raison vacillante se met souvent du parti sua LE JUGEMENT DEHNIER. 19I de notre cœur dépravé; dans les malheureux ré- prouvés il y aura une éternelle contrariété entre leur esprit et leur cœur. L*amour de la vérité et de la justice sera éteint pour jamais dans la volonté de ces n^isérables; et toutefois à leur honte, tou- jours la connoissance en sera très*claire dans leur esprit. C'est ce qui fait dire à TertuUien cette pa- role mémorable dans le livre du Témoignage de Tame : Meritb omnis anima et rea et testis est (0 : €c Toute ame pécheresse, dit ce grand homme , est 31 tout ensemble et la criminelle et le témoin ». Cri- minelle par la corruption de sa volonté, témoin par la lumière de sa raison : criminelle par la haine de la justice , témoin par la connoissance certaine de ses lois sacrées : criminelle, parce qu'elle est toujours obstinée au mal; témoin, parce qu'elle condamne toujours son obstination. Effroyable con- trariété et supplice insupportable! C'est donc cette connoissance de la vérité qui sera la source immor- telle d'une confusion infinie. C'est ce qui fait dire au prophète : Alii ei^igilabunt in opprobrium ut videant semper (?) : « Plusieurs s'éveilleront à leur » honte pour voir toujours ». Ceux qui s'étoient appuyés sur des conseils accommodans et sur des condescendances flatteuses , qui pensoient avoir échappé la honte , et s'étoient endormis dans leurs péchés à l'abri de leurs excuses vainement plausi- bles, « s'éveilleront tout à coup à leur honte pour » voir toujours » : Evisilabunt ut videant semper. Et qu'est-ce qu'ils verront toujours ? Cette vérité qui les confond, cette vérité qui les juge. Alors ils rougiront 0) De Te^timon. Anim* subfin y n.d.^— (>) Daniel, xii. a« 193 SUR LE JUGEMENT DERNlEII* doublement et de leurs crimes et de leurs excuser. La forcé de la vérité manifeste renversera leurs foibles défenses ; et leur ôtant à jamais tous les vains prétextes^ dont ils avotent pensé pallier leurs crimes , eÙ^ ûe- leur laissera que leur péché et leur honte. Dieu s'en' glorifie en ces mots par la bouche de Jérémie : Dis^' oQapenU Esau; j'ai dépouillé le pëdieur^ j'ai dissipé^ les fausses couleurs par lesquelles il avoit voulu pal- lier ses crimes; j'ai manifesté ses mauvais desseins si subtilement déguisés^ et il ne peut plus se couvrir par aucun prétexte : Discooperid Esauj res^elavi abscondita ejus, eteelari non poterit (<}. Mais réveillez vos attentions pour entendi*e ce> qui servira davantage à la conviction et à la con- fusion des impies : les justes qu'on leur produira/ les gens de bien qui leur seront confrontés. C'est ici que ces péchés trop communs, hélas! trop aisé* ment commis, trop promptement es^^cusés; péchés qui précipitent tant d'ames et qui causent dans lé' genre humain des ruines si épouvantables ; péchés qu'on se pardonne toujours si facilement, et qu'on' croit avoir assez excusés , quand on les appelle pé* chés de fragilité ; ah ! ces péchés désormais ne troU' veront plus aucune défense. Car il y aura le trou^ peau d'élite , petit à la vérité à comparaison des impies, grand néanmoins et nombreux en soi, dans* lequel il paroîtra des âmes fidèles, qui dans la même chair et dans les mêmes tentations ont néanmoins conservé sans taché , ceux4à la fleur sacrée de lâ pureté , et ceux-ci l'honnêteté du lit nuptial. D'au- tres aussi vous seront produits. Ceux -là' sont à la (>) Jerem* xliz. 10. vérité «tTR t& jrUGCMENT ]>E11NIER. tgS vérité jfcombës par faiblesse^, mais s*étant aiissi rele- vés, ils porti^ront contre vous ce témoignage fidèle, que «Milgrë la fFagilité ils ont toiqours triom|^hé autant de fois iju'ils o&t voulu combattre; et, comme dit Julien Pomère^ k ils monrtreront par ce 9 qu'ils ont fait ioe que vous ^pouvîét £iire à leut ^ exismple ausâi bien nvoitoit contre l'esprit; vous aviez un esprit qui nvoitoit contre la chair. Vous aviez dés maladies; vous aivtez aussi des raoïèdes dans les sajonemen^. Vous aviez un tetitateur ; maià yùus a^iett «n Sauveur. Les tentations létoient fré- quentes ; les 'inspirations ne T^totetit pas moins. Les objets étoieht toujours présens; et la grâce ^toit to«j0uris ^prét«$ et vous poieiviez du inoins fuir ce que votts ne pouviez pas vaiiycre. Êfiffin , E:Riri,Eit. flagrant délit : çuomodo confunditur fur ^ fftuzndo deprehenditur (0 : « Comme un voleur est confus » quaiid il est surpris dans son vol ». Il ne peut pas nier le fait , il ne peut pas Texcuser; il ne. peut ni se défendre par la raison^ ni s'échapper par la fuite. « Ainsi, dit le saint Prophète, seront étonnés, con- » fus, interdits, les ingrats enfans d'Israël » : Sic confusi sunt domus Israël. Nul n'échappera cette honte. Car écoutez le prophète : Tous, dit-il, seront confus, qui avec la face et le front d'un femme débauchée , osent, je ne dis {ilus excuser^ mais encore soutenir leurs crimes. Us ne trouveroient 'pas ass^ d'agrément dans leur intempérance, s-ils itê s'ett vanrtoielit pu- bliquemiênt ^ '^ à'iis ne la fàisoiéiit jouiir , dit 'ï^èrtnl- » liep , de toiïtè la lumière du fouï» et de tout le » témoignage dû dêl ^i : DèKctA ifèstt^ et lôco omni et luce ùÈ^)fU et unii^èrsd cœK cànsdientîâjhiunûiri}). ft Ils annoncent leurs péchés comme Sodomë » , disoit un prophète : Pecfcatum suum sicm S&èoma prœcUcwerunt (^) ^ et ik mettent une partie ide leur grandeur dans leur licence effrénée, il me souvient en ce lieu de ce beau mot de Tacite > ^i pariaqt dés excès de Doknitieh api^ qiïè soii pèk^ fttt par- venu à Tempire, dit que « ^àils ^ W&lkt à là côhsciende dé^ hô^n^es. Dé tels pé^eut^s scan- daleux coîT^mpet^t les bonnet •àwferàrs par leurs CO Aàiiat. Ub. I. /i. 16. — C») Isai, m. 9. ^ (3) TacU.HUt. L iv. ^UR LE JUGEMENT DERlflElU I97 per&icî^uxexemple^. Ils déshonprpnt la terre , et çhargspt ^Ç repfochps, ^\ '\e ÏQ$e dire^ le^ pa}:teQce; 4n e^el, qi|i )e& ^p^ffre trop lpj^g-^temp$. Mab Qifsu sauta t^n ^e )u^t{ûer fl'i^ia^ manière terrUi]^^ ^^ peukré^re dèsi cette vie^, par Mapl^itjinei^texepi^pllaire. Que si Diefl. durant cette vje ^es^ i^jLtçud à pénitence ,^ si manque d*écout^r sa voif ils ne rei^dpi^t dignes qu'il les réserve à son dpmier jugement ^ ils y boi- rop^ pon-seulemei^t; 1/s t^^j^uys^ge de ho^te éternelle qui est préparé à tous Ipst ppcheur^ y m^i$ encore « ils avalprqrnl; , (jrjt Ezéçhiel, la CQiq)e large et 9 profqnde ç^e déri§ioj> et (^e mpqupriey et ils seront y accat^le^ p^r le§ iij^i^ltes saQglante^ de tqutes les. » cré^ti^p^ f». : Çajic^.\oforis ÇM^V2i ; ep^ m ^ppis^i^rp, çL ifi suisqrwatiofiem > fu^e^t ççfiaçi^s^uf^i^). 'fe^ sjgrft le juiste supplice de leur iaipuft^ persH^ons pa§ qi?^e n.ous receyroi^S seukpaent à ce trf^]Liç^][ nue çpnfuçipn, pass^gjèfej ^ çon^rair.e n.ojt^ d^vop^ ent^eR^j^e , dit saint GfFé^fre 4e Na^i^n^ç^ qjjiç gar l^ YSfi^e^- muable de ce dernier jiigeqi^Qt ^ Çjeii imprimera' sur noç fronts ^ wiiç pfutrqùej éteri?,elle d'ignominie » : Notam ignpminfcfs ^cmp^fçr^^S^^)* ïjt, ajoute saint Jean Çiu-ysostôqie^ içettfe ^pçte sera j^uç terrible que tofus l^s aij^tres supplice^. Car c eçt p;^r elle ^ mes Frères, qijje le pécheur, c^ia^gf ^ ^ ci ijnçs. et pour- (0 Ezech. xxin: 3a. — (») Orar, xv, toi». ï , j^a^ a3o. C>8t dans la oonsci^ce mâdie, W Ty>««ni/&r», qud saintifirigo^r^ ye^l ^q Aoit imprimée cette note d^une éternelle ignominie. Edit de DéforU, / 198 SUR LE JUGEMEIÏT DE&NIEH: suivi sans relâche par sa conscience, ne pourra se souffrir soi-même; et il cherchera le néant , et il ne lui sera pas donné. O mes Frères, que la teinture de cette honte , si je puis parler de la sorte , sera inhé^ rente alors! O qu'il nous est aisé maintenant de nous en laver pour jamais ! Allons rougir , mes Frères, dans le tribunal de là pénitence. Hé! ne désirons pas qu'on y plaigne toujours notre foi* blesse. Qu'on la blâme, qu*on la réprenne, qu'on la réprime, qu'on la châtie. Le temps est court, dit l'apôtre (*), et l'heure n'est pas éloignée. Je ne dis pas celle du grand ju- gement ; car le Père s*est réservé ce secret ; mais je dis l'heure de la mort, en laquelle sera fixé notre état. En tel état que nous serons morts, en cet état immuable nous serons représentés au grand jour de Dieu. O quel renversement en ce jour ! O com- bien descendront des hautes places ! O combien chercheront leurs anciens titres", regretteront vai- nement leur grandeur perdue ! O quelle peine de' s'accoutumer à cette bassesse \ Fasse le Dieu que' f adore que tant de grandis qui m'écoutent, ne per- dent pas leur rang en ce jour? Que cet auguâte Monarque ne voie jamais tom- ber sa couronne : qu'il soit auprès de saint Louis^ qui lui tend les bras et qui lui montre sa place. O' Dieu! que cette place ne soît point vacante! Que celui-là soit haï de Dieu et des hommes qui ne sou- haite pas sa gloire,, même sur la terre,, et qui ne veut pas la procurer de toutes ses forces par ses- (0/. Cbr.vxi. ag. suit LB JUGEftfEIfT DERNIER. I99 fidèles sei^vices. Dieu sait sur ce sujet les vœux de mon cœur. Mais, Sire, je trahis votre Majesté et je lui suis infidèle , si je borne mes souhaits pour vous dans cette vie périssable. Vivez donc heureux , for- tuné, victorieux de vos ennemis, père de vos peu- ples. Mais vivez toujours bon et toujours juste ; vivez toujours humble et toujours pieux , toujours prêt à rendre compte à Dieu de cette noble partie du genre humain qu'il vous a commise. Cest par- là que nous vous verrons toujours Roi , toujours auguste, toujours couronné, et dans la terre et au ciel ; et c'est la félicité que je souhaite à votre Ma- jesté, au nom du Père, et du Fils^ et du Saint- Esprit. Amen^ ^OO EXOfiDB ï;xorde D'UN AUTRE SERMON POVK liE MÊME DIMANCHE. Gloii* qui doit taim* ks-' hémiliatioiM wlMitMrM au. Sravéi» *^^^%^^^mM^i^m^m^^ Tune vîdebunt Filium. hominis venieatçm in nul>e, <:unk potestate magnâ et majestate. Alors ils verront le Fils de l'homme venir sur une nuée, avec une grande puissance et une grande gloire. Luc. XXI. 27. Il y a cette différence , parmi beaucoup d'autres , entre la gloire de Jésus- Christ et celle des grands du monde y que la bassesse étant en ceux-ci du fond même de la nature , et la gloire accidentelle et comme empruntée, leur élévation est suivie d'une chute inévitable et qui n'a point de retour : au lieu qu en la personne du Fils de Dieu, comme la gran- deur est essentielle et la bassesse empruntée, ses chutes qui sont volontaires , sont suivies d'un état de gloire certain et d'une élévation toujours perma- nente. Ecoutez comme parie l'Histoire ^iute de ce grand roi de Macédoine ^ dont le nom même semble respirer les victoires et les triomphes. En ce temps, Alexandre y fils de Philippe , défit des armées près- SUR LES HUMILIATIO|7S DE J.-C. 90I que invincibles > prit des fontereBseç. imprenables ^ triompha des rqis, i^ubjugH^ |e^ peuples,, et toute la terre se tut devant ^ tao^^ laiftie d'abonnement et de frayeur (0. Qi^ ce conmir^noèttent e^t sutperbe y auguste! çoais v^yes^ la CPQQlusiaii*i£t. après cela ^ poui^uit le te^ta dfe V^isiârîea sacré> U: tomba inan lade^ et se senût( défaillir, et il vit ^a mort assurée^ et il partagea se^S^tdits que lamoirfc lui aUoit i»avir^ Qt ayanjt végné dçu^e a)^ il mo^utut Crest ^ 4^€À aboutit toutç Qett^ gloine : Mi se .-tecmlne f histoire du grfuid A4^^^nÂre.. L^hkftcûre ide J^s-£hrist ne commence pas à la v^ité d)'an«* inanière , si pom*^ peuse; mais elle i>e &)it f^s aussi par^cette. jfttfges^ saire décadence. Il est vrai qu il y a des chutes. Il est comme tombé du sein de son Père dans celui d'une femme mortelle^ de là dans une étable, et de là encore par divers degrés de bassesse jusqu'à Finfa- mie de la croix , jusqu'à Tobscurité du tombeau. J'avoue qu'on ne pouvoit pas tomber plus bas : aussi n'est-ce pas là le terme où il aboutit; mais celui d'où il commence à se relever. Il ressuscite , il monte aux cieux , il y entre en possession de sa gloire ; et afin que cette gloire qu'il y possède soit déclarée à tout l'univers , il en viendra un jour en grande puissance juger les vivans et les morts. C'est cette suite mystérieuse des bassesses et des grandeurs de Jésus- Christ , que l'Eglise a dessein de nous faire aujourdhui remarquer, lorsque dans ce temps consacré à sa première venue dans Tinfir- mité de notre chair, elle nous fait lire d'abord (0 /. Machab. i. â04 SUA L$:^ FOffDEMEIVS^ sa face ; parce que toujours instruite par le Saint- Esprit et très-sa^ftfîte en- ses voies, elle sait qu'il veut ébranler les âmes avant que de les rassurer, et donner dje',1^ terrf^r avant q^e. cf inspirer de lamour. Entrons, chrétiens ^j dans ses conduites : regar- dons Jésus-Christ comme juge avant que de le re- garder comme Sauveur. yoyons4e descendre dans les nuées du ciel avec cette majesté redoutable, avant que de contempler ççtte ^oi^çeuf^ ces çqndesr c^ftdftnoep^ c^ ^epfireases ipfini^% pQ**r 1^ genre hu- main, qui nouS'péFoitisonthittBtÀtclftB^ sa sainte et bienheureuse naissance. Que si vous penses peut^-éu^ que le jugement a deux parties , et que si les méchans y sont condam- nés au feu- éternel, lett^bonsiwisBi'y son# recueillis dan§, m^ ^'ternelrepos, écoutez ce qu^ dit Jé^usr Christ lui-même. « Celui qui croit ^..djt-il, o^ sera » point jugé (0 » : il ne dit pas qu il ne sera point ÇPH^ftnafié:, ;n^^^ flijiyi iie s^f^ RRiftt> j^g^' i a% fp^ nquf ^p^ft4^pn^, qf^^.c^ .qil'i?, v^^^fi^^pc^M^.f^M'f oonJh pr,eî^rç).p;:fftcin9lçpient dftus Iç jage«fte»t 4eWtfr# ÇS?feS%.J?«SP^FiW»^)^^l«? e^ pet^î, t^p'i|f)l« exécur ,, Quj^iipLç, do^x^jçK^:, çbf^t^ep$, !4^s P^rolçs asse* efficaces pour péne^rç|:.ypj;i:e iffl^^rjfîÇ perx^er yo§ cï^aiifs^4ç la,cp^i^;e,fî^,x^î jjigeHiç9jt?..0 Seigneur, parlez vpp^p^çmç;jianp:çç^ç(^^ sieul ave* drjoib fl[y paçler^ et jaif^i^ on n'y ^oâji; entendre que votre parole. Mais,. me^ Frères,^ dans cette action où. (0 Joan. III. 1$. ■ DE LA. VEKGEAÀGE bï'VIIfE. ao5 fl s'agit de represettter 'ce qiie Diéû fera de plus grand et déplus terrible y jB m'a^tMiiis plus (|ùef jamais à le faire porter t^ut lâèùl par sôil Ëbriture. Plaise à son sàinlt eft divib Ks^^t de ^\ier aùidedâTis des cœms> pendant tpie ]é pàrlierai [ au3c ot*eilles du corps]. C'est la grâce que fè Ihî demandé par^ eta Quûfd si neù sio ^oluëritis dis&ipliliafnj sed am*^ huhi^eri^ èx adi^rsù mîhi^ )sgè fuùtfuà eàntra vos adversùs é^cfiedmn 'et perciâiàm asos septies propter peccata vùstra»..,.» Et égo iricèdatn, contt*a ^os in furore contrario Et conteram super biam duritiœ vestrœi..... 'Et aifôminkxbitur v&s mirha mea W : < Que û étant avertis^ vous nie voulez pas encore » vous /soumettre à ia diseîpiiae , mais ^ne vous « mard»iez directemekit contre moi y }e marcbei^ai » aassi directemefiit cÀntk-e v je vous frapperai » sejpt fois^ c'est-k-dire '^ns fin \at ^ns tiombre pour » vos péchés , et ]e bti^rai vétre l^tpèiiie et in- »» domptable dnrèté », fet mon amè Vèus aura en » exécratiom ». { Lé tex'te dii ©feuWhynoitte ] est pbs ÊO^rt y mais nôh iheins lèrdfe^l^ > SicUt îéetatas m fDoftHnks ^hè ^îMs fckAétÈs ^os^ Hùatipli^ ecm^ sic téeiabUur ^b<^èr^fi^ d^ûe (éUsperdens (2) x « €omtti*e le SôigtteWr s'^est réjta^i èfh Votis acùrois- » saint et en vàii& Hàfeàntâu bien^ ûififsi il ise réjo^iï^a » en vous ravagéfàM- et kVk v^é^^'i^H^ëtsakil <ée fot\à » en comble »• Mais voici une troisième menace qui met le comhié àtii toâûîs dés pécheurs : Eb quod non servieris Domino^ Deo tuo in gaudio cor- disijue ïœtxUdpr-ppter rerum omnium ahunàantiam , servies inimico tuo quem immittet tihi Dominus , in W Lev. XXVI. 23, as, 29, 3o. — i«) Deùi. xisviii. 63, ao6 sua les foicdeueits famé, et siti, et nuditate, et omni penurid; et po^ net jugum Jerreum super cervicem tuam donec te conierat (0 : « Puisque vous n'avez pas voulu ser- » vir le Seigneur votre Dieu dans la joie et l'allé* » gresse de votre cœur au milieu de l'abondance de » toute sorte de biens ^ vous servirez à votre ennemi 3» que le Seigneur enverra contre vous, dans la » faim y dans la soif, dans la nudité, et dans une » extrême disette ; et cet ennemi cruel mettra sur » vos épaules un joug de fer par lequel vous serez » brisés »• [ Je veux ] suivre l'Ecriture de mot à mot et de parole à parole : il ne faut point que l'homme parle , et je ne veux pas ici contrefaire la voix de Dieu ni imiter le tonnerre. Pour joindre ces trois passages, [ réunissons ] trois caractères. Dans le premier, la puissance méprisée'; dans le second, la bonté aigrie par l'ingratitude ; dans le troisième, la majesté et la souveraineté violées : et voici en trois mots les trois fondemens de la vengeance divine que le Saint-Esprit veut nous faire entenc^e. Vous vous êtes soulevés contre la puissance infinie, elle vous accablera. Vous avez méprisé la bonté, vous éprou* verez les rigueurs. Vous n'avez pas voulu vivre sous un empire doux et légitime , vous serez assujettis à une dure et. insupportable tyrannie. PREMIER POINT. Mais pour procéder avec ordre dans l'explication des paroles que j'ai rapportées , il les faut consi- (>) Deut. xxYiii. 47» 4^* DE LÀ VENGEANCE DIVINE. ^07 dérev dans leur suite. Voici la première qui se pré- sente : Quod si nec sic vohieritis disciplinam ; « Que » si vous ne voulez pas vous soumettre à la disci- M pline »• Il leur met devant les yeux avant toutes choses la liberté du choix y qui leur est donnée ; parce que c^est cette liberté qui nous rend coupa- bles , et dont le mauvais usage donne une prise ter- rible sur nous à la justice divine. Pour entendre cette vérité, il faut savoir que Dieu y qui est par nature notre souverain, a voulu Tétre aussi par notre choix. Il a cru qu'il manque- roit quelque chose à la gloire de son empire, s'il n'avoit des sujets volontaires ; et c'est pourquoi il a fait les créatures raisonnables et intelligentes, qui étant déjà à lui par leur naissance, fussent capables encore de s'engager à lui obéir par leur volonté, et de se soumettre à son empire par un consente- ment exprès. Cette vérité importante nous est ma-^ gnifiquement exprimée dans le livre de Josué , où. nous voyons que ce fidèle serviteur de Dieu ayant assemblé le peuple, leur dit ces paroles : « Si vous » n'êtes pas contens de servir le Seigneur, l'option » vous est déférée » : Optio vobis datur : ce choisissez 21 aujourd'hui ce qu'il vous plaira, à quel maître » vous voulez sei^ir, et déterminez à qui vous avea^ » résolu de vous soumettre » : Eligite hodie çuod placetj oui potissimum seryfire debeati${^)^ Et tout le peuple répondit : « A Dieu ne plaise que nous » quittions le Seigneur 3 au contraire nous voulons » le servir, parce que c'est lui en e0et qui est notre » Dieu ». Josué ne se contente pas de cette pre- (0/oj. XXIT. i5. 3o8 âvn LE$ tofCùEMtva mière oôcep(latiaa> et reprenant la parole, il dit au Jpeuple : Prenez 'garde à quoi vous vous engagez ; ce vous ne paiïTrefc servir \e Seigneur, ni subsister V devant sa faoe ; parce ^e Dieu est fort , saint et M jatoux, et il ne pardonnera pas vos crimes et vos » pécbës » ^ Abrt poteritis sefvirc Ùontino : Deus ^rUm sandèus'etfertèf wnuilaîor éiH (^>. t!t le peuple répartit : ce Non, A Ue sc^a pas toiïinie vous le dite^, )) Mais 'Allais serviront le Séig^^r et demeurerons i) ses saf)6ts ». Alors Josué leur dit : ce Vous êtes donc ?» aujourd'hui -tënioins qM Vèus ckoisisset vou^* » mé^ês le Seigneur pour être voh-e Dieu et le ^ servir : Oui , ifious^e isoifi^mes témoinis W ». Si j'entreprenois de raconter tout ce qui est à rc* marqua imr'ces paroles, [ il faudrait un ] discours entier : mais [ je me 'restreins à ] ce qui importe à mo* sttjet. Vous ^ugex bien. Messieurs, que Dieu en Uôu^ kiisisant i'eiption ive i^enonce pas au droit ^ui lui e^t acquis, tl i^e prétend pas tious décharger de Tobligatiàn primilive que niçois aVûtis d'être à lui, ni tious défei'er teliement lé yihoilc, que nous puissions sahs ît évolte et sahs injustice ticus sous* fraii'e^ ^ùti étè^tte. Mïiis il VéUt^e nous soyxynSj aussi voloi^t^iï'eDlfènt à tui <|ue uduis y irommes déjà de diSôSt ùavtfrfel, et que woiis ëonfirmions par uû iîliôix expies «être dépendance nécessaire et inéti- tabïè. Potéi^quoi lé vetfb^l «itisi ? Pcmr notre perfec- ^ et pbâfr «fèiti^ gloitle. Celui à tfA Uôiks ^devons tt^ , Xrééït pëù^h" ^ous «aVôir jgré ^ Quelque ôhoBë : il v^ut noWs *d)i^cV^.>2a. * ' obéissance DE LÀ TBH<>EAKCE SITIKE. 209 obékfiance ^ nous lui dounous un titre pour ex^er des supplices. J^entendsici les pécheurs qui disent secrètement dans leurs cœurs, qu'ils se passeroient aisënient de cette liberté malheureuse qui les expose au péché et ensuite à la damnation. Je suis ici pour exposer les vérités éternelles > et non peur répondis à tous les murmures de ceux qui s'âèvent contre ces ora-^ des ; et toutefois je dirai ce mot : O homme, qui que tu sois, qui te fâches de nêtre pas une béte brute, à qui la lumière de ta raison et Thonneiir de is^ liberté est à charge, cesse de te plaindre de tes avantages , et d'accuser témérairement ton bienfai-- teur. Si tu étois indépendant par nature, et que Dieu néanmoins exigeât de toi que tu te rendisses dépendant par ta volonté, peut-^tre aurois-tu rai^ son de trouver ou l'obligation importune, ou la de- mande incivile. Mais puisque l'usage qu'il prétend de ta liberté, c'est [ de travaillei: à ton bonheur en t'assujettissant à son empire ] , ce qu'il exige est trop aisé, trop naturel et trop juste. On peut sans graa'd effort se donner à qui on est. Ce seroit peut-être quelque violence, s'il falloit sortir de notre état. et. nous tran^pprter à up domaine étranger. J[l ne s'agit que d'y demeurer et .d'y consentir. Enfin quand Dieu exige. que nous consentions à être sçs sujets^ il veut que ];lous consentions à. être, ce que nous sommes, et que .nous accommodions notte volonté au fond même de notre essence. Rien n'est. plus na^. turel, rien^p'est moins pénible, k moiçjs qiie la volonté ne soit entièrement dépravée. Aussi faut-il avouer qu'elle Test étrangement dans BOSSUET. XI. i4 ^10 Sun LSS FOlTDBXEirS tous les. pécheurs. Cardes qu'ils ne veulent. pas cUF* pendre de Dieu ^ ils ne veulent donc plus être ce qu'ds sont. I]is> combattent en eux-mêmes les pre- miers principes et le fondement de leur être» Ils corrompent leur propre droiture, ils ise rendent contraires .à Dieu, et ÏÂea par comé({uent leur de-^ vient contraire. Ils sont soumis à Dieu comme |uge. Il les \uige f pairoe qu il connott ce déri^lement. II ks hait y parce que les règles de sa ^évibé répugnent à leur in)iBtsce. Rien y distntrils, n'est contraire à Dieu, rien ne lui répugne , riea ne Toffen^e , parce que rien ne lui nuit ni ne le trouble. Dites donc qu'il ne se fait rien au monde contre Ut rai^n : poussez fusque -là rextravagance de votre sens dépravé. Yoîre bien vous est ôté, ma» la raison subsiste fioujour^ : si cette foible raison humaine , combien plus la divine et roiiginalç ? 11 faut q|a'ell^ «subsiste étemelle et inviolable^ afin que la jnstice soit exercée. Eterit m tempor^ iUo , vi^Uibo super -viros defix4»s iu fœ- ûihus suie, ifid dicunt in eordibus suis^ tr N^mfaciet heme îDoifiinus et non factet nk^Ve •: eterit fartituéo éorftun in Jù^eptionem (0 : « £n ce temps-là \q visi- » léfTBi dans mk colère ceux qài sont ^efùfytkcé» daas u leurs ordures^ qui disent en'leur'étieur-: Le Sei- >» 'gneur ne fera iii^bien ni mai : et toutes. leurs ri^ j» chesse^ seront pillées '». Fïdéhitis ifUid/sit inter justum ^et'im/Hum, inier sennentem -Dûmino et non sen^ienièm^ei (*) : « Vous verrez queUe-diS^rence il * y a îeiitre le juste et Timpie, entre belui ^ui sert » Dieu et celui qui ne le sert point ». DE LA VENGEAiyCE DIVINE. 211 Il&at donc ici vous faire entendre à quoi nous engage notre liberté ^ et combien elle nous rend responsables de nos actions. Par cette liberté nous faisons la guerre à Dieu. Nous exerçons notre li^ berté par une audacieuse transgression de toutes ses lois : nous transgressons l'une et l'autre table. « Tu » adoreras le Seigneur toti Dieu (0 n. Où lui ren-» dbns-nous cette adoration ? Se confesse-t-on seule* ment d^avoir méinqué à ce' devoir? Comme si ce prenner de tous les préceptes n'étoit mis en tête du Décftlogue que par honneur, et emportoit le moins d'obligation ! Sanctifiez les fêtes. Croyez-vous en conscience avoir satisfait à f intention de la loi par une messe qui dure moins d'une demi-heure, qui nest jamafis trop courte, où. Ton est sans atten- tion et s^ns respect même apparent? Le jour a vingt^quatre heures ; et le reste devroit un peu par- ticiper à cette sanctification. Il me vient dans la pensée d'appliquer ici ce reproche : « Ce peuple » m'^nore des lèvres , mais son cœur est loin de » tmi (^) ». Mais nous ne l'honorons pas même dès lèvreSb Je, ne $^ qui je blâmerar davantage, ou ceux qui ne l^QO^or^n^ q^ d^ lèvres', ou ceux qui ne Thonoreo^ pas m^e dès lèvres ; ou ceux qui ne composent que il'^térîeur, ou ceux qui ne com- posent paâ rnsêoie l'extérieur. Si bien que lés fêtes ne difierent .des autres jours, sioon en ce que les profanations qt les irrévérence^ y sont plus publi*- ques, pli^s scandaleuses, j^us universelles. Et pour la second^ table qui regarde le prochain , nous attaquons tous les jours son honneur par nos (>) Deuu VI. ,1 3! -*- (0 Isa. uiz. x3. 212 SUR LES FONDEMENS médisances , son repos par nos vexations , son bien par nos rapines, sa couche même par nos adultères. Disons après cela que nous ne marchons pas contre Dieu. Mais voici qu'il marche aussi directement contre nous. Voici Jésus qui descend de la nue pour détruire ses ennemis par le souffle de sa bouche , et les dissiper par la clarté de son avènement glorieux. Le foible s'élève contre le fort, le fort accable le foible. Le fort a o0ert la paix au foible ; le foible a voulu combattre : il n'y a qu'à voir qui l'emportera et à qui demeurera la victoire. Si résistant haute- ment à un souverain tel que Dieu , nous ne laissons pas toutefois que de vivre heureux , il s'ensuit que Dieu n'est plus Dieu; nous l'emportons contre lui, et sa volonté est vaincue par celle de la créature» Mais parce qu'elle est invincible , aucun- ne peut être Heureux que celui qui lui obéit ; et il faut né- cessairement que quiconque se soulève contre lui soit accablé par sa puissance. •• C'est encore pour cette raison qu'il ajoute dans les paroles que j'explique : « Et je briserai votre » fière et indocile dureté ». Vous vous endurcissez contre Dieu, il s'endurdt contré vous; vous vous attachez contre lui, et lui s'attadbe contre vous ; vous, en hoÉfime, de toute la force de votre cœur; lui, en Dieu, de toute la force du sien, s'il m'est |>ermis de parler ainsi. Hélas ! il n'y a point de propor- tion , et la partie n e^t paâ éigale : mais vous avez voulu le premier vous mesurer avec lui. Vous avez le premier rompu les mesures ; et vous avez rendu juste [le traitement que vous en avez^ éprouva ]. Vous persévérez , et il persévère. Vous persévérez à DE LA YEMGEANCB DIVINE. 3l} retenir ce bien mal acquis , et je vois tquîours dans vos coffres y dit le saint prophète (0, cette flammé dévorante y ce trésor d'iniquité, ce bien mal acquis qui renversera peut-être votre maison , et sans doute donnera la mort à votre ame. Persévérance humaine, opiniâtre j ah ! Dieu vous opposera une persévérance divine, une fermeté immuable, un décret fixe et ir- révocable, une résolution éternelle. [Us sont] incor- rigibles : de là il les aura en exécration, parce que les regardant comme incorrigibles, il frappera sans pitié et n'écoutera plus les gémissemens. [Ils ressen* tiront] une haine, une aversion du cœur de Dieu. Aentrez donc, pécheurs, en vous-mêmes, et re- gardez dans vos crimes ce que vous méritez que Dieu fasse de vous par sa vengeance. [ Rien n^a pu vous toucher ; tous les efforts ] (*) de la bonté de Dieu ont été vains. [ Elle prenoit plaisir à vous faire du bien , et vous , vous n'en avez trouvé qu'à l'outra- ger ]. Peut-elle souffrir [ une si noire.ingratitude ] ? Ecoutez cette bonté méprisée , et voyez comme elle TOUS parle. SECOND POINT. Encore qu'un Dieu irrité ne paroisse jamais aux hommes qu'avec un appareil étonnant, toutefois il n'est jamais plus terrible qu'en l'état où je dois^ le représenter, non point, comme on pourroît croire, porté sur un nuage enflamnié, ou sur un tourbillon (0 Hfich.yi, lo. t {*) On trouve ici dans le manuscrit cette note : Un mot de la honte de Dieu. Nous avons tâché de suppléer par les paroles qui wnt ehtte èeva crooketB^ ce que Paliteàr avoii^inleAtioBd^aioatek'. Edit, de DéforU» 2l4 ^^^ ^^^ FOKDEMEKS foudroyatity [avec une vûix] toujours meuaçâûte, toujours foudroyante, et jetant de ses'yeuxun fëu dévoraût; niais arïné èe ses bienfaits et assis* sur un trône de grâce. Nolite eontristare spirkum sanetum 2)eiin çuo signati estis (0 : « N'àttristess point l^à- » prit saint de Dieu dont vous avez été marqués » comme d'un sceau ». II se rëjouit en feisant du bien, on^ l'afflige quand on le refuse. [Ce qui peut] affliger et contrister l'Esprit de Dieu, [c'est] non tant l'outrage qui est fait à sa sainteté, que la vîo* lence que souifre son amour n^éprisé et sa bonne volônlé frustrée par notice opiniâtre résistance. Cêst là, dit le saint apôtre, ce qui affl%e le Saint-Esprit, c'est-à-dire l'amour de Dieu- agissant en nous pour gagner nos cœurs. Dîeù est irrité contre les démons; mais comme il ne demande plus leur aiféction , il n'est plus affligé ni centriste par leur désobéissance. C'est à un cœur chrétien qu'H veut faire sentir siçs tendresses : [il doit y] trouver la correspondance. De là naît le rebut qui l'afflige et quHc contriste, un dégoût des ingrats qui lui sont à charge. Sicutlœtatus est DonUnHs hent ^^obis faciens vàs^ çue multipïicans , sic lœtabitur subs^ertens aUiue-diS" perdensi'^) : a Gomme le Seigneur s'est réjoui en vous :» faisant du bien*, ainsi il se réjouira en vous rava- » géant et en vous renversant de fond en. comble ». L'amour rebuté^ramour dédaigné, l'amour outragé par le plus injurieux mépris, l'amour épuisé par l'excès de son abondance fait tarir la source des grâces et ouvre celle des vengeances. Rien de plus fuiûeux qu'un amour méprisé et outragé* Dieu a (0 £phe^. lY. 3o. — W DeuL xxviii. 63. DEIrA VBNGEikïrCB DIVINE. ^l5 9Km, énonçais bénissaipit^ sa nature bienfaisante; mais. nous Tavons eontriste, mais nou& avons affligé ^on Saint-Esprit > nous avons ch^gé la joie de bien faire en une )oie de punir ; et il est |u$te qWil népare la,tri&tesse <|ue nous avons causée k l'Esprit de grècè^ par uqe joie efficace, par un trion^pke de son tçenvf par un a^le de sa justice à punir nos ingratitudes ^ justice du nouveau Te^ment . qui s*applique par le sang^ par la bonté màt^e et par les grâces infinies d'un Dieu rédempteur. . ^ . Eccc A^nu$ Dd (0*: » Voici l'Agneau de Dieu »• Jam enim secufis ad radieem pqsiê^ lesti?) : « La 3» coignéfs est' déjà mise à la iracine i>. («a colère approche toujaurs^ av^c la ^àce i la coi^ée s'ap**- pliqjue toi^JQur^ par le bien&it mênve; et i$i la sainte inspiratioa ne, nous vitifie , eUe nous^ tue. Ciar diok pense3>-vouS; qne^ sortent Ifts fiaipmes qui dévorent les chrétiens . ing}:'at^? I^e ses autels j, de ses sacrer mens ^ de sefr plaies ,, de ce çâté ouvert aurla.croiJK pour nousr être une source . d*amûur infini*. C'est de là que sortira Vindignation de la j^uste fureur^ et d'autant pliis implac^le quelle aura étédétrem?- pée dans la source même; des grâces* Car il e^t ^uste et très*ju4te que tout,, et les grâces mêmes, tonnant à mal à un Gceur ingrat. O poids des grâces rejjetées l poids, des bienfaits méprisés! [Au contraire] tout tourne à bien à ceux qui aiment , même les péchés f dit saint Augustin (^) y qui les abaissent , qjai les hu- milient , qui les encouragent. A faci^ irœ cotlumbœ (4) : [MettezrBOus à cou- C*> Joan, Y, 36. »-- C»; Matth, ni. lo. — • (*> De ùfrrept. H Grat, Sll6 SVR LES VO'NDEMEirS vert] « 3e la face irritée de la colombe ». Operkè nos àfoLcie..,. Agni(^) : So/o£fciiritixi^r et hma non dabit lumen suum^ et stellœ codent de ccslo > et mrtiOjes cœlorum commovebuntur ; et tune parebit signum Filu homims. Et tune plangent omnes tribus terrœ > et videbunt FiUum homims 'venientem in nubihus cœli cum virtute muhd et majestate M : « Le soleil s'obscurcira et la lune ne » 'donnera plus sa lumière : les étoiles tomberont ^ du ciel y et les puissances des cieux seront â>ran- » lées. Maïs alors le signe du Fils de l'homme » paroitra dans le ciel , et tous les peuples de la -» terre seront dans les pleurs et dans les gémis* » semens , et as veiTont le Fils de l'homme qui » viendra sur les nuées du cieî avec une grande » puissance et une grande majesté ». Méditons attentivement quelle prise nous don- nons sur nous à la justice de Dieu par le mépris outrageux de ses bontés infinies. Qui donne ^ a droit d'exiger : il exige des reconnoissances : s'il ne trouve pas des reconnoissances , il exigera des supplices : il ne perd pas ses droits. Les grâces que vous mé- prisez préparent une éternité bienheureuse. « La » grâce , dit le Sauveur, est une fontaine d'eau jail- » lissante ^ : Fons aquœ salientis (^). Quand donc 0) y^poc, VI. i6. — W Matth, xxiy. ag, 3o.— * P) Joan. vr. i4» DE I«A VEirOEÂNCE DIVIITE. 217 VOUS êtes touchés, quand vous ressentez quelque- fois un certain mépris de cette pompe du monde qui sVvanouit , « de sa figure qui passe (0 », de ses fleurs qui se flétrksent du matin au soir ; quand , dégoûté de vous-même et de votre vie déréglée , vous regardez avec complaisance les chastes attraits de la vertu; [vous vous écriez dans Tamertume de votre cœur] : O chasteté ! ô modestie ! 6 pudeur passée! ô tendresse de conscience qui ne pouvoit souffirir aucun crime ! O sainte timidité , gardienne de l'innocence ! Mais ô force à faillir ! ô hardiesse pour s'excuser ! ô lâche abandon d'un cœur cor- rompu et livré à ses désirs ! Que veut le Seigneur votre Dieu, sinon que vous vous attachiez forte- inent à lui , et qu'en vous y attachant vous viviez heureux? C'est pour cela que Jésus-Christ est venu au monde « plein de grâce et de vérité i^) ». C'est pour cela qu'il nous a donné tant de saintes instruc- tions, qu'il ne cesse de renouveler par la bouche de ses ministres. C'est pour cela qu'il a rempli tous ses sacremens d'une influence de vie, afin qu'y par- ticipant nous vivions. Si nous savons profiter de tous ces bienfaits, nous acquerrons par sa grâce un droit étemel sur lui-même pour le posséder en paix. Que si nous les méprisons , qui ne voit que nous lui don- nons réciproquement un titre très-juste pour nous châtier par des supplices autant inouis que ses bon- tés étoient extraordinaires? « Comme le Seigneur a» s'est réjoui en vous faisant du bien , ainsi il se » réjouira en vous ravageant et en vous renversant a> de fond en comble » : Sicut lœtatus est Dominas (0 /. Cor. vn. 3i. — («) Jaan. 1. 14. ' 2l8 SUR LES FOISBEM^HS • bene ^piis JucienSj vQsque multiplicans;,sic.lœtflr bitur sub^çriens atque disperdens. Et en (M^et il est ju&te qu'il mesure sa colère à ses boutés et à, nos ingratitudes , et que sa fureur impUcable perce d-autanl; de traits ua qœur infi* idèle^ que son amour bienfaisant s^voit employa fd'attraits pour le. gagner. C'est pourquoi il ne faut pas se persuader que les grâces de Dieu périssent : nom^ ine$ Frères, nele pensons, pas* Ces grâces que nous rejetqns, Dieii les rappelle à lui-niéme^ Dieu le$ ramasse en son sein , oii sa justice le& changée en traits pénétrant dont les. ingrats seront percés. Ils connoitronty les miser able9> ce que c'est que d'abu- ser des bontés d'un Dieu,. de forcer son incKnatîon bienfaisante y de le contraindre à de?epir cruel e^t inexorable , lui qui ne vouloit être quQ libéral 'et bi^£siisant« Dieu ne cessera de les frapper de cette main âouyeraine et victorieuse dont, ib ont. in^u* rienseiHefit refusé les dons; et ses coups redoublés sans fin leur seront d'éternels reproches de «es grâces méprisées. Ainsi toujours vivans et toujours mourans, immortels pour leurs p&inea^ trop forts pour mourir y trop foibles pour supporter; ils gé- miroiH étear neUement sur des Uts de flammes y ou- trés de furieuses et irrémédiables douleurs. Et pous- sant parmi des bla^bémes exécrables mille plaintes désespérées^ ils porteront à jamais le poids infini de tous les sacremens pro&nés» de toutes les grâces rejétées ; non moins prësâés, non moins accablés des miséricordes de Dieu^ que de l'excès intolé- rable de ses vengeances. Tremblez donc, tren^blez^ chrétiens, parmi ces \ BE LA VBJSTGBAirCE DIVII9E. 219 grâces immenses ^ parmi ces bienfaits infinis qui vous environnent. Les saintes prédications sont un poids terrible : les saints sàeremens, les inspiFa*^ tionSy les -exemplle^ bons et mauvais q[m noos »ver« tissent chacun à leur manière^le silènoemême d'an Dieu y sa patience, sa longanimité , son attente; ô le poids terrible ! Tous les mo^uvemenià de la grftce sont d*ûn poids tertible pour nouSi II li'y a rien à n^liger dans notre vie. Notredestinée, notre état!^ notre vocation ne souffrent rien de médiocre. Tout nous sert ou nous nuit ihiiniihent. Cloaque moment de notre Vie, chaque respiràfion^ chaque battement de notre pouls, si jepuis parler de la sorte, chaque éclairde notre pensée a des suites éternelles. L*éter^ riité d'un côté, et réternilé de l'autre. Sr vous smve^ fidèlement Tinstinct de la grâce , Féternité bien^ heureuse y est attachée. Si vous mâmquez à la grâce /une antre éternité vous attend, et vOus mé- ritez un mal éternel, pour avoir perdu volontai-* rement un bien qui le pouvoit être*. . TROISIÈME POIKT. . Ii; reste à considérer la troisième peiiie donb Dieu menace son pettple rebeile, laquelle* il a phi au Saint-Esprit de nous exprimer eni ees paroles que fe répète encore une fois : a Puisque vous n'avez » pas voulu servir le Seigneur votre Dieu darïii k » foie et l'allégresse de votre: cœur, au milieu dé » l'abondance d6 totftc^ sortes de biens ^ vous servie » Téz h vôtre ennenû que le Seigneur enverra contre » vous, dans la feim ^ dans la Suif , dans la nudité^ » et dans un exti^éme besoin de toutes choses; et cet 220 sua LES FDNDEMEN8 » ennemi mettra sur vos épaules un joug de fer par » lequel vous serez brisés (>) »• C'est-à-dire , comme nous l'avons déjà expliqué, vous n'avez pas voôlà vivre sous un empire doux et légitime ; vous serez justement soumis à une dure et insupportable ty- rannie. Deux conditions de l'empire de Dieu nous sont ici exprimées : il n'y en a point de plus légitime , U n'y en a point de plus doux. Vous n'ayez pas voulu servir Dieu votre Seigneur -, et certes il n'y à point de Seigneur dont le droit soit mieux éta- bli, ni le titre plus légitimé. Il nous a faits , il nous a rachetés : nous sommes par la création l'œuvre de ses mains, par la rédemption le prix de son sang; par la création ses sujets, par la ré- demption ses enfans. Nous sommes son bien, ncMis portons sa marque , créés à sa ressemblance , scella de son' Saint-Esprit ; et nous ne pouvons le désa- vouer sans que le fond de notre être ne nous désa- voue , ni enfin le renoncer sans renoncer à nous- mêmes. Si cet empire est le plus légitime, il est aussi le plus naturel : étant le plus naturel , il est par con- séquent aussi le plus doux. Ce n'est donc pas. sans raison que la joie du cœur est promise à ceux qui sei'vent le Seigneur leur Dieu. Car celui-là est con- tent qui est dans l'état que la nature demande. La joie se trouve donc nécessairement dans le service de Dieu'; l'abondance y est aussi et la plénitude. Nul ne sait mieux ce qui nous est propre que celui qui nous a faits. Nul ne peut mieux nous le donner, ' (0 Deut, xsyiii. 47» DE LA VEirOEANCE DIVINE. 221 puiscju^il a tout en sa main. Nul ne le veut plus sincèrement y puisque rien ne convient mieux à ce- lui qui a commencé Touvrage en nous donnant Tétre, que d'y mettre la dernière main en nous donnant la félicité et le repos. Telle est la condi- tion de la créature sous Pempire de son Dieu : elle est riche y elle est contente y elle est heureuse. Dieu, qui n'a besoin de rien pour lui-même , ne veut ré^ gnér sur nous que pour notre bien^ ni' nous pos- séder que pour nous faire posséder en lui toutes choses. Donc, ô créatures rebelles ^ ô pécheurs qui vous soulevez contre Dieu y faites maintenant votre sen- tence. Dites, Messieurs, ce que méritent ceux qui refusent de se soumettre à un gouvernement si avan- tageux et si équitable. Hélas ! que méritent-ils , si- non de trouver au lieu d'un joug agréable , un joug de fer ; au lieu d'un seigneur légitime , un usurpa- ieur violent ; au lieu d'une puissance bienfaisante et amie, un ennemi insolent et outrageux; au lieu d'un père, nii tyran; au lieu de la joie des enfans, la contrainte et la terreur des esclaves ; au lieu de Vailé^resse et de l'abondance y la faim, la soif et la nudité-, et une, extr^e disette. Il faut vous direiquel e^ cet ennemi que Dieu en- verra contre vous* Cdùi qui s'est déclaré l'ennemi de Dieu, qui ne pouvant >rien contre lui, se venge contre son image, «t la déchirant la déshonore , rempli^ant son i^sprit envieux d'une vaine imagi- nation de vengeance ( c'est Satan /avec ses anges. Esprits noirs , esprijts ténâireux, esprits furieux et désespérés; [ qui affectent un] fasjte insolent, au 223 Sirn LES FaiTDEMENS lieu de Leur grandeur naturelle 'y [ qui emploient ] ^es ifizLesses inalfcieuse6,:a«i lieu d'une sagesse ce* jeste ; [ qui ne inspirent que ] la rfaaine, ia dissent tioa et i'euFÎe ^ au lieu de la charité et de la société fraternelle.; [qui], jont devenus si;q>e]i>eSy trom- peurs, et jalons.; qui 8*étant perdua sans espérance fit abÎQiiés sans iessouroe^ ne sont /plus désormais ca^ paJ)les.que d^ cette noire et maligne joie qui revient à des m^ûbâns d'avoir des complices, à des envieux d'avoir des compagnons , à des< superbes r^vemés d'entraîner avec soi les autres. C'est cette rage, i^'est cette fureur de fi^taa et de se& anges que le pro* phète Eeécldel inous représente sons le nom et sous la figure'deiPfaaraon, roixl'Egjrpte. Spectade^épou^ vantafale ! Autour. de hn sont desimorts qu'il apercée par, de cruelles blessures* Là gtt Asfisiir^ dit le pro^^ phè|be^ avec toute sa opuititude : là «st tombé Elam -et tout le peuplerai le sui;voit't par terre , nageant dans leur aan^« Pfaa^ raon ««t an jnilieu^ qui vepaAt ses-yeùic-de la vue d'un si grand carnage , et>qni se «console de $â pèrts et jde la ruine ides< siens t fihàra9n;avee son airmée, SatSA avec . ses adges : ! f^idit eos Rharao , . et 4ionso^ loitus. est super iUniuend imukitadipe sud iÇ^tB inter-^ feata est gladio : JMmtim etjOVvU^iexBrcitUfi'epii (O4 Enfin, semblent-iik'dire^ nous ne serons pas les seuls miisérables. JOieu a vouhL.des isuppllces : en voilà assez; voilà assez. de sânj^t^ asse^ de. carnage. (OwP»ecA. xxxir. a«, ^4» *^i ^'- ' * DE LA TEirGEANCE DIVINE. 9t!%3 On a voulu nous égaler les liommes : les voilà enfin nos égaux dams les tourmens : cette égalité leur plait. Ils savent que les hommes les .doivent juger: quelle, rage pour ces superbes ! Mais avant ce jour, disentHilSy combien en mourra-t^il de .notre main ! Ah! que nous allons faire de sièges vax^ans, et qu'il y en aura parmi les criminels de caix qui pouvoient {^asseoir parmi Itts juges! Afaîs que fais* je, mes Frères, de profaner si long-^temps et ma bouche et vos oreilles en faisant parler ces blasjpda^éarateurs ! C'est assez de vous avoir découvert leur haine. Elle est telle , remarquer ceci etfétoniieft-^vous de cet excès, die lest telle cette hainexfu'ils ^ut coatre nous, qu'ils se piaiseut non* seulement à xléioler, mais encore à^ouiUer notre ame, à Im dégrader. Oui , ils aiment encore niieux uous CDinrompre que nous tourpenter, nous ôter Imnooei]^ que le repos , et • nous rendre méchans que nous /rendre ^malheureux : si bien que quand ces ^victorieux cruels se sont rendus les ipaitres d!uue .ame, ib y entrent avec iurie, ils la pillent. Us la ïBvagent,. ils laTiéle&t; O^iameblandùe^ au «kBg'de i' Agneau,. ame. qui étotf ^«ocitie- des eaux du baptême si puro , si pudique eti si ^v^rgin^lé ! Ces cor^ rupteups>la violent, noo lantpour se satisfaire ^e pour. la déshonprer «t la raviliri Us la 'porteiit k s'abandonner à eux; ils la souillent et puis ils la méprisent : [ils ia traitent cotàme c^s] femmes qui deviennent le ui^ris.de ceux à ^i' eUes^se sont lâ*- chement et indignemant proslttoées^- * \ Souvenez^vous de vptre b^ptdmei [|1 a] dfétruik la puissance des ténèbres. [Rappelez -vous ces] !224 SUE LES FOJfBEM.ElffS exorcismes [ qui ont été employés pour chasser Satan de votre ame. Retire-toi , lui a-t-on dit , ] « Maudit^ damne» : Maledictej damnate, [Il a été forcé de céder à] Fempire de l'Eglise [qui lui a, ordonné ] de « faire place au Dieu vivant et véri- » table )) : Da locum Deovero et mvo (0. [Alors vous avez pour toujours ] renoncé à son empire. Chaque empire a ses pompes et ses ouvrages. Les pompes [doivent être] distinguées des œuvres. Les pompes du diable [sont] tout ce qui corrompt la modestie; tout ce qui remplit Fesprit de fausses grandeurs; tout ce qui étale la gloire et la vanité ; tout ce qui veut plaire et attirer les regards;, tout ce qui en- chante les yeux ; tout ce qui sert à l'ostentation et au triomphe de la vanité du .monde ; tout ce qui fait paroitre grand ce qui ne Test pas , et élève une autre grai^deur que celle de Dieu. Maintenant il n'y a plus de pompe du« monde : les spectacles sont devenus honnêtes ^ parce qu'on a ôté les excès gros* sierSy [pour insinuer plus sûrement dans les cœtu'Sy le. poison] le plus délicat et le plus dangereux. On ne coBnoitplus de luxe. A la simplicité de cet habit jblanc dont tu as été revêtu ^ [tu substitues des ome- Jïxenstout profanes]? ah! tu reprends les marques et les enseignes du monde. Il faut retrancher du jbaptéme cette cérémonie si saio^te ,i si ancienne , si apostolique. ' Les œuvres , c'est l'iniquité. « L'œuvre desesprits » de ténèbres^ c'est de renverser l'homme » : Ope-- ratio eorum est hominis eversio {^). [Tu y contri' bues] toi y qui corromps les principes de la religion («) JRitueL — (») Tertj. ApoL ». aa. et i DE LA VENGEANCE DIVINE. SsS f ■ et* de la crainte de Dieu par ces dangereuses raiK leries: [toi qui nous] affranchis [de Thumble sou- mission aux objets de la foi ^ comme d'une ] crédu- lité vaine : [toi, qui] fortifies la. pudeur contre la crainte du crime : [ toi , qui envenimes ] ces re- proches qui allument le feu de la vengeance : [Vous y concourez] vous, qui n'étalez pas seulement avec vanité et ostentation , mais qui armez ^ pour ainsi dire, cette beauté corruptrice de l'innocence. Ils nous dominent [ces esprits de malice] par les passions d'attache. L'avarice [fait qu'] on ne dis- tingue plus ce bien mal acquis, confondu avec votre patrimoine. L'ambition, fatiguée des longueurs , [prend] les voies abrégées, et qui sont le plus sou- vent criminelles. L'impudicité,ah ! qu'ils la poussent loin! Et dans cet esprit [de libertinage on recon- nott] une force étrangère. Ainsi nous avons relevé ce trône abattu , et re-^ dressé cet empire d'iniquité , corrompu le baptême^ eHacéla croix de Jésus imprimée sur notre front ^ rejeté cette onction sainte , cette onction royale qui nous avoit faits des rois, des christs et des oints de Dieu; [profané] le corps et le sang de Jésus- Christ; nous peut-être, l'ordre et le sacerdoce. Enfin tous les mystères du christianisme sont deve- nus le jouet des démons. Nul christianisme en nos mœurs. [Aussi] « le Seigneur enverra-t-il Satan contre » nous » , revêtu de tous les droits de Dieu contre lés pécheurs : Qujem immiitettibi Dominas (<}. Dieu (0 Deut. xxyiii. 4^. BOSSDET. XI. l5 ^7l6 StJR LES PONDEMENd rétablit notre souverain; il le met en sa place ; il lui donne , pour ainsi dire ^ toute sa puissance. Etran- ger, qui nous tirera de notre patrie; usurpateur, qui ne fera que ravager; esclave révolté, qui ne donnera point de bornes à son insolence. « Nous » étions nés pour être rois » : Fecisti nos Deo nos- tro reges et sacerdotes (0 ; [ et nous préférons d'être assujettis au tyran le plus impitoyable ]. Revenez , Jérémie , renouvelez vos gémîssemens. O saint prophète de Dieu, seul capable d'égaler les lamentations aux calamités , venez déplorer encore une fois le sanctuaire souillé, la maison de Dieu profanée 7 Hœreditas nostra versa est ad aliénas ; domus nostrœ ad extraneos : « Notre héritage est » passé à ceux d'un autre pays , et nos maisons à yi des étrangers ». Serxf idominati sunt nostri : a Des » esclaves nous ont dofninés ». Cecidit corona ca-- pitis nostri : vœ nobis quia pecca^imus W ! « La » couronne est tombée de notre tête : malheur à » nous , parce que nous avons péché » ! jéperuerunt super te os suum omnes inimici tui : sibilavenmt et fremuerunt dentibus suis, et dixerunt : Devorabi- mus : en ista est dies quam expeclahamus ; inve- nimus , vidimus P),* « Tous vos ennemis ont ouvert » la bouche conti^e vous; ils ont sifflé, ils ont grincé » les dents, et ils ont dit: Nous les dévorerons: » voici le jour que nous attendions; nous l'avons » trouvé, nous Tavons vu ». Fecit Dominas quœ cogitavit : tœtificayfit super te inimicum et exal- tapit cornu hostium tuorum (4) : « Le Seigneur a fait (0 Apoc, ▼. 10. — V») Thren. y. a, 8, i6. — C^) /^û/. n, i6. -— (4)/iiV/. 17. DS LA TENCBÀNGE BIVIHE. 227 » ce qu'il (avoit résolu ; il vous a rendu la joie de » vos ennemis ^ et il a relevé la force de ceux qui » vous hàïssoient ». Nous ne rougirons pas de porter des fers , nous que Jésus-Christ a fait rois! Nous jetons aux pieds de Satan la couronne que le Sauveur a mise sur nos têtes. Vœ nohis, quia peccavimus : ce Malheur » à nous y parce que nous avons péché ». Disons-le du moins du fond de nos cœurs ce Vœ^ ce Malheur ^ à nous. Renouvelons les vœux de notre baptême : je renonce [à Satan, à ses pompes et à ses œuvres]. [Femme mondaine y consentez à ] plutôt choquer, que de plaire trop ; [ d'être ] plutôt méprisée , que vaine et superbe; plutôt seule et abandonnée, que trop chérie et trop poursuivie. Où est Feau pour nous baptiser? Ah ! plongeons-nous dans Teau de la pénitence , dans ce baptême de larmes, dans ce bap- tême de sang, dans ce baptême laborieux. Plon- geons-nous-y, n'en sortons jamais, jusqu'à ce que Jésus nous appelle [ à sa gloire ] , où nous cou* duise, etc. 228 ftxriL lÉsxrs-cHRisir I.'" SERMON POUR LE IL' DIMANCHE DE L'AVENT, PRÊCHÉ A METZ, SUR JÉSnS-GB»IST COMME OBJEX DE SCAKDALE. Caractères du Messie promis , opposes à ceux que les Juifs cBarnéls sVteient figurés» Jésus -Christ l'es réunit tous en an personne. ^>*||%«%|^<|%|*^/V>^>^>%%^ Cœci vident, claudi ambubut, leprosi mandantur , sardi audiunt, moctui resurgtuxli , paup^res eyangelisaiitur : et beatus estqui'noa fuerit scaadalîzatus in me*. Les aveugles reçoivent la vue ^ les sourds entendent , les estropiés marchent ^ les lépreux sont nettoyés , et les morts revivent; t Evangile est annoncé aux pauvres : et bienheureux est celui qui n'est point scandalisé en moi. Matth. xi. 5, 6. iSi vous voyez aujourd'hui que saint Jean-Baptiste envoie ses disciples à notre Sauveur pour lui de- mander quel il est, ne vous persuadez pas pour cela que FElie du nouveau Testament et le grand précurseur du Messie ait ignoré le Seigneur auquel il venoit préparer les voies. Je sais qu'il y a eu quelques personnes très-doctes ^ et entre autres le COMME OBJET I>£ SGAITDALE. âSg grave T^rhiUien (0 , qui ont em que datis le temps que saint Jean-Baptiste fit faite cette question aa Sauveur, I4 lumière p|*ophétique qui Tavoit jos-^ qu'alons éolairé/ avoit été éteinte en son ame; maift je ne craindrai point de vous dire y av^ le r^^ect que je dots aux auteurs de ce sentimeitt ^ qu'il n' y a aucune vraisemblance dans cette pensée.^ Abra- » bam a vu le jour de notre. Seigùeur ; Isaïe a vu sa » gloire et nous en a parlé j) ^ nous dit révangéliste saint J^an W ; tous* les prophètes l'ont connu en es>- prit; et le phis grand des propiiètes Taura ignoré? Celui qui a été envoyé pour rendre témoignage dé la lumière, aura été lui-même dans les ténèbres? £t après avoir tant de fois désigna au peuple cet agneau de t)iea qui purge les péchés du monde , après avoir vu le Saint-Esprit descendre sur lui, lorsqu'il vpulut être baptisé de sa main ; tout d'uâ coup il aura oublié ce qu'il a fait connoître à tant de personnes ? Vous voyez bien , fidèles , que cela n'a aucune apparence. Mais polu^q^oi donc, direz-vous, pourquoi lui envoyer ses disciples pour s'informer de lui s'il est vrai qu'il soit le Messie? 'Qui interroge, îldierche; qui jdiercbe., il ignore. S'il cohnoissoît quel étoit Jésus-Christ ,: quelle raison peut'-il avoir de lui faire ainsi demander ? Ne craignoit-41 pas que son douté ébranlât la foi de plusieurs, et diminuât beaucoup de l'autorité du témoignage certain qu'il a si sou- vent rendu au Sauveur? C'est tout ce qu'on nous peut opposer. Mais cette objection ne m*étonne pas : au contraire ce qu'on m'oppose, je veux le tirer à (») Af/lp» Ikfarcion. Ub. iv. — W Joan. viii. 06. xii. 4 1 • â3o SUR 1É8VS-CH&I8T mon avantage. Je dis qu*il interroge ^ parce qu*il sait ; il demande au Sauveilr Jésus quel il est ^ parce qu il cpnnoît très-bien quet il est. Gomment cela , direz-vous?. C'est ici, chrétiens, la vraie explication de notre évangile, et le fondement nécessaire de tout ce discours. Saint Jean , qui connoissoit le Sauveur qu'il avoit prêché tant de fois, savoit bien qu'il n'appartenoit qu'à lui seul de dire quel il étoit^ et de se manifester aux hommes , desquels il venoit être le précepteur. C'est pourquoi il lui envoie ses disciples, afin qu'ils soient instruits par lui-m^e touchant sa venue que lui seul étoit capable de nous déclarer. Ainsi n'appréhendez pas, chrétiens, qu'il détruise le témoignage qu'il a donné de notre Sei- gneur ; car lui faisant demander à lui-même ce qu'il faut croire de sa personne, il fait bien voir qu'il reconnoît en lui une autorité infaillible, et qu'il ne lui envoie ses disciples que pour être formés de sa main et enseignés de sa propre bouche. Ne pouvant plus annoncer sa venue aux hommes , parce qu'il étoit retenu aux prisons d'Hérode , il prie notre Seigneur de se faire connoitre lui-même; et lui fai- sant faire cette ambassade, en présence de tout le peuple , il a dessein de tirer de lui quelque instruc- tion mémorable pour les spectateurs, qui s'imagi- noient le Messie tout autre qu'il ne devoit être. En effet il ne fut point trompé. Jésus , qui con- noissoit sa pensée, et qui vouloit récompenser son humilité, fait voir à ses disciples les effets de sa puis- sance infinie; Il guérit devant eux tous les malades qui se présentèrent; il leur découvre son cœur ; il leur donne des avis importans pour connottre par- COICME OBiET DE SCANDALE. a3l faitement le secret de Dieu , et détruire une fausse idéeduMejSsie^ qui avoit préoccupé les Juifs trop charnels : et sachant que son bien-aimé précurseur ne pouvoit avoir de plus grande joie que d'appren- dre la gloire de son bon maître y il commande aux envoyés de saint Jean de lui en tapporter les nou> velleSy lui voulant donner cette consolation dans une captivité qu'il soufiroit pour Tamour de lui. « ÂUez-vous-en 9 dit-il, rapporter à Jean les mer- jp veilles que vous avez vues » ; dites-lui que « les a sourds entendent , que les aveugles reçoivent la » vue y que la vie est rendue, aux morts, que TEvan- » gile est annoncé aux pauvres , et qu heureux est » celui qui n*est point scandalisé en moi ». Comme s'il eût dit : Les Juifs, trompés par Técorce de la lettre et par les sentimens de lai chair , attendent le Messie comme un puissant roi, qui se mettant à la tête de grandes armées, subjuguera tous leurs enne- mis , et qui se fera reconnoître par l'éclat d'une pompe mondaine , et par une magnificence royale. Mais Jean , instruit des secrets de Dieu , sait qu'il doit être manifesté par ^es marques bien plus au- gustes, encore que selon le monde elles aient beau- coup moins d'apparent. Allez-vpus*en donc, et lui racontez les guérisons admirables que vous avez vues de vos propres yeux. Dites -lui que l'auteur de tant de miracles ne dédaigne pas de converser parmi les pauvres; au contraire qu'il les assemble près de sa personne pour les entretenir familièrement des mystères du royaume de Dieu et des vérités éter^ nelles : et toutefois que nonobstant , et le pouvoir par lequel je fais de si grandes choses , et l'incroya- a32 SUR JÉSUS-*CHRIST ble douceur par laquelle je condescends à Finfirmité des plus pauvres et des plus abjects y bienheureux est celui à qui je ne donne point de scaïaidale. Dites ceci à Jean , à ces marques il connottra bien qui je suis. Tel est le sens de tout ce discours y très-court en apparence et très-isimple ^ mai&' plein d un si grand sens ^t de tant de remarques illustres tirées des pro^ phéties anciennes qui parlent de la grandeur du Messie y que toute Féloquénee humaine ne suf&roit pas à vous en étaler les richesses. Toutefois j'ose en- treprendre, fidèles^ avec l'assi^ance divine^ d'en dé*- couvrir aujourd'hui les secrets selon la mesure qui iÈn'est donnée. Je suivrai pas à pas le texte de mon Evangile ; conférant les paroles de notre Sauveur avec les actions de sa vie et les prédictions des pro- phètes y dont nous avons ici un tissu. Nous admire- rons tous ensemble la profonde conduite de Dieu dans la manifestation de son Fils. Mais poui^ y pro- céder avec ordre, réduiédns tout cet entretien à trois chefs tirés des propres paroles du Fils de Dieu. Je remarque trois choses dans sou discours, qu'il guérit les malades, qu'il catéchise les pauvres, qu'il scan*- dalise les infidèles. Dans ses miracles, je vois sa bonté, en ce qu'il à pitié de nos ïnaux : dans ses instructions, je vois sa simplicité, en ce qu'il ne lie de société qu'avec les plus pauvres : enfin dans le scandale qu'il donne, je vois les furieuses oppositions que l'on fera à sa salutaire doctrine. Viens, ô Juif incrédule, viens considérer le Messie ; viens le reconnôttre par les vraies marques que t ont données tes propres prophètes. Tu crois qu'il ma- r COMME OBJET DE SCAITDALE. !^33 Difestera son pouvoir y établissant en la terre un puissant empire auquel il joindra toutes les nations^ ou par la réputation de s^ grandeur y ou par ses ar- mes victorieuses. Sache que sa puissance n'éclatera que par sa bonté y et par la tendre compassion qu*il aura de nos maladies. Tu te le représentes au mi* Heu d'une cour superbe ^ environné de gloire et de majesté : apprends que sa simplicité ne lui permet-^ trapas d'avoir d'autre compagnie que cellç des pau- vres. Enfin tu t'imagines voir couler sa vie dans un cours continuel de prospérités ; au lieu qu elle ne sera pas un seul moment sans être injustement tra- versée. En un mot le Messie promis par les ora«- des divins, doit être un homme infiniment misériT cordieux, dont le cœur s'attendrira à l'aspect des misères de notre nature, qui recevra les pauvres en sa plus intime familiarité, et épandra sur ewji les trésors de sa sagesse incompréhensible , en les ca- téchisant avec une affection, paternelle ; qui^ no« nobstant son inclination libérale , et la candeur de sa vie innocente, et sa naïve simplicité, recevra mille malédictions des hommes ingrats, sans que pour cela il cesse de leur bien faire. Voilà quel de*- voit être le Sauveur du monde. O Dieu, qu'il est bien autre que les Juifs ne se l'imaginent \ S'il fû( venu avec une pompe royale, les pauvres n'auroient pas osé approcher de lui, ni même le regarder : tout le monde lui eût fait la cour, bien loin de le char- ger d'imprécations. C'est pourquoi étant venu pour souffrir , il a pris une condition d'esclave : étant venu pour les pauvres , il a voulu naître pauvre , afin de pouvoir être familier avec eux. C'est le vé- 2i34 3UIt JÉSUS-CHRIST ritable portrait du Messie notre unique libérateur, tel qu il nous est désigné paries prophéties, tel qu'il nous est montré dans son Evangile. Considérons en détail, chrétiens, cet adorable tableau. Mais admirons avant toutes choses le premier trait de cette salutaire pein« ture que notre évangéliste nous a tracée; et voyons paroître la toute-puissance du Sauveur Jésus par le remède qu'il apporte à nos maladies. C'est le premier point de mon discours. PREMIER POINT., PouRRois-jE bien vous dire , fidèles , combien de pauvres malades et combien de sorXes de maladies a guéri notre miséricordieux médecin ? Vous eussiez TU tous les jours à ses pieds les aveugles , les sourds, les fébricitans, les paralytiques, les possédés, en un mot et enfin tous les autres infirmes, quiconnois- sant sa grande bonté, voy oient que c'étoit assez de lui exposer leurs misères pour obtenir de lui du soulagement. Encore ce médecin charitable leur éparghoit souvent la peine de le chercher; lui-même il parcouroit la Judée, et comme' dit l'apôtre saint Pierre , « il passoit bienfaisant et guérissant tous les » oppressés » : Pertransiit Benefaciendo, et sanando omnes oppressas à diabolo ('). Dieu éternel! les ai- mables paroles, et qu elles sont bien dignes de mdn Sauveur ! La folle éloquence du siècle , quand elle veut élever quelque généreux conquérant, dit « qu'il 2> a parcouru les provinèes , moins par ses pas que » par ses victoires » : Nontam passibus quàm victo- (») Mt. X. 38. COMME OBJET DE SCANDALE. 23S riis peragra^it (*). Les panégyriques sont pleins de ces sort es d'exagérations. Et qu est-ce à dire, parcou- rir les provinces parles victoires? N'est-ce pas por- ter partout le carnage /la désolation et la pillerie ? Telles sont les suites de nos victoires. Âh ! que mon Sauveur a parcouru la Judée d'une manière bien plus admirable ! Je puis dire vérita- blement qu'il l'a parcourue, moins par ses pas que par ses bienfaits : Pertransiit benefaciendo. Il alloit de tous côtés visitant ses malades , distribuant par- tout un baume céleste, je veux dire une miraculeuse vertu qui sortoit de son divin corps, devant laquelle on voyoit disparoître les fièvres les plus mortelles et les maladies les plus incurables : Pertransiit be- nefaciendo. Et ce n'étoit pas seulement les lieux où il arrêtoit quelque temps , qui se trouvoient mieux de sa présence. Il rendoit remarquables les endroits dans lesquels il .passoit , par la profusion de ses .grâces. En cette bourgade il n'y a plus d'aveugles ni d'estropiés : sans doute, disoit-on, le bienfaisant Je* sus a passé par-là : Pertransiit. Et en effet, chrétiens, quelle contrée de la Palestine n'a pas expérimenté mille et mille fois combien étoit présent le remède que les infirmes et les languissans trouvoient dans le secours de sa main puissante ? C'est aussi ce que le prophète Isaïe , que les Pères ont appelé l'évan- géliste de la loi ancienne, tant ses prédictions ^ont précises 5 c'est , dis-je , ce que le prophète Isaïe cé- (*) Ces paroles renferment le sens de celles qu^on Ut dans le pa- négyrique de Trajan, fait par Pline le jeune, où ÎI s^exprime ainsi : Quum orbem terrarum non pedibus magis quàm laudihus peragra^ res ? Edit. de Déforis. 236 SUR JÉSUS-CHRIST lèbre avec son élégance or4inaire ^ dans le diapitre trente-cinquième de sa prophétie : « Dites aux affli^ » géSy Qous dit-il, à ceux qui ont le cœm* aliatta » parleurs longues calamités, dites -leur qu'ils se » fortifient. Voici venir notre Dieu qui les vengera • »,Dieu viendra lui-même et nous sauvera v : Deus ipse veriiet et sahabii nos (i). Quel est ce Dieu qui vient nous sauver, si ce n'est le Sauveur Jésus , du- quel le même Isaïe a écrit qu'il seroît appelé Em- manuel , Dieu avec nous? Un Dieu avec nous, n'est- ce pas à dire un Dieu-homme ? Dieu donc viendra lui-même, dit Isaïe, Dieu viendra lui-même pour nous sauver. Vous voyez qu'il est parlé là du Messie. « Et alors, poursuit^il (2) , c'est-à-dire à la venue du » Sauveur, les oreilles des sourds et les yeux des » aveugles seront ouverts; alors celui qui étoit per- » dus sautera agilement comme un cerf , et la la»- » gué des muets sera déliée ». Ne voyez-vous pas, chrétiens , que le discours de notre Sauveur , dans l'Evangde que nous exposons , est tiré de celui da prophète ? « Leis sourds entendent, dît le Fils de » Dieu, les aveugles voient , les boiteux marchent ». Il se plaît de toucher , quoiqu en peu de mots , les prophéties qui s'accomplissent en sa personne; afih de nous faire comprendre ce que l'apôtre saint Paul nous a si évidemment démontré, « qu'il est la fia » de la loi (3) », et Tunique sujet de tous les oracles divins. . . ... Donc, mes Frères, reconnoissons la puissance de notre SauA^eur dans les remèdes qu'il nous apporte^ touché de compassion de nos maux. Certes je sais (*) IsaL XXXV. 4- — (*) Ibid, 5,6,— (') Rom, x. 4- COMME OBJET DE SCANDALE. 23^ ^e le 'Fits de Dieu- venant enseigner sur la terre une doctrine si incroyable quétoit la sienne , il falloit quil la confirmât par miracles, et qu'il jus- tifiât la dignité de sa mission par des effets d'une puissance surnaturelle. Mais cela n'empêche pas que je ne remarque la bonté qu'il a pour notre na«- ture y dans le plaisir singulier qu'il reçoit de donner la guérison à nos maladies. Oui Je soutiens que tous ses miracles viennent d'un sentiment de compassion. Plusieurs fais considérant les misères qui agitent la vie humaine y il ne nous a pas pu refuser ses larmes. Jamais il ne vit un misérable qu'il n'en eut pitié ; et je pense certainement qu'il eut été; chercher les malheureux jusqu'au bout du monde ^ si Jes prdres de Dieu son Père et l'ouvrage de notre rédemption ne l'eussent arrêté en Judée.: « J'ai, dit-il, compas- » sion de ce peuple (0 >> ; avant que de multiplier les cinq pains. Il fut ^ût été la divinité, etr leur vie l'immortalité., .. .,.;, Et en effet, chrétieA$.audit0ut*^» tant que cette innocence eût duré, Dieu sV^i^stint intérieurement à nos âmes, y eût versé l'in/luence de vie avec une telle abondance , qu elle se fût débordée s\ir le corps : de sorte que rhomp^ji^iv.ant;dç J)|ieu n'âu- roit eu aucun trouble en l'esprit; ni aUCM^e .iofir'« mité en la chair. Le péché, nous Ay^^t retirés de Dieu, il .a fallu nous faire voir combien nous ber'« BOSSUET. XI. i6 34^ SUA jésVS-GHRIST dïans ; tdlement que Famé ne buvant plus à cette fontaine de vie éternelle , devenue elle-même im- puissante f elle a aussi laissé le corps sans vigueur. C*ést pourquoi je ne m'étonne pas si la mortalité s'en est emparée ; et 4è^lQx*s cette chair qui tend à la mort, a été découverte à toute sorte d'injures; et penchant continuellement à sa fosfie^^^^étlë^st^e- ven^e sujette nécessairement à de grandes vicissi* tudes, et par conséquent à de mottelle^ altérations. Et dans tous ces malheurs , que voyons- nous autre chose y fidèles ; car je vous en fais juge^; qu'uae juste punition de notre péché? d'autant qu'il étoit plus que juste que l'incorruptibilité abandonnât l'homme^ puisqu'il ne vQuloit plus en jouir avec Dieu. Ce qui étant ainsi supposé, il est très-certain que le Fils de Dieu, qui d'abord pénétroit toutes choses, quand il voyoit les fièvres , les paralysies et les autres mala- dies corporelles , alloit à ta source du mal , je veux dire à cette première désobéissance. Dans la peine il ne considéroit que le t^rîme, et c-ést ce qu'il dé- ploroit davantage. Il savoit bien que les afflictions de la chair, n'étant que la punition, elles ne pou- voient pas être le plus grand mat. Il n'est pas en la puissance même de Dieu qu'il y ait une misère plus grande que le péché. Je sais que cette vérité offense les sens humains : hélas ! mortels ignorans que nous lommes , nous ne comprenons pas quelle misère c'est que d'offenser Dieu ! Dites à un homme qui est sur la roue, s'il lui reste assez de sentiment pour vous écouter, dites^lui qu'il est malheureux, non pas tant de ce qu'il est puni , que de ce qu'il est coupable } que sa plus COMME OBJET DE SCANDALE. 24^ grande misère est d*étre homicide , et non pas d'être rompu vif: quand est-ce qu'il entendra ce discours? Son ame, oppressée de tourmens, ne s'arrête qu au plus sensible et non pas au plus. raisonnable. Il s'ir- ritera contre vous ; et une telle proposition lui aug« menteroit son supplice. Et toutefois est- il rien de plus nécessairement véritable 7 Car c'est une chose certaine que la plus grande misère vient du plus grand mal ; et }e ne craindrai point d'assurer que la peine, au lieu d'être un'tnal , est un bien ; d'au- tant que c« qui fait le mal^ c'est l'opposition au sou-^ Terain bien qui est Dieu. Or la peine n'est pas contre Dieu : au contraire elle s'accorde avec sa justice : est^-ilpas très* juste que le pécheur souiFre', et que le crime ne demeure pas impuni ? Et la justice n*est-^ ce pas un graqd bien ? Par conséquent si la peine est un mal, ce n'est qu'à l'égard du particulier; mais c'est un très-grand bien à l'égard de l'ordri^ commun. Et comment? C'est que le péché met la désordre dans Tunivers. C'est un désordre visible que les commandemens du souverain soient mal obsei^vés : donc le péché met le désordre au monde* Et toutefois le maître dç l'univers ne peut souffi ir de désordre dans son ouvrage. Que fait-il ?• Il établit deux ordres : l'un de ses réglemens étemels sur les^ quek les volontés droites sont composées \ l'antre ; c'est l'oiUre de fa justice qui rfeinge les volontés dé- réglées. Ces deux ordres sont fondés tous deux sur cette loi immuable , qu'il faut que la voldnté divine se fasse ^ ou dans l'obéissance des bons, ou dans le supplice des criminels. « Ceux qui ne veulent' pas » faire ce qu'il veut, lui-même il en fait ce qu'il à44 ^^"^ JÉSUS-CHRIST » veut » f dit saint Augustin : Ciim faciunt quod non vons croire que tant de pécheurs ont excité dans le cœur de notre Sauveur uiie douleur qui ne peut être comprise. Ah! si notre Seigneur Jésus-Christ a eu une douleur si sensible pour les moindres de toiis les maux qui sont ceux qui travaillent ce corps mortel, il n^est pas imaginable combien ardemment il a désiré de donner le remède aux péchés qui abî^^ moient les âmes qu'il étoit venu racheter, dans la dernière extrémité de misères. C'est pourquoi s'il a donné des larmes a^x maux du corps, il a donné aux maladiesede nos âmes jusqu'à:, la dernière goutte de son .^ivin sang. S'il a guéri les infirmités corporelles par la tertu de sa seule parole avec une incroyable facilité, il a voulu purger nos iniquités avec des douleurs inconvpréhensibles ; comme dit le pro- phète Is4ïe (0 , que « Dieu l'a frappé pour les péchés s> de son peuple, qu'il a porté nos péchés sur son » dos, et que nous avons été guéris par ses plaies». C'est parce sang et par ces souffrances qu'il a ou- vert à la m^son de David cette belle et admirable fontaine dont parle le prophète Zacharie en son treizième chapitre. « En ces jours-là, dît-il , jaillira P une fontaine à la mai$pn de David et aux habi- j» tans.de Jérujsalem, pour la purification des pé^ » cheur^ (2) ». C'est à vous , c'est à vous , chrétiens, (0 Isai, un. 4y 5y 8. •— C*) Ztuih, xiii, i. ^4^ STTR JÉSUS-CHRiéT qu est ouverte cette fontaine. Vous êtes les vrais ha- bitans de Jérusalem ^ parce que vous êtes les enfans de r Eglise ^ et les héritiers des promesses qui ont été faites à la syâagogue^ Vous êtes la maison de David ; parce qu.e vous êtes incorporés à Jésus le fils de David , et que sa chair et son sang ont passé à VOU&. Accourez donc à cette miraculeuse fontaine; venez y laver vos iniquités. On court avec tant d'empressement à ces bains que Fou s'imagine être salutaires au corps y et on néglige ces divines eaux oii se fait la purgation de nos âmes. O stupidité ! & aveuglement ! Si vous avez bien com]iris, chrétiens , quel mal c'est que d'offenser Dieu y combien il est terrible et inconcevable; que ne courez-vous au remède que le miséricordieux Jésus vous présente dans la pénitence? Ah! fidèles , c'est par ce canal que coulent ces eaux saintes et purifiantes. O Dieu I que |e m'^estimerois bienheureux ^ si l'avois pu servir à vous faire entendre que les plus cruelles maladies ^ont moins que rien ^ si nous les comparoiis au venin ^ à la peste , qu'un seul péché mortel porte dans nos âmes ! Prions donc le miséri- cordieux Médecin qui a tant pitié de nos maux, qu'il fasse ce qu'il voiidra de nos corps ^ pourvu qu'il sauve les âmes. Quand nous sommes dans les douleurs violentes, répandons notre ciœur devant lui, et disons avec une foi vive : Charitable et misé* ricordieux Médecin , descendu du ciel pour me traiter de mes maladies qui sont innombrables ; ou je suis bien malade en mon corps , si mes douleurs sont aussi grandes que je les ressens; ou je suis bien malade en mon ame^ puisque je tn'a^ge si fort pour COMME OBJET DE SCANDALE. 24?^ 4e petits maux : ou plutôt je suis bien malade en Tuii et en Tautre , parce que et les dauleuçs que jc^ sens sont très^aigues^ et que mon esprit .s'abat trop pour des maux qui , tout cruels qu'ils sont , sont au- cunemei^t supportables» J'avoue devant vous.^ 6 mon Dieu y que la rai^n devroit tenir le dessuf plus qu'elle ne fait : mais que ferai-^je? Ma chair est infirme^ et vous savez. Seigneur^ combien elle pèse à l'esprit. Pourquoi est-ce ,6 bon Médecin , que vous ne me rendez pas la santé ? Vos grands miracles me font bien connoitre que la puissance de me sou- lager ne vou^ manquje pas. Que vous ne soyez point touché de qe que j'endure^ vous qui avez toujours 'eu une si gcande^ compassion^ pour les misérables^ , vous que; nos seules misère$;0^t attiré en ce iqoii^^?,? afin de remédier à nos Qiaux ; «h ! certainement ie ne le puis croire, et sans doute cela n'est .pas. Jl fjaut donc dire nécessairement qu'il n'est pas expédient que je guérisse, et qu'il est expédient que je souiTre: ainsi soit-il, puisqu^ainsi vous plaît. Cette ^ méde- cine est an)èrf , mais elle me dqit être- très^doux^e d'une niain^si chère et si bienfaisante. Oui j, je le rer conçois, mpui â^uveur^ il;,n'/5$t:pas^^ncpfejt;e^ps de guérir iiv>a .ço^ps* Il v^e^ira, il vi^ndr^,. çf temps, bienheureux, où. vous 'établirez dans, une ineorruptil^e) santé cette chair que vous ^yez ai;- mée, piiisque vous en avea^ pris une de même nature. Alors ma chair se portera bien^ parce qu'elle, sera faite semblable ^ la vôtre, à laquelle j'ai participé dans vos saints mystères^ Soiifirons en attendant, «si vous le voulez;. Mais du moins, ô ma douce espérance , ô mon aimable consolateur , ^48 SUR léSUS-CHKIST guérissez les maladies .de mon ame. Modérez les èm^ressemens de mon avariée > et Fardeur de mes &Ues' amours, et là 'dangereuse précipitation' der mes jugemens téméi'aires y et TindisGrëte chaleur dé mon' ambition mal réglée. Je n'ignore pa^îqde mes maladies sont de justes punitions de! mes - cririiès : vous , ô mon unique lîb&ateur ,• qui pour moi tour-* nez en bien toutes choses , faites que les 'peines de mes péchés soient le sceau de vôtre tàiiséncorde , Texercice de ma patience, etTépreuvéde ma vertu. ' En est-ce assez, fidèles , sur cette mafiè^ë? AVèz- vous pas. connu Jésus<;Christ comme médecin des iniirmes? Voulez-vous que nous pài9ions en ùa mot de Jésus compagnbn et évangéiisiê d<és'jf)âuvi:€S3, nfin de considérer uii^ peu plus long-^téUnpSi Jésiti' scatidalé des infidèles ? Renouvelez ; s'il votes 'plaît , vos attentions, ■ -• ' ' - 1 * ' SECOND POINT, i 1 1 î • ' ,. ' • { I i ■.'...,,.. T ' : j t. .:.,'. ' . . ■- . ' ' \ : X j ^ • > G^^éMi: le proplisèta^isàïe qui iiotis ayant fMt voir Jésos-Ghrist donnant la guértson à^ ho$ maladies y nous dira aussi qu il est envoyé poiti' étrfe'Févahge- liste' dés piauvres!: où par létnot^cjffetttres*, vous tlevéz entendre ' généi^alement tèils tes îafflî^ qùé Jésus devoït évangélisfer ^ c^èst-à-diréleui* portef de bonnes nouvelles. Cela étant ainsi supposé ^^ëcouteift maihtehafnt Isaïe en sèU' chapitre sbixante-iihième ; où il parle ainsi du Messie. « L'Esprit de Dieu, dit-^ i> il, est sur moi, à cause qu'il m'a oint <») ».' Arré* tbns-nous à ces mots y chrétiens / et pénétrons-en le sens. Je dis , avant toutes choses , ^ue le prophèto •« j (0 Isai, Lzx. I. COMME OBJBT OK SCÂlfDÀLC. a4d parle en la personne d'un autre, selon lé style or- dbaire de l'expression prophétique. Car nous ne lisons rien dans les Écritures dé fonction du pro*-' pbète Isaïe. Mais qui seroit cdûi ; <^t étant un peu instruit du christianisme, i^ verroit pas que pan ces paroliQs il a ttianifestemént .désigné lé Sauveur du monde 7 L'Esprit de Dieu «st sur moi, dit-il. Et lui-même n'a-t-il pras dit , « qu'il' sortir6it iine fleui' » de la racine de Jessé, et que sur elle reposeroit » l'Esprit du Seigneur (0 *> ? Vous savez que Jessé ^ c'est le père du roi David. Qçelle est cette fleur de la racine de Jes^é , sinon le Sauvéïit* Jésus, qui est sép^ pelé par excellence le fils de i)avid ? Et n-i^t^cé ]pM sur lui que l'on à vu descendre le Saint-Esprit en là f. -^ (^ MauJi, ▼. 5. 25â SUR jÉstrs-cHmsT ^ l'an de pardon du Seigneur (0 : c'est ce qui est ap. pelé ailleurs le temps d'indulgence, le temps de mi- séricorde. Et n'est-ce pas ce que fait le Sauveur Jésus, nous annonçantla miséricorde en ces termes? « Bien- » heureux les miséricordieux , car on leur fera mi- » séricorde (^) » ! Isaïe assure qu'il doit annoncer à ceux qui se lamentent en Sion , que leur tristesse sera changée en joie (3). Sion , c'est le lieu du tem- ple de Dieu ; c'est la figure de son Eglise. Ceux qui se lamentent en Sion , ce sont ceux qui se plaignent de cet exil , qui, éloignés de leiir terre fatale, souf- frent ordinairement persécution dans ce triste pèle- rinage. Jésus donc pour leur annoncer le change- ment de leur état misérable en une condition tou- ^oui^s bienheureuse, parle ainsi en ce même lieu: ic Bienheureux ceux qui souffrent persécution pour » la justice , parce que le royaume des cieux est à y> eux (4) > } C'est ainsi^ que notre Seigneur évangé- lise les âflligés , exéc utant ponctuellement les pro- phéties anciennes. • Pourquoi ne în'écrierai-je paîs en ce lieu avec le grave- Tertttllien, dont j'ai tiré presque toutes les re- marques que je viens de faire en son quatrième livrç contre Marcion (5); pourquoi, dis-je, ne m'écrierâi-je i>ag avec lui ? O Chrùtum et in nopis veterem ! «0 » que Jésus^Christ est ancien dans la nouveauté de ^ son Evangile » ! Ce qu'il fait est nouveau, parce que perspfine âe l'avoit fait avant lui : ce qu'il fait est ancien, parce qu'il ne fait qu'accomplir les cho- ses que ja fidèle antiquité avoit attendijies. Quel autre (0 Isai. LXi. a. -- (*) 3fauh. v. 7. — (3) Isûi. txi; 3. — (4) Mauh. T. 10. — (^) Adw. Marcion. lib. ly^ /t. ai. t COMME OBJET DÉ SGÀK'DALE. ^53 a jamais apporté de meilleures nouvelles aux pauvres que celles que le pauvre Jésus leur a annoncées ^ quand il leur a prêché sa venue! O pauvres, ré- jQuissez-vous , voici un compagnon qui vous vient ; mais un compagnon si grand et si admirable, qu'il vaut mieux être pauvre en sa compagnie, que d'être le maître et le tout-puissant dans les assemblées des mondains. Ne vous étonnez pas si vous êtes le re- but du monde : tel étoit Jésus-Christ lorsqu'il a paru sur la terre, et a conversé parmi les hommes. Les pauvres , ses bons amis ^ apprirent les premiers sa venue , parce que c'étoit pour eux qu'il venoit ; et il ne voulut être reconnu que par les marques de sa pauvreté. La suite de sa vie n'a pas démenti sa naissance. Plus il s'est avancé dans Fâge, plus il a mis les pauvres dans ses intérêts, qui n'étoient antres que la gloire de Dieu. C'est eux qu'il admet dans sa confidence ; c'est à eux qu'il découvre tous ses mys^ tères ; c'est eux qui sont choisis pour les ministres de son royaume^ et les coadjuteurs de son grand ouvrage. Courage donc^ ô pauvres de Jésus-Christ; que toute la terre vous méprise , c'est assez que vous ayez Jésus-Christ pour vous. Vous n'avez point d'ac^ ces dans la cour des rois; mais souvenez [-vous] que c'est là que règne la confusion et le trouble; Courez à Jésus-Christ, ô vous qui êteç oppressés, ô mâla-*^ des , nécessiteux, misérables, généralement qui que vous soyez ; vous y trouverez la paix de vos âmes. Ecoutez la voix amoureuse qui vous appelle. Je^ez^ vous entre ses bras avec confiance , il les a toujours ouverts pour vous recevoir. Seulement souiTrez vo^^ tre pauvreté avec patience : ne murmurez ni contre a54 SVB. JÉSUS-CHRIST Dieu ni contre les hommes. Attendez doucement le temps de votre consolation ; et souvenez-vous c{ue> si le monde vous tourmente , vous servez un mattre qui Ta surmonté , qui n*a pu plaire au monde , et à qui le monde aussi n a pu plaire. C'est ce qu'an- nonce aux pauvres le Sauveur Jésus. Dites^moi , en vérité y chrétiens y pouvoit-il leur dire de meilleures nouvelles? Et n'avons-nous pas raison d'assurer que c'est lui véritablement qui est envoyé pour être l'é- vangéliste des pauvres» TROISIÈME POINT. Ce qui m'étonne , fidèles , c'est que le Sauveur du inonde étanjt tel que nous le venons de dépeindre , on ait été offensé de sa vie. Repassons en peu de motSy je vous prie, sur les choses que nous avons dites ^ et étonnons^nous devant Dieu, que l'on ait pu être scandalisé en notre Sauveur. Et première- ment, ms miracles devbi^ii-ils pas faire taire les Lou<^es les plus médisantes? Une mission si bien at* testée devoit-elle être jamais contestée ? Encore s'il eût fait des miracles qui n'eussent de rien servi que pour faire éclater son pouvoir, peut-être auroit-oa pu dire qu'il y avait de l'ambition dans ces grands ouvrages. Mais je vous ai montré que tous ses mî^ racles ont pris leur naissance dans une tendre com*- passion de nos maux, et jamais il n'a fait un pas, que pour le bien de ce peuple ingrat. Faisons iké^jamoins qu'une noire envie ait encore pu se per* snader qu'il se se(voit du don de Dieu pour s'ac- quérir du crédit; qn'avoit-on à dire contre sa sim* plicité? L'a-t-on vu à la porte des grands pour men- COMME OBJET DE aCi.irDALE. !l55 dier leur faveur ? S'est-il intrigué dans les afiàires du monde ? A-t-U flatté l'ambition et Tarrogance des princes ? Au contraire n'a-t-il pas mené une vie* noQ-$eulemeat commune et privée ^ mais trè&ab)ecte et très-basse ; marchant en toute simplicité , vivant et conversant avec les |)auvres , soufirant toujours injustioe sans jamais se plaindre 7 II est vrai qu'il était méprisé y mais il ne se soucioit point des bon-* oeurs; pauvre, mais il ne demandoit point de ri^ chesses , bien qu'il n'eut pas seulement un gite as« sure pour reposer sa tête. Pouvoit-il s'acquitter plus dignement de sa cbarge de prédicateur ? Il alloit enseignant la parole de vie éternelle que Dieu lui 9toit mise à la bouche. Iln'enfloit pas son discours par de superbes pensées, ou par le faste d'une élo^ qvence mondaine ; mais il le remplissoit d une doc^ trine céleste , de vérités divines , qui donnoient aux âmes une nourriture solide, et alloient jusqu^à la ra- cine de nos maladies. Tantôt il attiroit les peuples par la douceur, tantôt il les reprenoit sans les épap- ^r , jusqu'à les appeler les enfans du diable ^ leur préchant les oracles divins , non point avec les là-* ches condescendances des scribes et des pharisiens , mais avec empire et autorité (>), avec une liberté et une assurance , digne des vérités étemelles qu'il nous venoit ann O Dieu ! qui ne seroit étonné des secrets terribles delà Providence? C'est ici que je di& du plus grand sentiment de mon ame avec le grave Tertuilien : MiJd vinéUco Christum, mihi defendo Jesum;.*..^ quodcumque illud corpusculum sit W : Cet innocent contredit par toute la terre , c'est le Jésus-Christ que je cherche : je soutiens que ce Jésus est à moi, )e proteste qu'il m'appartient. « S'il est déshonoré^ » s'il est abject , s'il est nûsérable ; j'ajouterai en* » core y s'il est le scandale des infidèles , c'est mom » Jésus-Christ » : Si inglorius ysi ignobiUs , si inho^ noraèilis , meus erit Christus. a Car , poursuit le » même Tçrtullieu y il m'a été promis tel dans lé» » prophéties » : Talis enim habiiu et aspeçtu emnun-^ tiabatur. Je reconnois celui duquel Isaïe a écrit au chapitre vingt-huitième , que c'est « une pierre » élile, une pierre de salut (^) » pour son peuple^ et au chapitre huitième , que c'est « une pierre » d'achoppement, [ que ] tous ceux qui s'y heur- » teront seront, brisés (4) »« Je reconnois celui duquel le Psalmiste a chanté : «La pierre qu'ils ont rejeté^ D en bâtissant, est devenue la pierre angalaireC^) -> qui soutient tout le Corps de l'édifice. Enfin je re* connoi3 celui duquel Siméon a dit, le tenaùt entre C») Maith, XI. 6. — (») Adw. Marci. Ub. iii, «. i6 e< i^. -^ t^) Esaii xxTiii. i6. — W) Ibid. Tiii. i4 W Ps. cxTii. ai; ses GOMME OBJET DE SCANDALE. 287 ses bras dans le temple : soutenu « sur le fondement des » apâtres ^ et sur la pierre angulaire qtii est Jésus- i M Christ (0 >». Dieu donc, dans le ooors des siècles, s'est proposé de rétablir rhomtne comme un bâti-- ment ruineux* Il h posé I0 fondement de cette nou- velle structure en Id vie dé notre Sêdgneur. Les sens humains n*y comprennent rien ; tout les choque, tout leâ embarrasse : de fit 1^ scandale et le trouble. Mais à ce grand jugement où Dieu couronnera Tédi- fice par la glorieuse immortalité de nos corps, ok toutes choses étant consommées , « il sera tout en I» tous » , comme dit l'apôtre (^) ; alors la lumière éternelle venant à se*découvrir à nés c<»ttrs, quel ordre, quelle sagesse, quelle beauté ne verrons- iaous pas dans ce qui paroksoit à nos sens n confus - et si mal digéré! Par conséquent, ô hommes crois en attendant que tu voies. Sache que la guérison de tes maladies dépend absolument de la coofiaaoe que tu auras en ton méklecin : Croisettuserassauvé, nous dit-il (3} : prends sans examiner Tiiifàillîlde remède qu'il te présente. S'il s'en réserve le stcret pour un temps , dès à présent û t'en abandonoe Ttisage ; et sa miséricordieuse bonté a tellement disposé toutes iehoses, qu'y croire, c'est ta santé ^ le connoitre, ce sera ta f^ité. Est-fl rien de plus convenable? D'autant plus que ce grand médecin qui entreprend de traiter tes (0 Ephes» II. 20. — (») /. Cor. xy, a8. — • W Luc. vin. 5q. J GOMME QBJET DE SCANDALE. a5g plaies y eonnoissant parfaitement leur malignité et le vice de ta nature ^ a bien vu qu'il n*y avoit rien qui te fût plus propre ni plus nécessaire que Thu- milité. O homme y si tu Tentends^ Torgueil est ta maladie la plus dangereuse. C'est par Torgueil que secouant le joug de Tautorité souveraine ^ par la- quelle ton ame doit être régie ^ tu t'es fait toi-mémë ta loi : la conduite de ta raison ^ ç ont été ses propres lumières ; la règle de ta volonté^ ç'ont été ses incli- nations. Cest là ta blessure mortelle. Il faut que ces deux facultés soient humiliées^ afin qu'elles puissent être guéries. Comme ta volonté s'abaisse par l'obéis-» sance, ton entendement se soumet par la foi. Tu soumets ta volonté à ton Dieu > quand tu embrasses les choses, parce -qu'il les veut : tu lui soumets ton entendement y quand tff. les crois, parce qu'il les dit. Cette soumission te semble bien grande. Mais un Dieu- homme pour Famour de nous, un Dieu mort pour l'amour de nous , veut Un sacrifice plus entier dans un abaissement plus profonde Car un Diena-homme et un Dieu mourant ^ n'est-ce pas un Dieu anéanti^ comme dit l'apôtre (0? Et quel doit être le sacrifice d'un Dieu anéanti pour l'amour dé l'homme > sinon l'hoiamef aiféanti devant Dieu? Or ce ne seroit pas faire beaucoup pour lui que de pratiquer les choses aisées f et de croire colles qui sont plausibles ; de sort^ que pour la perfection de ce sacrifice que nous devons ôfirir au Dieu incarùé, il £dloit y et faire les choses qui sont pénibles , et croire les iofcroyàbles. Ainsi nous détruisons devant lui tout ce que nous sommes, afin que tout soit ré- a6d SUR JÉSUS-CHRIST paré de sa main. C'est pourquoi il étoit à propos pour rétablir la raison humaine par l'humilité, que les vérités de Jésus fussent incroyables. Et tout ce qu} est incroyable y est choquant ; et tout ce qui est cho- quant y fait du trouble : de là le scandale des infidèles. Davantage : la vérité la plus importante qu'il fal- loit nous faire connoître, étoit notre foiblesse et notre impuissance , parce qu'en nous montrant clai- rement combien nous sommes impuissans par nous- mêmes , c'étoit l'unique moyen de nous faire recou- rir avec confiance au mérite du libérateur Jésus- Christ. Or quand je vois sa doctrine et sa vie si cruellement combattues , voici la réflexion que je fais. D'où vient cette résistance si furieuse que l'on apporte à l'œuvre de notre salut? N'est-ce pas ce que dit saint Paul ; « L^omcie animal ne comprend » pas les secrets de Dieu (0 »? N'est-ce pas ce que dit Jésus-Christ : « Pourquoi n'entendez -vous pas » mes discours ? Parce que vous ne pouvez pas en- «> tendre mon langage (s) ». D'où vient qu'ils ne pouvoient pas entendre son langage ? C'est qu'ils le vouloient entendre par eux-mêmes ; et il leur étoit impossible. N'entendant pas ce langage, ils ne pou- voient qu'être étourdis de la voix de Dieu : cet étourdissement les animoit à la résistance. Plus les vérités étoient hautes -y plus leur raison orgueilleuse étoit étourdie , et plus leur résistance étoit enflam- mée. C'est pourquoi je ne m'étonne pas si le Fils :de Dieu leur prêchant ce qu'il avoit vu dans le sein du Père, la résistance montant à l'extrême, se por- tât à la dernière fureur. De là vient qu'il leur dit 0) /. Cor, II. i4> <— ^ Joan. yiii. 43. COMME OBJET DE SCANDALE. 261 en son évangile : « Vous n^ voulez tuer méchâm- ^ ment^ parce que mon discours ne prend point en n vous(0». Superbes y îgnorans^ que ne recourez- vous à la grâce par Thumilité chrétienne? Et vous^ nereconnoissez-vous.paSy chrétiens ^ que sans Tassis- tance de cette grâce vous nauriez que de la résis- tance pour votre Sauveur ? Ces perfides ont ouï ses psuroles ^ et ils les ont méprisées : ils ont vu ses mi«- racles , et ils n ont pas cru : ils ont vu sa vie , et elle leur a été un scandale. Donc il ^st vrai, ô mon Sauveur lésus y que si vous ne me parlez puissam- ment au cœur, si vous ne m'entraînez à vous par vos doux attraits, ni votre vie quoique très-innocente |, ni votre doctrine quoique très-sainte, ni vos mira- cles quoique très- grands, ne dompteront pas mon opiniâtre rébellion. Les .uns disent que vous êtes un gi^and prophète, les autres que vous êtes un séduc- teur; les uns s'édifient en vous, les autres se scan- dalisent de vous. D'o& vient cela, ô mon maître^ sinon que les uns sont humbles , et que les autres sont orgueilleux ; que les uns suivent la nature , et les autres suivent la grâce 7 Ainsi vos vérités aveu* glent les uns, pour illuminer d'autant plus les au- tres. Vous êtes une pierre de scandale aux superbes ; afin que les humbles ressentent mieux ce que vous faites miséricordieusement en leurs cœurs, et qu'ils louent vos bontés avec une admiration profonde de vos jugemens. C'est ici que les bons chrétiens sont incroyablement consolés. Si les vérités évangéliques entroient en nos âmes avec une apparence plau- sible ^ nous attribuerions leur victoire à la force de (0 Joan* Yiii. E7. â6'J SUR JÉSVS-CH&IST notre raison; et devenant plus superbes^ nous de- viendrions par conséquent plus malades. Mais quand le vrai fidèle comprend la fblie et l'extravagance du christianisme ^ c*est là que la gv^ce se fait sentir dans la répugnance de la nature ; à cause qu'il re- connoit que ce n'est pas la chair qui le gagne ^ ni les intérêts mondains qui l'engagent ^ ni la philoso- phie humaine qui le persuade; mais la puissance divine qui le captive. C'est pourquoi dans la doctrine de l'Ëvangile il a plu à notre grand Dieu , qu'il y eût tant de choses étranges , dures , incroyables , extravagantes y selon la sagesse du monde; afin que la raison humaine étant confondue ^ la seule gr^ce de Jésus^Christ triomphât des cœurs par l'humilité chrétienne. Mais disons une dernière raison ^ qui fermera ce discours en nous donnant une instruction impor- tante pour la conduite de notre vie. Certes il est bien vrai, ô Dieu tout-puissant, ce que le bon Si- méon a dit de votre Fils bien -aimé, « qu'il seroit » posé comme un signe auquel on contrediroît (0 ». Toutes ses actions et toutes ses paroles ont été mé- chamment contredites. Il guérit les paralytiques, les aveugles-nés, et d'autres maladies incurables; et parce qu'il choisit le jour du sabbat pour fairç cette bonne œuvre, on dit qu'il viole la loi de Dieu. Il chasse les démons ; on dit que c'est au nom de Béelzé- buth, prince dès démons. Qn l'appelle un fou, un sé- ducteur, un impie, un démoniaque. Jamais le3 doc- teurs de la loi n'approchoient de lui, qu')afin de Tin- )urier ou de le surprendre* Enfin ils l'ont pendu à la (*) Lue. II. 34« COMME OBJET DE SCANDALE. ^63 croix ; et le Rédempteur d'Israël est devenu le scan^ dale de ces infidèles. Les gentils ont contredit sa parole par toutes sortes de cruautés qu'ils ont exer-» cées sur ses serviteurs. Ils ont pris ses vérités et soii Evangile pour la plus grande folie qui ait jamais paru sur la terre. Bien plus, parmi ceux qui se sont rangés sous sa discipline, combien a-t^il été contre- dit? £h ! mes Frères , quelle indignité ! Tous les fondemens de notre s^ut ont été attaqués par des gens qui faisoient profession du christianisme. Lç perfide arien a nié la divinité de Jésus ; Tinsensé Marcion a nié son hutnanité ; le nestorien a divisa les personnes ; Feutychieû a confondu les natures ; et sur la personne da Jésus-Christ, toutes les inven- tions diaboliques se sont tellement épuisées, qu il est impossible de s*imaginer une erreur qui non-seu*- lement n'ait été soutenue, mais même qui n'ait fait une secte sous le nom du christianisme. Ck>mbiei)L d*hérésies se sont élevées contre les vérités de Jésus I Toutes , elles ont heurté contre cette pierre ; et sans venir au détail , ayant rompu stoft aucun sujet la paix et Funité chrétienne, ne se sont-c^s pas scandalisées de Jésus, auteur de la paix et de la charité fraternelle ? Mais allons encore plus avant Que les gentils, que les Juifs, que les hérétiques se soient scandalisés du Seigneur Jésus , cela est supportable ; on souffre facilement les injures de ses ennemis. Mais , 6 dou- leur ! que les catholiques, que les enfans de sa sainte Eglise, que les vrais sectateurs de sa foi vivent de telle sorte en ce monde , que Ton ne peut nier que Jésus-dhrist ne les dioque et que son Evangile n^ leur soit( un scandale; c'est, mes Frères, ce qui est déplorable beaucoup plus que je ne puis vous le 264 SVH XÉSUS'^CHRIST dire. Quand rkumilité, quand Tintégrité, quand le mépris des honneurs de la terre ^ bref quand rinno« cence te choque , chrétien , oserois-tu dire que tu n*espas choqué du Sauveur ? Ignores-tu que sa doc- trine n*est pas seulement la lumière de nos esprits ^ mais qu elle est le modèle de notre vie ? Si Jésus est le scandale de ceux qui errent dans la doctiîne, parce quils n'écoutent pas Jésus -Christ comme notre infaillible docteur; ne Test-il pas aussi de ceux qui sont dépravés dans leurs mœurs , puisqu'ils ne veulent pas le connoitre comme l'exemplaire de notre vie? Et' qui trouverai-)e donc dans le monde qui ne soit pas scandalisé en notre Sauveur? Nous aimons les richesses, et Jésus les a méprisées : nous courons après les plaisirs , et Jésus les a condamnés: nous somn^es ibus du monde , et Jésus Ta surmonté. Et comment pouvons-nous dire que nous aimons Jésus y nous qui n'aimons rien de ce que nous voyons en sa personne y et qui aimons tout ce que nous n'y voyons pas ? En vivant de la sorte , peux-tu nier que tu ne sois choqué de Jésus? Tu n'en hais pas le nom y mais la chose t'est un scandale. Oui, Jésus t'est un scandale y ô vindicatif , parce qu'il a par- donné les injures. Jésus t'est un scandale , ô usurier, parce qu'il est le père et le protecteur des pauvres, auxquels ton impitpyable avarice arrache tous les jours les entrailles. Jésus t'est un scandale, hypo- crite, parce que tu fais servir sa. doctrine de cou- verture à tes mœurs corrompues. Jésus t'est un scandale, ô misérable superstitieux, qui pour des fantaisies particulières abandonnes la piété solide et la dévotion essentielle du christianisme, qui est la croix du Seigneur Jésus. Jésus t'est un scandale. COMME OB^ET DE SGAlTDÀLB. 26S à toi qui traites la simplicité de sottise , et la sincère piété de bigoterie ; à toi enfin qui par ta vie déré- glée fais blasphémer son saint nom par ses ennemis. Gela étant ainsi , chrétiens , à qui est-ce que Jésus n'est pas un scandale 7 ce Tous cherchent leurs in* » téréts et non pas ceux de notre Sauveur » , disoit autrefois l'apôtre saint Paul (0 : O Dieu , que diroit- îl, s'il revenoit maintenant sur la terre? Voyant la licence qui règne au milieu de nous, y voyant triompher le vice, nous prendroit-il pour des chré- tiens, ou plutôt ne nous rangeroit-il pas au nombre des infidèles ? Eh! d'où vient, ô Dieu tout-puissant, d'où vient que vous permettez que votre Fils ait tant d'adver- saires , et si peu de vrais serviteurs ? J'entends votre dessein , ô grand Dieu : vous voulez que dans cette confusion infinie de ceux qui contredisent notre Sauveur, ceux qui l'honorent sincèrement tiennent cette grâce plus chère : vous voulez que leur foi soit plus ferme , et leur charité plus ardente parmi les oppositions de tant d'ennemis ; et que Jésus re- trouve dans le zèle du petit nombre , ce qu'il semble perdre dans la multitude innombrable des ingrats et des dévoyés. Par conséquent, mes Frères, aug- mentons notre zèle pour son service. D'autant plus que nous voyons tous les jours augmenter le nombre de ceux .qui blasphèment son Evangile, ou par leurs erreurs, ou par leur mauvaise vie; efforçons-nous d'autant plus à lui plaire, et à étendre la gloire de son saint nom : tâchons de lui rendre l'honneur que ses ennemis lui ravissent. Disons-lui de toute l'affection de nos cœurs : Quoique' le Juif enrage , (0 Philip, II. 24. a66 SUE JÉSUS'CHRIST COMME OBJET DE SCANDALE. que le gentil raille y que Théiétique s'écarte , que le mauvais catholique se joigne au parti de vos enne- mis; nous confessons y ô Seigneur Jésus, que vous êtes celui qui devez venir : vous êtes ce grand Sau* veur qui nous est promis depuis Torigine du monde : TOUS êtes le médecin des malades, vous êtes Tévan- géliste des pauvres : et en cela que vous paroissez comme le scandale des orgueilleux , vous êtes Ta- mpur des simples , et la consolation des fidèles. Vous êtes celui qui devez venir; nous n'en connoissons point d'autre que vous , nous n'en attendons point d'autre que vous r « Il n'y a point d'autre nom sous » le ciel par lequel nous devions être sauvés (0 ». Par conséquent , fidèles, puisque nous n'en atten- dons point d'autre que lui , mettons notre espé- rance en lui seul. S'il est vrai que nous n'attendions plus un autre maître que lui pour nous enseigner , observons fidèlement ses préceptes* Si nous n'atten* dons point un autre pontife qui vienne purger nos iniquités, gardons soigneusement l'innocence. Et d'autant que le même Jésus, qui est venu en l'in- firmité de la chair , viendra encore une fois glorieux pour )Uger les vivans et les morts ; « vivons justement s> et sobrement en ce monde ; attendant la bien- » heureuse espérance, et la triomphante arrivée de » notre grapd Dieu et rédempteur Jésus-Christ (^) », qui détruisant la mort pour jamais nous rendra compagnons de son règne et de sa bienheureuse immortalité. Ainsi soit-il. 0) ^€t ly. la. — C>) TiJt. ii. la» i3. EXORDE POUH LE U«* SIMANCHB DE l'àVENT. 267 EXORDE D'UN SÇRMON SUR LE MÊME TEXTE (*). PRÈCBÉ DEVANT DE3 RELIGIEUSES, %<%^^^^i%^/%»%/<^»%^^« S^ nous apprenons des Ecritures divines que notre Seigneur Jésus-Christ a toujours été Tunique espérance du monde , la consolation et la joie de tous ceux qui attendoient la rédemption dlsraël ; à plus forte raison, chrétiens, devons-nous être persuadés que Jean-Baptiste son bienheureux pré- curseur n'avoit point de plus chère occupation que celle d'entretenir son esprit de ce doux objet. C'est pourquoi je me le représente aujourd'hui , dans les prisons du cruel Hérode , comme un homme qui n'a de contentement que d'apprendre ce que son maître fait parmi les homa\es , et comme par ses prédica- tions et par ses miracles il se fait reconnoître à ses vrais fidèles, pour le Fils du Dieu tout-puissant. C'est ce qu'il me semble que saint Matthieu nous fait conjecturer en ces mots de notre Evangile : « Jean » entendant dans les liens les grandes œuvres de » Jésus-Christ, il lui envoie deux de ses disciples , » pour lui faire cette demande : Etes-vous celui qui » devez venir, ou si nous en attendons quelque (,*) Cet exorde est écrit à la suite du discours qu^oa vient de lire. ^68 EXOKDE POUR LE II/ DIMÀNCUE DB L*ÀVENT. » autre W » 7 Pour moi^ je m'imagine , fidèles ^ que le fruit qu'il espéroit de cette ambassade , c'est que ses disciples lui rapportant la réponse de son bon maître^ il ne doutoit nullement que sa parole ne dût être pleine d'une si ineffable douceur , que seule elle seroit capable non-seulement de chasser les maux d'une dure captivité, mais encore d'adou- cir les amertumes de cette vie. Chères Soeurs , dans cette prison volontaire où vous vous êtes jetées pour l'amour de Dieu, dites-moi, que pourriez-vous faire sans la douce méditation des mystères du Sauveur Jésus? Et n'est-ce pas cette seule pensée qui fait triompher en vos cœurs une sainte joie dans une vie si laborieuse? Oui certes, il le faut avouer, Dieu a répandu une certaine grâce sur toutes les paroles et sur toutes les actions du Seigneur Jésus ; y penser, c'est la vie étemelle. Oui , son nom est un miel à nos bouches, et une lumière à nos yeux, et une flamme à nos cœurs : et lorsque remplis de l'Esprit de Dieu , nous concevons en nos âmes le Sauveur Jésus, nous ressentons une joie à peu près semblable à celle que sentit l'heureuse Marie, lorsque cou- verte de la vertu du Très-haut , elle conçut en ses chastes entrailles le Fils unique du Père éternel, après que l'ange l'eut saluée par cesicélestes paroles : uive ^ Maria y eic. {})Mau. 3(1.3,3. «p sua LA DiviiriTé de là religion. 269 11.^ SERMON POUR LE IL" DIMANCHE DE L'AVENT; PRÊCHÉ A LA COUR, SUR LA DIVINITÉ DE LA RELIGION. Les moyens par lesquels elle s^est établie , la sainteté de sa morale si bien proportionnée à tons les besoins de Tbomme, preuves évi" dentes de sa divinité. Injustice de aea contradicteurs > infidélité des dirétiens. i^^%<^^%^^/%'»<%^^»%»% Csed vident, claudi ambulant , leprosi mondàntar, snrdi aadionty mortui resurgunt, pauperes evangelizantur : et beatiis est qui non fuerit scandalizatus in me ! Les ai^eugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purgés, les sourds entendent, les morts ressus-^ citent^ VEvitngile est annoncé caix pauvres : et heu* reux celui qui ne sera pas scandalisé à mon sujet l Matth. XI. 5 y Ç. Jésus-Christ interrogé dans notre Evangile par les disciples de saint Jean-Baptiste y s'il est ce Messie que Ton attendoit y et ce Dieu qui devoit venir en personne pour sauver la nature humaine y Tu es qui *verUurus es? ^ Etes-vous celui qui devez venir » ? leur dit pour toute réponse y qu'il fait des biens 270 SUA LA DIVINISÉ infinis au monde, et que le monde cependant se soulève unanimement contre lui. Il leur raconte d'une même suite les bieniaits qu'il répand et les contradictiodift qa^il endure , les mii^acles qu'il fait et les scandales qu'il cause à un peuple ingrat ; c'est^ à-dire qu'il donne aux hommes pour marque de divinité en. sa personne sacrée ^ premièrement ses )>ôntés, et secondement leur ingratitude. En effet , chrétieQS, il est véritable que Dieu n'a |amaiscessé d'être bienfaisant, et que les hommes aussi de leur côté n'ont jamais cessé d'être ingi^ats : telle- ment qu'il pourroit sembler , tant notre méconnois- sance est extrême I que é'est comme un âpatiagé de la nature divine d'être infiniment libérale aux hommes , et de ne trouver toutefois dans le genre humain qu'une perpétuelle opposition à ses volontés, et un mépris injurieux de toutes ses grâces. Saint Pierre a égalé, surpassé en deux mots les éloges des plus pompeux panégyriques ^ lorsqu'il a dit du Sauveur ^ « qu'il passoit $n bienfaisant et » guérissant tous les oppressés » : Pertransiit bene^ faciendô et sananda omîtes oppfessos (0. Et certes il n^ & rien de plus magnifique et de plus digne d'un ï)ieu , que de laisser partout où il passe des effets de sa bonté; que de marquer tous ses pas par ses bienfaits; que de parcourir les bourgades, les villes ^t les provkices^ ncm pat sâi victoires y Gomiire on a dit àe& ca9qu<$ransj car c'est tout rava^r et tout détruire *> mab par ses libéralités. Akisi léhn^ChvisX a montré avx hommes» st divi* tûtéconune ^Ua a accoutumé àt ie déclarer ^ir savoir DE LÀ BELIGIOV. j|^ I par ses grâces et par ses soins paternels; et les hommes Tont traité aussi comme ils traitent la di* vinitéy quand ils Tont payé, selon leur coutume^ d'ingratitude et d'impiété : Et beatus est qui non fuerii scandaUzatiis in me! Voilà en peu de mots ce qui nous est proposé dans notre Evangile ; mais pour en tirei* les instruc*- tions y il faut un plus long discours ^ dans lequel je ne puis entrer qu'après avoir imploré le secours d'en-haut. A%fe. Cmci vident, ctaudi ambulant j leprosi mun^ dantur : et beatus est gui non fuerit scandaUsatus im me! tt Les aveugles voient ^ les boiteux marchent^ » les lépreux sont purifiés : et bienlteureux est » celui qui n'est poiût.scandalisé en moi )»! Ce n'est plus en illuminant les aveugles^ ni en faisant marcher les estropiés , ni en purifiant les lépreux ^ ni en tessus* citant les morts , que Ïésus-Cbrist autorise sa mission, et fait connoitre aux hommes sa divinité. Ces choses ont été faites durant les jours de sa vie mortelle ^ et il les a continuées dans sa sainte! Ef^ist tant qu'il a été nécessaitre pour poser les foademens de la foi naissante. Mais ces miracles sensibles ^ qui ont été faits par le Fils, de Dieu sur des. personnes parti- culières et pendant un tempslimité , étoient les sigties sacrés d'autres nûracles spirituels qui ii*ont point de bornes semblables^ ni pour les temps ^ ni pour les personnes, puisqu'ils regardent <%alement tous les hcMDmes et tous les siècles. En efiet ce ne sont point seulement des particuliers aveugles , estropiés et lépreux , qui demandent au 272 SUR l'A pIVlJBriTÉ Fils de Dieu le secours de sa main puissante. Mais plutôt tout le genre humain , si nous le savons com^ prendre , est ce sourd et cet aveugle qui a perdu. la connoissance de Dieù^ et ne peut plus entendre sa voix. Le genre humain est ce boiteux y qui n'ayant aucuiie règle des moeurs^ ne peut plus ni marcher droit j ni se soutenir. Enfin le genre humain est tout ensemble et ce lépreux et ce mort, qui, faute de trouver quelqu'un qui le retire du péché , ne peut ni se purifier de ses taches , ni éviter sa corruption* Jésus-Christ a rendu Touïe à ce isourd et 1^^ clarté à cet aveugle , quand il a fondé la foi : Jésus-Christ a redressé ce boiteux ^ quand il a réglé les mœurs : Jésus-Christ a nettoyé ce lépreux et ressuscité ce mort, quand il a établi dans sa sainte Eglise la ré- mission des péchés. Voilà les trois grands miracles par lesquels Jésus-Christ nous montre sa divinité; et en voici le moyen. s Quiconque fait voir aux hommes une vérité sou<- veraine et toute-puissante, une droiture infaillible, une bonté sans mesure , fait voir en même temps la divinité. Or est-il que le Fils de Dieu nous montre en sa personne une vérité souveraine par Tétablisser- ment de la foi , une équité infaillible par la direc- tion des mœurs, une bonté sans mesure par la rémission des péchés : il nous montre donc sa divi- nité. Mais ajoutons , s'il vous plait , pour achever l'explication de notre Evangile, que tout ce qui prouve la divinité de Jésus-Christ, prouve aussi notre ingratitude. Seatus çui non/uerit scandaUr' zaius in me! « Heureux celui qui ne sera pas scan-* » dalisé à mon sujet » I Tous ses miracles nous sont un ]>£ LA nELIOlOlir. 2'ji un scandajie; toptes ses grâces nous deviennent un empêchejp^^ent.' lia voulu, chrétiens, d^ns la foi que les yérites fussent hav^tes, dans la règle d^s mqeurs .que la vo^eite, daps l^,rémission des péchas. que le^w^yep. fût facile. Toi|t cela étoit fait pour notre salut; cette hauteur pour^nous élever; cett^ .droiture .pour nous conduire; cette ifacilité pour nous inviter à la péi^ît^nce. -Ms^is nous sommes si .dépravées , que tout npus. tourne à scandale, puisqi^e la hauteur des .vérités de la ibi fait que nous nous sou^vpps cpptre Fautorité 4^ Jésus-Christ; qi^e Texaçtitu^ede la règle qu,'il. noi^s donne , nous,ppr(e à nous plaindre de.s?i rig|:uei}rj,et que laiacjilité d^ .pardon nqiiS;^§Lune ocç^çfQi^ fi'^bviser de ça pastiçQCç . PREMIER POINT. .La vérité e$t,m)e.reii^e q^ui habite en elle-ménxe etd^Qsiîa^propre.lqpiiière ,. laquelle. par conséquent .^t^lle^ni^êxne sçn Jr-pfl^, ^IJerwêrne s^ gji^^pdieur.^ / eUq-iÇLeine _-^, S^UciVé- iTQ^tl?f(^is pour le bien des , JiQmn)ie$>elle ;st{Vpi|lp^gQ,erjsur^eii?E, et Jésus-Christ .est v^ijiM i^A qoy^mléi piwr. établir pet jempire par la i^foi qu'il ^npQSia pi'écbée.fX'^ai.pirooiis, Messieurs , de .yp^s jifiife^v^r, (({u^'l^ yérité de ciBtt^ foi s^est ét^lie ,.«P jSPHl^raftf ,..f t ;^n jSftuvei^aîiie . towte -.pi^i^an te ; et la marque assurée ,qi;e |ei .y.6u$ , ep,|dpnpe , c'est ^fpi^ 6aps;§e_çr/?>fe;/rf)ligée 4>UftgU;pr^\içi3i:^B,rai5on, . et; sans. être j^giais i:éd.ui}:e.à,pnftpçuj«îer.a]giçua se- cours ,; par §a: propçea^tprité, par sa propre fproe, elle a fait, (;e /jumelle a yQ.iîXu , et ,a régpé .dans le i^iqnde. C'est agir,,si je^oe^nw UPmf0 y I»<§sea5 souve- rainement : mais il faut appuyer ce que j'avance. BOSSUET. XI. i8 2^4 *^^ ^^ DIVINITÉ J'ai dit que la vérité chrétienne n'a point cherché son appui dans les raisonnemens humains , mais qu'assurée d'elle-même, de son autorité suprême et de son origine céleste, elle a dit, et a voulu être crue: elle a prononcé ses oracles, et a exigé la 'sujétion. Elle a prêché une Trinité, mystère inaccessible par sa hauteur : elle a annoncé un Dieu - hqmme , tm Dieu anéanti jusques à la croix , abtme impéné- trable par sa bassesse. Gomment a*t-elle prouvé? Elle a dit pour toute raison qu'il faut que la raison }ùi cèile, parce qu'elle est née sa sujette. Voici quel est son langage : Hcéc dieit Dominus : . Ce n'est plus l'accusé qui demande du délai à son juge , c'est le juge effrayé qui en de- mande à son criminel. Ainsi les saints apôtres ont TCnversé les idoles, ils ont converti les peuples. « Enfin ayant affermi, dit^aint Augustin , leur sa- « lutaire doctrine , ils ont laissé à leurs successeuirs » la terre éclairée par u«e lumière céleste » ; Con- Jirmatd saluberrimd disciplina , illuminatas terras postcris reUçuerimt (^). Mais ce n'est point par l'art du bien dire, par l'arrangement des paroles, par des figuras artificielles , qu'ils ont opéré tous ces grands effets. Tout se fait par une secrète vertu qui persuade contre les règles , ou plutôt qui ne per- suade pas tant, qu'elle captive les entendémens ; i^ertu qui venant du ciel, sait $e conserver toute en- tière dans la bassesse modeste et familière de leurs^ expressions, et dans la simplicité d'un style qui pa- roît vulgaire : comme on voit un fleuve rapide qui (0 Act. xzir. aS. -:- (*) S» Aug, de veréMei' i. 4» ^^' ^9 ^^* 749* a*]6 SrK LA DIVINITÉ retient,' coulant dans la plaine, cette force violente et impétueuse qu'il a acquise aux montagnes d*où il til-e son origine, dV>ù ses eaux sont précipitées. Concluons donc, chrétiens, que Jésus -Christ a 'fondé son saint Evangile d*ùne manière souveraine et digne d'Un Dieu; et ajoutons, à'îl vous pïaît, que c'étoit la plus convenable aux' besoins dé notre nature. Nous avons besoin parmi nos érrieurs, non d'un philosophe qui diipute, mais d'un Dieu qui nous détermine dans la recherche de la vérité. La voie du raisonnement est trôjp lente et trop incer- taine : ce qu'il faut chercher est éloigné; ce qu^ faut prouver est ihdécis. Cependant il sVgitdu prin- cipe même et du fondéihent de la conduite , sur le- quel il faut être résolu d'abord : il' faut donc néces- sairement en croire quelqu'un. Le cbrêtién n'a rien à chercher, p^arce qtï'il trouve tolîit- dans la foi. Le chrétien n'a rien à prouver, parte qde la foi lui dé- cide tout, et que JésuS-Christ' lui a jproposé de sorlô les vérités ^nécessaires, que s'il n'est' pas capable ' de les entendre , il n'est pas moins disposé à les croire : Tâlia populis persuader et, credenda saltèm, siper- ' cîpere^non vàlèrenti^).- Amûy par mêine moyen, • Dieu a été honoré, parce qu'on l'a clru, comme îl est juste , sur sa parole ; et Thomme * a été instruit -par une voie courte, parce qUe'satis auctm circuit de raisonnethent , Tautôrité de la^lbî l'a mené dès le premier pas à la certitude.' Mais continuons d'admirer Fauguste sotiveràineté -de la vérité chrétienne. Elle est Venue Sûr la tertre comme une étrangère, inconnue et 'toutefois haSe (0 S, August ihid. Ri 3. SE I4A EELIGIOBT. 2^77 et persécutée, durant Tespace de quatre cents ans ^ par des préjugés iniques. Cepeud^nt> parmi ces. fu- reurs du mo];Lde entier conjuré coutre.eUe, elle n s^ point mandié de secours humain, ]Çlle s'est fait elle- même des défenseurs intrépides et dignes dç s^ gran- deur, qui dans la passion q^^ils s^voient pour ses, intérêts, ne sachant que 1^ confçsser et mourir pour elle , ont cpuru à la luprt a^vçiç tant de force, qu'ils ont effrayé leurs persécuteurs , qu'à la fin ils ont fait honte par leur patîçnçe aux lois qui les condamnoient au dernier supplice, et ont obligé, le^ princes h, les révoquer. Orando, pqfiendo, cum pîd securita$e. moriendo , Içges, qyibw dflmnàbapin^ christiana religio , eruhesç^r^ compulenmt, muta- rique feoerunZ , dit élpque^i^ent sainjt Augustin (').^ C'étoit donc le conseil 4^ Pieu et la destinée de la vérité^ $i je puis parler de ^ sorte, qu'elle fût, entièrement établie malgré liçs rois ^9 la tf rre , et que dans la suilé des temps die les eût premièrement; pour disciples, et après pour défei^seurs. Il ne les a point appelés quand il a bâti son Eglise. Quand il a eu fondé immuablement et ^levé jusqu'au comble ce grand édifice ^^ il li|i a pl^ alqrs de Içs appeler : lEt nunc regesip) : [Venez], « rqisjj m^inten^nt ». Il les a donc appelés, non pojini: par i^cesçité, mais par grâce. Donc l'établissemej^ de la y^rité pe dé- pend point de leur assisja^nçe , i\i l'empirç de I^ vérité ne relève point de leur sceptre. : et si Jésusr Christ les a établis défenseurs de son Evangile, il le fait par honneur et non par. b,esoin; c'est pour honorer leur autorité et pour consacrer leur puîsj- («) De Ciif, DeL lih, viix , cap, xx, tom. m ^ coL 307. •:- W Ps, 11, 10. 2'7^ StrK LA DIVINITÉ sance. Cependant sa vérité sainte se soutient tou- jours d'elle-même et conserve son indépendance. Ainsi lorsque les princes défendent la foi, c'est plutôt la foi qui leû défend ; lorsqu'ils protègent la religion, c'est plutôt la religion qui les protège et qui est l'appui de leur trône. Par où vous voyez clai- rement que la vérité se sert des hommes, mais qu'elle n'en dépend pas : et c'est ce qui nous parott dans toute la suite de son histoire. J'appelle ainsi l'histoire de l'Eglise ; c'est l'histoire du règne de la vérité. Le monde a menacé, la vérité est demeurée ferme : il a usé de tours subtils et de flatteries , la vérité est demeurée droite. Les hérétiques ont brouîHé, la vérité est demeurée pure. Les schismes ont déchiré le corps de l'Eglise , la vérité est de- meurée entière. Plusieurs ont été séduits, les foibles ont été troublés , les forts même ont été émus; un Ôsius, un Origène, un TertuUien, tant d'autres qui paroissoient l'appui de l'Eglise, sont tombés avec grand scandale : la vérité est demeurée tou- jours immobile. Qu'y a-t-il donc de plus souverain et de plus indépendant que la vérité, qui persiste toujours immuable , malgré les menaces et les ca- resses, malgré les présens et les prosa*iptions , mal- gré les schismes et les hérésies, malgré toutes les tentcitions et tons les scandales; enfin au milieu 'de la défection de ses enfans infidèles, et dans la chute funeste dé ceux-là même qui sembloient être ses colonnes ? • Après cela, chrétiens, quel esprit ne doit pas céder à une autorité si bien établie? Et que je suis étonné quand j'entends des hommes profanes , qui BE LA RELIGION. 2']^ clans la nation la plus florissante de la chrétienté ^ s'élèvent ouvertement contre l'Evangile! Les enten- drai-je toujours et les trouverai-je toujours dans le, monde y ces libertins déclarés, esclaves de leurs pas- sions, et téméraires censeurs des copseils de Dieu; qui tout plongés qu'ils sont dans les choses basses ^ se mêlent de décider hardiment des plus relevées l Profanes et corrompus, lesquels, comme dit saint Jude, « blasphèment ce qu'ils ignorent, et se cor- » rompent dans ce qu'ils connoissent naturelle- »mentiii : Quœcumque quidem ignorant^ Masphe-- mant; çuœcumçue autem naturaliter, tanquam muta animantia , norunt, inhis corrumpunturM, Hommes deux fois morts, dit le même apôtre ; morts premiè- rement, parce qu'ils ont perdu la charité ; morts secondement, parce qu'ils ont même arraché la foi : jirbores infructuosœ , eradicatœ , bis mortuœi'^) : « Arbres infructueux et déracinés » , qui ne tien- nent plus à l'Eglise par aucun lien. O Dieu! les verrai- je toujours triompher dans les compagnies ^ et empoisonner les esprits par leurs railleries sa- crilèges? Mais hommes doctes et curieux , si vous voulez discuter la religion, apportez -y du moins et la gravité et le poids que la matière demande. Ne, faites point les plaisans mal à propos dans des choses si sérieuses et si vénérables. Ces importantes ques- tions ne se décident pas par vos demi-mots et par vos branlemens de tête , par ces fines railleries que vous nous vantez, et par ce dédaigpeux souris. Pour Dieu, comme disoit cet ami de Job (3), ne pensez (0 Juà, 10. - W Ibid, I a. — (3) Jok xiu i. a8o SUtt LA DIVINITÉ pas être les seuls hommes , et que toute Iti, sagesse ^oit datis votre esprit, dont vous nous vantez la délicatesse. Vous qûî voulez pénétrer les secrets de Dieu, çapàroissez, Venez en présence, développez- nous les énigmes de la nature ; choisissez ou oé qui est loin , ou ce qui est près ; ovt ce qui est a vos pieds, ou ce qui est bien haut suspendu sur vOs têtes ! Quoi ! partotrt votre raison dfeirieure arrêtée ! partout où elle gauchit , où elle s'égare , ou: elle suc-^ combe ! Cependant vous ne vdulei pa^ que la foi vous prescrive ce qu'il faut croire. Aveuglé, chagrin et dédaigneux , vous ne voulez pas qu'oti vous guide et qu'on vous donné la main. Pàu^e voyageur égaré et présôniptùeui, qui croyez savoir le che- inin , qui vous rêfasez la conduite , qile voufez-vo.us qu'on vous fasse? Quoi! Voulez -vous donc qu'on vous laisse errer? Mais voiis vous irez engager dans des détours mfiiiis; danà quelque chemin perdu; Vous vous jeterez dans qtië que précipice. Voulez- vous qu'on vous fasse entendre clairement toutes lès vérités divines : Mais considérez où vous êtes, et en quelle basse région du monde vous avez été relégué. Voyez cette riuît profonde, ces ténèbres épaisses qui vous enVirôhnént $ la foiblesse , l'imbé- •cillité y l'igfaoï'alice de votre raison. Concevez que ce n'est pas ici là région de l'intelligence. Pourquoi donc né Voùlez-vous pas qu'en attendant que Dieu se montre à décoiii^ert ce qu'il est , la foi vienne à votre secoure , et vous apprenne du moins ce qu il en faut croire ? Mais , Messieurs , c'est assez combattre ces esprits profanes et témérairement curieux. Ce n'est pas le DE LA RELI'CIOïr. 26 1 vice le plus cotnmun^ et }ô vois un^ autre malheur bien plus univeiisel dai» \» cour: Ce n'est point oette ardeur inconsidérée de l^ouïloîr aller trop afvant; c'^st une extrême iiég^èteé de tou& les itiy stères. Qu'ills soient o« tfn'ils- me sbiant pas, les hommes trop dédàigiieux ne â'en^ sèaeient plus, et n'y vealent pas seulémait priser *^ ifls^ wb savent s'ils croient ou s'ils ne croient pas : tôot prêts à vous avouer ce qu'il vous plidray pom^vci ranches^ et dans ses fruits; cest-à-dîré dans sa nature y dans ses facultés y dans toutes ses opéra* tions. Car comme elle sait ^ chrétiens , que le nom de Dieu est un nom de père y elle nous demande l'amour; mais, pour s'accommoder à notre fdibl^sse, elle nous y prépare par la crainte. Ayant donc ainsi résolu de nous attacher à Dieu par toutes les voies possibles, elle nous apprend que nous devons en tout temps et en toutes choses révérer son autorité ,> croire à sa pardle, dépendre de sa puissance , nous confier en sa bonté, craindre sa justice , nous aban- • donner à sa sagesse , espérer son éternité. ' Pour lui rendre le culte raisonnable que nous lui devons, elle nous apprend, chrétiens, que nous sommes nous-mêmes ses victimes : c'est pourquoi elle nous oblige à dompter nos passions emportées et à mortifier nos sens , trop subtUs séducteurs de notre raison. .Elle a sur ce sujet des précautions inouies. Elle va éteindre jusqu au fond du cœur Tétincelle qui peut causer un embrasement. Elle étouffe la colère , de peur qu'en s'aigrissant elle ne se tourne en haine implacable. Elle nattend pas à ôter répée à l'enfant, après qu'il se sera donné un coup moiiiel' : elle la lui an^aehe des mains dès la première piqûre. Elle retient jusqu'aux yeux, par une extrême jalousie qu'elle a pour garder le cœur. -Enfin elle n'oublie rien pour sôuipettre le corps à l'esprit, et l'esprit tout entier à Dieu; et c'est là., Messieurs, notre sacrifice. Nous avons à considérer sous qui nous vivons et avec qui nous vivons. Nous vivons sous l'empire de Dieu : nous vivons en société avec les hommes. Après donc cette^pr.einière obligation dVm^r Diea comme filtre souveraiti , plus qua nQuy$ - iigtém^ > s'iensuit le. second devoir (J^aimer Vbomo^ notre pi?o^ cbaia ei^ e^rit.despçiëté, con^Oie no^^mêioes* Là s^ voit trè&-aainteszienJt établie sous la prQteçUoa de Dieu la cbariJ^ fta4erneUe> loujoiArs ^crée €t in-* ifjolafele malgré les* injures et les intérêts : là Tau- mène y trésor de :gi?âqes : là le pardon des injures ^ qui nous ménage celui de Bien : là enfii^ la miséri- corde ]^éSérée ^u sacrifice^ et la réconciliation, avec soft ftère irrite.^ nécess^re prépa^ration pour approcher. de TauteL Là, dapsune sainte distribu- tion des offices de la cbarité^ oq apprend à qui on doit le respect y à quirobéissance^.à fui le service^ à qui la protectipn>. à qui le secoure ^ à q^i la çon^ descendance^ à qui de charitable avertissemens ^ et on voit quQfi doit la justice à tous.^ et qu'oa ne doit faire injure à persoime non plus qu à soi- même. Youlez-vous que nous passions à ce que Jésus- Christ a institué pour ordonner les familles ? Il ne s'est pas contenté de conserver au mariage son pre- mier honneur : il en a fait un sacrement de la reli-» gion , et un signe mystique de sa cbas(;e et im« pinable union avec son Ëglise, En cette sorte il a consacré Torii^ne de notre naissance. Il en a re- tranché la polygamie, qu il avoit permise un temps en faveur de Taccroissement de sqn peuple , et le divorce qu'il avoit soui&rt à cause de la dureté des cœurs. Il ne permet plus que Tamour s'égare dans la multitude : il le rétablit dans son naturel , en le faisant régner sur deux coeurs unis , pour faire dé-^ DE LÀ RELIGIOlf. 285 couler de cette «union ulue concorde inviolafble dans les familles et entre les frères. Après avoir ramené -les choses à 'la première institution, il a voulu dé- sormais que la plus sainte alliance du genre hu- •main fllt aussi la plus durable et la plus ferme, et que ie tlodud conjugal fût indissoluble , tant par la •première'lbrce de là foi donnée, que par Fobligation 'natuireUe d'élever les enfans communs, gages pré- -cieux d'une 'étemelle correspondance. Ainsi il a dotoné au tiiaris^e des fidèles une -forme auguste et ^vénérable, qui honore la nature , qui supporte la foiblesse, qui garde la tempérance, qui bride la 'sensualité. ' ^ Que dirai-je des saintes lois qui Tendeiit ' les en- * fens' soumis^et les parens • charitables , • puissans îns- » le précepte que de faire la guerre au vice ^ ? Ma- , ^ult quiUbet improbus execrari legem, quàm emen" . dare r^entem, mai/uli prœcepta odisse quamwtîai^). Pour moi. je me donne de tout mon cœur à ces .saintes institutions. Les moeurs seules me feroient • j (?) jipolo§é :n, 37.*— {*) Satw ,lih. vr» adu» Avar» Edit, BaUtz. DE LA RELIGION. 387 recevoir la foi. Je crois en tout à celui qui m'a si bien enseigné à vivre. La foi me prouve les mœurs; les mœurs me prouvent la foi. Les vérités de la foi et la doctrine des mœurs sont choses tellement con- nexes et si saintement alliées, qu'il n'y a pas moyen de les séparer C"^). Jésus-Christ a fondé les mœurs sur la foi ; et après qu'il a si noblement élevé cet admi- rable édifice, serai-je as^ez téméraire pour dire à * un si sage architecte , qu'il a mal posé les fonde- mens? Au contraire ne jugerai-je pas par la beauté manifeste de ce qu'il me montre, que la même sagesse a disposé ce qu'il me cache? Et vous, que direz-vous, ô pécheurs? En quoi étes-vous blessés, et quelle partie voulez-vous retran- cher de cette morale ? Vous avez de grandes difficul- tés : est-ce là raison qui les dicte, ou la passion qui les suggère? Hé! j'entends bien vos pensées : hé! je vois de quel côté tourne votre cœur. Vous demandez ' la liberté. Hé î n'achevez pas , ne parlez pas davaià- tage ; je vous entends trop. Cette liberté que vous • demandez , c'est une captivité misérable de votre cœur. Souffrez qu'on vous affranchisse, et qu'on rende Votre cœur à un Dieu à qui il est, et qui le ' rédemande avec tant d'instance. Il n'est pas juste, mon Frère, que l'on entame la loi en faveur de vos jiassibns, mais plutôt qu'on retranche de vos pas- sions ce qui est contraire à la loi. Car autrement que aeroit-ce ? chacun déchirerait le précepte : Za- {*) Ici se trouve le mot d'exemple entre deux crochets : Fauteur avoit sans doute dessein d^appuyer «a proposition de quelc[UQ «xenaple. Edit de Déforis, ' a88 SUR UL mviNixé cereta psUUx (0. Jl n^y appint d^hoinipe û coi-rompii à qui quelque. péché ne déplais* ,Cjçlui-là e^t natu- ireltemwt.liWr^i{tau^pi§a,4WfaiJwa lapt qu^Uvoi» .plaim coatrevlses r,£^ues,, il appla|i4ii^^ v^tre-docr ,trîne.. Mais^l ^^t ft^r e^ambitiaip;; illudifaut laisser Vfeoger cette iiijurej 4st envelopper ^qs ennemis o)t .ses concui^rens dans, cette inti^igue dwg^^^Hse. Ainsi .jtaîite la < loi sqra. mutila, etnous.verroqs, cornac .disoit le ! ^and . 3aint Hilaiie da^s un .autre sujet , ; «c une aussi ^grande .variété.. da^s la 4<)c$inne , que ]» noiisen,voyons danslesmo^rs^etf^utant desort^s » de foi qu'il y.^ d'iAcUuatiqns .difféj^ent^s.» : Tôt \rmnc Jides exùtecej qwt /va^^if^falosi f^t $of nçbis , 4^ai$sezTXovs .dpnc . cQnfli|ire . à ^Sj lqi^>^i ^iptçsi , ; et^ftitesren votre r^gle. £t,qp ^^e^flit!^ f|ajiqii>^e est |:iTpp parfaite ,,e.t,q^'^ifn ne p^t y ^afte^dre. G'eft , ce flue, disent Jesjlaçfees:^!; le%(wr^p»9W^.: jlstivwyeQt -.(sl^mplf^^ IWUitq^t lwr,f^rpU iwpc^»l)|içi.et:lors- ? q^^l^'y a ximh M^ sp.<}ppi^^ntià^ux-meBafs ,,de.yainjes,fiîa5rwri^ et;4ïs,j^çrrw«fs wagii\siîrç^. jQidt ^^m (4) : «.I^e, par^s^€W^,dit r.Jfe^ef^^isj partir, iljr » a un. lion s^r w()a^irte;:J».lH>ppeifl[)e 4^y9rera.ç»r .» les .grands, cJijieinin;s,o^e.parm*WX..4^^ :. Hj a.HU » lion dehors : jervais.étre toé,s^u i^ilifji^de |a; place » pidJiqne »..I1 trAuye tOifljonrs^d^çuJç^s, et.il ne s'eiTorce jamais d'en vaincre aucune. En effet, ; . • . • .. p- (3) Prov, XXVI. 1 3. — W) Ibià. xxii. 1 3, vous y DE I.A KELIGION4 289 Tou^, qui Doins. objectez que la loi de TEvaugile est trop parfaite et surpasse les forces humaines ^ avez^ vous jamais essayé de la pratiquer? Contez- nous donc vos efforts^, montrez-nous les* démarches que vous avez faites» Avant que de vous plaindire de votre impuissance^ ïque ne commencez -vous quelque chose? Le second pes^ âirez>-vous, vous est impo^ sible } oui, si vous ne faites jatnais le premier. Gom-^ mencez^ c|onc à marcher, et avancez par degrés.' Vous verrez les choses se :faciliter , et le chemin s^aplanir manifestement devant voits. Mais qu'avant que d'avoir tenté y vous nous tlisiez tout impossible; que vous soyez fatigué et harassé du chemin sans vous être remué de votre place, et accablé d'un travail qiie vous n'avez pas encore entrepris : cest une lâcheté non-^seulémei^t ridicule, mais insuppor- table. Au' reste, comment peut^^on dire que Jésus-» Christ nous >ait chargés par- dessus nos forces ; lui qui a eu tapt d'égards % notre foiblesse , qui nous ofire tant de secours, qui nous laisse tant de res* sources, qui non content de nous retenir sur le pendiant par Iç précepte, nous tend encore là main dans le précipice, par la rémission des péchés qu'il nous présente ? TBOISIÈME POINT. ) Js v) Cart^iY^ fl2k «^ (^ Ziii^ xm. i. DE LA R^LIGIOW. agS iite : c'est ici que Findulgence multîplîef les crimes , et que la source des miséricordes devient une source infinie de profanations saci'iléges. Que dirai>je ici , chrétiens , et avec quels termes assez puissans" déplorerai -je tant de sacrilèges qui infectent les eaUx dé la pénitence ? « Kau du baptéfaie , que » tu es heureuse , disoit autrefois TertuUien , que' » tu es heureuse, èâu mystique , qui ne laVes qu'une » fois » 1 Félix dqua quœ sèrhel ahluitï « qui ne » sers point de jouet aux pécheurs » ! Félix aquài quœ semel abluit , quœ ludibrio peccatorihus non est (0 ! C'est le bain de la péilitence toujours ouvert aux pécheurs, toujours prêt à recevoir ceux qui retournent ; c'est ce bain de miséricorde qui est exposé au mépris par l^a facilité bienfaisante , dont les eaux servent contré leur nature à souiller les hommes : qiios diluit inquinat : parce que la facilité de se laver , fait qu'ils ne craignent point de salir leur conscience. Qui ne se plairidroît, chrétiens, de voir cette eau salutaire si étrangement violée, seu- lement à cause qu elle est bienfaisante ? Qu'inven- terai-je , où me tôurnerai-je pour arrêter lés profa- nations des hommes per\*ers ,' qui vont feire malheu- reusement leur écueil du port ? Les pécheurs nous savent biéh dire qu'il ne faut que le repentir , pour être capable d'approcher dé cette fontaine de grâces. En vain nous disons à ceux qui se confient si aveuglément à ce repentir futur : Ne voulez-vous pas considérer que Dieu a bien promis le pardon au repentir , mais qu'il n'a pas (0 De Bapt, n. i5. agi êVH LA DIVINITÉ promis de donner du temps pour ce sentiment nécessaire ? Cette raison convaincante ne fait plus d'effet , parce qu'elle est trop répétée. Considérez , mes Frères, quel est votre aveuglement : vous rendez la bonté de Dieu complice de votre endur- cissement. C'est ce péché contre le Saint-Esprit, contre la grâce de la rémission des péchés. Dieu n'a plus rien à faire pour vous retirer du crime. Vous poussez à bout sa miséricorde. Que peut- il faire que de vous appeler , que de vous attendre , que de vous tendre les bras, que de vous offrir le pardon 7 C'est ce qui vous rend hardis dans vos entreprises criminelles. Que faut -il donc qu'il fasse ? Et sa bonté étant épuisée et comme sur- montée par votre malice, lui reste -t-il autre chose que de vous abandonner k sa vengeance? Hé bien ! poussez à bout la bonté divine : montrez- vous fermes et intrépides à perdre votre ame : ou plutôt, insensés et insensibles , hasardez tout, ris- quez votre éternité ; faites d'un repentir douteux le motif d'un crime certain : quelle fermeté , quel courage ! mais ne voulez-vous pas entendre combien est étrange , combien insensée , combien mons- trueuse cette pensée de pécher pour se repentir? Obstupescite , cœlij, super hoc (0 : « O ciel, 6 terre, » étonnez-vous d'un si prodigieux égarement » ! Les aveugles enfans d'Adam ne craignent pas de pécher, parce qu'ils espèrent un jour en être fâchés! J'ai lu souveqt , dans les Ecritures , que Dieu envoie aux pécheurs l!esprit de vertige et d'étourdissement; mais (>) Jcrcm. Il* 12. • OE LA RELICION. SC^S fe le vois clairement dans vos excès. Voulez -vous vous, conv irtir quelque jour, ou périr misérable- ment dans Timpénitence? Choisissez, prenez parti. Le dernier est le parti des déïnons. S'il vous reste donc quelque sentiment du christianisme , quelque soin de votre salut, quelque pitié de vous-même , vous espérez vous convertir; et si vous croyiez que cette porte vous fût fermée , vous n'iriez pas au crime avec l'abandon oii je vous vois. Se convertir, c'est se repentir : vous voulez donc contenter cette passion, parce que vous espérez vous en repentir ? Qui a jamais ouï parler d'un tel prodige? Est-]S LA PÉNITENCE.. 365 leurs sens ^ auxquels ils abandonnent toute leur con- duite. Et si pour les éveiller y dans cet assoupissement lëthargique, nous faisons retentir à leurs oreilles cette trompette ëpouvantable du jugement à venir qui les jettera dans des peines si sensibles et si cuisantes ; cette menace est trop éloignée pour les presser à se rendre : « Cette vision y disent-ils y chez le prophète » Ezéchiely ne sera pas si tôt accomplie » : In dies mulios et in tempora longa iste prophetat (0. Ainsi leur malice obstinée résiste aux plus pressantes considérations que nous leur puissions apporter , et rien n'est capable de les émouvoir; parce que le . mal du péché y qui est si présent ^ n*est pas sensible i et qu'au contraire le mal de l'enfer, qui est si sen- sible y n'est pas présent. C'est pourquoi la bonté divine qui ne veut point la mort du pécheur, mais qu'il se convertisse et qu'il vive , pour ejQTrayer ces consciences malheureusement intrépides, fait élever aujourd'hui du fond du désert une voix dont le dé- sert même est ému : J^ox DomirU concutientis de- sertum , et commouebit Dominus desertum Ca- des W : « La voix du Seigneur ébranle le désert : » le Seigneur remuera et agitera le désert de Ca- » dès ». C'est la voix de saint Jean-Baptiste y qui non content de menacer les pécheurs « de la co- » 1ère qui' doit venir », àventuréird; sachant que ce qui est éloigné ne les touche pas, leur montre dans les paroles de mon texte la main de Dieu déjà appuyée sur eux , et leur dénonce de près sa ven- geance toute présente : Jam enim securis ad mdicem arborum posita est : « La cognée est déjà mise à la (■) Ezeeh, XII, vj, -^ (») Ps, xxTiit. 7. 366 StJK LA iréCESSITÉ » racine des arbres ». Mais^ mes Frères , comme cette voix du grand précurseur résonnera en vain au dehors ^ si le Saint-Esprit ne parle au dedans ; prions la divine Vierge qu elle nous obtienne la grâce d'être émus de la parole de Jean - Baptiste ^ comme Jean-Baptiste lui-même fut ému dans les entrailles de sa mère par la parole de cette Vierge , lorsqu elle alla visiter sainte Elisabeth; et lui com-^ muniqua dans cette visite une partie de la grâce , qu'elle avoit reçue avec plénitude par les paroles de range que nous allons réciter : jive , Maria. Faisons paroître à la Cour le prédicateur du dé- sert; produisons aujourd'hui un saint Jean-Baptiste avec toute son austérité. La Cour n'est pas incon- nue à cet illustre solitaire ; et s'il n'a pas dédaigné de prêcher autrefois dans la Cour d'Hérode , il prê- chera bien plus volontiers dans une Cour chré- tienne et religieuse y qui a besoin toutefois et de ses exhortations et dé son autorité pour être touchée. Paroissez donc , divin précurseur, parlez avec cette vigueur plus que prophétique , et faites trembler les pécheurs superbes sous cette terrible cognée qui porte déjà son coup , non aux branches et âuX ra- meaux , mais au tronc et à la racine de Tarbre , c'est- à-dire à la source-même de la vie. Jam enim securis ad radicem arborum posita est. Pour entendre exactement les paroles de ce grand prophète , remarquons , s'il vous plaît, Messieurs, qu'il ne nous représente pas seulement ni une main armée contre nous , ni un bras levé pour nous frap- per : le coup , comme vous voyez, a déjà porté , DE LA PÉiriTENCE. 36^ puisqu^il dit que la cognée est à la racine. 'Mais encore que le tranchant soit .déjà entré bien avant , saint Jean toutefois nous menace encore d'un se* cond coup qui suivra bientôt , pour abattre tout-àf' fait Tarbre infructueux ; après quoi il ne restera qu'à le jeter dans les flammes : Omjiis ergo arbor non fcbciens frucUùn honum , excidetur et in ignem miuetur (0 : « Tout arbre donc qui ne porte pas » de bon fruit , sera coupé et jeté au feu »« En effet, il est certain qu'avant que la justice de Dieu lance sur nos têtes coupables le dernier trait de sa veng^tnce^ nous sommes déjà frappés par le péché même. Une blessure profonde a suivi ce coup, par laquelle nrotre cœur a été percé ; tellement que nous avons à craimlrë xieux coups infiniment dan^ gereux; le preniier, de notre main propre parle crime; le second, de la main de Dieu par sa ven- geance : et ces deux coups suivent nécessairement de la nature même du péché.. Et afin? que cette vé-» rite soit expliquée par les principes, je suis obligé , Messieurs, de faieu' poser avant toutes choses une doctrine qite j|'ai tirée de saint Augustin , laquelle s^éclaircira davantage par la suite de ce discQurs r c'est qu'on peut considéra* le péehe en deux diffé- rentes manières, et avec deux rapports divers : pre-' mièrement,pàr rapport h la volonté humaine; se- condement, par rapport à la volonté divine. Il est la malheureuse production de la volonté humaine y et il se commet avec insolence contre les ordres sacrés et inviolables de la volonté divine : it sort C') Luc m. 9. . . . 368 Sun LA NÉCESSITÉ donc de Tune , et résiste à Fautre. Enfin ce n*est sut* tre chose y pour le définir, quun mouvement de la volonté humaine contre les règles invariables de la volonté divine. Ces deux rapports différens produisent deux mau« vais effets. Le péché est conçu dans notre sein par notre volonté dépravée; il ne faut donc pas s*éton^ ner s'il y corrompt , s'il y attaque directement le principe de la vie et de la grâce : voilà la première plaie. Mais comme il se forme en nous en s'élevant contre Dieu et contre ses saintes lois, il arme aussi contre nous infailliblement cette puissance redouta- ble ; et c'est ce qui nous attire le second coup qui nous blesse à mort. Ainsi; pour donner au pécheur la connoissance de tout son mal , il faut lui faire sen- tir , s'il se peut ; premièrement , chrétiens , que la cognée l'a déjà frappé , qu'il est entamé bien avant , et qu'il s'est fait par son péché même une plaie pro- fonde : « La cognée est déjà mise à la racine des » arbres » : Jam enim securis ad radicem arbo^ rum jÊOsita est. Mais il faudra lui montrer ensuite que s'il diffère de faire guérir cette première bles- sure , Dieu est tout prêt d'appuyer la main pour le retrancher tout-à-fait ; afin que s'il ne craint pas le coup qu'il s'est donné par son crime , il appréhende du moins celui que Dieu frappera bientôt par sa justice : « Tout arbre donc qui ne porte pas de bon 3> fruit, sera coupé et jeté au feu » : Omnis ergo arbor nonfaciens fructum ionum , excidetur et in ignern mittetur. Et ce sont ces deux puissantes con- sidérations qui partageront ce discours. PREMIER DE LJL i»ÉiriTEircE. 36g PREMIER POINT. • S'il nous était aussi aisé d'inspirer aux hommes la haine de leurs péchés, comme il nous est aisé de leur faire voir que le péché est le plus gran d de tous les maux f nous ne nous plaindrions pas si souvent qu'on résiste à notre parole ^ et nous aurions la consola-* tion de voir nos discours suivis de conversions signa^ lées. Oui , mes Frères , de quelques douceurs que se flattent les hommes du monde en contentant leurs désirs 9 il nous est aisé de prouver qu'ils se blessent, qu'ils se déchirent, qu'ils se donnent un coup mor- tel par leurs volontés déréglées. Et pour éclaircir cette vérité dans les formes et par les principes, il faut rappeler ici la définition du péché que nous avons déjà établie. Nous avons donc dit, chrétiens , que le péché est un mouvement de la< volonté de l'homme contre les ordres suprêmes de la sainte volonté de Dieu. Sur ce fondement principal il nous est aisé d'appuyer une belle doctrine de saint Augustin , qui nous ej^plique admirablement en quoi la mali- gnité du péché consiste (0. Il dit donc qu'elle est renfermée en une double contrariété, parce que le péché est contrah*eà Dieu, et qu'il est aussi contraire à l'homme. Contraire à Dieu ; il est manifeste, parce qu'il combat ses saintes lois : contraire à l'homme , c'est une suite ; à cause que l'attachant à ses propres inclinations, comme à des lois particulières qu'il se fait lui-même , il le sépare des lois primitives et de la première raison h laquelle il est lié par son ori- (x) De Civil. Dei, lib, xii, c. ih, tom. TU, eoL 3oa. BOSSVET. XI. 20 S'JO sua tk NÉCESSITÉ gine cëlesle , c'est-à-dire par l'honneur qu'il a de naître Timage de Dieu, et de porter en son ame les traits de sa face , et lui ôte sa félicité qui consiste dans sa canfbrmité avec son auteur. Ilparoitdonc, chrétiens, que le péché est éga- lement contraire à Dieu et à Thomme; mais avec <3ette mémorable différence , qu'il est contraire à Dieu, parce qu'il est opposé à sa justice; mais de plus, contraire à Fhomme, parce qu'il est préjudi* ciable à son bonheur : c'est-à-dire contraire à Dieii , comme à la règle qu'il combat; et outre cela, mais funestement ^ contraire à l'homme , comme au sujet qu'il corrompt : à Dieu, comme mauvais; à l'homme^ comme nuisible. Et c'est ce qui a fait dire au divin Psalmiste, que « celui qui aime l'iniquité se hait soi* ^ même » , ou , pour traduire mot à mot^ qi^' il a de l'aversion pour son ame, à cause qu'il y corrompt •avec la grâce, les principes de sa santé, de son bon- heur, et de sa vie : Qui autem diligit iniçuitatem ^ oditanimam suamk^). Et certes il est - nécessaire que les hommes se perdent eux-mêmes en .s'élevant contre Dieu. Car que sont-ils autre chose, ces hommes rebelles, que sont-ils, dit saint Augustin, que des ennemis im- puissans; « Ennemis ^e Dieu , dit le même saint ^ 3) par la volonté de lui résister et non par le pou*- » voir de lui nuire » ? Inimici Deo resistendi volun^ tatCy non potestate lœdendi ip). Et de là ne s'ensuit- il pas que la malice du péché ne trouvant point de prise sur Dieu qu'elle attaque, laisse nécessaire- ment tout son venin dans le cœur de celui qui le (0 Psabn. X. 6. — (»} De Ciw, Dei, ihid, y DE LÀ PÉNITENCE.^ 3^1 commet ? Comme la terre , qui élevant des nuages contre le soleil qui Féclaire , ne lui ôte rien de sa lumière,. et se couvre seulement elle-même de té« nèbres ; t^insi le pécheur téméraire résistant folle- ment à Dieu; par un juste et équitable jugement n'a de force que contre lui-même , et ne peut rien que se détruire par son entreprise insensée; il se met en pièces lui-même par l'effort téméraire qu'il fait contre Dieu. C'est pour cela que le roi prophète a prononcé cette malédiction contre les pécheurs : Gladius eo- rutnintret in corda ipsorum, et arcus eorumconr- Jringaturi^). « Que leur épée leur perce le cœur, et » que leur arc soit brisé ». Vous voyez deux espèces 4'ârmes entre les mains du pécheur; un arc pour tirer de loin , un glaive pour frapper de près. L'arc se rompt et -est inutile; le glaive porte son coup, mais contre lui-même. Entendons le sens de ces paroles : le pécheur tiré de loin, il tire contre le ciel et contre Dieu ; et non-seulement lestraits n*y arrivent pas, mais encore l'are se rompt au premier effort. Impie, tu t'^èves contre Dieu, tu te moques des vérités de son Evangile , et tu fais un jeu sacrilège des mystères de sa bonté et de sa justice. Et toi , blasphémateui!' impudent ^ profanateur du saint nom de Dieu, qui: non content de prendre en vain ce nom* vénérable qu'on ne doit jamais prononcer sans tremblement, profères des exécrations qui font fré- mir toute la nature, et té piques d'être inventif en nouveaux outrages contre cette bonté suprême, si C0-P*.1XXYI. 16. 3^2 SUR LA NÉCESSITÉ féconde pour toi en nouveaux bienfaits ; tu es donc assez furieux pour te prendre à Dieu,' à sa provi- dence , de toutes les bizarreries d'un jeu excessif qui te ruine y dans lequel tu ne crains pa$ de ha- sarder à chaque Coup plus que ta fortune p puisque tu hasardes ton salut et ta conscience. Ou bien poussé à bout par tes ennemis sur lesquels tu n'as point de prise , tu tournes conti^e Dieu seul ta rage impuissante; comme s'il et oit du npmbre de tes enr nemis, et encore le plus foiblie et le moins à craindre, parce qu'il ne tonne pas toujours, et que roieilleur et plus patient que tu n'es ingrat et injurieux , jl ré- serve encore à la pénitence cette tête que tu dévoues par tant d'attentats à sa justice. Tu prends un arc en ta main; tu tires hardiment contre Dieu ^ et les coups ne portent p£(S juisqû'à lui y que sa sainteté rend inaccessible h tous les outrages des hommes : ainsi tu ne peux rieu contre lui , ^t ton arc se rompt entre tes mains, dit le saint prophète.. Mais, mes Frères, il nç suffît pas que son arc se brise et que son entreprise demeure inutile; il faut que son glaive lui^perce le c^œur, et que pour avoir tiré de loin centime Dieu , il se donne de près un coup sans remède, si Dieu ne le guérit par miracle. C'est la commune destinée à& tous les pécheurs. Le péché qui trouble tout i'^rdre du nuMuley met le désordre premièrement, dans celui^qui le commet. La vengeance qui fort du icœtirpour; tout ravager > porte toujours son premier coup et le plus mortel sur ce cœur qui la produit, 1^ nourrit. L'injustice qui veut profiter du bien d'autrui, fait son essai sur son auteur qu elle dépouille de son plus grand bien, DE XA pénriTBircE. StS qui est la droiture, avant qu'il ait pu ravir et usur^ per celui des autres. Le médisant ne déchire dans les autres que la renommée, et déchire en lui la vertu mêmp. L'impudicité qui veut tout corrompre, commence son effet par sa propre source, parce que nul ne peut attenter à l'intégrité d*autrui, que par la perte de la sienne. Ainsi tout pécheur est ennemi de soi-même, corrupteur en sa propre conscience du plus grand bien de la nature raison-^ nable, c'est-à-dire de Finnocence. D'oli il s'ensuit que le péché, je ne tlis pas dans ses suites, mais le péché en lui-même est le plus grand et le plus ex- trême de tous les maux : plus grand sans compa-^ raison que tous ceux qui nous menacent par le de- hors , parce que c'est le dérèglement et l'entière dépravation du dedans : plus ]graûd et plus dange- reux que les maladies du corps les plus pestilentes, parce que c'est un poison fatal à la vie de l'âme : plus grand que tous les maux qui attaquent notre esprit , parce que c'est un mal qui corrompt notre conscience : plus grand par conséquent que la perte de la raison , parce que c'est perdre plus que la rai- son , que d^en perdre le bon usage, sans lequel la raison même n'est plus qu'une foire criminelle. En- fin pour conclure ce raisonnement, mal par-dessus tous les maux , malheur excédant tous les malheurs ; parce que nous y trouvons tout ensemble et un mal- heur et un crime ; malheur qui nous stccable, et crime qui nous déshonore; malhetir qui nous ôte toute espérance , et crime qui nous ôte toute excuse; mal- heur qui nous fait tout perdre , et crime qui nous 374 SUR LÀ NÉCESSITÉ rend coupsd)Ies de cette perte funeste, et qui [ûe] nons laisse [pas même ] sujet de nous plaindre. Après-cela, chrétiens, il ne faut pas s'étonner si Ton nous prêche souvent que notre crime devient notre peine. Et je n ai pas dit sans raison que la cognée qui nous frappe, c'est le péché même ; puis- qu'il sera dans l'éternité le principal instrument de notre supplice. Complebo furorem meum m te ': « J'assouvirai en vous toute ma fureur » : Etponam contra te omnes abominationes tuas,... Et abomi- nationes tuœ in medio tuî erunt,..^ Et imponam tibi omnia scelefa tua (0 : « Et je vous opposerai à » vous-mêmes toutes vos abominations Et vos » abominations subsisteront au milieu de vous- » même Et je vous chargerai ^u poids de tous » vos forfaits ». Voilà le juste supplice, un homme tout pénétré, tout environné de ses crimes* Et en efiet, dit saint Augustin , il ne faut pas se persua- der que cette lumière infinie et cette souveraine bonté de Dieu tire d'elle-même et de son sein pro- pre de quoi punir les pécheurs. Dieu est le souve- rain bien, et de lui-même il ne produit que du bien aux hommes : ainsi pour trouver les armes par les- quelles il détruira ses ennemis , il se servira de leurs péchés mêmes, qu'il ordonnera de telle sorte que ce qui a fait le plaisir de l'homme pécheur , devien- dra l'instrument d'un Dieu vengeur. Ne putemus illam tranguillitatem et ineffabile lumen Dei de se proferre ^ unde peccata puniantur ^ sed ipsa peccata sic ordinare , ut quœ fuerunt delectamenta homini {}) Ezech» vu. 3, 4> ^* DE LA PÉpriTEIfCE. SjS. peccanti , sint instrumenta Doimno punientiiS), E(, ne me demandez pas, chrétiens, de quelle sorte se fera ce grand changement de nos plaisirs en sup- plices ; la chose est prouvée par les Ecritures. C'est le Véritable .q.ui le dit , c'est le Tout-puissant qiM le fait. Et toutefois y si vous regardez la nature des* passions, auxquelles vous abandonnez votre cœur,, vous comprendrez aisément qu'elles peuvent deve- nir un supplice intolérable. Elles ont toutes en elles-mêmes des peines cruelles , des dégoûts,, des. amertumes. Elles ont toutes une infinité qui se fâchç de ne pouvoir être assouvie;, ce qui mêle dans elles toutes des empoi;temens qui dégénèrent en une es- pèce, de fureur non moins pénible que déraison- nable. L'amour impur, s'il m'est permis de le nom^ mer dans cette chaire, a ses incertitudes, ses agir tations violentes, et ses résolutions irrésolues, et l'enfer de ses. jalousies : Dura sicut infernus œmu- latio (^) : et le reste que je ne dk pas. L'ambition a ses captivités , ses empressemens , ses défiances et ses craintes , dans sa hauteur même qui est souvent la mesure de son précipice. L'avarice , passion basse , passion odieuse au inonde, amasse non-seulement les Injustices, mais encore les inquiétudes avec les trésors. Eh! qu'y a-t-il donc de plus aisé que de faire de nos passions une peine insupportable de nos péchés , en leur ôtant , comme il est très-juste , ce peu de douceur par où elles nous séduisent , et leur laissant seulement les inquiétudes cruelles et l'amertume dont elles abondent? Nos péchés contrq nous, nos. péchés sur nous, nos péchés, au milieu (0 Enar. in Ps. vu. n» 16, tom, iv, col. 35. — (0 Cant. viii. 6: 376 SUR LA ïrÉCESSITÉ de naus : trait perçant contre notre sein , poids in- suppoHable sur notre tête^ poison dévorant dans ^os entrailles. Ainsi ne nous flattons pas de Fespérance de Tim- punité 9 pendant que nous portons en nos cœurs Tinstrument de notre supplice. Producam ignem de medio tut qui comedat tei}) : « Je ferai sortir du » milieu de toi le feu qui dévorera tes entrailles ». Je ne Ténverrai pas de loin contre toi , il prendra dans ta conscience ^ et ses flammes s'élanceront du milieu deUoi, et ce seront tes péchés qui le pro- duiront. Le penseïî-vous, chrétien, que vous fabri- quiez en péchant Tinstrument de votre supplice éternel ? cependant vous le fabriquez. Vous avalez Piûiquité comme Teau ; vous avalez des torrens de flammes. Par conséquent , mes Frères , malheur sur nous qui avons péché et ne faisons point péni* tence! Le coup est lâché; Tenfern est pas loin, ses ardeurs éternelles nous touchent de près , puisque nous en avons en nous-mém^s et eu nos prc^res pé- chés la source féconde. « La cognée est à la ra- » cine ». A.h! quel coup elle t'a donné, puisque tu nourris déjà en ton cœur ce qui fera un jour ton dernier supplice ! Autant de péchés mortels, autant de coups redoublés. Aussi Tarbre ne peut^l plus se soutenir : il chancelé , il penche à sa perte par ses habitudes vicieuses , et bientôt il tombera de son propre poids. Que s'il faut encore un dernier coup , Bien le lâchera sans miséricorde sur cette racine stérile et maudite. Le pécheur ne se soutient plus; les moindres tentations le font chanceler , les plus (0 Ezech. XXVIII. 18. DE LA PÉNITENCE. i'J'J légers moavemens lui împrimeQt une pente dange^ reuse. Mais enfin il a pris sa pente funeste par ses mauvaises inclinations ; il ne se peut plus relever, et je le vois qui va tomber. Il est vrai que Dieu lui donne encore un peu d'espérance ; mais , J)uîsqu*îl en abuse , )e vis éternellement , dit le Seigneur, je ne puis plus souffrir cette dureté i Finis venit , venit finis.,. Fac conclusionem (0 : « La fin est venue, et » il faut conclure ». Je détruirai tous leÈ fondemens de cette espérance téméraiï*e ; je lâcherai le dernier coup, et coupant jusqu'aux moindres fibres qui soutiennent encore ce malheureux arbre , je le pré* cipiterai de son haut, et le jetterai dans la flamme: Omnis arhor non faciens fructùm, excidetur et in ignem miuetur : « Tout arbre qui ne produit pais de » fruit, sera coupé et jeté au feu ». Retirez-vous^ de peur d être accablé de sa chute : ses exemples [vous entraîneroient avec lui.] Seigneur, donnez- moi de la force; aidez le travail de mon cœur, qui veut enfanter de vrais pénitens. SECOND POINT. Tel que seroit un ennemi implacable, qui, nous ayant dépouillé de tout notre bien , nous attire de plus sur les bras un adversaire puissant auquel nous ne pouvons résister ; tel et encore plus malfaisant est le péché à l'égard de l'homme : puisque le péché, chrétiens, comme je l'ai déjà dit, nous ayant fait perdre le bon usage de la raison, l'emploi légitime de la liberté, la pureté de la conscience, c'est-à- dire tout le bien et tout l'ornement de la créature ^0 Ezech. vu. a , a3. 3^8 SUR LÀ NÉCESSITÉ raisonnable; pour mettre le comble à nos maux^ il arme Dieu contre nous, et nous rend ses enne- mis déclarés , contraires à sa droiture , injurieux à sa sainteté y ingrats envers sa miséricorde, odieux à sa justice ^ et par conséquent soumis à la loi de ses vengeances. De là nous pouvons comprendre de quelle sorte Dieu est animé ^ si je puis parler de la sorte, envers les pécheurs impénitens; et je vous dirai en un mot , car je ne veux point m'étendre à prouver des vérités manifestes, qu'autant qn il est saint, autant qu'il est juste, autant leur est-il contraire; de sorte qu'il a contre eux une aversion infinie. . Les pécheurs n'entendent pas cette mérité : pen- dant qu'c\ l'ombre de leur bonne fortune et à la faveur des longs délais que Dieu leur accorde , ils s'endorment à leur aise, ils s'imaginent que Dieu dort aussi; ils pensent qu'il ne songe non plus à les châtier, qu'ils songent à se convertir; et comme ils ont oublié ses jugemens , « ils disent dans leur cœur : frappant d'une main puissante et en épuisant sur » vous toute ma colère »• Dieu ne règne sur les hommes ^qu^çn ces deux manières : il règne sur les pécheurs convertis, parce qu'ils se soumettent à lui volontairement ; il règne sur les pécheurs condamnés, parce qu'il se les assu- jettit malgré eux. Là est un règne de paix et de grâce, ici un règne ^e rigneiur et de justice; mais partout un règne souverain de Dieu; parce^que là on pratique ce' que Dieu commande ; ici l'oa souffre le supplice que Dieu .impose : Dieu reçoit les hom^ inages de .ceux-là ; il hit ju^ice 4^$ autres. Pédieur^ que Dieu appelle à la pénitence et qui résistez à sa voix , vous êtes entre les deux ; ni vous ne faites ni vous n'endurçz cç que Dieu yeut; vous méprisez la loi , et vous n éprouvez pas la peine : vous rejetez l'attrait et vous n'êtes point açc^jblé pajr la colère. Vous bravez jusqu'à la bonté qui yQu$ attjire , jusqu'à la patience qvû vous atljei^d : vqus^ vivez maître absolu de vos volontés, indépen^aj^t de Dieu, sans rien ménager de votre part , sans jiqn souffrir .i. [ Faire ] attention aux choses dites : point tant songei* au prédicateur. Les choses que nous disons sont-elles si peu solides , qu^elles ne méritent de ré^ flexion que par la manière de les dire? Taiit d'heures de grand loisir 1 pourquoi sont-elles toutes des heures perdues? Pourquoi Jésus-Christ n'en aura-t-il pas quelques-unes plutôt qu'un amusement inutile? Ainsi puisse Jésus-Christ naissant vous combler de -grâces ! puissiez-vous recevoir en lui un Sauveur, et non un juge ! puissiez-vous apprendre à sa crèche à mépriser les biens périssables, et acquérir les ines- timables richesses que sa glorieuse pauvreté nous a méritées ! I 4a*» * ^ « • • BossuET. XI. ai 386 SUR LA ZfÉCESSITÉ FRAGMENS SUR LE MÊME SUJET (*). Activité de la justice divine contre le pécheur. Son oppositiop à la loi de Dieu. Effets qui en résultent contre lui. Ce qu'il doit faire pour éviter les coups de la main vengeresse. Dignes fruits dé pénitence, toujours salutaires. « Une voix crie dans le désert : Préparez les voies » du Seigneur y aplanissez les sentiers de notre » Dieu ; pour cela il faut combler toutes les vallées » et abattre toutes les montagnes (0 » : c'est-à-dire qu'il faut relever le courage des consciences abattues par le désespoir^ et abattre sous la main de Dieu pap la pénitence les pécheurs superbes et opiniâtres qui s'élèvent contre Dieu, etc. L'Eglise fera bientôt le premier, lorsqu'elle dira aux pécheurs : Consolamini^ consolaminii'^).,,, Gau- dium magnum ;.... qida natus estvobis hodie Sali^a- torÇi) : « Consolez-vous, consolez-vous.... Je vous' » annonce le sujet d'une grande joie.... Il vous est » né un Sauveur ». Mais devant que de relever leur courage, il faut premièrement abattre leur arro- {*) Ces fragmens nous paroissent avoir été composés par Fauteur, pour être adaptés au sermon précédent, qu^il aura voulu prêcher dans quelque autre occasion avec certains changemens et des ad- ditions. Edit. de Déforis. C«) Luc, III. 4* — W IsaL XL. I. — (3) Luc. ii. lo, ii. DE LA PÉHITENCE. 887 gance : Jam enim securis ad radicem arborum po~ sita est (0 : « Car la cognée est déjà mise à la racine » de l'arbre »: Pour cela il faut des paroles inspi- rées d'en-haut. ^f^e ^ Maria. Deux coups; celui du péché, celui. de la justice divine. L'un ôte la vie, l'autre l'espérance : le coup du péché , la vie ; le coup de la justice ,• l'espérance. Chose étrange et incroyable , Messieurs ! après la perte de la vie, pêut-il rester de l'espérance? Oui, parce que Dieu est puissant pour ressusciter les morts, et « qu'il peut, dit notre évangile, faire M naître des enfans d'Abraham de ces pierreà (2).» insensibles et inanimées ; et sa miséricorde infinie lui faisant faire tous les jours de pareils miracles, ceux qui ont perdu la vie de la grâce, n'ont pas néanmoins perdu l'espérance, etc. Faut traiter le second point, et dire par quels des grés Dieu abat l'appui et le fondement de cette es- pérance mal fondée. Ce coup n'est pas toujours sensible. Il dessèche l'arbre et la racine en retirant ses inspirations. Ainsi je ne m'étonne pas si les pécheurs convertis regardent l'état d'où ils sont sortis avec une telle frayeur, et ne se sentent pas moins obligés à Dieu , que s'il les avoit tirés de l'enfer. Posuerunt me in lacu inferiori (3) : « Ils m'ont mis dans une fosse profonde » . Eruisti animant meam ex infemo inferiori (4) : « Vous avez retiré mon ame de l'enfer le plus pro^ » fond ». Deux choses font l'enfer : la peine du CO Luc. m. 9. — W îbid. 8. — (3) Ps, Lxxxvii. 6. — (4) Ps. Lxxxy. la. 388 SUR LA NÉCESSITÉ damné; séparation éternelle d'avec Jésus -Christ ; Nescio vos (0 : « Je ne vous connois pas )>. A la sain te table : il ne nous connoît plus. Elle est éternelle de sa nature. Le feu^la peine du sens. Il n'est pas encore allumé y mais nous en avons en nous le principe. En effet ^ d'où pensez-vous, chrétiens, que Dieu fera sortir [ ce feu ? du sein même du pécheur ].- . Le moment que Dieu a marqué pour donner ce coup irrémédiable qui enverra les pécheurs au feu éternel , par une juste disposition de sa providence, ne leur doit pas être connu. C'est un secret que Dieu se réserve et qu'il nous cache soigneusement, afin que nous soyons toujours en action , et que jamais nous ne cessions de veiller sur nous. Néanmoins le pécheur s'endort dans les longs délais qu'il lui donne , l'attendant à la pénitence ; et pendant qu'il dort à son aise au milieu des prospérités temporelles , il s'imagine que Dieu dort aussi : « Il dit dans son » cœur t Dieu l'a oublié » ; il ne prend pas garde à mes crimes : Dixit enim in corde sua : Oblitus est Deus (îï) ; et parce qu'il ne songe pas à se convertir et que Dieu ne lui fait pas sentir sa fureur, il croit que Dieu ne songe pas à le punir. Pour lui ôter de l'esprit cette opinion dangereuse , tâchons aujour- d'hui de lui faire entendre une vérité chrétienne qui nous est représentée dans notre évangile , et que je vous prie de comprendre : c'est que la justice divine qui semble dormir, qui semble oublier les pécheurs , les laissant prospérer long-temps en ce monde , est toujours en armes contre eux , toujours en action , toujours vigilante , toujours prête à don- (») Matlh, XXV. 12. — C») Ps, IX. 34. DE LA PÉiriTENGE. ^89 ner le coup qui les coupera par la racine ^ pour ne leur laisser aucune ressource. Mais afin de bien comprendre cette vérité ^ il est nécessaire , Messieurs , de vous expliquer plus pro-' fondement ce que j'ai déjà touché en peu de paroles touchant la ^contrariété infinie qui est entre le pé- cheur et la justice de Dieu. Je suivrai encore le grand Augustin y et les ouvertures admirables qu il nous a données pour Téclaircissement de cette matière en son épître quarante -neuvième (0. Il remarque donc en ce lieu qu'il y a cette opposition entre le pé- cheur et la loi, que comme le pécheur détruit la loi autant qu'il le peut^ la loi réciproquement déti-uit le pécheur ; telleme»t qu'il y a entre eux une inimitié qui jamais ne peut être réconciliée : et quoique cette vérité sok très-claire^ vous serez néanmoins bien aises, Messieups, d'entendre une- belle raison par laquelle saint Augustin Va prouvée^ Elle tombera sans dif- ficulté dans l'intelligence de tout le monde , parce qu'elle est établie sur le principe le plus connu_de l'équité naturelle :- « Ne fais pas ce que td ne veuil » pas qu'cm te lasse » : In quâ mensurâ mensifùe^ ritisy remetieturvoèisi'^) : « On se servira envers toi » de-la même mesure dont tu te seras servi » . Pécheur, qu'as-tu voulu faire à la loi de Dieu î N'as-tu pa^ voulu la détruire et anéantir son pouvoir ? Oui , certainem^it , chrétiens. « Les hommes qui ne veu- » lent pas être justes, souhaitent qu'il n'y ait point » de vérité, et par conséquent point de loi qui con- (>) M!piMté eu. a/, xuxy tom, ii, wol. aSi , ei se^* — ^ (*) Zuc^ vu. ^ '3go SUR LÀ NÉCESSITÉ » damnie les injustes » : Qui dum nolunl esse fusti, nolunt esse veritatem quâ damnentur injusU (<). Et c'est pour cela , chrétiens, que Moïse descen- dant de la mpntagqç^ entendant les cris des Israé- lites qui adoroient le veau d'or , laisse tomber les tables sacrées où U Ipi étoit écrite et les brise : Vi^ dit vitulum et choros ^ et projeçii, taJbulas, et fregit €6is W : ce II vit le ve^v, et 1^$ d^pses , :et jl jeta les » tables et les brisa »« Et cela , pour quelle raison? si ce n'est pour représenter ce que le peuplé faisoit alors. Ah ! ce peuple ne mérite point d'avoir de loi, puisqu'il la détruit entière en ce moment qu'on la lui porte de la part de Dieu. Qu'a fait cette loi pour être brisée ? Détruisez les pécheurs^ faites-les mourir. II le fera en £ion ten^ps , mais en àttcfudant il npus montré ce que nous faisons à la loi. •C'est pourquoi il bri§e ]Le$ iables où le doigt de Dieu étoit impriiné; e|t pepji^rque^^ s'il vous plaît , Messieurs, que le peuple n^ pèche que contré l'ai-- ticle. qui dé£endoit dladorer Içs idoles : Mon faciès tibisjculptile Ç) : « Vous ne^vous ferez point d'image » taill en sa vie, la loi de so|i côté le fait au pécheur en » lui otant ^a vie à lui-même » : Quod peccator Jacit legî çj^am de sua vifd abstulit, hoc eifacit lex \U auferqt eun^ de l\ominum vitd quant régit (0. Voilà donc une .^terqelle opppsitipn entre le pé- cheur et la loi flp pieu , c'est-à-dire par conséquent entre le pécheur et la justice divine. De là vient que la justice divine nous est représentée dans les Ecri- tures toujours armée contre le pécheur, (c Toutes » ses flèches sont aiguisées , nous dit le prophète , » tous ses arcs sont bandés et prêts à tirer » : Sagitue çfus acutœ, et omnes arcus ejus extenti (2). Que s'il retarde par miséricorde à venger les crimes, sa jus- tice cependant souffre violence : « Cela m'est à » chçirge, dit-il, et j'ai peine à le supporter » : Facta sont mihi molesta j laborayi sustinens (5). Mais poui^ K^) Epist, 01. 71. a4> co/. î82. — < W Isal. v. a8. — (') Ibid. i. 14. Sg^ Stm LÀ NÉCESSITÉ quoi rechercher ailleurs ce que je trouve si claire-^ ment dans mon ëvàngile? Que ne puis -je tous représenter et yùus faire appréhender vivement le tranchant épouvantable de cette cognée appliquée à la racine de Tarbre? A toute heure ^ à tous momens elle veut frapper, parce qu'il n'y a heure, il n'y a moment oii la justice divine irritée ne s'anime elle- même contre les pécheurs. Il est vrai qu'eUe retarde à frapper , mais c'est que la miséricorde arrête son bras. Elle tâche toujours de gagner le temps ; elle pousse d'un moment à l'autre, nous attendant à la pénitence. Pécheurs, né sentez-vous pas quelque- ibis le tranchant de cette justice appliqué sur vous? Lorsque votre conscience vous trouble , qu'elle vous inquiète , qu'elle vous effraie , qu'elle vous réveille en sursaut, remplissant votre esprit des idées fri- neste de la peine qui vous suit de près, c'est que la justice divine commence à frapper votre cons- science criminelle : elle crie, elle vous demande secours, elle se trouble, elle est étonnée. Mais, ô Dieu! quel sera son étonnement, lorsque la justice divine laissera aller tout<-à-fait la main ! Que si elle demeure insensible, si elle ne s'aperçoit pas du coup qui la frappe , ah ! c'est qu'il a déjà donné bien avant, que l'esprit de vie ne coule plus, et de là vient que le sentiment est tout offusqué. Mais soit que vous sentiez ce tranchant, soit que vous ne sentiez pas le coup qu'il vous donne , il touche, il presse déjà la racine, et il n'y a rien entre deux, O pécheur, ne trembles-tu pas sous cette main terrible de Dieu, qui non-seulement est levée, mais déjà appesantie sur ta tête ? Jam enim securis ctd DE LA PÉNITENCE. 39^ radicem arboris posita est : « La cognëe est d^ià' » mise à la racine de l'arbre ». Elle ne s'approche pas pour ébranler l'arbre, ni pour en faire tomber les fruits ni les feuilles; plaisirs, richesses, les biens de fortune , biens externes qui ne tiennent pas à notre personne : il ne faut pas un si grand effort , il ne faut pas [ toucher 1 la racine , il ne faut que secouer l'arbre. Elle n'en veut pas même aux bran- ches , à la santé, à la vie du corps : elle le fait quel- quefois , mais ce n'est pas là maintenant où elle touche : « Elle est à la racine » , dit saint Chrysos- tôme : Apposita est ad radicem. Il n'y a plus rien entre deux; et après ce dernier coup, qui nous menace à toute heure , il n'y a plus que le feu pour nous, et encore un feu éternel. Représentez-vous , chrétiens, un homme h qui son ennemi a ôté les armes , qui le presse Tépée sur la gorge , Demandé la vie , demande pardon ; il commence à appuyer de la pointe sur la poitrine à l'endroit du cœur. C'est ce que Dieu fait dans notre évangile ; il n'enfonce pas encore le coup, ce sont les mots de saint Ghrysostôme , mais aussi ne retire-t-il pas encore la main. H ne retire pas , de peur que tu ne te relâches et ne t'enfles ; et il n'avance pas tout-à- fait , de peur que tu ne périsses. En cet état il te dit dans notre évangile : Ou résous-toi bientôt à la mort, ou demande promptement pardon : Omnis arhornon faciens fructam , excidetur, « Tout arbre » qui ne fait point de fruit , sera coupé ». Ne déses- père pas , 6 pécheur , il n'a pas encore frappé ; tremble néanmoins , car il est tout prêt , et le coup ;sera sans remède. Peut-être va-t-il frapper dans ce $94 ^^^ L^ NÉCESSITÉ moment même; peut-être sera-ce la deraière fois qu'il te pressera à la pénitence. Mais je suis en bonne santé : épargne-t-il la jeu- nesse ? Epargne-t-il la naissance ? épargne-t-il la modération , qui semble un des plus puissans appuis de la vie ? Mais en un moment il renverse tout. Et puis quand il te voudroit prolonger la vie, il sait bien nous frapper d'une autrie manière. Peut-être qu'il ne laissera pas de frapper en retirant ppur ja«- mais les dons de sa grâce. S'il les retire, arraché ou desséché, c'est la même chose; le coup e$t donné, la racine est coupée , l'espérance est morte. Que tar- dons-nous donc, malheureux, à lui donner les fruits qu'il demande? Et quoi! si vite, si promptement, et si près du coup de la mort ! Oui , mes Fi^ères; ea ce moment même faites germer ces fruits salutaires; ces fruits peuvent croître en toute saison, et ils n'ont pas besoin da temps pour mûrir. Nathan menace David de la part de Dieu ; voilà la cognée à la ra- cine. En mém/e temps, sans aucun délai : « J'ai pé- » ché », dit -il au Seigneur. Voilà le fruit de la pénitence ; et au même instant qu'il paroît , k tran- chant, de la cognée se retira : Dominu^ transtulit peccatum twirn (r); « Le Seigneur a transféré votre » péché ». Ne demande donc pas un long ten)ips pour accomplir un ouvrage qui ne demande jamais qu'un moment heureux. 11 suffît de vouloir, dit saint Chrysostôme (?), et aus3itôt \& germe de ce fruit pa- roît ; et la cognée se retirera sitôt qu'eUe verra pa- roître , je ne dis pas le fruit , mais la fle^ur ; je ne dis pas la fleur, mais le nœud , m^is le moindre rejeton (0 //. Reg, XII. i3. — («) Homil. xi. in Matt. tom, vu, p.i52, i53* - BE LA. PÉNITENCE. SgS. qui témoignera de la vie. 4hî s'il est ainsi, chré- tiens, malheureux et mille fois m^llieureiix celui qui sortira de ce lieu sacré sans donner à Dieu quel-- que fruit ! Si vous ne pouvez lui donner une entière conversion , une repentance parfaite , ah ! donnez- lui du moins quelques larmes pour déplorer votre aveuglement. Ah ! si vous ne pouvez lui donner des larmes, ah ! laissez du moins aller un soupir qui té- inoigne }e désir de vous recpunoître ; et si la dureté de vos cœurs ne vousperqaet pas un soupir, battez-vo.us du moins la poitrine , jetez du moins un regard à Dieu poi^r le prier de fléchir votre obstination ; donnez quelque anmone -à cette intention ^ et pour obtenir cette grâce. Ce n'est pas moi, mes Frères, qui vous le conseille , c'est la voix du divin précurseur .qui vous y exhorte dan$ notre évangile» C'est lui qui ex- cite aujourd'hui les p.e^ple$ à fair^ des fruits de pénitence. C'est lui qui, pour les presser vivement, leur représente la cognée terrible de la vengeance divine toute prête à décharger le dernier coup , s'ils ne produisent bientôt ces bons fruits. Là-dessus le peuple ; Quid facienws ? «c Quel ff uit prpduironsr » nous? fc Qui haiet duos tufiiças^ det non habenti; et qui habet escas , simiUier facial (0 : « Que celui o> qui a deux habits en donne à celui qui n'en a pas ; yi et que celui qui a de quoi manger,, en agisse de i> même ». C'o$t pour <^tte maison qu'il parloit. Vous dirai-je la honte de l'Eglise ? non , ces pauvres catholiques n'ont pas d'habit, ils n'ont pas de nour- riture. Ne dites pas : Je l'ignorois. Je vous le déclare; ne croyez pas que nous inventions. Ce n'est pas ici un {})Luc, III. 10, II. ZgS SUR LA NÉCESSITÉ théâtre où nous puissions inventer à plaisir des sujets propres à émouvoir et à exciter les passions. Que de profusions dans les tables ! que de vanités sur les habits ! que de somptuosité dans les meubles ! Mais quelle rage et queUe fureur dans le jeu ! Le désespoir [ de ces infortunés est la suite de tant de désordres ]• Nous rendrons compte de ces âmes. Quand il lâchera le dernier coup^ etc. Moment que Dieu a réservé à sa puissance. Le dernier coup après les grandes miséricordes y après Tabondante effusion , [ après Y ] épanchement des grandes grâ- ces. Preuve par notre évangile : Jam enim securis : « Déjà la cognée ». « Le Seigneur avoit commencé » às*ènnuyer» : CœpitDominiistœdereW.'Dégoiit [ de Dieu , ] quand on passe si facilement du crime à la pénitence ^ et de la pénitence au crime. Déjà , depuis la venue du Sauveur» Pieu s'^toit irrité don- treson peuple qui a voit' lîiéprîsé lès prophètes : « Ds » ont, dit-ily appesanti leurs oreilles, ils ont endurci » leur cœur comme un diamant, pour ne point écou- » ter les paroles que je leur ai envoyées en la main de » mes serviteurs les prophètes ; et il s'est élevé une D grande indignation, une commotion violente dana » le cœur du Seigneur Dieu des armées » : Etfacta est indignatio magna à Domina exercituum (^).Pour venger le mépris de ses saints prophètes , Dieu a se- coué la nation judaïque comme un grand arbre , il en a fait tomber les fruits et les feuilles , la gloire de ce peuple , la couronne et le sceptre de ses rois entre les mains des rois d'Assyrie. Il jette les sceptres comme un roseau : quand il lui plait ^ un roseau est (0 ly. Reg, X. 3a. — (») Zach. vu. x i , 12. DE LA PÉNITENCE. 897 un sceptre et un sceptre est un roseau. Il a frappé les branches y les tribus : une partie au-delà du fleuve, une autre en quelque partie de Fempire des Assyriens : cependant encore une souche en Israël , encore une racine en Jacob. Le temple , les sacri- fices, le conseil de la nation, Fautorité des pontifes, enfin une forme d'empire , de republique. Jésus est venu , Jésus a prêché, etc. Jam securis nd radicem : L'arbre a été coupé par le pied , ou plutôt déraciné tout-à-fait. Tite vient bientôt après Jésus-Christ : le vengeur suit de près le Sauveur. Ils n'ont pas connu le temps de leur visite : Dieu les visite à main armée. L'aigle romaine vient fondre sur eux et les enlever, malgré les forteresses dans lesquelles ils avoient mis leur confiance. Tite se reconnoît Finstrument de la vengeance de Dieu. Sans savoir le crime, il recon^ noit la vengeance; tant le caractère de la main de Dieu paroissoit de toutes parts. « Tite , dit ApoUo- » niusdeTyane, en prenant Jérusalem , avoit rem- » pli de cadavres tous les lieux d'alentour. Les peu- » pies voisins voulurent le com^onner en considéra-n » tion de sa victoire. Mais il leur répondit qu'il étoifc D indigne de cet honneur, qu'on ne devoit point » lui attribuer les œuvres exti^aordinaires qui ve*- » noient de s'opérer; qu'il n'avoit fait que prêter sey y mains à Dieu , qui exerçoit manifestement sa co- » 1ère contre les Juifs » : Interea Titus captis Hie- rosoljmis , omnia circum loca cadayeribus complet uerat. Fimtùnœ autem génies ob victoriam coronare ipsum voluerant. Ille verh tali honore indignum s^ esse respondit : non enim se esse talimnoperum aiju:^ SgS SUR LÀ NÉCESSITÉ' toreirij sed Deo iracundiam contra Judœos demonS'* tranti, suas manus prœbuisse {*). Le temple renversé , le sacrifice aboli, toute la nation dispersée , le jouet et la dérision de tous les peuples du monde : Omnia in figurd eontingeiant Mis (0 : « Tout leur arrivoit en figure ». Ce peuple dans ses bénédictions, figure de nos grâces ; dans ses malédictions, figure de la vengeance que Dieu exerce sur nous, etc. Le baptême, la pénitence ; le pain des anges, viande céleste. Dieu s'approche de Farbre, jion pour faire tomber les fruits et les feuilles. U n'en veut ni à votre, bien, ni à vos fortuneâ. Il ne faut pas la cognéei, il ne faut pas la racine. Les biens externes tiennent si peu qu'il ne faut que se^ couer l'arbre légèrement, et après le moindre veni les emporte. Il n'en veut pas aux branches, à là santé^ à la vie ; jad radicem , au fond de l'ame. Arbre in- fructueux, où il né trouve aucun fruit; quœ non facitjructum bonum. « Un homme avoit un figuier planté dans sa » vigne, et venant pour y chercher du fruits il n'y » en trouva point. Alors il dit à son vigneron : Il » y a déjà trois ans que )e viens chercher du fruit à » ce figuier sans y en tix)uver; coupez -lé donc; » pourquoi occupe-t-il la terre inutilement? Le » vigneron lui répondit : Seigneur, laissez-le en-^ C*) Philost. ApoL Tyan, Vita. l. vi, c, xiv. Bossuet s^étoit con- tenté d'indiquer dans son manuscrit le récit de Philostrate, par ces mots : Ce qui en est écrit dans la vie d^ApoUdnins Tyaneus, Nouli avons cru entrer dans ses vues, en donnant ici le XJàxVù. iinportant de l'historien d'Apollonius. Edit, de Déforis. CO /. Cor. X. U. DE LA PÉNITENCE. 899 » core cette année , afin que je le laboure au pied » et que j'y mette dii fumier : après cela s'il porté » du fruit ) à la bonne heure ; sinon vous le fereas » couper (0 »• Je suis Venu depuis trois ails : trois ans ^ c'est uii terme immense pour l'attente de notre Dieu. Comp- tons vingt ans, trente ans, cinquante ans. Songez à votre âge , je n'entreprends pas de faire ce dénom- brement ; et il n'a pas encore trouvé de fruit. Les autels de notre Dieu n'ont pas encore vu vos pré- mices. Il faut couper : Ut quid enim terrant occupât ? « Pourquoi occupe-t-il la terre inutileHient » ? il occupe le sôiti de mes ininistres , qui travailleroient plus utilement sur des âmes mieus disposées. Il fait ombre à ma vigne, et empêche qufe mes nouveaux plants ne prennent le soleil > ou que leur fruit né mûrisse. « Donnez encore un an ». Voyez un terme prëfix et un terme assez court 5 car l'Eglise qui in- tercède sait qu'il lie faut pas abuser de la patience d'un Dieu. Trois ans > une longue attente; un an, une longue surséànce : « Et s'il rapporte du fruit, à » la bonne heure; sinon vous le couperez ». Elle consent. Appliquez à Tame : vous avez eu la pluie ', vous avez eu le soleil , vous avez eu la culture ; vous n'avez ni profité ni porté de fruits : vous n'avez plus rien à attendre que la cognée et le feu. Portez des fruits : Fructum bonum : au goût de Dieu : Dignos fructus : dignes du changement que vous méditez, dignes des maiivaises œuvres que, vous avez faites. Changement total au dedans et au dehors. Propor- tion avec les mauvaises œuvres. Maximes des Pères : (0 Luc, xiii. 7 , 8. 4oO suit LA NÉCESSITÉ tous y sans exception : qui s^est abandonné aux choses défendues y doit s'abstenir des permises. Autant qu'il s*est abandonné , autant doit-il s'abstenir : Dignos. Mes Frères, je ne veux rien exagérer; Dieu m'est témoin, je désire sincèrement votre salut, et je ne veux ni élargir ni étrécir les voies de Dieu. Voilà les maximes qui ont enfanté les vrais pénitens. Les autres [conduisent] à la perdition éternelle. Faites^ vous des fruits dignes de pénitence 7 Ces gorges et ces épaules découvertes étalent à Timpudicité la proie à laquelle elle aspire. Est-ce pour réparer le temps que vous le consumez au jeu ? Lier les parties, les exécuter ^ les reprendre , l'inquiétude de la perte, l'amorce du gain, l'ardeur, etc. Et quand vous étalez cette parure et tous ces ornemens de la vanité, faites-vous des fruits dignes? etc. Vous n'hu* miUez pas la victime; non, vous parez l'idole. Faites des fruits dignes : mais pressez-vous , car le règne de Dieu approche , comme saint Jean vous presse et ne vous laisse aucun repos : pas un mot qui ne vous presse ; jlppropinquaU Tant mieux. C'est un règne de douceur. Jésus , etc. La justice après. A la suite des grâces , un grand attirail de supplices : Jam securis ad radicem. Je n'ai dit que ce qui est. Pour comprendre solidement combien est grande la colère de Dieu contre les pécheurs qui ne l'ap- paisent pas par la pénitence , il faut supposer deux principes dont la vérité est indubitable. Le premier principe que je suppose, c'est que plus celui qui gouverne est juste , plus les iniquités sont punies. Le second, c'est que la peine pour être juste doit être proportionnée à l'injustice qui est dans le crime* DE LÀ PÉNITENCfe. 4^1 crime. Ces principes étant connus par la seule lu- mière de la raison , il faut tirer cette conséquence que n'y ayant rien [ de ] plus juste que Dieu , rien de plus injuste que le péché -, ces deux choses con- courant ensemble , doivent attirer sur tous les pé- cheurs le plus horrible de tous les supplices. Que Dieu soit infiniment juste , ou plutôt qu'il soit la justice même, c'est ce qui paroît manifestement, parce qu'il est la loi immuable pai^ laquelle toutes choses ont été réglées : ce qu'il vous sera aisé de comprendre, si vous remarquez que la justice con- siste dans l'ordre; toutes les choses sont équitables sitôt qu'elles sont ordonnées. Or ce qui met l'ordre dans les choses , c'est la volonté du souverain Etre. Car de même que ce qui fait l'ordre d'une armée, c'est que les commandemens du chef sont suivis; et ce qui fait l'ordre d'un concert et d'une musique, c'est que tout le monde s'accorde avec celui qui bat la mesure : ainsi l'ordre de cet univers, c'est que la volonté de Dieu soit exécutée. C'est pourquoi le monde est conduit avec un ordre si admirable; parce que, et les astres, et les élémens, et testes les autres parties qui composent cet univers , cons- pirent ensemble d'un commun accord à suivre la volonté de Dieu , suivant ce que dit le prophète : ce Votre parole, ô Seigneur, demeure immuable- » nient dans le ciel; vous avez fondé la terre, et » elle est toujours également stable. C'est par votre i> ordre que les jours durent, parce que toutes » choses vous servent (0 ». Si la justice de Dieu est (0 Ps, cxviii. S9, 90, 91. BOSSUET. XI. 2â 4oa SUR LA NÉCESSITÉ iafinie^ il est aussi inûnÎBient juste que tous ses ordres soient accomplis^ [et que les hommes] n'ou- trepassent jamais son commandement. Rien ne ré- siste à la volonté de Dieu ^ que la volonté des pé- cheurs. La justice et l'injustice opposées. La justice infinie. Il n'y a qu'une injustice infinie qui soit ca- pable de s'opposer à la justice infinie de Dieu, d'autant plus que celui qui [refuse de lui obéir y se porte de tout le poids de sa volonté à anéantir sa jus- tice ]. La volonté de Dieu la choque nécessairement en tout ce qu'elle est dans toute son étendue , sui- vant ce que dit l'apôtre saint Jacques (0 :'et la rai*» son en est évidente ; parce que par une seule cour travention l'autorité de la loi est anéantie. L'injus- tice infinie, le supplice est infini dans son étendue* Après avoir compris i« I II i'»i ABRÉGÉ D'UN AUTRE SERMON POUR LE TROISIÈME DIMANCHE DE L'AVENT, SVR US TAUX SONKBUK Vt VWJ^UTÉ GHIUÉTIENITE. I«MA«M«<^<%^<*«#V» SVn LÀ VÉRITABLE CONVERSION. ^1% nitent est un homme pensif et attentif à son ame ; Càgitubo pro peccato meo (0 : .« Mon péché occupe » toutes mes pensées ». Un pénitent est un homme dégoûté et de lui-même et du monde : Dormitor- yit anima mea prœ tœdio (^) : « Mon ame languit » d*ennui ». Un pénitent est un homme qui veut sou- pirer, s'aflBliger , qui veut gémir : Laboraui in ge^ nUtu meo (^) : « J'ai été pressé par mes sanglots »• Un tel homme veut être seul^ veut avoir des heures particulières 9 le monde Timportune et lui est à charge. Je vous étonnerois y mes Frères , si je vous racon- tois les lois de Fancienne pénitence. On tiroit le sol- dat de la milice y le marchand du négoce, tout chré- tien pénitent des emplois du siècle. Ils prioient , ils méditoient nuit et jour ; ils regrettoient sans cesse le bien qu ils avoient perdu. Ils n'étoient ni des fê- tes y ni des jeux , ni des affaires du monde. Us se nourrissoient dans leurs maisons du pain de larmes. Ils ne sortoient en public que pour aller se confon- dre à la face de l'Eglise, et implorer aux pieds de leurs frères le secours de leurs prières charitables ; tant ils estimoieut la retraite et la solitude néces- saires. Qu est-ce en effet qui nous a poussés dans ces pro~ digieux égaremens? qu'est-ce qui nous a fait oublier et Dieu et nous-mêmes? si ce n'est qu'étourdis par le bruit du monde y nous n avons pas même connu nos excès. Notre conscience ^ témoin véritable, ami fidèle et incorruptible , n'a jamais le loisir de nous parler; et toutes nos heures sont si occupées, qu'il CO Ps. xxxYii. 19. — (») Ps, GXYiii. a8. — i}) Ps, vi. 6. 4l6 SUR LA VÉ11ITÀ1II.B COZTYERSION. ne reste plus de temps pour cette audience. Et ce^ pendant il est vâ^itable que qui ôte à Tesprit la réflexion , lui ôte toute sa force. Car il y a cette différence entre la raison et les sens, que les sens font d^abord leur impression , leur opération est prompte , leur attaque brusque et surprenante ^ aa contraire la raison a besoin de temps pour ramasser ses forces, pour ordonner ses principes, pour ap- puyer ses conséquences , pour affermir ses résolu- tions ; tellement qu'elle est entraînée par les objets qui se présentent, et emportée, pour ainsi dire^ par le premier Tent , si elle ne se donne à elle-même par son attention un certain poids, une certaine con- sistance, un certain arrêt : Iniqmtates nostrœ quasi tentas abstulerunt nos (>) : « Nos iniquités nous ont » emportés comme un vent ». Ce vent ne manquera jamais de nous emporter, ^ notre ame ne se roidit, et ne s'affisrmit elle*même par une attention actuelle. JSi donc on lui bit la réflexion , on lui ôte toute sa force, on la laisse découverte et à labandon pour être la proie du premier venu. C'est, mes Frères, ce que Eût le monde : il sait remuer si puissamment jenesais quoi d'inquiet et d'impatient que nous avons dans le fond du cœur , qu'il nous tient toujours en mouvement. Toutes les heures s'écoulent trop vite, toutes les journées finissent trop tôt ; en sorte qu'on n'est jamais un moment à soi : et qui n'est pas à soi- jnéme , de qui ne devient-il pas le captif? Hommes errans , hommes vagabonds , déserteurs de votre ame et fugitifs de vous-mêmes , « prévari- >» cateurs, retournez au cœur » : Redito , prcevari-- i>) /roi. uLxy. 6. calores^ 5V1L LÀ VÉRITABLE CONVERSION» 4^7 catores], ad cor (0. Commencez à réfléchir , et à en- tendre la voix qui vous rappelle au dedans. Si vous vous êtes perdus par cette prodigieuse dissipation , il faut qu un recueillement salutaire commence vo^ tre guérison. Une partie de votre mal consiste dans un certain étourdissement que le bruit du monde a causé y et dont votre tête est toute ébranlée; il faut vous mettre à Técart j il faut vous donner du repoSé Voici le médecin qui vous dit lui*méme^ par la bou* chede son prophète : Si reuertamini et quiescatis , sali^i eritis : in silentio et in spe erit fortitudo ves^ tra ip) : c< Si vo^s sortez de ce grand tumulte et que » vous preniez du repos , vous serez sauvés ; et eu » gardant le silence vos forces commenceront de se M ]^établir ». Le docte saint Jean-Ghrysostôme (3) a renfermé en un petit mot une sentence remarquable, quand il a dit que pour former les mœurs, et peut-être en pourrions-nous dire autant de Tesprit , il faut desap- prendre tous les jours. En effet mille faux préju- gés nous ont gâté l'esprit et corrompu le jugement \ et la source de ce désordre , cest qu'aussitôt que nous avons commencé d'avoir quelque connoissance^ le monde a entrepris de nous enseigner, a joint aux tromperies de nos sens celles de l'opinion et de la coutume. C'est de là que nous avons tiré ces belles leçons, qu'il faut tout mesurer à notre intérêt , que la véritable habileté c'est de faire tout servir à notre fortune, qu'il faut venger les affronts. Endurer, c'est s'attirer de nouvelles insultes ; cette grande (0 Isaù xLTi. 8. — ^ (•) /«. XXX. i5. — (3) i^. Chrys, Honùl xi. in Crenes. tom. ly. pag. 86. BOSSUEX. XI. ?J 4l8 SUR LA VÉRITABLE CONVERSION. modération , c'est la vertu des esprits vulgaires ; la patience est le partage des foibles et la triste con-** solation de ceux qui ne peuvent rien : dans une vie si courte et si malheureuse que la nôtre, c'est folie de refuser le peu de plaisir que la nature nous donne. Voilà les grandes leçons que nous apprenons tous les jours dans les compagnies ; si bien que tous les préceptes de Dieu et de la raison demeurent en«^ sevelis sous les maximes du monde. Après cela, mes Frères, vous comprenez aisément la nécessité de désapprendre ; mais certes, pour ou- blier de telles leçons, il faut 'quitter l'école et le maître. Car considérez, je vous prie , de quelle sorte le monde vous persuade. Ce maître dangereux n'agit pas à la mode des autres maîtres : il enseigne san$ dogmatiser : il a sa méthode particulière de ne prou- ver pas ses maximes , mais de les imprimer dans le cœur sans qu'on y pense. Ainsi il ne suffît pas de lui opposer des raisons et des maximes contraires, parce que cette doctrine du monde s'insinue plutôt par une insensible contagion, que par une instruc- tion expresse et formelle. Oui certes, autant d'hommes qui nous parlent , autant d'organes qui nous les inspirent. Nos ennemis par leurs menaces , nos amis par leurs bons offices concourent également à nous donner de fausses idées des biens et des maux. Tout ce qui se dit dans les compagnies , et Tair même qu'on y respire n'imprime que plaisir et que vanité* Aipsi nous n'avançons rien de n'avaler pas tout à coup le poison du libertinage , si cependant nous le suçons peu à peu, si nous laissons gagner jusqu'au cœur cette subtile contagion, qu'on respire avec SUR LA VÉRITABLE CONVERSION. 4^9 Tair du monde dans ses conversations et dans ses coutumes. Tout nous gâte, tout nous séduit : et le grand malheur de la vie humaine, c'est que nul ne- se contente d'être insensé seulement pour soi, mais veut faire passer sa folie aux autres ] si bien que ce qui nous, seroit indifférent , souvent , tant nous* sommes foibles, excite notre imprudente curiosité par le bruit qu'on en fait autour de nous. Dans cet étrange empressement de nous entre-communiquer nos erreurs et nos folies, Tesprit se corrompt tout^ à-fait ; et si nous demandons à Tertullien ce qu il craint pour nous dans le monde : Tout, nous ré* pondra ce grand homme , jusqu'à l'air, qui est in- fecté par tant de mauvais discours, par tant de maximes antichrétiennes : //?5i£m^z/e aerem.... sce- lesUs voscibus constupratum (0. Ne vous étonnez donc pas si je dis que le premier instinct que ressent un homme touché de Dieu, est celui de se séquestrer du grand monde. La même voix qui nous appelle à la pénitence , nous appelle aussi au désert, c'est-à-dire au silence, à la solitude et à la retraite. Ecoutez ce saint pénitent : Similis factus sum pellicano solitudinis, foetus sum sicut nycticorax in doniivilio; vigilaifi, et factus sum si-* eut passer solitarius in tecto i?) : « Je suis, dit -il, >i devenu semblable au pélican des déserts et au » hibou des lieux solitaires et ruinés : j'ai passé la » nuit en veillant, et je me trouve comme un pas- » sereau tout seul sur le toit d'une maison ». Au lieu de cet air toujours complaisant que le monde nous inspire, l'esprit de pénitence nous met dans le cœur (0 DeSpecL «.27. — C») Ps, ci. 7, 8. 4^0 SUR LA VÉRITABLE CONVERSIOIT» je ne sais quoi de rude et de sauvage. Ce iTest plus cet homme doux et galant qui lioit toutes les par- ties : ce n'est plus cette femme commode et com- plaisante y trop adroite médiatrice et amie trop offi- cieuse f qui facilitoit ces secrètes correspondances : ce ne sont plus ces expédiens, ces ouvertures^ ces facilités : on apprend un autre langage, on ap- prend à dire Non, à dire, Je ne puis plus, à payer le monde de négatives sèches et vigoureuses. On ne veut plus vivre comme les autres ni avec les autres ; on ne veut plus s'approcher : on ne veut plus plaire, on se déplaît à soi-même. Un pé- cheur, qui commence à sentir son mal , est dégoûté tout ensemble et du monde qui Ta déçu, et de lui- même qui s'est laissé prendre à un appât si gros- sier. Il se souvient, hélas ! à combien de crimes il s'est engagé par ses malheureuses complaisances. Il ne songe plus qu'à se séparer de cette subtile contagion qu'on respire avec l'air du monde dans ses conversations et dans ses coutumes. Un roi même, pénitent au milieu de sa cour et des affaires , entre dans cet esprit de sohtude. Il se retire souvent dans son cabinet. Si les affaires du jour ne lui permettent pas d'être seul, il passe la nuit en veillant ; et dans ce temps de silence et de Uberté il s'abandonne au Sfecret désir qui le pousse à soupirer et à gémir. Loin du monde, loin des compagnies, il n'a plus que Dieu devant les yeux pour s'affliger en sa présence^ pour lui dire du fond de son cceur : « J'ai péché 1) contre vous et devant vous seul », et je veux aussi m'affliger en votre seule présence : seul et invisible témoin de mes sanglots et de mes regrets ^ SUR LA VÉRITABLE CONVERSIOIT. 4^' ah ! écoutez la voix de mes larmes : Tibi soli pec-^ cat^i (0. Et certes si nous examinons attentivement pour- quoi Dieu et la nature ont mis dans nos cœurs cette source amère de regrets y il nous sera aisé de com- prendre que c'est pour nous affliger , non tant de nos malheurs^ que de nos fautes. Les maux qui nous arrivent par nécessité portent toujours avec eux quel- que espèce de consolation : c'est une nécessité , on se résout. Mais il n*y a rien qui aigrisse tant nos douleurs^ que lorsque notre malheur vient de notre faute. Ainsi ce sont nos péchés qui sont le véritable sujet de nos larmes ; et il ne se faudroit jamais con- soler d'avoir commis tant de fautes y n'étoit qu'en les déplorant on les répare : et c'est une seconde raison pour laquelle les saints pénitens s'abandon- nent à la douleur. Dans toutes nos autres pertes 3 les larmes et les regrets nous sont inutiles. Une per- sonne qui vous étoit chère vous a été ravie par la mort ; pleurez jusqu'à la fin du monde , quelque effort que vous fassiez pour la rappeler , votre doub- leur impuissante ne la fera pas sortir du tombeau ^ et 3i vives que soient vos douleurs^ elles ne ranime- ront pas ses cendres éteintes. Mais en déplorant vos péchés , vous les effacez par vos. larmes; en disant avec le prophète : « La couronne de notre tête est » tombée ; malheur à nous ^ car nous avons pé- » ché (2) » ; nous remettons sur cette tête dépouil- lée de son ornement la même couronne de gloire. En déplorant l'audace insensée qui vous a fait violer la sainteté de votre baptême , vous vous en préparez («) Ps. L. 5. — (») Thren. v. 16. 4^2 SUR LA. VÉRITABLE CONVERSIOIT. un second. Cest ce qui porte un pénitent à pleurer sans fin y et à chercher le secret et la solitude ^ pour s^abandonner tout entier à une douleur si juste et si salutaire. . Au reste y ne croyez pas que je vous fasse ici des discours en Tair, ni que je vous prêche des regrets et des solitudes imaginaires. Toutes les histoires ec- clésiastiques sont pleines de saints pénitens , qu une jdouleur immense de leurs péchés a poussés dans les déserts les plus reculés ; qui ne pouvant plus sup- porter le monde, dont ils avoient suivi les attraits trompeurs, ont été enfin remplir les déserts de leurs pieux gémissemens. Ils ne pouvoient se consoler d'a- voir violé leur baptême , profané le corps de Jésus- Christ, outragé Tesprit de grâce, foulé aux pieds son sang précieux dont ils avoient été rachetés , crucifié leur Sauveur encore une fois. Ils reprochoient à leur ame, épouse infidèle, blanchie au sang deTagneau, quau milieu des bienfaits de son époux, dans le lit même de son époux, elle s'étoit abandonnée à son ennemi. Les jugemens de Dieu [les pénétroient d une sainte frayeur ]. Ils versoient des ruisseaux de larmes. Us ne pouvoient plus supporter le monde qui les avoit abusés, ni ses fêtes, ni ses vanités, ni son triomphe qui détruit le règne de Dieu. Ils alloient chercher les lieux solitaires pour donner un cours plus libre à leur douleur : on les enteiidoit non gé- mir , mais hurler et rugir dans les déserts : Rugie- bam (0. Je n'ajoute rien à Thistoire : il sembloit qu'ils prenoient plaisir à ne voir plus que des ob- jets qui eussent quelque chose d'affreux et de sau- CO Ps. xxiiYii. s. ^ SUR LA VÉRITABLE CONVERSIOIT. 4^^ Tage^ et qui leur fussent comme une image de Tef* froyable désolation où leurs péchés les avoient ré- duits. L'épouse du saint Cantique aime la campagne et la solitude : le tumulte des compagnies et la vue même des hommes la détourne et l'étourdit. Pour- quoi ? parce qu'elle a le cœur touché. « Viens , j» mon bien-aimé^ dit l'épouse; sortons à la campa- » gne ; allons demeurer aux champs : levons -nous » du matin pour aller visiter nos vignes ^ pour voir >» si elles commencent à pousser leurs fleurs (0 ». Il n'y a aucune de ces paroles qui ne respire un air de solitude et les délices de la vie champêtre. L'amour^ ennemi du tumulte et occupé de soi-même, cher- che les lieux retirés , dont le silence et la solitude entretiennent son oisiveté toujours agissante. Amour innocent ; amour pénitent : déhcieuses méditations de l'amour innocent. Dans le cantique y solitudes agréables et solitudes affreuses. L'amour pénitent ^ outré de douleur et inconsolable : l'épouse délicate ^ qui déplore ses honteuses infidélités. [ L'Epoux ] ap- pelle sa bien - aimée , non plus des jardins et des prairies , mais du milieu des rochers et des déserts les plus effroyables, ce Lève- toi , dit- il , ma bien- » aimée , quoiqu'infidèle y mais pénitente : sors desî » trous des rochers y sors des cavernes profondes. » Viens du Liban y mon épouse y viens du sommet » des montagnes et du creux d^ précipices; sors des » tanières des lions, des retraites des bêtes ravîs- » santés (^) ». Ses douleurs, ses regrets et ses déses- poirs sont des bêtes farouches qui la déchirent. (0 CanL vu. 1 1, la. — W lUd. ii. 14. '▼• 8. ^ 424 SUR LÀ VÉRITABLE coNvisnisionr. Quels exemples nous proposez-vous ? [ me dira- t-on peut-être]. Voulez-vous déserter le monde ? Il ne faut plus espérer de pareils effets de la pénitence en nos jours. Saint Jean-Baptiste en personne pour- roit prêcher encore une fois; il ne nous persuade- roit pas de quitter le monde pour aller pleurer nos péchés dans quelque coin inconnu, dans quelque vallée déserte. Notre salut ne nous est pas assez cher, nous ne mettons pas notre ame à un si haut prix ; elle ne nous est pas assez précieuse , quoiqu'elle ait coûté le même sang. Je veux bien le dire, ces sain* tes extrémités ne nous sont pas précisément corn- mandées, ni peut-être absolument néce^aires ; mais du moins ne nous livrons pas tout-à-fait au monde, ayons des temps de retraite : ni à ses divertissemens, un cœur contrit , un cœur afiligé n'est plus sensible à ces vaines joies. N'exposez pas au monde Tesprit de la grâce : né vous répandez pas si fort au dehors. Faites entrer le bon grain dans la terre ; c'est pour l'avoir négligé et pour l'avoir laissé trop à l'aban- don qu'il n'a pu prendre racine ; les passans l'ont foulé aux pieds, les oiseaux du ciel l'ont mangé, ou les soins du monde l'ont étouffé : votre moisson est ravagée par avance dans le temps même de la culture et du labourage. Si votre pénitence n'est pas gémis- sante, qu elle soit du moins sérieuse, du moins qu'elle ne soit pas emportée. Tout le monde ne peut pas gémir, ni répandre des pleurs effectifs ; la douleur peut subsister sans toutes ces marques : mais le cœur doit être brisé au dedans. Mais du moins faut-il te- nir pour certain que ces emportemens de joie sen- suelle sont incompatibles avec cette sainte tristesse SUR, LA VÉRITi3LE COirTERSIOX. 4^^ de la pénitence, [ puistju'elle exige qu'on sache se priver ] même des choses permises : etiam à licitisi}). [ Une ame sincèrement touchée ] médite contre soi- même des choses extrêmes. Soyons donc attentifs à notre salut ; ce L'attention de l'esprit se fait à soi- » même une solitude » : Sibi ipsa mentis intentio solitudinem gignit^ dit saint Augustin (^). Faisons- nous une solitude par notre attention , par notre recueillement. Nous voilà dans le désert , où la voix de saint Jean-Baptiste nous a conduits : déjà nous y avons appris à pleurer nos crimes ; faut-il quel- qu'autre préparation pour ouvrir la voie à Dieu et le faire entrer dans notre ame ? C'est ce que [ nous verrons dans ] la seconde partie. SECOND POINT. N'en doutez pas, mes Frères, que la pénitence ne demande de plus intimes préparations que celles que j'ai déjà rapportées : la retraite et la solitude éloi- gnent le mal plutôt qu'elles n'avancent le bien. Les regrets, dont j'ai tant parlé, ser oient suffisans pourvu qu'ils fussent sincèrement dans le fond du cœur : mais comme nous sommes instruits qu'il y a de faus- ses douleurs et de fausses componctions ; c'est ce qui nous oblige à nous éprouver, et c'est ce que j'ap- pelle préparer les voies avec attention et exactitude. [ Toutes les conditions de cette épreuve , pour qu'elle soit solide, sont représtetées dans ces paroles d'Isaïe ]: Lai^amini, mundi estùte; auferte malum cogitationum vestrarum ab oculis meis; quiescite (') S. Gregor. Magn. lib. v, in cap, iv. Job. tom. i, col. l46. — (>) De dw. quœsU ad SimpUc. lib, ii, tom. yx» col, x 18. 4^1 6 817R LA VÉniXABLE CONVERSIOJT. €igere perverse ; discite Jbenefacere ; quœrite judi-- cium ; suhi^enite oppressa ; judicate pupillo ; defenr- dite viduam; etvenite et arguite me , dicit Dominas. Si fnerint peccata vestra ut coccinum ^ quasi nix alba erunt; et si fuerint rubra ut ^ermiculus ^ sicut lana alba erunt (0 : « Lavez-vous, purifiez -vous; » ôtez de devant mes yeux la malignité de vos pen- :» sées; cessez de faire le mal; apprenez à faire le » bien; recherchez ce qui est juste; assistez Top- » primé; faites justice à Torphelin; défendez la veuve: » et après cela venez, et soutenez votre cause con- » tre moi , dit le Seigneur. Quand vos péchés se- » roient comme Técarlate, ils deviendront blapcs » comme la neige; et quand ils seroient rouges comme » le vermillon , ils seront blancs comme la laine la » plus blanche », Un sage médecin attend à donner certains grands remèdes, quand il voit que la nature reprend le dessus : ici quand la grâce le reprend, quand elle commence à gagner un cœur, à dompter et à assu- jettir la nature* Vous n'avez pas gardé pour Dieu votre force , aussi voyez-vous qu elle s'est perdue. Eprouvez-vous vous-mêmes; c'est par les œuyres que le cœur s'ex- plique, enfans légitimes et naturels; on peut lui sup^ poser tous les autres* i( Ne donnez pas le saint aux chiens ; ne jetez pas , » vos perles devant 1^ pourceaux (2) ». [ Gardez- vous de ceux qui viennent ] avec un cœur feint : je ne parle pas de ces feintes et de ces impostures gros- sières. Il ne faut pas en croire les premiers regrets ; (0 Isat I. 16, 17. — (») Matih. vu. 6. SDR LA VÉRITABLE CONVERSION. 4^7 ce Car, nous dit saint Ambroise , fen ai trouvé plus » aisément qui avoient conservé leur innocence, que » je n'en ai trouvé qui l'eussent réparée par une » pénitence convenable , après être tombés » : Fa^ ciliiis aiUem im^eni qui innocentiam seruai^erint , çuàm qui congrue egerint pœnitentiami^). [Et nous décrivant les caractères de cette pénitence qu'il exige, il ajoute ] : « Peut-on regarder comme une péni- » tence, cette vie oîi l'ambition des dignités se fait » remarquer, oùl'on se permet de boire du vin comme » à l'ordinaire, où l'usage du mariage n'est pas re- » tranché » ? ^n quisquam illampœnitentiam putat, ubi adquirendœ ambitio dignitatis ^ ubi vini effusio^ ubi ipsius copulœ conjugalis usus (^) ? €c II faut, con- » tinue le saint docteur, renoncer entièrement au siè- » cle pour vivre en vrai pénitent ; donner au sommeil » moins de temps que la nature n'en exige, le combat- » tre par ses gémissemens, l'interrompre par ses sou- » pirs, l'éloigner pour vaquer à la prière » : Renun-^ tiandum sœculo est^ somno ipsi minus indulgendum, quàm natura postulatj, interpellandus est gemitibusj^ interrumpendus est suspiriisj sequestrandus orationi-^ bus. ce En un mot, il faut vivre de manière cjue nous )> mourions à l'usage même de la vie; que l'homme » se renonce lui-même, et soit ainsi changé et re- » nouvelé tout entier » : V^is^endum ita utvitali huic moriamur usui, seipsum sibi homo abneget^ et to- tus mutetur. [ Et combien cette conduite est-elle né- cessaire à un pénitent], c< puisque c'est par l'usage » même des choses de cette vie que l'innocence se (0 De pœnit. lib. il , cap, x , tom, u , coL 436. •— (>) I6iJ. col. 436, 437. 4'i8 SUR LA VÉRITABLE CONVERSION. » corrompt » ? Eb qubdipse hujus vitœ usus corrup^ tela sit integritatis. [Dieu nous a tracé lui-même Tordre de cette pénitence dans le premier de tous les pécheurs , comme le remarque ] saint Ambroise. ce Adam, dit ce Fère^ est chassé du paradis aussitôt » après sa faute : Dieu ne diffère pas; mais il le se- » pare aussitôt des délices^ pour qu'il fasse péniten- » ce » : Adam post culpam statim de paradiso Deus ejecit , non distuïit : sed statim separayit à deliciis , ut ageret pœnitentiam (0. « Il le couvrit à l'instant 3» non d'une tunique de soie , mais d'une tunique 3» de peau » : Statim tunicam vestwit peïliceam, non séricam. [ Telles sont les règles que doivent suivre les pécheurs pénitens] , « pour que dans leut* » pénitence il ne se trouve rien qui ait ensuite be- » soin de pénitence » : Ne in ipsd Jiat pœnitentid ^ quod postea indigeat pœnitentid. [Que diront ici ceux] qui font indifféremment la pénitence? Qui negligenter se gesserunti^). Ils doi- vent avoir compris que dans la foiblesse naturelle à rhomme , il est plus aisé de tomber que de se rele- ver de sa chute ; de se donner le coup de la mort ^ que de se rendre la vie; de suivre notre penchant en allant au mal, que de nous violenter pour en sortir. Ils doivent se persuader qu'on n'obtient pas de Dieu le pardon aussi facilement qu'on l'offense , et que l'homme ne fléchit pas sa bonté avec la même faci- lité qu'il la méprise. Car c'est une maxime établie que le bien nous coûte plus que le mal , et que c'est un ouvrage plus laborieux de se réparer que de se (») De pœnit. lih, ii, cap. xi, tow. ii, col. 437. — (*) Concil. Nie, Can. Arab, cap, xix. Lab. tom, 11 , col. 397. STJH LÀ yJÊRITÀBLE GONVERSIOIT. 4^9 perdre. Mais ceux dont nous parlons ne Tentendent pas de la sorte : ils mettent dans la même ligne et la pénitence et la faute. S'il leur est aisé de pécher , il ne leur est pas moins aisé de se convertir : tantôt pistes et tantôt pécheurs , selon qu'il leur plaît ; ils croient pouvoir changer leurs mauvais désirs avec autant de promptitude qu'ils ont à se laisser vaincre^ et se défaire de leurs mauvaises inclinations comme d'un habit qu'on prend et qu'on quitte quand on veut: erreur manifeste. A. la vérité , chrétiens^ pen- dant que la maladie supprime pour un peu de temps les atteintes les plus vives de la convoitise , je con- fesse qu'il nous est facile de peindre sur notre vi* sage^ et même pour nous mieux tromper ^ dans no- tre imagination alarmée, l'image d'un pénitent. Le cœur a des mouvemens superficiels qui se font et se défont en un moment. Mais il ne prend [pas] si fa- cilement les impressions fortes et profondes : non^ non y ni un nouvel homme ne se forme pas tout à coup, ni ces affections vicieuses dans lesquelles nous avons vieilli ne s'arrachent pas par un seul effort* Des remèdes palliatifs qui ne guérissent que la fan- taisie, et ne^touchent pas à la maladie, [ne sont point propres à opérer une guérison véritable ]. TROISIÈME POINT. ' Par ces saintes préparations, Tame qui s'éprouve elle-même , qui se défie des illusions de son amour- propre, rectifiera ses intentions, et donnera à son cœur la véritable droiture. Toute l'Ecriture est pleine de saintes bénédictions pour ceux qui ont le cœur droit. Mais quelle est^ 43o SUR Zk VÉRITABLE CONVERSION. Messieurs^ cette droiture? Disons -le en un mot : c'est la charité, c'est la sainte dilection, c'est le pur amour ; c'est la chaste et intime attache de l'épouse pour l'Epoux sacré; c'est cette céleste délectation d'un cœur qui se plaît dans la loi de Dieu, qui s'y soumet d'une pleine et entière volonté, « non par » la crainte de la peine, mais par l'amour de la jus- » tice (0 » : Qui sunt recti? dit saint Augustin ; ^la dirigunt cor secundkm ^oluntatem Dei C^). Ceux qui veulent tout ce que Dieu veut, ceux-là sont droits^ ceux-là sont justes. Il ne faudroit point ici d'isxpli- cation : ceux qui ont des oreilles chrétiennes enten- dent cette vérité. La volonté de Dieu est droite par elle-même ; elle est elle-même la droiture, elle est la règle primitive et originale. Nous ne sommes pas la droiture , nous ne sommes pas la règle ; car nous serions impeccables : ainsi n'étant pas droits par nons-mémes, nous le devenons, chrétiens, en nous unissant à la règle, à la sainte volonté de Dieu , à la loi qu'il nous a donnée ; non étonnés par ses me- naces, mais saintement délectés par son équité , et charmés par sa beauté et par sa droiture. Faites droits, mes chers Frères , les sentiers de notre Dieu. Aimez purement , aimez saintement ^ aimez constamment ; et vous serez droits. Si vous craignez seulement les menaces de la loi, sans ai- mer sa vérité et sa justice , quoique vous ne rom- piez pas ouvertement , vous n'êtes pas d*accord avec elle dans le fond du cœur. Elle menace , elle est redoutable : vous, à ces menaces vous donnez la (0 S, Aug, in Psalm, cxviii. Serm, xi. n. i, tom» ly, coL i3oa. — ^ C*)//»P«. xxxiiy eaarr. u, n. 2, €oL 18S. • SUR LA. VÉRITABLE COIfVERSIOW, . 4^1 crainte ; que faites-vous pour son équité ? L'aimez- VouSy ne Taimez-vous pas? la regardez-vous avec plaisir, ou avec une secrète aversion, ou avec froi- deur et indifférence ? Que sont devenus vos premiers désirs, vos premières inclinations? La crainte n'ar- rache pas un désir, elle en empêche l'effet, elle l'empêche de se montrer, de lever la tête ; elle coupe les branches , mais non la racine. Elle contraint y elle bride, elle étouffe, elle supprime; mais elle ne change pas. Le fond du désir demeure; je ne sais quoi qui voudroit , ou que la loi ne fût pas, ou qu'elle ne fût pas si droite, ni si rude, ni si pré^ cise , ou que celui qui l'a établie fût moins fort ou moins clairvoyant. Mais cette intention ne se mon» tre pas : vous n'entendez donc pas quel secret venin coule dans les branches, quand la racine de l'in- tention n'est pas ôtée , quand le fond de la volonté n'est pas changé. Je sais qu'il y a de la différence entre la crainte des hommes et celle qu'on a d'un Dieu vengeur ; que comme on peut espérer de tromper les hommes , et qu'on sait qu'on leur peut du moins soustraire le cœur, la crainte est plus, pénétrante sous les yeux de Dieu. Mais comme elle est toujours crainte, elle ne peut agir contre sa nature ; elle ne peut attirer, ni gagner, ni par conséquent arracher à fond les inclinations corrompues. « Si vous pouviez trom- » per, dit saint Augustin , les regards de celui qui » voit tout , que ne feriez-vous pas ? L'amour ne dé- •» truit donc pas chez vous la concupiscence , mais » elle est réprimée par la crainte » : Sifallere pas- ses ^ (juid non fecisses ? Ergo et concupùcentiam 43a SUR LA VÉRITABLE CONVERSION» tuam malatn non amor tollitj sed timor premit {^), Non y je ne le ferois pas : qui vous en empécheroit? Ce ne seroit pas la crainte , car nous supposons qu on ne vous voit pas: ce seroit donc quelque at- trait interne ^ quelque bien caché^ quelque plaisir innocent et chaste. Faites donc y mes Frères , vos sentiers di^oits [ par ] un comnuencement de dilection : « Ils commencent » à aimer, et par-là ils sont mus contre le péché » par des sentimens de haine et de détestation » : Diligere incipiunt ;...,. ac propterea moi^entur adver^ sus peccatq per odium aliçuod ac detestationem W* C'est le motif de votre haine , c'est de ce commen-* cernent d'amour que doit [ naître ] votre aversion ; june aversion [ se forme ] par une inclination con- traire. Il faut que cette plante divine ne soit pas seu- lement semée y mais qu'elle ait commencé de pren- dre racine dans l'ame avant qu elle reçoive la grâce justifiante ; autrement elle en seroit incapable. Il faut un commencement de droiture et de justice dans le cœur ; mais il la faut ensuite cultiver de sorte qu'elle étende ses branches partout, quelle rem- plisse tout le cœur, afin que vous puissiez cueillir des fruits de justice» De là doit naître une autre crainte; non la crainte de l'adultère qui craint le retour de son mari, mais la crainte d'une chaste épouse qui craint de le perdre. De là encore une autre droiture : marcher .dans la loi de Dieu avec une nouvelle circonspec- tion, craindre une fpiblesse expérimentée, s'atta- (0 S. Aug. Serm. glxix, «. 8, tom. y, coL 8ia. — • W ConciL Tria, Sess, Yi. cYï, de Justif, cher SUR LA. VÉRITABLE CONVERSION. 4^^ cher plus étroitement à la justice une fois perdue , honorer la bonté divine par la crainte des tentations et des périls infinis qui nous environnent^ etc. Toute créature a un instinct pour se conserver ; [et combien plus la] créature nouvelle [doit-elle être toujours sur ses gardes pour se maintenir dans la justice qui fait sa vie ] ? Le bruit nous effraie ; cet éclat menace de quelque ruine ou de quelque force étrangère qui vient contre nous avec violence ; la nature nous apprend souvent à craindre à faux. Et certes^ au milieu de tant de périls^ et les périls nous pressant de tant d'endroits , et ayant , comme nous avons y si peu de connoissance pour les prévoir; qui veut être en sûreté, doit souvent craindre même sans péril. Si vous n'avez point cette crainte, je doute que votre changement soit sincère , et votre conversion véritable. BossuET* xr. a4 aC)6 8UE LA NATIVITÉ •-« 1 1 1 — «- V SERMON SUR LE MYSTÈRE DE LA NATIVITÉ DE NOTRE SEIGNEUR (*). Objet y fin, utilité, prudente économie des abaissemens du FHs de Dieu, dans son' incarnation : sagesse des moyens qu^il emploie pour réparer notre nature et guérir ses maladies. Ses contradio^ tionS| sa gloire, son triomphe. V Et hoc vobis signum : Invenietis inCamtem pannis involu- tum, et positum in praesepio. Le Sauveur du monde est né aujourd'hui , et voici le signe que je vous en donne : Vous trouverez un en" font enveloppé de langes, posé dans une crèche, Luc. II. 12. Y ous savez assez , chrétiens , que le mystère que nous honorons y c'est Tanéantissement du Verbe C*^) Nous avons dans les manuscrits de Rossuet deux sermons pour le jour de Noël, dont l'un qui est le dernier, prêché chez les Carmélites du faubourg Saint-Jacques à Paris, répète en beaucoup d'endroits des morceaux entiers du premier, et n'est quaÂt au fond que le même sermon. Four éviter donc les répétitions, nous avons DE NOTRE SEIGNEUR. 29^ incarné^ et que nous sommes ici assemblés pour jouir du pieux spectacle d'un Dieu descendu pour nous relever, abaissé pour nous agrandir, ap- pauvri volontairement pour répandre sur nous les trésors célestes; C'est ce que vous devez mé- diter, c'est ce qu'il faut que je vous explique; et Dieu veuille que je traite si heureusement un su- jet de cette . importance , que vos dévotions en soient échauffées. Attendons tout du ciel dans une entreprise si sainte; et pour y procéder avec or- dre , considérons comme trois degrés par lesquels le Fils de Dieu a voulu descendre de la souve- raine grandeui: jusqu'à la dernière bassesse. Pre- mièrement il s'est fait homme , et il s'est revêtu de notre nature ; secondement il s'est fait passible, et il a pris nos infirmités ; troisièmement il s'est fait pauvre , et il s'est chargé de tous les outrages de la fortune la plus méprisable. Et ne croyez pas, chrétiens, qu'il nous faille rechercher bien loin ces trois abaissemens du Dieu -homme; je vous les rapporte dans la même suitfs et dans la même simplicité qu'ils sont proposés dans tnon évan- gile. Vous .trouverez , dit -il, un enfent, c'est le pris de ce second sermon ce quUl y avoit de neuf, et ce ^ui pou- volt être regardé comme une révision, une extension de preuves, et nous Pavons incorporé au pfemier sermon, lorsque cela a pu se faire sans rien gliter. Nous avons renvoyé ^n note deux'courts pas- sages qui méritent d^étre conservés, pages 3a 7 et 828. Un seul mor- ceau n'*a pu trouver place dans cet arrangement, parce qu^il est trop considérable^ et comme il forme un tout» npus le ^donnerons à la suite du premier sennon. JSâU, de JftforU. ^gS SUR LA WATIVITÉ commencement d'une vie humaine ; enveloppa de langes, c'est pour défendre Tinfirmité contre les injures de l'air; posé dacfô une crèche, c*fst la dernière extrémité d'indigenCe. Tellement que vous voyez da^s le même, texte., la nature par le mot d enfant, la foiblesise et l'infirmité par les langes, la misère et la pauvreté par la crèche, v Mais mettons ces vérités dans un plus grand jour, et .suivons atteûtivement ; arrëton&-nous un pei| ^w. tQus les degrés de cette descente mys- térieuse, tels qu'ils sont représentés dans notre Evangile. Et premièrement, il est clair que le Fils de Dieu , en se faisant homme , pouvoit pren- dre la nature humaine avec les mêmes préroga- tives qu'elle avoit dans son innocence, la santé, la force, l'immortalité; ainsi le Verbe divin seroit homme, sans., être tmvaillé des infirmités, que le péché seul . nous a .méritées. Il ne l'a pas fait , chrétiens ; il a voulu prendi-e , avec la nature , les foiblesses qui l'accompagnent. Mais en prenant ces foiblesses, il pôuv sous des anges ». Ce n'est .pas assez : mon Sau* veur descend le second degrie. S'il s'est rabaissé par son premier pas au-dessous de la nature an* gélique, il fait une seconde démarche qui le rend égal aux pécheurs. Et comment ? Il ne prend pas la nature humaine telle qu'elle étoit dans son in« nocence, saine ^ incorruptible^ immortelle; mais la prend en l'état malheureux où le péché l'a ré- duite, en^posée de toutes parts aux douleurs, à la corruption , à la mort. Mais mon Sauveur n'est pas encore assez bas. Vous le voyez déjà, chi'é- tiens , au-idessous dés anges par notre nature , égalé aux t pécheurs par l'infirmité; maintenant faisant son troisième pas , il se va , pour ainsi dire , mettre sous leurs pieds, en s'abandonnant au nié- pris par la condition misérable de sa vie et de sa naissance. Voilà , mes Frères , quek sont les tlegrés par lesquels le Bieu incamé descend de son trône. Il vient premièrement à notre nature , par la nature à rinfirraite, de l'infirmité aux disgi^âces et aux injures de' la fortune : c'est ce que vous avez remarqué pal* ordre dans les paroles de mon évangile. Mais ce n'est pas ce qu'il y a de plû;^ impor- tant, ni ce qui m'étonne le plus. Je- confesse que je. ne puis assez admirer cet abaiissement de mon maître : mais j'admire encore beaucoup davantage (0 P*. VIII. 6. , 3oo SUR LA VkTlYlTl^ qu on me donne cet abaissement y comme un signe pour reconnoître en lui le Sauveur du monde : £t hoc voiis signum, nous dit Tange. Votre Sau* veur est né aujourd'hui , et voici la marque que |e vous en donne : Un enfant revêtu de langes ^ couché dans la crèche; c'est-à-dire comme nous l'avons déjà expliqué y courez à cet enfant nou- vellement né, vous y trouverez: qu'y trouverons- nous ? Utie nature semblable à la vôtre y des infir- mités telles que les vôtres, deç misères au-dessous des vôtres. Et hoc vobis signum. Reconnoissez à ces belles marques qu'il est le Sauveur qui vous est promis. Quel est ce nouveau prodige ? que peut servir à- notre foiblesse que notre médecin devienne in- firme, et que notre libérateur se dépauille de sa puissance? Est-ce donc une ressource pour des malheureux , qu'un Dieu en vienne augmenter le nombre ? Ne semble-t-il pas , au contraire , que le joug qui accable les enfans d'Adam, est d'au- tant plus dur et inévitable , qu'un Dieu même est assujetti à le supporter? Cela seroit .vrai , mes [ Frères ] , si cet état d'humiliation étoit forcé , s'il y étoit tombé par nécessité , et non pas descendu par miséricorde. Mais comme son abaissement n'est pas une chute , mais une condescendance ; Des^ cendit ut leuaret, non cecidit utjaceret (0 ; et qu'il n'est descendu à nous que pour nous marquer les degrés par lesquels nous pouvons remonter à lui, («) Se Aug, TracU cvii. in Joan* n.6^ tom. m, part%^it àol. 670. DE NOTRE SEIGITEVR. 3oi tout l'ordre de sa descente fait celui de notre glo- rieuse flévation ; et nous pouvons appuyer notre espérance abattue , sur ces trois abaissemens du Dieu-homme. Est - il bien vrai ? le pouvons - nous croire ? quoi ! les bassesses du Dieu incarné ^ sont-ce des marques certaines qu'il est mon Sauveur ? Oui , fidèle y n'en doute pas ; et en voici les raisons so- lides qui feront le sujet, de cet entretien. Ta na- ture étoit tombée par ton crime ; ton Dieu Ta prise pour la relever : tu languis au milieu des infirmités ; il s'y est assujetti pour les guérir : les misères du monde t'effraient : il s'y est sou- mis pour les surmonter et rendre toutes ses ter- reurs inutUes. Divines itnarques, sacrés caractère^ par lesquels je connois mon Sauveur , que ne puis-je vous expliquer à cette audience avec les sentimens que vous méritez ! Du moins efforçons- nous de le faire y et commençons à montrer dans ce premier point que Dieu prend notre nature pour la relever. PREMIER POINT. 4 PotiR comprendre solidement de quelle chute le Fils de Dieu nous a relevés, je vous prie de consi- dérer cette proposition que j'avance; qu'en prenant la nature humaine , il nous rend la liberté d'appro- cher de Dieu , que le péché nous avoit ôté^. C'est là le fondement du christianisme, qu'il. est néces- 302 SUR LA VATIVITÉ saire que vous entendiez j et que )e me proposé aussi de vous expliquer. Pour cela , remarquez y fidèles y une suite étrange de notre ruine : c'est que depuis cette malédiction qui fut prononcée contre nous après le péché , il est demeuré dans l'esprit des hommes une certaine frayeur des choses di- vines , qui non-seulement ne leur permet pas d'ap- procher avec confiance de Dieu , de cette majesté souveraine , mais encore qui les épouvante devant tout ce qui paroît de surnaturel. Les exemples en sont communs dans les saintes Lettres. Le peuple dans le désert appréhende d'approcher de Dieu , de peur qu'il ne meure (0. Les parens de Samson disent : « Nous mourrons de mort^ car nous avons » vu le Seigneur W ». Jacob, après cette vision admirable, crie tout efirayé : « Que ce lieu est » terrible ! vraiment c'est ici la maison de Dieu (3) » ! « Malheur à moi ! dit le prophète Isaïe , car j'ai vu » le Seigneur des armées (4) ». Tout est plein de pareils exemples. Quel est , fidèles , ce nouveau malheur qui fait trembler un si grand prophète? quel malheur , d'avoir vu Dieu ? et que veulent dire tous ces témoignages , et tant d'autres que nous lisons dans les Ecritures ? C'est qu-elles veulent nous exprimer la terreur qui saisit naturellement tous les hommes en la présence de Dieu, depuis que le péché est entré au monde. Quand je recherche les causes d'un efiet si ex- (0 Exod. XX. 19. — W Judic, XIII. 23. — W Gen. xxviu. 17. -— (4) Isai. VI. 5. DE KOtHE SiSI&NEUR. 3o3 traordiiiaîre, et que je me detnande à moi-même: D'où vient que les hommes s'effraient de Dieu ? il s'en pr&ente à mon esprit deux raisons qui vont apporter de grandes lum:ières au mystère de cette journée. La première cause , c'est Téloignement ; la seconde , c'est la colère : expliquons ceci. Dieu est infiniment éloigné de nous. Dieu est irrité contre nous. Il est infiniment éloigné de nous par la gran- deur de sa nature ; il est irrité contre nous par la rigueur de sa« justice, parce que nous sommes pé- cheurs. Cela produit deux sortes de craintes : la pre- mière vient de Fétonnement , elle naît de l'éclat de la majesté^ l'autre des menaces* Ah ! je vois trop de grandeur, trop de majesté; une crainte d'étonne- ment ipe saisit, il est impossible que f en approche. Ah ! je vois cette colère qui me poursuit ;• ses me- naces me font' trembler, je ne puis supporter fas^ pect de cette majesté irritée , si j'approche je sais perdu. Yoilà les -deux craintes: la première causée par l'étonnement de la majesté ; la seconde par les menaces de la justice et de }a cplère divme. C'est pourquoi le Fii3 de Dieu fait deux choses : chré- tiens , voici le mystère. En se revêtant de notre nature , premièrement ,< il couvre la majesté , et il ôte la crainte dVtonaement : en second {ieu , il nous fait Toir qu^il nous aime pax*. le désir qu'il a de nous ressembler^ et il fait cesser tes menaces. C'est t^out le mystère de cette joqirnée , c'est ce que j'avois promis de vous expliquer* Vous voyez Boss. XI. 24 * 3o4 SVB. LA NATIVITÉ par quel excès de miséricorde le Fils ttni({ue da Père éternel nous rend la liberté d'approcher de Dieu^ et relève notre nature abattue. Mais -ces choses ont besoin d'être méditées : ne passons pas si légèrement par -dessus; tâchons de les rendre sensibles en les étendant davantage. Et premièrement , chrétiens , il est bien aisé de comprendre que Dieu est infiniment éloigné de nous ; car il n'est rien de plus éloigné que la sou- veraineté et la servitude^ que la toute-puissance et une extrême foiblesse, que l'éternité toujours immuable et notre continuelle agitation. En un mot tous ses attributs l'éloignent de nous , son immensité y son infinité^ son indépendance , tout cela^ l'éloigné ; et il n'y en a qu'un seul qui l'ap- proche : vous jugez biçn 'que.ç' hommes; et cela est clair dans les! saintes Lettres. « Gachez- » vous , dit le prophète lsaïe.(0; entrez bien avant » dans la terre ; jetez - vous dans les cavernes les » plus- profondes ». Ingredere in petram'.^ et ahs- condere in fossâ kumo. Et pourquoi ? Cachez- vous , d^t-il encore, une Ifois , « Déviant la face tec- » rible de Dieu et: devant la gloire de sa majesté » : A fade timoriS'Dominieiià glorid maféstaiis ejus. Voyez comitoe ^grandeur l'éloigné des hommes. La miséricorde^ au conti-atriey sa sépulture » : Pannis jam sepidturœ ini^olucrum initiatusM. En effet ne parott-il pas un certain rapport entre les langes et les draps de la sépulture ? On enveloppe presque de même façon ceux qui naissent et ceux qui sont morts : un berceau a quelqu'idée d'un sépulcre; et c'est la marque de notre mortalité qu'on nous ensevelisse en naissant. C'est pourquoi Tertullien voyant le Sauveur couvert de ses langes , il se le représente déjà comme enseveli ; il reconnoît en sa naissance le commencement de sa mort; Pannis jam sepulturœ im^olucrum initiatus^ Suivons l'exemple de ce grand homme; et après avoir vu en notre Sauveur la nature humaine par le mot d'enfant , considérons la mortalité dans ses langes ; et avec la mortalité) toutes les infirmités qui la suivent. C'est la seconde partie de mon texte , qui est enchaînée avec la première par une liaison nécessaire. Car après que le Fils de Dieu s'étoit revêtu de notre na* ture, c'étoit une suite infaillible qu'il prendroit aussi les infirmités. Ce ne sera pas moi, chrétiens , qui vous expliquerai un si grand mystère; il faut que )e vous fasse entendre en ce lieu le plus grand théologien de l'Eglise : c'est l'incomparable saint Augustin. J'ai choisi ce qu'il en a dit dans cette épître admirable à Volusien W ; parce que , dans mon sen- timent, l'antiquité n'a rien de si beau ni de si pieux tout ensemble sur cette matière que nous traitons. {}) Adi^. MareUm, Ub. rv. n, ai.— (») Ep» cxxxrii. /i. 8 f«9, tqm. II, coL 4o5. DE IVOTRE SEIGNEI7K. 3l3 Puisque Dieu avoit bien voulu se faire homme , il étoit juste qu'il n oubliât rien pour nous faire sentir cette grâce ; et pour cela , dit saint Augustin , il falloit qu'il prît les infirmités par lesquelles la vé- rité de sa chiLir est si clairement confirmée : et il nous va édaircir ce qu'il vient de dire par cette belle réflexifcn. Toutes les Ecritures nous prêchent, dit-il, que le Fils de Dieu n'a pas dédaigné la faim, ni la soif, ni )es fatigues, ni les sueurs, ni toutes les autres incoiamodités d'une chair mortelle. Et néanmoins , remarques^ ceci , un nombre infini d'hérétiques qui faisoient profession de l'adorer , mais qui rougissaient en leurs cœurs de son Evangile, n'ont pas voulu reconnoitre en lui la nature hu- maine. Les uns disoient que son corps étoit un fantôme; d'auties, qu'il étoit composé d'une ma*- tière céleste ; et tous s'accordoient à nier qu'il eût pris effectivemeit la nature humaine. D'où vient cela, chrétiens? C'est qu'il paroit incroyable qu'un Dieu se fasse honme ; et plutôt que de croire une chose si difficile ,ils trouvoient le chemin plus court de dire qu'en efet il ne l'étoit pas, et qu'il n'en avoit que les aparences. Suivez, s'il vous plaît > avec attention : teci mérite d'être écouté. Que se- roit - ce donc , dt saint Augustin , s'il fut tout à coup descendu es cieux, s'il n'eût pas suivi les progrès de l'âge y s'il eût rejeté le sommeil et la nourriture , et ébigné de lui cessentimens ? N'au- roit-il paslui-méne confirmé re(*reur? N'auroit-il pas semblé qu'il ett en quelque sorte rougi de s'être fait homme, puiqu'il ne le paroissoit qu'à demi? N'auroit-il pas eflicé dans tous les esprits la créan^^e 3l4 SUR LA NATIVITÉ de sa bienheureuse incarnation ^ qui fait toute notre espérance ? Et ainsi , dit saint Augustin , ( que ces paroles sont belles ! ) « en faisant toutes choses mi- » raculeusement , il auroit lui-même détruis ce qu'il » a fait miséricordieusement » : Et dufk cmnia mi- rabïlitér facit , auferretquod misericord^erfediti^)» En effet, puisque mon Sauveur éfoit Dieu, il falloit certainement qu'il fît des iriracles : mais puisque mon Sauveur étoit homme . il ne devoit pas avoir honte de montrer de l'infirmité, et l'ouvrage de la puissance ne devoit pas renverser le témoi- gnage de la miséricorde. C'est pourquoi , dit saint Augustin , s'il fait de grandes choses, il en fait de basses : mais il modère tellement toïte sa conduite, «qu'il relève les choses basses pà* les extraordi- » naires, et tempère les extraordinares par les com- » munes » : Ut soïita subUmaret ins}litis , et insolita solitxs temperaret (^). Confessez qie.tout cela est bien soutenu : je ne sais si je le fais bien enten- dre. Il naît, mais, il naît d'une verge; il mange, mais quand il lui plaît ; il se pass des nourritures mortelles, et n'a pour tout alimeit que la volonté de son Père; il commande aux inges de servir sa table : il dort , mais pendant son s bassesse et lamaje&té; celui qui étant couché dans » la crèche , paroît dans le ciel en sar gloire. Il est » dans le maillot , et les Mages l'adorent ; il naît » parmi les animaux , et les anges publient sa nais- » sance; la terre le rebute, et le ciel le déclare par ^ une étoile; il a été vendu, et il nous rachète; » attaché à la croix, il y distribue les couronnes et » donne le royaume éternel ; infirme qui cède à la » mort, puissant que la mort ne peut retenir; cou- » vert de blessures, et médecin infaillible de nos » maladies; qui est rangé parmi les morts, et qui » donne la vie aux morts; qui naît pour mourir, » et qui meurt pour ressusciter ; qui descend aux » enfers, et ne sort point du sein de son père » : Jacens in prœsepio , videbatur in cœlo ; in^olutus pannis , adorabatur à Magis ; inter animalia éditas^ ab angelis nuntiahatur ;,». virtus et infirmitas , liU" militas et majestas ; redimens et venditus ; in crues positus j et cœli régna largitus ; . . . patiens vulncrum , et salyator œgrorum^ unus defunctoruni, et viyi-- 3l6 SUR LA NATIVITÉ Jicaiorobeuntium ; ad inferna descendens, etàPatris gremio non recedens (0. Joignons-nous avec ce grand pape pour adorer humblement les foiblesses qu un Dieu incarné a prises volontairement pour Tamour de nous. C'est là tout le fondement de notre espérance. Mais il me semble que vous m'arrêtez pour me dire : Il est vrai , nous le voyons bien ; Jésus a ressenti nos infirmités , mais nous attendons autre chose : vous nous avez promis de nous fau*e voir que ses foiblesses guérissent les nôtres ; c'est ce qu'il faut que vous expliquiez. Et n'en êtes-vous pas encore convain- cus ? Ne suffit- il pas , chrétiens , d'avoir remarqué nos infirmités en la personne du Fils de Dieu y pour en espérer de lui le remède ? Ethoc voèis signum : « Voilà » le signe que l'on vous en donne ». L'apôtre avoit bien entendu ce signe, lorsque, voyant les infirmités de son maître , aussitôt il paroît consolé des siennes. Ah ! dit-il , £ JDrOTRE SEIGNEUR. 321 Cette femme vaine et ambitieuse^ qui porte gur elle la nourriture de tant de pauvres et le patri- moine de tant de familles, ne se peut considérer comme une personne particulière. Cet homme qui a tant de charges, tant de titres, tant d'honneurs, seigneur de tant de terres, possesseur de tant de biens , maître de tant de domestiques , ne se comp- tera jamais pour un seul homme; et il ne considère pas qu'il ne fait que de vains efforts, puisqu'enfin quelque soin qu'il prenne de s'accroître et de se multiplier en tant de manièreis et par tant de titres superbes, il ne faut qu'une seule mort pour tout abattre et un seul tombeau pour tout enfermer. Et toutefois , chrétiens p l'enchatitement est si fort et le charme si puissant , que l'homme ne j^ut se déprendre de ces vanités* Bien plus, et voici un plus grand excès , il pense que si un Dieu se résout à paroitre sur la terre, il ne doit point s'y montrer qu'avec ce superbe appareil; comme si notre vaine pompe et notre grandeur artificielle, pbuvôit doiif- ner quelque envie à celui ^ui possède tout dans l'immense simplicité de son essence. Et c'est poui>* quoi les puissans et les superbes du monde ont trouvé notre Sauveur trop dénué; sa crèche les a étonnés, sa pauvreté leur a lait peur : et c'est aaetté même erreur qui a fait imaginer aux Juifs cette Jé- rusalem toute brillante d'or et de pierreries, et louté cette magnificence qu'ils attendent encore aujoor-^ d'hui en la personne de leur Messie^ Mais au contraire. Messieurs, ai nous voulons raisonner par les véritables principes , nous trouve- rons qu'il n'est rien de plus digne d'un Dieu venant BOSSUET. XI. !2tf 3îl2 SUR LA NATIVITÉ sur la terre y que *de confondre par sa pauvreté le faste ridicule des enfans d'Adam ^ de les désabuser des vains plaisirs qui les enchantent ^ et enfin de dé- truire par son exemple toutes les fausses opinions ^ .qui eiLercent sur le genre humain une si grande et si injuste tyrannie. C'est pourquoi le Fils de Dieu vient au monde comme le réformateur du genre humain , pour dé* sabuser tous les hommes de leurs erreurs , et leur donner la vraie science des biens et des maux; et voici Tordre qu il y tient. Le monde a deux moyens d'abuser lek hommes : il a premièrement de fabsses douceurs qui surprennent notre crédulité trop fa- cile : il a secondement de vaines terreurs qui abat- tent notre courage trop lâche. Il est des hommes si délicats qu ils ne peuvent vivre y s'ils ne sont toujours dans la volupté^ dans le luxe^ dans Tabondance. Il ei^ est d'autres qui v-ous diront : Je ne demande pas de grandes richesses; mais la pauvreté m'est insup- portable. : je n'envie pas le crédit de ceux qui sont dans les grandes intriglkes du monde; mais il est dur de demeurer dans l'obscurité : je me défendrai bien des plaUirs; mais je ne puis souffrir les douleurs. Le monde, gagne les unâ, et il épouvante les autres. Toîus deux S'écartent de la di^oite voie; et tous deux enfin viennent à ce point , que celui-ci pour obtenir les* plaisirs, sans lesquels il s'imagine qu'il ne peut paS' vivre, et l'autre pour éviter les malheurs, qu'il croit qu'il ne pourra jamais supporter^ s'engagent entièremeat dans l'amour du monde. Mon Sauveur, faites tomber ce masque hideux par lequel le jU^onde se rend si terrible; faites tom- DE NOTRE SEl&:^£Un. 323 ber ce masque agréable par lequel il semble si doux: désabusez-nous. Premièrement faites voir quelle est la vanité des biens périssables. Et hoc vobis signum.: «Voilà le signe que Ton vous en donne». Venez à retable , à la crèche, à la misère, à la pauvreté de ce Dieu naissant. Ce ne sont point ses paroles, c'est so^ état qui vous prêche et qui vous enseigne. Si les plaisirs que vous recherchez, si les grandeurs que vous admirez étoient véritables, quel autre les au* roit mieux méritées qu'un Dieu? qui les auroit plus facilement obtenues , ou avec une pareille magnifia cence? Quelle troupe de gardes l'environneroit! quelle seroit la beauté de sa cour ! quelle pourpre éclateroit sur ses épaules ! quel or reluiroit sur sa tête! quelles délices lui prépareroit toute la nature^ qui obéit si ponctuellement à ses ordres! Ce n'est point sa pauvreté et son indigence qui l'a privé des plaisirs : il les a volontairement rejetés. Ce n'est point sa foiblesse, ni son impuissance, ni quelque coup imprévu de la fortune ennemie qui l'a jeté dans la pauvrette, dans les douleurs et dans les oppro* bres : mais il a choisi cet état, ce II a jugé, dit Ter- » tuUien (0, que ces biens, ces contentemens , cette )> gloire étoient indignes de lui et des siens » : Indi- gnam sibi et suis judicasfit. Il a cru que cette gran- deur étant fausse et imaginaire, elleferoit tort à sa véritable excellence. Et ainsi, dit le même auteur, c< en ne la voulant pas, il l'a rejetée : ce n'est pas » assez; en la rejatant, il l'a condamnée : il va » bien plus loin, en la condamnant, le dirai-je? » oui , chrétiens, ne craignons pas de le dire, il Va (0 Tertidl, de Idololat. n. i8. 3^24 SUR LA NATIVITÉ » mise parmi les pompes du diable auxquelles nous » renonçons par le saint baptême » : Igitur quam noluit^ rejecit ; quam rejecit^ damnai^it ; çuani damnaxfit, in pompd diaholi deputauit (0. C'est la sentence que prononce le Sauveur naissant contre toutes les vanités des enfans des hommes. Voilà la gloire du monde bien traitée : il faut voir qui se trompe y de lui , ou de nous. Ce sont les paroles de TertuUien qui sont fondées sur cette raison. Il est indubitable que le Fils de Dieu pouvoit naître dans la grandeur et dans l'opulence; par conséquent , is'il ne les veut point ^ ce n'est point par nécessité , mais par choix ; et Tertullien a raison de dire qu'il les a formellement rejetées : Quam noluit, rejecit. Mais tout choix vient du jugement : il y a donc un juge- ment souverain par lequel Jésus-Christ naissant a donné cette décision importante; (|ue les grandeurs du siècle n'étoient pas pour lui y qu'il les devoit re- jeter bien loin. Et ce jugement du Sauveur^ n'est-ce pas la condamnation de toutes les pompes du monde? Quam rejecit^ damnauit. Le Fils de Dieu les mé- prise ; quel crime de leur donner notre estime! quel malheur de leur donner notre amour ! Est-il rien de plus nécessaire que d'en détacher nos affections? Et c'est pourquoi Tertullien dit que nous les devons renoncer par l'obligation de notre baptême. Et hoc vobis signum, : c'est la crèche , c'est la misère , c*est la pauvreté de ce Dieu enfant y qui nous montrent qu'il n'est rien de plus méprisable, que ce que les hommes admirent si fort. Ah! que la superbe philosophie cherche de tous 10 TcrtuU. de IdololaL n. i8. DE ZrOTKE SEIGirEim. 325 côtés des raisonnemens contre Tamour désordonné des richesses^ qu'elle les étale avec grande emphase; combien tous ses argumeps sont-Us éloignés de la force de ;ces deux mots : Jésus-Christ est pauvre, un Dieu est pauvre? Et que nous sommes bien insen^ $és de refuser notre créance à un Dieu qui nous en- seigne par ses paroles, et confirme les vérités qu il nous prêche, par l'autorité infaillible de ses exem- ples! Après cela je ne puis plus écouter ces vaines objections que noqs fait la sagesse humaine. ; Un Dieu ne de voit pas se montrer auxhommeia, qua- vec une gloire et un appareil qui fût dign^ de sa majesté. Certes notre jugement, chrétiens; ^^ étrân-* gement confondu par les apparc^nces et par la ty- rannie de Topinion , . si nous croyons que Téçlat du monde ait quelque chose digne d'un Pieu , qui pos^ sèdeen lui-même la «Quverainé grandeur, M^i^ vou- lez-vous que je vous di^e au contraire ce que je trpqye de grand , d'admirable^ q^ qui me paroît djgne vé- ritablement d'un Dieu conversant avec le$ hommes? C'est qu'il semble n'être paiu sur la terre qup pour fouler aux pieds toute cette vaioe^pompe, et braver, pour ainsi dire , par la pauvreté de sa crèche, luotre faste ridicule et nos vanités extravagantes. Il a vu, du plus haut des cieux, que les hommes n'étoîent tou* chés que des biens sensibles et des pompes extéHeu res. 11 s'est souvenu, en ses bontés, qu'il les avoit icréés au commencement pour jouir .d'u^e plus solide félicité. Touché de compassion, il vient en personne les désabuser, non par sa doctrine, mais par ses exemples , de ces opinions non moins fausses et dan- gereuses qu'elles sont établies et invétérées. Car y oy es SaÔ SUR LA NATIVITÉ OÙ va son mépris : non-seulement il ne veut point, de grandeurs humaines ; mais pour montrer le peu d'état qu'il en fait , il se jette aux extrémités oppo- sées. Il a peine à trouver un lieu assez bas par où il fasse son entrée au monde : il rencontre une étable à demi- ruinée ; c'est là qu'il descend. Il prend tout ce que les hommes évitent, tout ce qu'ils craignent^ tout ce qu'ils méprisent, tout ce qui fait horreur à leui^s sens; pour faire voir combien les grandeurs du siècle lui semblent vaines et imaginaires. Si. bien que je me représente sa crècjbe, non point comme un berceau indigne d'un Dieu , mais comme un char de triomphe où il traîne après lui le monde vaincu. Là sont les terreurs surmontées, et là les douceurs mé~ prisée»; là les plaisirs rejetés, et ici les tourmens ■souïTerts : rien n'y manque, tout est complet. Et il me semble qu'au mitieu d'un si beau triomphe, il nous dit avec une contenance assurée : « Prenez cou* 3> rage , j'ai vaincu le monde » : Confite : ego vwi mundum (0 ; parce que par la bassesse de sa nais^ sance^'par l'obscurité de sa vie, par la cruauté et l'ignominie de sa mort , il a efiacé tout ce que les hommes estiment , et désarmé tout ce qu'ils redou* tent. Et hoc voiîs signum : « Voilà le signe que l'on » nous donne pour reconnoître notre Sauveur ». ' Accourez de toutes parts, chrétiens , et venez con- noitre à ces belles marques le Sauveur qui vous, est •promis. Oui, mon Dieu, je vous reconnois, vous êtes le libérateur que f attends. Les Juifs espèrent un autre Messie, qui les comblera de prospérités, qui leur donnera Tempire du monde, qui les rendra (0 Joan, XVI, 33. DE NOTRE SEIGNRtJn. ÎS^- contens sur la terre. Ah! combien dé ïûif^ ptirtni nous ! combien de chrétiens qui désirerdiérittih Sau- veur qui les enrichît , un Sauveur, qui contentât leur ambition , ou qui voulût flatte]^ leur délicatesse ! Ce n'est pas là notfe Jés^tis-Christ. A qiioi^le pourrons- nous recoiinoître ? Ecoutez ; je vous le dh*ai par de belles paroles d'un ancien Pète : Si ïgnohîlis j si in- glorius^si inhonorabilii j meus eiit Christiis (0 : ce S'il est méprisable^ s'il est saùs éclat ^ s'il est bas » aux yeux des mortels; cV»t le Jésus-Christ que je ^ cherche ». tl me faut un Sauveur qui fesse honte aux superbes, qu; fasse peur aux délicats dé kêté^rè/ que le monde ne puisse goûter, que la sagesse bu-» maine ne puisse comprendre , qui ne puisse étk^ë nnu que des humbles de cœur. Il me faut uh^-S'aU^ îeeur qui braVe, pour ainsi dire , par sa gén^eirsé pauvreté nos vanités ridicules,- extravagances; qui m'apprenne par. son exemple ^que tout ce qu^ je vois n'est, qu'un songe; que je dois rapporter à une^ au- tre et» mies craintes et mes espérances; qu'U vly a i:ienjlç :grand.que de suivre Dieu ^ et 'iexuv^ tout le l*^8te au-dessous de nous; qu'il y^a d'autre» maux* que je dois craindre et d'autres, biens 'queîe. dois àt-^ tendre. :Le ivoilà, )e l'ai rencontré, je le reconnois àices signes ; .vous le voyez aussi , chrétiens (*). -Reste) à^.considérer maintenant si nous le croirons. (0 TèrtulL adu. Marcion, lib, m, /i. i^. C"^) Vous l'avez connu, mes chères Sœurs , puisque vous avez aimé son dépouillement; puisque' sa' pauvreté vdus a plu ; puisque vous l'avez épousé aVéb tous ses clous , toutes, ses'dpiaes, avec toute \k bassesse de «a cr«che et 32$ ^UR LA. NATIVITÉ Il y a deux partis formés : Immonde d*un cèté^ Jësu^ , Cl^rU^ de Tautre. On va eiai£6uledu côté du monde, on s y presse, on y cQ\irt, on croit qu'on n'y sern }amai^a§^ztdjt.. Jésus ^atp^uyi:^ ^t at>ai)d(Qnné.: i) d la y évité, r^^tre^l'apparence :. l'un a J)ieu pour lui, l'autre a jie^ h^i^P^- U e$t biei^ aisé è choisir* Mais ce monde a^ de nvagniÇques pi:Qp[ie^es : là les délices,. les réjouissances, l'applaudiasepi^p]: , la fa- veur : vous pourrie? vpuj ye|\^er de vos ennemis ; vous pourrez po^éder c^ que vous aimez ; votre amitié se^a iieçb!?)t:chée:.VQV& ai^rea de l'autorité , du crédit; yau/s (couverez partout un visage gai et un accueil agréable : il n'est rien tel, il faut pi«ndre parti. de ce côté li^* l>'autre part Jésus^Cfarist se montre avec un,yisage séfère. Man Sauveur, que ne promsttez*- vous d^ semblables biens 7 que vous seriez un grand et aimable Sauveur, si Vous vouliez sauver le monde de la; pauvreté l L'un lui dit : Vous seriez ifkon SauYi^ur y si vous vouliez me tirer de la pauvreté x Je ne voqs le /promets pas. Combien lut <^elit en sécrète Que .je puisse contenter ma passion r' Je ne le veuxpâS): Que je'pcfsse seulement vengel^ cette injure : Je vous le défends : Le bien de^oét hopim^ m'accommoderoit : je n'y :ai poii^t; de- dmt ^ mais j'ai du. crédit : N'y tpudiez p^s, oii vous ^étesperdn.^ Qui pourroit souffnrun maître si rade ? retirons^ nous, on n'y peut pas vivre. Mon.Sa,uvçur,,.qije vous êtes rude \*)\ Mais du moins que promettez* toutes, lès. rigueurs.de sa croix. Mais nous, ^ nies Frères, que choisirons-nous? . , . .C^)Man Sauveur, vous êtes :trop incompatible, on ne BB NOTRE SEIGITEVR. 829 VOUS ? de grands biens. Qui ; mais pour une autre vie! Je le prévoijs, vous ne gagnerez pas votre cause : le inonde emportera le dessus ; c*en est fait^ |e le vois bien /Jésus va être condamné encore une fois. On nous donne un signe pour vous connoitre , mais c'est un signe de contradiction. Il s*en trouvera , peut s'accommoder avec vous, la multitude ne sera pas de votre coté. Aussi, mes Frères, ne la veut-il pas. C'est la multitude qu'il a noyée par les eaux du déluge ; c'est ta multitude qu'il a consumée par les feux du ciel ; c'est la multitude qu'il a abîmée dans les flots de la mer Rouge ; c'est la multitude qu'il a réprouvé^, autant de fois qu'il a maudit dans son évangile le monde et ses vanités : c'est pour engloutir ^çetle malheureuse et d^mmable multitude dans les cachpts éternels, que « T^pfer, dit le prophète » Isaïe (0, s'est dilaté démesurément, et les forts et les » puissans, et les grands du nionde s'y précipitent en » foule ». O monde î ô multitude ï à irpupe innombrable! je crains ta société malheureuse. Le lionibre ne me dé- fendra pas contre mon juge ; la foule des témoins ne me justifiera pas ; ma conscience [ m'accuse J : je crains que mon Sauveur ne se change «a- juge iilft|>laGable : Sicut Ice^ tutus est DomimiS ssqmr.v.Qs bene voUsfiiciens , vasque mukîpfioa^fii sic kçlabifi^r disperd^n^ f^çs. q(que subyfet^ tens (2) : « Comme le Seigneur s'esjt plu k vous bénir et à • i » vous multiplier, ainsi se plaira- t-il à vous détruire et a » vous ruiner ». Quand Dieu entreprendra d^égalër sa justice à ses miséricordes, et dé venger ses bontés si indi- gnement méprisées , je ne me sens pas assez fort pour soutenir l'effort redoutable, ni les coups incessamment redoublés d'une main si rude et si pesante. Je me ris des jugemeus des hommes du monde et de leurs foUes pensées* U) Isai. y. 14. ^ W Deut. xxvui. 63. 33o SiJR LA NATIVITÉ même dans TEgiise y qui seront assez' malheureux de le contredire ouvertement par des paroles et desi sentimens infidèles : mais presque tous le contredi- ront par leurs œuvres. Et ne le condamnons-nous ,pas tous les jours ? Quand nous prenons des routes opposées aux siennes j c'est lui dire secrètement qu'il. a tort, et qu'il devoit venir comme les Juifs l'attendent encore. S'il est votre Sauveur , de quel mal voulez-vous qu'il vous sauve? Si votre plus grand mai c'est le péché, Jésus-Christ est votre Sauveur : mais s'il étoit ainsi , vous n'y tomberiez pas si facilement. Quel est donc votre plus grand mal ? c'est la pauvreté, c'est la. misère? Jésus* Christ n'est plus votre Sauveur; il n'est pas venu pour cela. Voilà comme l'on condamne le Sauveur Jésus. Où irons-nous , mes Frères , et où toumerons- noiis nos désirs? Jusqu'ici tout favorise le monde, le concours , la commodité , les douceurs présentes. Jésus-Christ va . être condamné : on ne veut poinf d'un Sauveur si pauvre et si nud. Irons-nous? preu^ drons-nous parti? Attendons encore : peut-être que le temps changera les choses. Peut-être ! il n'y a point de peut-être ; c'est une certitude infaillible. Il vien- dra , il viendra ce terrible jour où toute la gloire du monde se dissipera en fumée; et alors on verra pa- roitre dans sa majesté ce Jésus autrefois né dans une crèche, ce Jésu^ autrefois le mépris des hommes, ce pauvre , ce misérable , cet imposteur , ce sama- ritain, ce pendu. La fortune de ce Jésus est chan- gée. Vous l'avez méprisé dans ses disgrâces 5 vous DE JrOTRE. SBIGNEUn. 33i B^aurez pas de part à sa gloire. Que^cet avènement changera les choses! Là ces heureux du ^ele n ose* ront paroitre,; parce que se* souvenant de la pan^ vreté passée du Sauveur ^ et voyant sa grandeur pré- sente y la première, sera la conviction de leur folie ^ et la secoade en sera la condamnation. Cependant ce. même Sauveur laissant ces heureux et ces fortu- nés y auxquels on applaudissoit sur ila terre , dans là foule des malheuFeux ,il tournerai sa divine face , aU petit nombre dei ceux qui n'auront pas rougi de sa pauvreté, oxt refusé de. porter sa: cpoixi Venez, dira-t-il , mes chers compagnons , entrez en la so- ciété de ma gloire , jouissez de mon bkhquet éternel. Apprenons donc, mes Frères, à aimer la pau- vreté de Jésus : soyons tous pauvres avec Jésus- Christ. Qui est-ce qui n'est pas pauvre en ce monde, Tun en santé, l'autre en biens , l'un en honneur, et l'autre en esprit? Tout le monde est pauvre; aussi n'est-ce pas ici que les biens abondent : c'est pour- quoi le monde pauvre en eifets ne débite que des espérances ; c'est pourquoi tout le monde désire , et tous ceux qui désirent sont pauvres et dans le besoin. Aimez cette partie de la pauvreté qui vous est échue en partage , pour vous rendre semblables à Jésus-Christ; et pour ces richesses que vous possé- dez, partagez-les avec Jésus-Christ. Compatissez aux pauvres, soulagez les pauvres; et vous participerez aux bénédictions que Jésus a données à la pauvreté. Chrétiens, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, (€ qui étant si riche par sa nature , s'est fait pauvre » pour l'amour de nous , pour nous enrichir par sa 333 SITU LA NATIVITÉ » pauvreté (0 » , détrompons-nous des faux biens du monde. Comprenons que la crèche de notre Sau- veur a rendu pour jamais toutes nos vanités ridi- cules. Oui certainement, ô mon Seigneur Jésus- Christ y tant que |e concevrai bien votre crèche , vos saintes humiliations, les apparences du siècle ne me surprendront point par lem*5 charmes, elles ne m'éblouiront point par lei^ir vain éclat ; et mon cœur ne sera toudié ^ue de ces richesses inesti- mables, que votre glorieuse pauvreté nous a pré- parées y dans la félicité éternelle. Amen^ (0 //. Cor, VIII. g. . ♦ • » ^ I r * Dfi NOTJLE SBIGKEVR. 333 FRAGMENT D'UN AUTRE SERMON SUR LE MÊME MYSTÈRE (♦). Dieu unique dans ses perfections : comment il les; communtque à rhomme. Qrgueily cause de sa chute :. incarnation du Fils de Dieu» remède à cette maladie* f/%^%Mii%^%^m:^^4/^'%^m Gomme Dieu est unique .en iton essence , il est impénétrable en sa gloire , il est inaccefôible en sa hauteur et incomparable, en sa majesté : il est en nous , et nous ne pouvons Fatteiindre. G*est pourquoi FEcriture nous dit si souvent qu'il est plus haut que les cieux et plus profond que les abîmes ; qu'il est caché en lui-mêiùé par Sa propre lumière , et que « toutes les créaturt^s sont comme un rien devant sa ») face » : Omnes gentes xfoasi non sint, sic sunt co^ ràm eOj et quasi nrhOuM et inanè reputatœ sunt ez (0. Le docte TertuHîert , écrivant contre Mardon , nous explique cette vérité par ces magnifiques pa- roles : Summum magnUrti ipsd sud magnitudine (*) Ce fragment renferme le morceau du sermon sur la Nativité, qui s^est trouvé si semblable dans la plupart de ses parties , à celui qu^on vient de lire : nous le donnons ici comme essentiellement lié au sermon qui précède, et pouvant servir à compléter les matièrea qui en font le sujet. Eàit, de Déforis. ^^) Isai,%L, 17. 334 ^^^ ^^ NATIVITÉ ' solitudinempossidens^ unicum est {*), Les expressions de notre langue ne reviennent pas à celles de ce grand homme ; mais disons après lui^ comme nous pourrons y que Dieu étant grand souverainement ^ il est par conséquent uni<]^ue, et qu'il se fait par son unité une auguste solitude y parce que rien ne peut l'égaler ni l'atteindre, ni en approcher, et qu'il est de tous côtés inaccessible. Plus à fond : il n'y a point de grandeur en la créature qui ne se démente par quelque endroit , qui soit soutenue de toutes parts ; et tout ce qui s'élève d'un côté s'abaisse de l'autre. Celui-là est relevé en puissance , mais médiocre en sagesse : cet autre aura un grand courage , mais qui sera mal secondé par U force de son esprit ou par celle de son corps. La probité n'est pas toujours avec la science, ni la science avec la conduite. Enfin, sans faire ici le dénombremeht de ces infinis mélanges, par lesquels les hommes sont inégaux à eux-mêmes; il n'y a personne qui ne voie que l'homme est un composé de. pièces très-inégales, qui ont leur fort et leur foible : il n'y a rien de si fort qui n'ait sou foible; il n'y a rieiji de si haut qui ne tienne au plus bas par quelque endroit. Dieu seul est gfànd en tous * points, parce qu'il possède tout en son unité, parce qu'il est tout parfait , et en un mot tout lui-même, Singulier en toutes choses, et seul à qui on peut dire : (^) Ex defectione œmuU soliludinem quandam de singularitate prœstantiœ suœ possidcns, unicum est. Telles sont les paroles de Tertullien, adt*, Marcion, lib. i, n. 4» queBossuet a mises en marge de son manuscrit, et qu'ail a converties en celles qu*il rapporte ici, sans doute pour rendre plus claire la pensée de Fauteur. EdiU de Déforis. B^ NOTHE SEIGNEUR. 335 O Seigneur, qui est semblable à vous C^)? profond en vos conseils, terrible en vos jugemens, absolu en vos volontés , magnifique et admirable en vos œuvres* C'est ce que veut dire Tertullien par cette, haute solitude en laquelle il fait consister la perfection de son être. . Le mystère de cette journée nous apprend que Dieu est sorti de cette auguste et impénétrable so- litude. Quand un Dieu s'est incarné, l'Unique s'est donné des compagnons, l'Incomparable s'est fait des égaux , l'Inaccessible s'est rendu palpable à nos seos t €< il a paru parmi nous » , et comme un de nous sur la terre : Et habitasfit innobis (p). Encore qu'il soit éloigné par tous ses divins attri- buts, il descend quand il lui plaît par sa bonté, ou plutôt il nous élève. Il fait ce qu'il veut de ses ouvrages : et comme , quand il lui plaît , il les repousse de lui jusqu'à l'infini et jusqu'au néant, il sait aussi le moyen de les associer à lui-même d'une manière incompréhensible, au-delà de ce que nous pouvons et croire et penser. Car étant infiniment bon , il est infiniment commuijiicatif , infiniment unissant; de sorte qu'il ne faut pas s'étonner qu'il puisse unir la nature humaine à sa personne divine. Il peut élever l'homme autant qu'il lui plait, et jusqu'à être avec lui la même personne. Et il n'y a rien en cette union qui soit indigne de lui; parce que, comme dit le grand saint Leon,.c( en prenant » la nature humaine, il élève ce qu'il prend , et il » ne perd point ce qu'il communique » : Et nostra suscipiendo proi^ehit ^ et sua communicando nou (0 Exod. XV. 1 1. — (*) Joan. i. 14. 336 SITK LA NATIVITÉ perdit. Par-là il témoigne son amour, il eierce sa munificence et conserve sa dignité : Et nostra sus-- cipiendo provehit , et sua communicando non per-- dit (0. Encore plus avant : l'orgueil est la cause dé notre ruine. Le genre humain est tombé par l'impulsion de Satan. Gomme un gi*and bâtiment qu'on jette par terre, en accable un moindre sur lequel il tombe ; ainsi cet esprit superbe en tombant du ciel est venu fondre sur nous , et nous a entraînés après lui dans sa ruine. Il a imprimé en nous un mouve- ment semblable à celui qui le précipite lui-même : Unde ceciditj inde dejecit (^). Etant donc abattu par son propre orgueil, il nous a entraînés en nous renversant dans le même sentiment dont il est poussée Superbes aussi bien que lui, [ nous voulons nous ] égaler à Dieu avec lui. L'homme par soii orgueil a voulu se faire Dieu ; et pour guérir cet orgueil Dieii a voulu se faire homme. Saint Augustin définit l'orgueil une perverse imitation de la nature divine (^). [ Car il y a ] des choses où il est permis d'imiter Dieu. Il est vrai qu'il est excité à jalousie , lorsque l'homme se veut faire Dieu et entreprend de lui ressembler; mais il ne s'ofiènse pas de toute sorte de ressemblance *, au contraire il y a de ses attributs dans lesquels il nous commande de l'imiter. Considérez sa miséricorde , dont le Psalmiste a écrit « qu'elle surpasse ses autres » ouvrages (4) » ; il nous est ordonné de nous cou- (0 Serm, iv. de Nat. c, m.— (») S, Aug, Serm. clxit. n, 8, toi», v, col. 788. — ^3) De Civ. Dei. Ub, jux, 0, xii, tom. vu, coL 556. — (4) Ps, cnhiY. 9. former DE IVOTRE SEIGNEUR. 337 former à cet admirable modèle : Estote miséricordes sicut et Pater vester miser icors est {^) : « Soyez » miséricordieux comme votre Père est miséricor- » dieux ». pieu est patient sur les pécheurs^ et les invitant à se convertir ,. il fait luire en attendant son soleil sur eux , et prolonge le temps de leur peni-, tence. U veut que nous nous montriçms ses enfans, en imitant cette patience à l'égard de nos ennemis : Ut sitis filii Patrfs vestri (2) : « afin que vous soyez^ » les enfans de votre Père ». Il est saint : et encore, que sa sainteté semble être entièrement incommu- nicable, il ne se fâche pas néanmoins que nou^ osions porter nos prétentions jusqu'à Thonneur d^ lui ressembler dans ce merveilleux attribut; aucon-? traire il nous le commande : Sancti estote , quia^ ego sanctus sum^) : « Soyez saints, parce que je suis )) saint ». Ainsi vous pouvez le suivre dans sa vérité,,^ dans sa fidélité et dans sa justice. Quelle est donc cett^ ressemblance qui lui cause de la jalousie 7 Cest que^ nous lui voulons ressembler dans Thonneur de Tin-^ dépendance , en prenant notre volonté pour loi souveraine , comme lui-même n £^ point d'autre loi que sa volonté absolue, Cest là le point délicat 9 c'est là qu'il se montre jaloux de ses droits, et re^- pousse avec violence tous ceux qui veulent ainsi attenter à la majesté de son empire. Sayon^ ,de^ dieux , il nous le permet , p^r l'imitation de sa saiun teté, de sa justice, de 3a vérité, de sa patience, de sa miséricorde toujours bienfaisante, Quaiid il s'agira de puissance , tenons-nous dans les ]()ornesi (0 Luc. VI. 36. — (») MaUh, v. 45. — C^) Levit, xi. 44* BOSSUET. XI. 2^ 338 &VK LA NATIVITÉ d'une cr&ture , et ne portons pas nos désirs à une ressemblance si dangereuse» Voilà , mes Soeurs ^ la règle immuable que nous devons suivre pour imiter Dieu. Mais^ ô voies cor- rompues des enfans d'Adam! ô étrange corruption du cœur humain ! nous renversons tout Tordre de Dieu. Nous ne voulons pas Fimiter dans les choses où il se propose pour modèle , nous entreprenons de le contrefaire dans celles où il veut être unique et inimitable , et que nous ne pouvons prétendre sans rébellion. C'est sur cette souveraine indépen- dance que nous osons attenter ; c'est ce droit sacré et inviolable que nous affectons par une audace insensée. Car comme Dieu n'a rien au-dessus de lui qui le règle et qui le gouverne , nous voulons être aussi les arbitres souverains de notre conduite; afin qu'en secouant le joug^ en rompant les rênes > et rejetant le frein du commandement , qui retient notre liberté égarée, nous ne relevions point d'une autre puissance, et soyons comme des dieux sur la terre. Et n'est-ce pas ce que Dieu lui-même reproche aux superbes, sous l'image du Roi de Tyr? Ton cœur , dit-il , s'est élevé , et tu as dit : Je suis un Dieu , et « tu as mis ton cœur comme le cœur d'un » Dieu » : DecUsti cor tuum quasi cor Dei (0. Tu i'aë voulu ni de règle , ni de dépendance. Tu as marché sans mesure, et tu as livré ton cœur emporté à tes passions indomptées. Tu as aimé, tu as haï, seldii que te poussoient tes désirs injustes; et tu as fait un funeste usage de ta liberté par une superbe transgression de toutes les lois. Ainsi notre orgueil (O^'xec^. xx\riii. a. • • DE NOTRE SEIGNEUH. 339 aveugle nous remplissant de nous-mêmes^ nous érige en de petits dieux. Eh bien! ô superbe , ô p^etit dieu, voici le grand Dieu vivant qui s'abaisse pour te confondre. L'homme se fait Dieu par orgueil^ et Dieu se fait homme par condescendance. L'homme s'attribue faussement la grandeur de Dieu , et Dieu prend véritablement le néant de l'homme* Mais voici encore un nouveau secret de la misé- ricorde divine. Elle ne veut pas seulement confondre l'orgueil, elle a assez de condescendance pour vou- loir en quelque sorte le satisfaire. Elle veut bien donner quelque chose à cette passion indocile y qui ne se rend jamais tout-à-fait. L'homme avoit osé as- pirer à l'indépendance divine : on ne peut le con- tenter en ce. point; le trône ne se partage pas : la majesté souveraine ne peut souffrir ni d'égal ni de compagnon. Mais voici un conseil de miséricorde qui sera capable de le satisfaire. L'homme ne peut devenir indépendant ; Dieu veut bien devenir sou- mis. Sa souveraine grandeur ne souffre pas qu'il s'a- baisse, tant qu'il demeuiera dans lui-même ; cette nature infiniment abondante ne refuse pas d'aller à l'emprunt, pour s'enrichir en quelque sorte par l'humilité ; « afin , dit saint Augustin , que l'homme » qui méprise cette vertu , qui l'appelle simplicité » et bassesse , quand il la voit dans les autres hom- » mes, ne dédaignât pas de la pratiquer, quand il » la voit dans un Dieu (0 ». £t hoc vobis signum. O homme , tu n'as fait que de vains efforts pour t'élever et te faire grand : tu peux bien t'emporter , mais non t'élever ; tu peux ^ (') InPs. xzxiii. Enarr, i. /i. 4> tom. iv, coL aïo. 34o SUR lÀ NATIVITÉ bien t'enfler, mais non t*agrandir: viens chercher dans ce Dieu-homme, dans ce Dieu enfant, dans ce Sauveur qui naît aujourd'hui , la solide élévation et la grandeur véritable D'où vient qu^un Dieu se fait homme? pour nous faire approcher de lui^ traiter d*égal avec lui. C'est pourquoi saint Augustin attribue la cause du mystère de Flncarnation « à » une bonté populaire » : Populari quâdam clemen-' tidM. De même qu'un grand orateur plein de hautes conceptions , pour ,se rendre populaire et intelligi- ble, se rabaisse par un discours simple à la capacité des esprits communs : comme un grand environné d*un éclat superbe qui étonne le simple peuple , et ne lui permet pas d'approcher, se rend populaire et familier par une facilité obligeante, qui sans af^ foiblir l'autorité rend la bonté accessible : ainsi la sagesse incréée , ainsi la majesté souveraine se dé- pouille de son éclat , de son immensité et de sa puissance pour se communiquer aux mortels , et re-* lever le courage et les espérances de notre nature abattue. Approchez donc , ô fidèles , de ce Dieu en«» fant. Tout vous est libre, tout vous est ouvert. (>) S. Aug, contra Acad» lib, m, /i. 43> tom i, coL 294. DE NOTRE SEIGNEUR. 3^1 IV SERMON SUR LE MYSTÈRE DE LA NATIVITE DE NOTRE SEIGNEUR^ PR£CaÉ DANS L^EGLISE CATUEDRAIiE DE MEAVX, EN 169I ^'\ CsHtaclères du Messie promis. Trois sortes de contradictions auxquelles il est eu butte, même parmi les chrétiens et dans fEglifiè. ^/%<%»%<%^<^^^^>^%^»%^^» CiELui-ci , cet enfant qui vient de naître , dont les anges célèbrent la naissance , que les bergers vien- nent adorer dans sa crèche, que les Mages viendront bientôt rechercher des extrémités de l'Orient , que (*) Ce sermon n''est, à proprement parler, que Tabrégé de celui que BossDet a^oit prononcé : nous ne Favons point écrit de la main -de Fauteur, mais seulement de celle de M. Ledieu, son secrétaire , à qui il le dicta après Favoir prêché, comme nous Fapprend la note suivante mise en tête du manuscrit, «c Cette copie faite de ma » main est Foriginal même du sermon dbnt Fauteur n'avoit rien » écrit, et qu'ail me dicta depuis, à Versailles en deux ou trois 8oi« 3> rées, pour Jouarre, où il Fàvoit promis. H Yy envoya en effet » à madame de Lusancy Sainte-Hélène, religieuse, avec la lettre » fpiû lui écrivit de Versailles le 8 janvier 169a, la chargeant de » renvoyer cet original fait pour elle , quand elle en auroit pris 3) copie. J'ai la lettre parlant de cet enyoi ». Ediu de Déforis. 34a SrR LÀ NATIVITÉ vous verrez dans quarante jours présenté au temple ^ et mis entre les mains du saint vieillard Siméon : « Cet enfant , dis-je , est établi pour la ruine et pour » la résurrection de plusieurs dans Israël (0 », non- seulement parmi les gentils, mais encore dans le peuple de Dieu et dans l'Eglise qui est le vrai Israël; €c et pour être en butte aux contradictions; et votre » ame sera percée d'une épée » : et tout cela se fera, « afin que les pensées que plusieurs tiennent ca- a> chées dans leurs cœurs, soient découvertes ». La religion est un sentiment composé de crainte et de joie : elle inspire de la terreur à l'homme , parce qu'il est pécheur ; elle lui inspire de la joie , parce qu'il espère la rémission de ses péchés : elle lui inspire de la terreur , parce que Dieu est juste ; et de la joie, parce qu'il est bon. U faut que l'homme tremble et qu'il soit saisi de frayeur, lorsqu'il sent en lui-même tant de mauvaises inclinations; mais il faut qu'il se réjouisse et qu'il se console , quand il voit venir un Sauveur et un médecin pour le guérir. C'est pourquqi le Psalmiste chantoit : « Réjouissez* » vous devant Dieu avec tremblement W » : réjouis- sez-vous par rapport à lui , mais tremblez par rap* port à vous; parce qu'encore que par lui-même il ne vous apporte que du bien , vos crimes et votre malice pourront peut-être l'obliger à vous faire du mal. C'est donc pour cette raison que Jésus-Christ est établi non-seulement pour la résurrection , mais encore pour la ruine de plusieurs en Israël. Et vous ne trouverez pas mauvais que j'anticipe ce discours prophétique du saint vieillard Siméon, pour vous (^) Luc. II. 34, 35. — (») Ps. II. u. DE NOTKE SCIGITEVK. 343 donner une idée parfaite du mystère de Jésus-Christ qui naît aujourd'hui. G'étoit un des caractères du Messie promis à nos pères d'être tout ensemble ,, et un sajet de consola- tion, et un sujet de contradiction; une pierre fon- damentale sur laquelle on . doit s'appuyer , et une pierre d'achoppement et de scandale contre laquelle on se heurte et on se brise. Les deux princes des apôtres nous ont appris unanimement cette vérité. Saint Paul y dans Tépitre aux Romains : « Ce|;te » pierre, [dit-il,] sera pour vous une pierre de scan- » dale , et quiconque Croit en lui ne sera point cour » fondu (0 ». Le voilà donc tout ensemble^ et le fon- dement de Fespérance , et le sujet des contradictions du genre humain. Mais il faut encore écouter le prince des apôtres: « C'est ici, dit-iL(?), la pierre de Fangle^ » la pierre qui soutient et qui unit tout l'édifice; et » quiconque croit en celui qui est figuré par cette )) pierre, ne sera point çoofondu». Mais c'est aussi une pierre d'achoppement et d^ scandale , qui fait tomber ou qui met en pièces tout, ce qui se hçurt^e contre elle. Mais il faut que les disciples se taisent quand le maître parle lui-même. C'est Jésusr Christ qui répond aux disciples de saint Jean-Baptiste : ce Bienheureux sont ceux, dit-il,, à qui je ne suis pas » une occasioa de scandiale (5) ». Quoique je fasse tant de miracles^ qui £ç>nt voir au genre humain que je suis le fondement de son espérance , on est ce- pendant trop heureux quand on ne trouve point en moi une occasion de se scanlialiser : tant le genre humain est corrompu, tant les yeux sont foibles CO Rom. IX* 33. — C») /. Petr. ii. 6, 7. — (3) Itfatth, tu. 6, 344 ^^^ ^^ VATITITÉ poarsouteBÎr lalamière^tanllesGceorssont rdidies à la vérité. Et pour porter cette vérité jusqu'au preoiier principe, c'est Dieu même qui est prûniti- vement en ruine et en r&urrection au genre hu- main ; car s'il est le sujet des |Jus grandes louanges, il est aussi en butte aux plus |prands blasf^mes. Et cela c'est un eflet comme naturel de sa grandeur; parce qu'il &ut nécessairement que la lumière qui édaire les yeux sains, éblouisse et confonde les yeux malades. Et Dienpermet que le genre humain se par- tage sur son sujet , afin que ceux qui le servent, en voyant ceux qui le blaqphément, recpnnoissent la grâce qui les discerne , et lui aient l'obligation de leur soumission. Cétoit donc en Jésus-Christ un caractère de divinité d'être en butte aux contradictions des hommes, d'être en ruine aux uns, eteti résurrection aux autres. Et pour entrer plus profondém^rit dans un si grand mystère, je trouve qée Jâuâ-Christ est une occasion de contradiction et de scandale, dans les trois principaux endroits par lesquels il s'est dé- claré notre Sauveur; dans l'état de sa personne, dans la prédication de sa doctrine, dansl'institutiondeses sacremens. Qu'est-ce qui choque dans l'état de sa per- sonne? sa profonde humiliation. Qu'est-cequi choque dans sa prédication et dans sa doctrine ? sa sévère et inexorable vérité. Qu'est-ce qui choque dans l'institution de ses sact*emens? je le dirai pour notre confusion, c'est sa bobté et sa miséricorde même. PREMIER POINT. de Dieu par leur intelligence , autant s'en éloir » gnoient-ik par leur orgueil » : QuanUm propiib- 'çuai^erunt intélligentid , tanûim superbid recesse^ runt , dit excellemment saint Augustin (0. Mais, direzrVous, on leur pré choit la résurrec- tion de Jésus-Christ et son ascension triomphante d^ins les cieûx^ ils dévoient donc entendre que ce Verbe , que cette! Parole y que cette Sagesse inca]^- née étoit quelque chose de grand. Il est vrai : mais tout le fond de ces grands mystères étoit toujours un Dieu fait homme ; c'étoit un homme qu'on éle^ voit si haut; c'étoit une chair humaine et un coi^ humain qu'on plaçoit au plus haut des cîeux. C'est ce qui leur paroissoit indigne de Dieu ; et quelque haut qu'il montât après s'être si fort abaissé , ils ne trouvoient pas que ce fût un remède à la dégrada^ tion qu'ils s'imaginoient dans la personne du Verbe (0 Contra Julian. lib. ir, cap. m, tom. x^ col 593. DE NOTRE SEIGNEUR. 347 fait chair. C'est par-là que cette personne adorable leur devint méprisable et odieuse : méprisable, parce qu elle s'étoit abaissée ; odieuse y parce qu'elle les obligeoit de s'abaisser à son exemple. C'est ainsi qu'il a été établi pour la ruine de plusieurs : Posi- tus in ruinam. Mais en même temps il est aussi la résurrection de plusieurs ; parce que pourvu qu'on veuille imiter ses humiliations , on apprendra de lui à s'élever de la poussière. Humiliez-vous donc, âmes chrétiennes , si vous voulez vous relever avec Jésus- Christ. Mais, ô malheur Iles chrétiens ont autant de peine à apprendre cette humble leçon , qu'en ont eu les sages et les grands du monde. Loin d'imiter Jésus- Christ, dont la naissance a été si humble, chacun oublie la bassesse de la sienne. Cet homme qui s'est élevé par son industrie , et peut-être par ses crimes, ne veut pas se souvenir dans quelle pauvreté il étoit né. Mais ceux qui sont nés quelque chose dans Tordre du monde , songent-ils bien quel est le fond de leur naissance? combien elle a étéfoible, com- bien impuissante et destituée par elle-même de tout secours? Se souviennent-ils de ce que disoit, en la pei^onne d'un roi , le divin auteur du livre de la Sagesse? « Je suis venu au monde en gémissant » comme les autres (0 ». De quoi donc se peut van- ter l'homme qui vient au mondé ; puisqu'il y vient en pleurant , et que la nature ne lui inspire point d'autres pressentimens dans cet état, que celui qu'il a de ses misères? Entrons donc dans de profonds sentimens de notre bassesse ; et descendons avec (») «$!fltp. Tii. 3. 348 SUR LA NATIVITÉ Jésus*€hnst , si nous voulons monter avec lui. « U » est montée dit saint Paul (0, au plus haut des )> cieuxy parce qu'il est auparavant descendu au » plus profond des abîmes >>. Ne descendons pas seulement avec lui dans une humble reconnoissance des infi imités et des bassesses de notre nature; des- cendons jusqu'aux enfers, en confessant que c'est de là qnil nous a tirés : et non-seulement des enfers où étoient les âmes pieuses avant sa venue y ou des prisons souterraines où étoient les âmes imparfaites qui avoient autrefois été incrédules ; mais du fond même des enfers où les impies , où Caïn , où le mau- vais riche étoient tourmentés avec les démons. C'est jusque-là qu'il .nous faut descendre, jusque dans ces brasiers ardens ^ jusque dans ce chaos horrible et dans ces ténèbres éternelles; puisque c'est là que nous serions sans sa grâce. Anéantissons à son exemple tout ce que noussommes^ Car considérons, mes bien-aiméSy qu'est-ce qu'il a anéanti en lui- même. « Comme il étpit , dit saint Paul ip) , dans la » forme et la nature de Dieu , il n'a pas cru que ce » fût à lui un attentat de se porter pour égal à » Dieu ; mais il s'est anéanti lui-même en prenant la » forme d'esclave, ayant été fait semblable aux » hommes ». Ce n'e^t donc pas seulement la forme d'esclave qu il a comme anéantie en lui-même \ mais il a anéanti autant qu'il a pu, jusqu'à la forme de Dieu , en la cachait sous la forme d'esclave , et sus- pendant, poMr ainsi parler, son action toute-puis- sante et refrusio;i .de sa gloire; poussant l'obéis- sance jusqu'à la mort , et jusqu'à la mort de la (») Ephes. ly. 9, lo. — C») Philip, u. 6,7. DE NOTRE SEIGNEVll. 349 croix (0; la poussant jusqu'au tombeau ^ et tie com- mençant à se relever que lorsqu'il fut parvenu à la dernière extrémité de la bassesse. Ne songeons donc à nous relever non plus que lui^ que lorsque nous aurons goûté son ignominie dans toute son éten-f due , et que nous aurons bu tout le calice de ses humiliations. Alors il ne nous sera pas en ruine., mais en résurrection , en consolation et en )oie.. ^ SECOND POINT. MAis pour nous jeter dans ces profondeurs^ lais- sons-nous confondre par la vérité de sa doctrine* C'est la seconde source des contradictions qU'il a eu à essuyer sur la terre. Il n*a eu à y trouver que des pécheurs; et il sembloit que des pécheurs ne dé- voient non plus s*opposer à un Sauveur y que des malades à un médecin. Mais c'est qu'ils étoient pé^i- cheurSy et cependant qu'ils n'étoient pas Uumbles. Toutefois qu'y avoit-il de plus convenable à un pér cheur que l'humilité, et l'humble aveu de ses fautes? c'est ce que Jé&us-dhrist n'a pu trouver parmi les hommes, il a trouvé des pharisiens pleins de râ|Si« nés 9 d'impuretés et de corruption : il a trouvé des docteurs de la loi , qui sous prétexte d'observer les plus petits commandemçns avec une exactitude sur- prenante y violoient les plus grands. Et ce qui les a soulevés contre le Fils de Dieu , c'est ce qa'il a dit lui-même en un mot : ce Je suis venu au monde , » comme la lumière; et les hommes ont mieux aimé » les ténèbres que la lumière , parce que leurs œu- » vres étoient inauvaises C^) ». CO Philip, II. 8. — («) Joan. m. 19. 35o sua LA NATIVITÉ C^est pourquoi Jésus a été, plus que Moïse , plus que Jérëmie, plus que tous les autres prophètes, ^ un objet de contradiction, de murmure et de scan- dale à tout le peuple. « C'est un prophète, ce n'en » est pas un : c'est le Christ; le Christ peut-il venir » de Nazareth ? peut-il venir quelque chose de bon » de Galilée (0? Quand le Christ viendra, on ne » saura d'où il vient (^); mais nous savons d'où vient » celui-ci (5). C'est un blasphémateur et un impie qui » se fait égal à Dieu (4) , qui enseigne à violer le » jour du sabbat (5). C'est un samaritain et un schis- » matique (^) ; c'est un rebelle et un séditieux , qui » empêche de payer le tribut à César (7) ; c'est un » homme de plaisir et de bonne chère, qui aime » les grands repas des publicains et des pécheurs (^); » il est possédé du malin esprit, et c'est en son nom » qu'il délivre les possédés (9) ». En un mot, c'est un trompeur, c'est un imposteur ; ce qui enfermoit le comble de tous les outrages , et ce qui fait aussi qu'on lui préfère un voleur de grand chemin et un assassin. Lequel des prophètes a été en butte à de plus étranges contradictions? Il le falloit ainsi, puis- que portant aux hommes plus près que n'avoit fait aucun des prophètes, et avec un éclat plus vif , la vérité qui les condamnoit , il falloit qu'il soulevât contre lui tous les esprits jusqu'aux derniers excès ; c'est pourquoi la rébellion n'a jamais été portée plus loin. Il fait des miracles' que jamais personne n'a- voit faits , et il ne laissoit aucune excuse à l'infidé- 0) Joan. VII. 40, 4i. — (*) ^^id' ^1- — ^') ^**^- ^' 39- "^ ^^^ ^*^^' X. 33. - (5) ibid. IX. 16. — (6) Ibid, Yui. 48. — (7) Luc. xxiu. 2. — Ç8) Matth, XI. 1 9. — (9) lUd. XII. 24- D£ NOTRE SEiaNEITft. 35l lité des hommes. Mais plus la conviction étoit ma- nifeste y plus le soulèvement devoit être brutal et insensé. Car voyez jusqu'où ils portent leur fureur : il avoit ressuscité un mort de quatre jours en pré- sence de tout le peuple : et non-seulement c'est ce qui les détermine à le faire mourir , mais ils veulent faire mourir avec lui celui qu'il avoit ressuscité, afin d'ensevelir dans un même oubli , et le miracle ^ et celui qui en étoit l'auteur, et celui qui en étoit Le sujet; parce qu'encore qu'ils sussent bien que Dieu, qui avoit fait un si grand miracle , pouvoit bien le réitérer quand il voudroit, ils osoient bien espérer qu'il ne le voudroit pas&ire, ni renverser si souvent les lois de la nature. Voilà jusqu'où ils poussent leurs complots; et jamais la vérité n'avpit été plus en butte aux contradictions , parce que jamais elle n'avoit été plus claire , ni plus convaincante, ni, pour ainsi parler, plus souveraine. C'est donc alors que les pensées, que plusieurs tenoient cachées dans leurs cœurs , furent découvertes. Et quelle fut la noire pensée qui fut alors découverte? que l'homme ne peut souiTrir la vérité; qu'il aime mieux ne pas voir son péché pour avoir occasion d'y demeurer , que de le voir et le reconnoître pour être guéri : et en un mot que le plus grand ennemi qu'ait l'homme, c'est l'homme même. Voilà cette secrète et profonde pensée du genre humain , qui devoit être révélée à la présence de Jésus-Christ et à sa lumière. Ut reue- lentur ex multis cordiius cogitationes. . . Prenez donc garde , naes Frères , de ne pas imiter ces furieux. Tu t'enfonces dans lé crime, malheu- reux pécheur ; et à mesure que tu t'y enfonces les 35a SUR LA NATIVITÉ lumières de ta conscience s'éteigneat ; et cette pa-' rôle de Jésus-Christ s'accomplit encore : « Vo^s vou- » lez me faire mourir, parce que ma parole ne prend » point en vous (0 )>• Les lumières de ta conscience^ et cette secrète persécution qu elle te fait dans ton coeur, ne t'émeuvent pas; pour cela tu les veux éteindre ; les vérités de l'Evangile te sont un scan- dale ; tu commences à les combattre , non point par raison, car tu n'en as point, et « les témoignages de » Dieu sont trop croyables (2) » ; mais par paresse ^ par aveuglement , par fureur. U n'y a plus devant ^es yeux et dans le fond de ton cœur qu'une petite hunièi^e ; et sa foiblesse fait voir qu'elle n'est plus en toi que pour un peu de temps : Adhuc modicum lumen in vobis est (P) ; « La lumière est encore en » vous pour un peu de temps ». Au reste, mon cher Frère, c'est Jésus-Christ qui te luit encore, qui te parle encore par ce foible sentiment : marche donc à la faveur de cette lumière , de peur que les ténè- bres ne t'enveloppent : et celui qui marche dans les ténèbres ne sait où il va (4) ; il choppe à chaque pas, à chaque pas il se heurte contre la pierre , et tous les chemins sont pour lui des précipices. TROISIÈME POINT. Mais ce qu'il y a ici de plus étrange , c'est que le dernier sujet du scandale qui a soulevé le monde contre Jésus-Christ , c'est sa bonté. Si dans le temps de sa passion et dans tout le cours de sa vie , on a poussé les outrages jusqu'à la dernière extrémité; c'est à cause « qu'il se livroit à l'injustice », comme {}) Joan. VIII. 37. — W Ps, xcii. 7. — (3) Joan. xii. 35. — (4) Ibiâ. dit DE NOTRE SBlGfffiVR* 3S3 « dit Tapôtre saint Pierre (0; qu'il se laissoit frapper impunément , comme un agneau innocent se laisse tondre, et se laisse même mener à Tau tel ^ pour y être égorgé comme une victime: c'est que s'il fait des miracles y c'est pour faire du bien à ses ennemis, et non pas pour empêcher lé mal qu'ils lui vouloient faire. C'est de là qu'est venu le grand scandale que le monde a vu arriver dans Israël , à l'occasion de Jésus-Christ. Mais voici , dans le vrai Israël et dans l'Eglise de Dieu, le grand scandale. Parce que, dans l'institution de ses sacremens, Jésus-Christ n'a point voulu donner de bornes à ses bontés, les chrétiens n'en donnent point à leurs crimes. On a reproché au Sauveur l'efficace toute*puissante de son baptême , où tous les crimes étoient également expiés ; et Julien l'Apostat a bien osé dire que c'étoit inviter le monde à faire mal ip) : mais la clémence du Sauveur ne s'en tient pas là. Novatien et ses sectateurs en ont eu honte : ils ont tâché de renfermer la miséricorde du Sauveur dans le baptême, étant tout remède à ceux qui n'avoient pas profité de celui-là. L'Eglise les a condamnés , et la miséricorde qu'elle prêche est si grande , qu'elle ouvre encore une entrée pour le salut à ceux qui ont violé la sainteté du baptême , et souillé le temple de Dieu en eux-mêmes. Restrei- gnons-nous donc du moins , et ne donnons qu'une seule fois la pénitence , comme on faisoit dans les premiers temps. Non , mes Frères, la miséricorde de Jésus-Christ va encore plus loin : il n'a point mis de bornes à la rémission des péchés. Il a dit , sans (0 /. Petr. II. a3. — (») Apud, S. Cyril udlex. Ub. vu. contn Jul 6ossu£T* XI. a 8 3^4 ^^^ ^^ ITATIVITÉ restriction : « Tout ce que vous remettrez , tout ce » que vous délierez (0 ». Il a dit à tous ses miàistres, en la personne de saint Pierre; « Vous pardonnerez » non -seulement sept fois^ mais jusqu'à sept fois » septante fois W ». C'est que le prix de son sang est infini : c'est que reflicace de sa mort n a point de bornes : et c'est là aussi lé grand scandale qui paroit tous les jours dans Israël : on dit, je pécherai encore, parce que j'espère faire pénitence. Que ce discours est insensé ! sans doute faire pénitence, ce n'est autre chose que se repentir. Quand on croit qu'on se repentira de quelque action , c'est une raison pour ne la pas faire. Si vous faites cela , dit-on tous les jours y vous vous en repentirez. Mais à l'égard de Dieu y le repentir devient l'objet de notre espérance, et on ne craint point de pécher, parce qu'on espère de se repentir un jour. Il falloit donc encore quç cette absurde pensée fût .révélée à la venue de Jésus- Christ : Ut reyelenîur cogitaUones. Mais , chrétien , tu n y penses pas quand tu dis que tu feras pénitence et que tu te repentiras, et que tu fais servir ce re- pentir futur à ta licence : tu renverses la nature, tu introduis un prodige dans le monde. C'est en effet que ton repentir ne sera pas un repentir véritable, mais une erreur dont tu te flatteras dans ton crime. Tremblez donc , tremblez , mes Frères , et crai- gnez qu'en abusant de l'esprit de la pénitence pour vous autoriser dans vos péchés, vous ne commet- tiez à la fin ce péché contre le Saint-Esprit , qui ne se remet ni en ce monde ni en l'autre. Car enfin , s'il est véritable qu'il n'y a point de péché que le (0 Matlh, XVI. 395 ^ *▼">• *8* — ^'^ ^*i^- a»- DE irOTRE SEIGKETTR. 355 , sang de Jésus-Christ ne puisse effacer, et que sa miséricorde ne puisse remettre , il n'est pas moins véritable qu il y en aura un qui ne sera jamais remis : et comme vous ne savez pas si ce ne sera point le premier que vous commettrez, et qu'il y a au con- traire grand sujet de craindre que Dieu se lassera de vous pardonner, puisque toujours vous abusez de son pardon , craignez tout ce que fera une bonté rebutée, qui changera en supplices toutes les grâces qu'elle vous a faites. Venez contempler tous les mystères du Sauveur : regardez l'endroit par où ils vous peuvent tourner à ruine , et celui par on il& vous peuvent être en conscdation et en joie : et au lieu de regarder sa bonté comme un titre pour l'offenser plus facilement, regardez-la comme un motif le plus pressant pour enflammer votre amour ; afin que passant vos jours dans les consolations qui accompagnent la rémission des péchés, vous arriviez au bienheureux séjour,' d'où le péché et les larmes seront éternellement bannies : c'est la grâce que je vous souhaite avec la bénédiction du Père , du Fils et du Saint-Esprit : ainsi soit-il. 3S6 . SVn LA 9AT1TITÉ EXORDE SUR LE MYSTÈRE DE LA NAUVITÊ DE NOTRE SEIGNEUR. tv^^^^^m^^^i^^^tmf^ C'étoit une grande entreprise de rendre véné- rables par toute la terre les abaissemens du Verbe incarné. Jamais chose aucune ne fut attaquée par des raisonnemens plus plausibles. Les Juifs et les gentils en faisoient le sujet de leurs railleries;, et il faut bien que les premiers chrétiens aient eu une fermeté plus qu'humaine , pour prêcher à la face du monde avec une telle assurance une doctrine appa- remment si extravagante. C'est pourquoi Tertullien se vante que les humiliations de son maître, en lui faisant mépriser la honte , Font rendu impudent de la bonne sorte et heureusement insensé : Bene int- pudentem et féliciter stultum (0. Laissez-moi, disoit ce grand homme , quand on lui reprochoit les bas* sesses du Fils de Dieu , laissez*moi jouir de Figno- minie de mon maître et du déshonneur nécessaire de notre foi. Le Fils de Dieu est né dans une étable ; je n'en ai point de honte , à cause que la chose est honteuse : on a mis le Fils de Dieu dans (») De Carn. Chr. ». 5. ' DE KOTRB SEI6NEITA. ' 357 des langes ; il est croyable , parce qu'il est ridicule : le Fils de Dieu est dans une crèche ; je le crois d'au- tant plus certain , que selon la raison humaine il paroit entièrement impossible. Ainsi la simplicité de no^ pères se plaisoit d'étourdir les sages du siècle par des propositions inouies y dans lesquelles Us ne pouvoient rien comprendre ; afin que toute la gloire des hommes s'évanouissant ^ il ne restât plus d'autre gloire que celle du Fils de Dieu anéanti pour l'amour des hommes. C'est à ce Dieu abaissé que je vous appelle. Venez l'adorer, chrétiens, autant dans sa foiblesse que dans sa grandeur ; autant dans sa crèche que dans son trône. Mais quel seroit notre crime , si venant adorer le Fils, nous manquions de saluer la divine Mère , qui nous l'a donné par son enfantement , qui nous le nourrit de son lait vir- ginal, qui nous le conserve par ses soins maternels, et qui nous obtiendra son secours qui nous est si nécessaire en cette action , si nous l'en prions avec zèle, en disant, jÉi^e. 358 SV& LA 2VÀTIT1TÉ PENSÉES DÉTACHÉES .) SUR LE MEME SUJET (*). ^<*«'%»»»^^»%/%^^^%«^»/^ Les prophètes étoient vaiacus par notre malice ; les docteurs ne profitoient pas ; la loi étoit foible et parloit vainement^ les anges mêmes et les archanges travailloient inutilement au salut des hommes, dont la volonté ne suivoitpas le bien où elle étoit excitée* Le Créateur est. venu lui-même. ,non avec éclat ni avec un appareil superbe , de peur d'alai^mer son serviteur fugitif et égaré de ses loi^ (f^uyae^a tai^v vofAwv). Il ne. veut pas effrayer sa proie^ la proie qu'il vouloit prendre pour son salut. S'il étoit venu noblement y le monde eût attribué son changement à sa dignité^ à sa puissance , à ses richesses , à son éloquence y à sa doctrine. Tout est humble, tout est pauvre, tout est obscur , méprisable ; afin qu'il paroisse que la seule divinité avoit transformé le monde : une mère pauvre , une patrie encore plus pauvre ; dans une crèche , pour se montrer la pâture même des ani* (^) Bossuet cite en tête de ces Pensées lliomélie de Théodote d''Ancyre, sur la naissance du Sauveur, qui fîit lue dans le concile d^Ephése : il renvoie plus bas à deux autres homélies du même au-> teur, et par la comparaison que nous avons faite, nous nous sommes convaincus que le fond de ces pensées est tiré des trois homélies de Théodote. On les trouve au tOTn& m d^ Conciles du P, Labbe^ €oL 988 et suLif, £dit. de Déforis. DE NOTRB SEIGNEUR. 35^ maux irraisonnables : car les Juifs étoient plus bru- taux que les brutes mêmes. Etant riche , s'est fait pauvre. Condescendance. Une vertu céleste prit la forme d'une étoile , pour conduire les Chaldéens par une nature qui leur fut connue et /amilière. Le même qui a attiré les Mages fait la solennité présente j non couché dans la crèche y mais posé sur cette table sacrée. La crèche a enfanté cette table : il a été posé en celle-là, afin qu'il pût être mangé en celle-ci. Cette crèche a représenté cette table magnifique. Cette Vierge a produit ce nombre innombrable de vierges. La pauvreté dé Bethléem a bâti ces temples magnifiques. Ces pau* yres langes ont produit la rémission des péchés* Voyez ce qu'a produit la pauvreté ; combien elle a engendré de richesses. Pourquoi avez-vous honte de sa pauvreté, qui a produit tant de biens inesti- mables ! Pourquoi lui ôtez-vous ses plaies , qui ont fait la guérison des nôtres? Nos membres ( membra virginis ) , qu'il a pris n'ont rien de honteux, puisque Dieu les a formés ; mais c'est nous qui avons fait outrage à notre na- ture , en la livrant à nos convoitises. Il n'a pas mé- prisé notre nature , quoique nous l'ayons outragée nous-mêmes. Dieu accoutumé de paroître aux hommes sous des formes sensibles. Le feu qui ne brûle point. Le juge parmi les criminels , qui ne condamne per- sonne : juge parmi les condamnés , qui n'envoie personne au supplice : juge qui ne juge pas, mais qui enseigne ; qui ne condamne pas, mais qui guérit* La clémence de ce feu mystique qui pardonne ai} 36o SUR LA NATIVITÉ buisson , figure de la clémence de Jésus-Christ. II éclaire, et ne consume pas ; il brille , et ne brûle pas ; il fait du bien , bien loin de blesser et de nuire. Dieu ne trouve rien de honteux de ce qui peut don< ner le salut aux hommes. La pensée devient intelligible par la parole , pal- pable par l'Ecriture : ainsi le Verbe. Vôtre pensée (Xôyoç) est votre enfant en quelque sorte ; vous l'en- fantez une seconde fois , quand vous la rendez sen- sible : ainsi le Père. La parole que je prononce en moi se répand sur tous ; propre à;nn chacun comme à tous. Dieu habite dans l'homme plus noble que tout le reste , que le soleil , etc. , parce qu'il est libre , maître de soi-même. Comme celui qui déchire le papier oh est écrite la loi du prince y viole sa parole , qui , inviolable par elle-même y est violée et comme déchirée dans le corps dont elle s'est revêtue : ainsi le Verbe de Dieu. • 11 eist venu à son serviteur , non avec la majesté d!un maître y car il auroit étonné son fugitif; l'atti- rant par son humilité à la familiarité; à la liberté , ense.faisant conserviteur, afin que nous devinssions maîtres. Le Verbe s'est approprié un corps, se Test rendu propre , et en ce corps toutes les passions de ce corps: il se les est donc appropriées. Il ne faut point dire que Dieu habite en Chi^st comme dans une autre personne ; ni que Christ est adoré, parce qu'ilestuni au Verbe; ni qu'il est adoré avec lui , parce que c'est la même adox*ation. Il ne faut point DE NOTRE SEIGNEUR. 36 1 séparer par la pensëe ni par Tiatelligence le Verbe et le Christ, en les unissant seulement de parole , comme faisoit Nestorius. Mais toutes les fois que nous nommons le Verbe, nous devons entendre que rhomme est aussi compris sous ce nom : ainsi quand nous nommons Jésus , nous y comprenons le Verbe. Cest ce qui est expliqué passim, mais très-bien dans rhomélie de Théodotus. Parsfulus natus est , datas est, Admirabilis (0 : ce Un petit enfant nous est né , un fils nous est » donné : il s'appelle l'Admirable » : qui détruit le royaume où il est né, qui s'en fait un nouveau, de ses ennemis et de ceux qui ne le connoissoient pas , par la croix ; subjugant par amour : Deducet te mirabiliter dextera tua (2). « Votre droite vous fera » faire des progrès miraculeux et étonnans». Con- siliarius ; Conseiller , qui « renverse tous les raison- » nemens humains, et tout ce qui s'élève avec hauteur 3» contre la science de Dieu » : Consilia destruen- tes, et omnem altitudinem extollentem se adv^ershs scientiam Dei (3). Deusfôrtis : « Dieu, Fort », qui soutient nos foiblesses par les siennes ; « car ce qui >i paroit en Dieu foiblesse est plus fort que la force » de tous les hommes » : Quod infirmum est Dei , fortius est hominibus (4). Pater futuri sœculi : « le » Père du siècle futur » : tout réservé au temps à venir : rien au présent. Princeps pacis : « le Prince » de la paix ». Pacem relinquo (5) ; « Je vous laisse la » paix » : Pax huic domui; « Que la paix soit dans » cette maison » : Mei^ertetur ad vos (6) ; « Votre («) Ism. IX. 6. — (>) Ps, XLiv. 6. — 0) //. Cor, x. 4, 5 (4) L Cor, t. î6. — l^) Jean, xiv. 27. — (^) Matth, x. i a , i3. BOSS. XI. 28 * 302 STTR LA NATIVITÉ •î) paix reviendra à vous » : Pacem ei qui longe est, et qui prope (0 : « la paix à ceux qui sont éloignés )> comme à ceux qui se trouvent proche» : a la paix » qui surpasse toutes pensées, qui garde les cœurs » et les esprits en Jésus-Christ » : Pax Dei quœ exsuperat omnem sensum , custodiat corda *vestra et intelligentias vestras in Christo Jesu (2).- La chair a été ennoblie et non la divinité dé- gradée. Dieu relève ce qu'il prend et ne perd pas ce qu'il communique. Le grand pape saint Léon (3) nous enseigne que les œuvres qu'un Dieu Sauveur a accomplies pour notre salut, ne sont pas seulement des grâces, mais des secours; que tout ce qui nous rachète, nous parle ; enfin que tous les mystères sont des exem- ples : si bien que le chrétien doit imiter tout ce qu'il croit. Apparuit graiia Dei : « La grâce de Dieu nous a » paru ))• Dans tous les mystères que Dieu accom- plit pour notre salut , il y a toujours trois choses à considérer. Tous les mystères contentent nos désirs par quelque don , dirigent nos mœurs par quelque exemple , excitent notre espérance par quelque ' promesse. ( Car tout ce qui s'accomplit dans le temps a son rapport à la vie future. ) Si bien qu'il faut toujours y considérer la grâce qu'ils nous ap- portent , les instructions qu'ils nous donnent , la gloire qu'ils nous proposent. L'ap&tre n'a rieil omis, et conduit successivement les fidèles par tous ces degrés. Apparuit gratia Dei Sal^atoris nostri (0 IsaL i.vn. ijg. — W PhiUp. iv. 7. — W iSerm. xxiv. in Natii^iu Dom^tom, i,pag.i6o. omnibus DE HOTRE SEIGMEUR. 363 omnibus hominibus (>) : « La grâce de Dieu notre 31 Sauveur a paru à tous les hommes » : là il nous propose la grâce que Jésus naissant nous apporte. Erudtens nos C^); « elle nous a appris d : là il nous découvre les vertus que Jésus naissant nous enseigne. Expectantês beatam spem (?) ^ « étant » toujours dans l'attente de la béatitude que nous » espérons » : là il nous fdit voif le grand et ad- mirable spectacle que Jésus naissant nous fait at- tendre. Après avoir expliqué ce pieusement.... Que si le monde nous appelle à ses spectacles^ nous attendons un autre spectacle, Jésus -Christ nous fait attendre un retour. Il est venu pour semer, il viendra pour recueillir : [ il est venu ] pour confier le talent, [ il viendra ] pour en exiger le profit : [ il est venu ] pour détruire la fausse gloire > [ il viendra ] pour établir la véritable. NostrCB cœnœ, nostrœ nuptiee nundum sunt (4) : « Nos jeux j nos fêtes , nos banquets ne sont pas en-» » core prêts d. Laisseï-^moi achever le temps de mon deuil. La vie chrétienne, la vie pénitente [ est un } deuil ^irituel : [ nous sommes ] consacrés à la mort par le saint baptême. [ Le pécheur ] déplore la mort , non de son époux ni de son père , mais de son ame , la perte de son innocence. Etat de FEglise , est un état de viduité et de désolation : [ elle a ] perdu en son époux plus de la moitié d'élle-^méme. (0 TU, II. lï. — (») Und. 12. — P) Î6id. la. — (4) Tertul de Spectae. n, dS. BosStJET. XI. 29 434 SU.& LA* SÀIHTE ENFANCE FRAGMENT 6UA jLE$ M'T$TERES J>E LA SAINTE ENFANCE DE NOTRE SEIGNEUR, FOUfi LE DIMANCHE DANS L'OCTAVE DE NOËL. i^%^>%fV%^%/%^%>^^^%^m^^ £rant pater ejus et mater mirantesy Son père ^t sa mère étaient étonnés, tiuc, lu 33* Je remarque dans FEvangile que le caractère par- ticulier des mystères de la sainte enfaiice de Jésus* Christ notre Sauveur^ c'est d Imprimer daus les âmes par leur profondeur, par leur simplicité , par leur sainteté, un étonnement intime et secret des Toies inconnues de Dieu et de sa sagesse cachée: Un en- fant natt dans une étable, pauvre, inconnu, mé- prisé ; et toutefois , ô prodige ! le ciel et la terre s*en remuent, les anges descendent, une étoile nou- velle brille , les pasteurs le font connoître dans Beth* léem, les Mages dans la ville royale, Siméon et Anne dans le temple même ; ceux qui sont de loin le cherchent ; ceux qui sont près le méconnoissent ou le persécutent. Dieu fait des miracles inquis pour DE KOTRE SEIGNEUR. 4^^ le découvrir, et dans la suite il en fait de non moins surprenans pour le cacher.: Le ciel ser déclare en sa : taLYenr, et à peine peut-il trouver un asile dans toute , la terre. On liu prédit tout ensemble , et des gran-r , deurs extraordinaires et des humiliations terribles, i Que peut faire une ame religieuse dans un si grand ; mélange de choses si sagement rassemblées, sinon de se laisser jeter insensiblement avec Joseph et Ma- rie dans cette sainte admiration que je lis dans mon évangile ? Erantpater ejus et maler ndrantos : « Son. 3> père et sa nière étoient étonnés ». Je ne puis vous dire , mes Sœurs , combien de grâces étoient ren-« fermées dans cet étoanement sacré, ; un recueille- . ment très -profond, une secrète attention à. ce qui se passe, une attente respectueuse de je ne sais quoi de grand et de relevé qui se prépare, une dépendance absolue des desseins cachés de Dieu, \u\ abandon aveugle à sa grande et occulte providence* Yoilà les saintes dispositions, ou plutôt voilà les grandes vertus qui sont renfermées dans cette admi- ration de la sainte Vierge : Eranl mirantes..* et j'esr père que nous entrerons dans ces mêmes sentimens par son entremise, que nous lui allons demander avec les paroles de Fange. ^i/e. « Qui est celui , dit le Sage , qui a mesuré les » hauteurs du ciel et les profondeurs de l'abîme (0 » 7 c'est-à-dire, qui est celui qui a pu comprendre , et les grandeurs infinies d'un Dieu considéré en lui- même , et les profondes bassesses d'un Dieu anéanti pour l'amour de nous? L'un et l'autre secret est im* 436 SUR LÀ SAINTE BNFANCE pénétrable à la créature ^ et comme elle s'y perd ea les contemplant y il ne lui reste qu^à les adorer ayee un étonnement religieux. Aussi voyons-^nous, dans^ les saintes Lettres y que lès anges, qui voient face à face la gloire et la majesté d'un Dieu régnant , sont contraints de baisser la vue et de se cacher devant loi comme étonnés de sa grandeur ; et' les' hommes qui sont appliqués par un ordre particulier à cou* templer les profondeurs d*un Dieu abaissé /ne pou- vant trouver le' fond d'un si grand abîme, sont jetés dans un pareil étonnement , ainsi que nous lé lisons dans notre évangile : Er€mt pàterejuset mater mi^ rantes : « Son père et sa mère étoient étonnés )k. J'ai déjà remarqué, mes Sœurs, que cet étonne* ment l'eligieux est le véritable sentiment de Tame pat lequel nous devons honorer les profondes et inconcevables conduites de Dieu dans Tenfance de son Fils : et ^ pour entrer, comme nous devbns,'danà cette sainte disposition, considérons attentivement toutes les circonstances particulières de l'histoire de ce Dieu enfant. Ainsi mon dessein n'est pas aujour- d'hui de vous parler simplement de la naissance de notre Sauveur, mais de vous repi^senter comme en raccourci tous les mystères de sa sainte enfance, auxquels ce temps est consacré, avec leurs secrets rapports à l'œuvre de la rédemption de notre na- ture ; afin que contemplant d'une même vue , au- tant que le Saint-Esprit nous l'a révélé^ tout l'ordre et l'enchaînement des desseins de Dieu sur cet en- fant, nous nous perdions dans l'admiration de ses conseils et de sa sagesse : Erant mirantes. Voilà ^ iuâ$ très ^chères Sœuis^ le dessein que je me pro- BS NOTRE SEIGNEUR. 4^7 pose : lûais de peur que nos esprits ne s^égarent, je réduirai à trois points cette pieuse méditation de Faifahce du Sauveur des ames« Cet enfant a été découvert au monde ; il a été caché au monde ; il a été persécuté par le monde. Il a été découvert j et les pasteurs , et les Mages ^ et le vénérable vieil- lard Siméon^ et Anne cette sainte yeuve en sont des témoins fidèles. Ensuite il a été caché ; et sa fuite précipitée en Egypte^ et la retraite obsc^ire de Nd* zareih en sont une preuve suffisante. Il a été pec- séciitév et la cruelle jalQùsîe d'Hârodey et le meur* tre des saints Innocens le ibnt bien (Connoltre. Tels sont les trois sujets d'adniàiiation^ue }>'aî à vous pro-* poser en Jésus enfant. Lés voies nouvelles et impré- vues par lesquelles Dieu le manifeste; les ténèbres profondes et impénétrables dans lesquelles Dieu le retire et lexacbe;.les:persécutions inopinées parlés- quelles Dieu l'exercé 9 et par lui sa: sainte famille r ce sont les trois vérités que je veux considérer avec vous, mes Soeurs *y afin que nous apprenions tousen- sembley et à recevoir. ses lumières quand il se dé- couvre j et à révérer ses ^nèbres quand 11 S(& cache , et. à nous unit* à .ses ^u&ances^^ Il se cache, ai- mons son obscurité; tl se mantre, suivons ses lu- mières; il souSréy unissons-nous à ses peines. Jésus ne doit pas dégénérer, de sa haute et ad^ miràble bassesses S'il [y a ] de làhonte [de ce ] qu'il se cache, [il y en a] bien|>Ius de ce quil se décou- vre ; [ c est pour se manifesîter à ] de pa^vres bergers : c'est à eux auxquels il enVoie $es anges. Mon Sau- veur, cachez-vous plutôt^ Orgueil humain; on veut se faire connoitre des grands, et on. aime mieux la 438 SUK LA SAINTS ENFANCE retraite et robscarité toute entière^ [ que «te n'être connu que àe^ petits ]. Mais mon Sauveur veut por^ ter toute cette honte^ et celle d'être cache, et celle d'être découvert seulement aux pauvres et aux mé^ prisables du mondes II ne faut paâ sVtonner si celui qui est innocent, s'attache premièrement où il trouve le moins de corruption , et où la nature est moins gâtée; [ et tel est l'état des pauvres ]•• Leur condition ' met plus à couvert des égaremens de la présomption, des felies et des extravagances de la vanité : il n'y trouve pas ce, faste affecté, cet air superbe et dédai» gneux.;mais s'il teste quelque t^*ace de la justice et de l'innocence, -c'est là «ce ^'il cherche, [c'est parmi eux qu'elle se conserve}. N'importe qu'ils soient .oé- •cupésà garder les bêtes: il y a -plus d'innocence dans ces emplois bas y que^ans ceux' que le monde ad** mire ; plus de dépravation dans les affaires humain nés, plus de malignité à çcmduire et à gouverner les hommes. Les animant marchent d'une voix drx>ite, les hommes se spvit dévoyés. [ On entrevoit] je ne saisjouoi de plus innocent dai» les créatures qui •sontrdemeurées dans la pureté de leur être, sans âr en rien altéiré l'ouvrage du Créateur. Ce sont des esprits grossiers , mais ils ne se dissipent pas dans de vaines subtilités , mais ils ne s'égarent p^s dans des présomptions extravagantes. Mais Dieu ne cher- che pas dans l'esprit des hommes, la vivacité, la pénétration , la subtilité ; mais la seule .docilité et humilité pour se laissa: enseigner de lui. Qu'il ne soit pas capable d'entendre, c'est assez qu'il le soit de croire. Rien n'est plus insupportable au cœur de Dieu, quç des hommes qui s'imaginent , ou pénétrer ' ©E' NOTRE SEKilfEtrîl, ' 4^9* ses mystères par leur subtilité^ ou mesurer ses gi^an^ deurs par leurs pensées , ou attirer ses bienfaits par leurs seuls mériji^s^ ou avancer s^s ouvrages par leur industrie y ou lui être nécessaires par leur puis- sance. C'est pourquoi ce Dieu a choisi peu de sages » selon la chair^ peu de puissans et peu de nobles » : Non multi sapientes secundùm carfiem, non multi potenteSj non multi nobiles (0. U-eh vient néahmoins de ces sages y les Mages ^ mais après Tétoile ^ mais toujours prêts à retourner par une autre voie ; de ces riches et de ces puissans : l'opinion publiquç les a couronnés. Trois conditions : oflfrirson or à Jésus, ses richesses à ses membres : son encens j lui rendre hommage de sa grandeuir: >sa ipyrrhe, lui présen- ter au milieu des pompes du monde le souvenir de sa mort , la mémoire de sa sépulture : grand et agréable sacrifice de' la main' des grands ! Que nous sacrifions volontiers à Dieu des plaisirs médiocres ! que nous mettons volontiers au pied de la croix des contradictions légères et des injures de néant! que nous sommes patiens et humbles, lors- qu'il ne faut que donner à Dieu des choses qui ne coûtent rien à la nature! Choisissez *moi toute autre croix : je veux bien souffrir, mais non pas cela : mais toujours celle qui arrive , c'est celle que nous in- fusons. Nous voulons bien des croix, pourvu qu'elles ne soient pas croix, des peines qui ne soient pas pei- nes, et des contradictions, pourvu que notre hu- meur n^en soit pas choquée. N'est-ce pas au méde- cin à nous mêler la médecine, à mesurer la dose? W /. Cor, I. a6. 44o POUR LÀ CI&COITGIBIOir I." SERMON POUR LA FÊTE DE LA CIRCONCISION DE NOTRE SEIGNEUR, P&ÊGHÉ A METZ. ■ Royauté de lésus-Clirist : en quoi elle consiste : comment il Fa acquise : de quelle maniéire il Fexerce : infidélité et ingratitude de «es sujets. Ezcelleiice de* son stfcenloce. Vocabis nomen ejus Jesum ; ipse enîm salvam faciet po- pulum* Vous appellerez son nom Jésus; car c'est bd qui saus^era le peuple. Matth. i. a t • Aujourd'hui le Dieu dlsraël, qui est veni| visiter son peuplci revêtu d*une chair humaine ^ faitsapre^ mière entrée en son temple : aujourdliui le grand prêtre du nouveau Testament, le souverain sacrifi- cateur selon Tordre de M elchisédech y se met entre les mains des pontifes successeurs d*Aaron, qui porn toit la figure de son sacerdoce : aujourd'hui le Dieu de Moïse se soumet volontairement à toute la loi de Moïse : aujourd'hui llnefiable ^ dont le nom est in* / IdC NOTRE SEICNEVR. 44' tîômpr^ensible y daigne recevoir un nom humain y qui lui est donné par la boucbe des hommes, mais par Tinstigation de Tesprit ()e Dieu. Que dirai-je ? où me tournerai -je, environné de tant de mys- tères ? parlerai-je de la circoncision du Sauveur , ou bien de l'imposition du nom de Jésus; de cet ai- mable nom, les délices du ciel et de la terre, no- tre unique consolation durant le pèlerinage de cette vie 7 Et la solennité de cette église , et je ne sais quel mouvement dé mon coènt m'incite à parler du nom de Jésus, et à vous en faire voir l'excellence, autant qu'il plaira à Dieu de me l'inspirer par sa «grâce. ' * . ' Jésua , c'est-à-dire Sauveur, ô nom de douceur et de charité! « Mon ame, bénissez le Seigneur , et » que tout ce qui est en moi-mémé rende les louan- a ges à son saint nom%>': Benediù j aViima mea^ Do" mino (0. Parlons du nom de Jésus, découvrons-en le mystère , faisons voir l'excellence de la qualité de Sauveur, et combien il est glorieux à notre grand Dieu et Rédempteur Jésus-Christ d^âvôir exercé sut nous une si grande miséricorde , et de nous avoir isauvés par son sang. Que tout ce temple retentisse du nom et des louanges du Sauveur Jésus: Âh ! si nous avions les yeux assez purs, nous verrions toute cette église remplie d'anges de toutes parts pour y honorer la présence du Fils de Dieu ; nous lés ver- rions s'abaisser profondément au nom de Jésus , toutes les fois quenousleprononceronsdansla suite de ce discours. Abaissonsrnous aussi en esprit ; et adorant en nos cœurs nôtre aimable Saùveiir Jé- (0 Ps. eu. I. 44'^ POITft LA CISCOirClSION sus, prions aussi la sainte Vierge sa mère de nous le rendre propice par ses pieuses intercessions. AifCy etc. Comme nous avons quelques inclinations qui nous sont communes avec les animaux , et qui ressen* lent tout*à-fait la bassesse de cette demeure terrestre dans laquelle nous sommes captifs ; aussi certes en ,avons-nous d'autres d'une nature plus relevée, par lesquelles nous touchons de bien près aux in-- telligences célestes qui sont devant letr^ne de Dieu, chantant nuit et jour ses louanges» Lés bienheureux esprits ont deux merveilleux mouvemens : car ils n'ont pas plutôt )eté les premiers regards, sur eux» .mêmes, que reconnoissant aussit&t que leurs lumièr- res sont découlées d'une autre lumière infinie , ik xetournent à leur principe d'une promptitude in- croyable ,. et cherchent, leur pel'fectiou où ils b^ou» vent leur origine. C'est le premier de Jeui^ mbur vemens. Puis chaque ange considérant qite Diea lin donne des compagnons, qui' dans rune-inéme vie et dans une même immortalité conspirent au même des- sein de louer leur oommun Seigneur, il se sent pressé d'un certain désir d'entrer en société avec eux. Tous soi^t touchés les uns pour les autres d'une puissante inclination; et c'est cette inclination qui met l'ordre dans leurs hiérarchies, et établit entre leurs légions une sainte et éternelle alliance. Or encore qu'il soit vrai que notre ame éloignée de son air natal, contrainte et presque accablée par la pesanteur de ce corps mortel , ne fasse paroîtrè qu'à demi cette noble et immortelle vigueur dont DE NOTKE SEICNEUH. 44^ elle devroit être toujours agitée ; si est-ce néan- moins que nous sommes d*une race divine ^ ainsi que l'apôtre saint Paul l'a prêché avec une mer- veilleuse énergie en plein conseil de l'Aréopage : Ipsius enim etgenus sumus (0. Il a plu à notre grand Dieu y quiinousa&rmésà sa ressemblance, de lais- ser tomber sur. nos- âmes une étincelle de ce fea céleste qui botille 4^ils les esprits angéliques : et si peu que.nous.puissipns faire de réflexion sur nous- mêmes ^ nous y remarquerons aisément ces deux belles inclinations que nous admirions tout à l'heure daiis la nature des anges. . En effet ne voyons- nous pas que sitôt que nous sommesparvienusàriisage de la raison, je ne sais quelle inspiration, dont nous ne connoissons pas l'origine, nous apprend- à réclamer Dieu dans toutes les né- cessités de la vie? Dans toutes nos afflictions, dans toujB nos besoins-, un secret instinct élève nos yeux au ciel^ comme si nous sentions en nous-mêmes que c'est là que réside l'arbitre des choses humaimesl Et ce sentiment se remarque dans tous les peuples* du monde , dans lesquels il est resté quelques > traces d'humanité, à cause ^u'il n'est pas tant étudié qu'il est naturel, et qu'il natten nos aines noil tant par doctrine que par instinct. C'est une adoration que les païens mêmes rendent, sans y penser^ au vnai Dieu } c'est le christiamsme de la nature, ovi^ comme l'appelle TertuUien, « le tânoigiiage de l'ape nà'^ » turellement chrétienne » : Testimonium animas nabâràUter chrisdanœ (^). Voilà déjà le premier mou-* 444 PO.UR LÀ CIRGORGISIC^N venient que notre nature a commun avec la nature angélique. ^ D'ailleurs il pàroît manifestement que le plaisir de rbomme y c'est Thomme. De là cette douceur sensible que nous trouvons dans une honnête couh versation. Delà cette familière communication des esprits par le commerce de la panxle. De là la cor- respondance des lettres; de là^ pour' passer plus avant y les Etats et les républiques; fFelles sont 'les deux premières inclinations de tout ce qui est eapa^. ble d'entendre et de raisonner. L* une nous ^ève à Dieu j Tautre nous lie d'amitié avec nos semblables. De Tune est née la< religion^ et de Fautre* la société. Mais d'autant que les choses hùmaÎDes^ vont (na^tn*- rdOement au désordre ^ si elles ne sont retenue» par la discipline! il a été nécessaire d'établir une forme de gouvernement dans les choses saintes et dans les profanes ; sans> quoi la' religion tomberoit bientôt eu ruine> et la société dégénéreroit en confusion. Eit c'est ce qui a introduit dans le monde les deux seaulès autorités légitimes ! celle des princes et des n^is^ trais/ celle des prêtres et des pontifei. Delà la puis* sance royale^ de là l'ordre saoerdotaL Ce n'est pas ici le lieu dé vous expliquer, ni hn quelle de ces deux puissants a l'avantage sur Fau^ tre, ni comme elles se prêtent entre elles une mu* tuelle asf^tance. Seulement )e< vous. prie de consi* dérer qu'étant dérivées l'une et l'autre des deux inclinations qui ont pris dans le cœur de l'homme de plus profondes racines , elles ont acquis juste* ment ^ne grande vénération parmi tous les peuples^ DE NOTRE SEIGNEUR. 44^ elles sont toutes deux sacrées et inviolables. C'est pourquoi les empereurs romains^ les maîtres de la teiTe et des mers, ont cru qu'ils apporteroient un grand accroissement à leur dignité , s'ils ajoutoient la qualité de souverain pontife à ces noms magnifi- ques d'Auguste ) deCésar, de triomphateur > ne dou- tant pas que les peuples ne se soumissent plus volon- tiers à leurs ordonnances ^ quand ils considéreroient les princes comme ministres des choses sacrées. Sur quoi f quand je regarde ce titre de religion attaché à ces noms odieux de Néron, de Caligula, ces mons- tres du genre humain , l'horreur et l'exécration de tous les siècles ;. je ne puis m'empécher de faire cette réflexion, que les dieux de pierre et de bronze, les dieux adultères et parricides que l'aveugle antiquité adoroit > étoient dignes certainement d'être servis par de tels pontifes. Elevez -vous donc, ô roi du vrai peuple, ô poq- tife du vrai Dieu. La royauté de ces empereurs n'é- toit autre chose qu'une tyrannie, et leur sacerdoce profane un continuel sacrilège. Venez exercer votre royauté par la profusion de vos grâces, et votre sacerdoce par l'expiation de nos crimes. Je pense que vous entendez bien que c'est du Sauveur que je parle. C'est lui, c'est lui seul, chrétiens, c'est lui qui étant le vrai Christ, c'est-à-dire l'oint du Sei* g^eur, unctus, assemble en sa personne la royauté et le sacerdoce par l'excellence de son onction, qui enferme l'une et l'autre puissance. Et c'est pour cette, raison que l'admirable Melchisédeeh est tout ensemble et roi et pontife ; mais « roi de justice et 44^ POUR LA. GIRCONClSIOlf i> de paix », Rex justitiœ ^ réx pacis (0, comme rjnterprète rapôtre, dans la divine Epitre aux Hé- breux ; mais le « pontife du Dieu très-haut » , Sa-* cerdos Deiexcelsi ip)^ comme porte le texte de la Genèse. Et d'où vient cela, chrétiens? n'étoit-be pas pour représenter celui qui y dans la plénitude des temps 9 devoit être le vrai roi de paix et le grand sa^ crificateur du Dieu tout- puissant , c'est-à-dire le Sauveur Jésus , dont Melchisédech étoit la figure ? . C'est de ce glorieux assemblage de la royauté et du sacerdoce en la personne du Fils de Dieu , que l'espère vous entretenir aujourd'hui. Car ayant con- sidéré attentivement la signification du nom de Jé- j5us que Ton donne en ce jour à mon maître, je. trouve dans ce nom auguste sa royauté et son sacer- doce; Jésus, c'est-à-dire Sauveur; et je dis que le Fils de Dieu est roi, parce qu'il est Sauveur; je dis qu'il est pontife, parce qu'il est Sauveur. Je vois déjà, ce me semble, que ces deux vérités excellentes m'ouvrent une belle carrière. Mais je médite quel- que chose de plus. Il est le roi Sauveur, il est le pontife Sauveur. Comment est-il Sauveur ? par son sang. C'est pourquoi en cette bienheureuse journée^ où il reçoit le nom de Jésus et la qualité de Sau- veur, il commence à répandre son sang par sa mys- térieuse circoncision , pour témoigner que c'est par son sang qu'il est le Sauveur de nos âmes. O belles et adorables vérités; pourrai -je bien aujourd'hui TOUS faire entendre à ce peuple ? Vous, qui VOUS êtes scandalisés autrefois de voir QE NOTRE SEIGNEUR.^ 44? «Duler le sang de mon maître ^ vous qui avez cru que sa mort violente étoit une marque de son im* puissance y ah ! que vous entendez peu ses mystères! Lacroix de mon roi, c'est son trône; la croix dé- mon pontife y c'est son autel. Cette chair déchirée^ c'est la force et la vertu de mon roi ; cette même* €hair déchirée ^ c'est la victime de mon pontife. Le* ;Ming de mon roi, c'est sa pourpre; le sang de mon pontife, c'est sa consécration. Mon roi est installé , mon pontife est consacré par son sang ; et c'est par ce moyen qu'il est le véritable Jésus , l'unique Sau*^ veur des hommes. O roi, et Sauveur, et souverain pasteur de nos âmes, versez une goutte de ce sang précieux sur mon cœur, afin de l'embraser de vos> flammes ; une goutte sur mes lèvres , afin qu'elles, soient pures et. saintes, ces lèvres qui doivent au- jourd'hui prononcer si souvent votre nom adorable : ainsi soit- il, mes Frères. Je commence à parler de la royauté de mon maître : disons avec courage, écou- tons avec attention. Il s'agit de glorifier Jésus qui est lui-même toute notre gloire : ô Dieu, soyez avec nous. Je disudonc, avant, toutes choses, que, selon les prophéties anciennes , le Messie attendu par les Juifs, reconnu et adoré parles chrétiens, devoit venir au 4 monde avec une puissance royale. C'est pourquoi l'ange, annonçant sa venue à la sainte Vierge sa mère, parle de lui en ces termes : a Dieu lui don- » nera, dit-il, le trône de David son père, et il ré- » gnera éternellemeat. dans la maison de Jacob ». Et c'est la même chose qu'avoit prédit Tévangéliste- de la loi, je veux dire le prophète Isaïe, lorsqu'il dit 443 POUR hk CIRCONCISION de notre Seigneur, qu' « il s'asseoira sur le trône de- » David, afin de raffermir en justice et en vérité jus- » ques aux siècles des siècles » : Super soUum Damd^ et super regnum efus sedebit , ut confimtet iUud et Qorroboret injudicio etjustitid, amodo et usijfue in sempitemum (0« Ce que je suis bien aise de vous &ire considérer, afin que vous voyiez en ces deux.passages la conformité de l'ancienne et de la nouvelle al* liance. Car il seroit impossible de vous rapporter en ce lieu tous les textes des Ecritures qui promettent la royauté au Sauveur. Et c'est en quoi les Jui& se sont malheureusement abusés , parce qu'étant possédés en leur ame d'une aveugle admiration de la royauté et des prospérités temporelles, ils donnoient à leur Messie de belles et triomphantes aimées, de grands et de superbes pa- lais , une cour plus leâte et plus polie , une maison plus riche et mieux ordonnée que celle de leur Sa- lomon ^ et enfin tout ce pompeux appareil dont la majesté royale est environnée. Aussi quand ils virent le Sauveur Jésus, qui, dans une si basse fortune ^ prenoit la qualité de Messie , je ne saurols vous dire combien ils en furent surpris. Cent fois il leur avoit dit qu'il étoit le Christ ; cent fois il l'avoit at« testé par des miracles irréprochables, et ilsneces^ sent de Timportuner : mais enfin , « dites**nous donc » qui vous êtes ; jusqu'à quand nous laissèrez-vous » en suspens 7 Si vous êtes le Christ, dites -le -nous » franchement » , et nous en donnez quelque signe : Quousque animcmi nos tram toUis ? si tu es Christus^ die nobis pedam (^). Us eussent bien Toulu qu'iljeur (>) IsaL iz. 7. — C*) Joan. x. 24. eût DE NOTRB SBIGJffEtJR. 449 eût dit antre chose, ils lui eussent volontiers accordé tout rhonnefur qui étoit du aux- plus grands prophè- tes; mais ils eussent ëté bien aises de lui persuada: ^ _ou l>ien de se jtaireTOV, ou bien de se déporter vo- Ipntairemçnt de la qualité de Messie. Et nous lisons en saint Jean ^ qu'après cette miraculeuse multipli- cation des cinq pains , quelques peuples étant con- vaincus qu un miracle si extraordinaire ne pouvoit être fait que par le Messie^ s'assemblèrent entre eux^ et conspirèrent de le faire roi (0. Et ils eussent exé^ cuté leur dessein , s'il ne se fût échappé de leur vue. ]^trange illusion des hommes y parmi lesquels or- dinairement toutes sortes d'opinions sont reçues ^ excepté la bonne et la véritable ! Les uns disoient que Jésus était un séducteur 3 les autres^ ne pouvant nier qu'il n'y eût en sa personne quelque chose de surnaturel y se partageoient entre eux en mille sen- timens ridicules. « Quelques-uns assuroient que » c'étoit Elie ; d'autres aimoient mieux croire qu« » c'étoit Jean-Baptiste, ou bien quelqu'un des pro- » phètes ressuscites » : jilii Eliam > alii Joannem Baplistam, aut unum expropheUs (2). Et à quelles extravagances ne se laissoient - ils point emporter , plutôt que d'avouer qu'il fût le Messie ? D'où vient cette obstination , chrétiens ? c'est qu'ils avoient l'i- magination remplie de cette magnificence royale et de cette majesté composée, de laquelle ils av.oient fait leur idole. Et cette fausse créance avoit telle vogue parmi les Juifs, que ce vieux et infortuné po- (0 Joan, VI. i5. — (») Matth. XVI. 1^ BossuET. xi« 3o 45o POVlt LÀ CIRCONCISION litique , qui avoit toujours son ame troublée d'uù furieux désir de régner , qui ne craignoit pas moins, qui n'épargnoit pas plus ses enfans que ses ennemis, c'est Hérode dont je veux parler ^ conçut de la ja- lousie de cette royauté prétendue. De là ce cruel massacre des Innocens , duquel nous célébrions là mémoire ces jours passés. Je ne sais si je me trompe , fidèles ; mais il me semble que ces observations sur l'histoire de notre Seigneur ne doivent pas vous déplaire. Ainsi je né craindrai pas d'en ajouter encore une^ qui vous fera voir manifestement combien cette opinion de la royauté du Sauveur et oit enracinée dans l'esprit des peuples. C'est que les apôtres mêmes , eux que le Fils de Dieu honoroit de sa plus intime confidence , bien qu'en particulier et en public il ne leur promit que tourmens et ignominie en ce monde , ils n'a- voient pu encore se déprendre de ce premier senti- ment , dont on avoit préoccupé leur enfance. « Eh ! » Maître , lui disoient-ils^ quand est-ce qu'arrivera )> votre règne? sera-ce bientôt que vous rétablirez » le royaume abattu d'Israël (0 »? Ils ne pouvoient goûter ce qu'il leur prédisoit de sa mort. Comme ils voyoient son crédit s'augmenter , ils croyoient qu'à la fin il viendroît à bout de l'envie , et qu'il at- tireroit tout à lui par sa vertu et par ses miracles. Ils se flattoient l'esprit de mille espérances grossiè- res. Déjà ils t^ommençoient à se débattre entre eux de l'honneur de la préséance. Et ne fut-ce pas une beUe proposition que les deux frères inconsidérés 10 ^c*.^ 6* DE SrOTRE $£IGJNE1ÏR« 4^1 firent faire à notre Seigneur par leur mère trop crédule et trop simple ? Ils s'imaginoient déjà le Sauveur dans un trône éclatant de pierreries, au mi- lieu d'une grosse cour. Et, Seigneur, lui disent-ils> quand vous commencerez votre règne, nous serions bien aises que Tun de nous fût assis à votre droite et Tautre à la gauche (0. Tant ils abusoient de la patience et de la faveur de leur maître , repaissant leurame d'une vaine et puérile ostentation! Si bien que notre Seigneur ayant pitié de leur ignorance , commence à les désabuser par ces mémorables pa- roles. O disciples trop grossiers , qui vous imaginez dans ma royauté un faste et une pompe mondaine ;, « vous ne savez ce que vous me demandez » : la chose n'ira pas de la sorte : Nescilis quid petatis C^). « Pour- » rez-vous bien boire le calice que je boirai » ? ce calice c'est sa passion dont il leur a parlé tant de fois sans qu'ils aient voulu le comprendre. Puis après quelques avis excellens , voici comme il conclut son discours : « Sachez , dit-il, que le Fils de l'homme » n'est pas venu pour être servi , mais afin de servir » lui-même , et afin de donner sa vie pour la ré-* » demption de plusieurs (^) ». Ah ! disciples encore ignorans, et vous mère mal avisée , ce n'est pas là ce que vous prétendiez : vous demandiez de vaines grandeurs, on ne vous parle que de bassesse. Mais mon Sauveur l'a fait de la sorte , afin de nous insinuer doucement , par le souvenir de sa passion, que notre roi étoit un roi pauvre; qu'il descendoit sur la terre, non pour se revêtir des grandeurs humaines , mais pour nous ap- (0 Matth. zx. 31 (>) lUd. 23. — (3) Ibid. a8. 45a P-OtîR LA GIBGOlfCISION prendre par son exemple à les mépriser (*) ; et (jue comme c'étoit p|r sa passion qu'il devoit monter sur son trône, aussi est-ce par les souffrances que nous pouvons aspirer aux honneurs de son royaume cé- leste. C'est ici, c'est ici, chrétiens, où après vous avoir exposé les divers sentimens dès hommes tou- chant la royauté de Jésus, j'aurois à demander à Dieu la langue d'un séraphin , pour vous exprimer dignement les sentimens de Jésus lui-même. Certes je ne puis voir sans étonnement , dans les Ecritures divines, que le débonnaire Jésus, qui, du- rant tout le cours de sa vie mortelle , faisoit , pour ainsi dire , parade de sa bassesse , quand il sent ap- (*) Je ne m'étonne plus, chrétiens, si le Fils de Dieu s'écarte bien loin, lorsque les peuples le cherchent pour le faire roi : Cùm cognovisset, quia venturi essent iit ra^ perent eum, etfacerent eum regem^fu^t iteràm in mon- tem ipse solus (0; « Sachant qu'ils dévoient venir l'enlê- » ver pour le faire roi , il s'enfuit encore $U4' la montagne » lui seul ». La royauté qu'on lui veut donner n'est pas a. ^a mode. Ce peuple ébloui des grandeurs du monde, a honte de voir dans l'abjection celui qu'il reconnoît pour son Messie ; et il le veut placer dans un trône avec une magnificence royale. Une telle royauté n'est pas à son goût ; et c'est pourquoi TertuUien a raison de dire : Regem denique fieri, conscius sut regni, refugit {p) ; a Sachant, » dit-il, quel est son royaume , il refuse celui que l'on lui )) présente ». Un roi pauvre, un roi de douleurs, qui s'est lui-même destiné un trône où il ne peut s'établir que par le mépris, n'a garde d'accepter une. royauté qui tire son éclat des pompes mondaines. Donnez -lui plutôt une éta- ble, une croix ; donnez-lui un roseau fragile j donnez -loi une couronne d'épines. (0 Joan. VI. i5. — (*) De IdoloL n, i8. . 1>E NOTRE SEIGNEUR. ^ 4^3 * Jïrôcher son heure dernière , ne parle plus que de gloire, n'entretienne plus ses disciples que de ses graodeurs. Il étoit à la veille de son infâme supplice. Déjà il avoit célébré cette pâque mys^rieuse , qui devoit être le lendemain achevée par reffusion de son sang. Son traître disciple yei^oit de sortir de sa chaiùbre , pour aller exécuter le détestable traita qu'il avoit fait avec les pontifes. Sitôt qu'il se fut rp" tiré de sa compagnie, mon maître qui n'ignprpit.pa^ son perfide et exécrable desseip,'^cpmme s'il eâ^t été saisi tout à coup ^'une ardeur, divine^^ parle ,dp cptte sorte aux apôtres : « Maintenant, ^maintenant, dit- » il, le Fils derJbomme va être glorifié » ; Nunc cïa-^ rififiatas^st Filiiis hominis {}). Eh! mes Frèiç'es, que va-t-ril faire? Que veut dire ce Maintenant, demande fort à propos en ce lieu l'admiirable saint Augus- tin W? Va-t-il point peut-être s'élever dessus upe nuée, pour foudroyer tous ses ennemis ? ou bien est- ce qu'il fera descendre des légions d'anges ^jpojur sje faire adorer par tous les peuple^ du monde^|^N,Qn ,^ non^ ne le croyez pas. ,11 va à lapiojrt, au^sji^pplice, au plus cruel de tous les^ tçuriiif nsj, à, la dernière des infamies^; et, c'es^ ce^qu il appeUe sa g^loire ,. c'e^t son, règne, c'est son triomphç. .. , ,^! Regardez , je .vous prie, mon. Sauveur dans cette triomphante jpqr née en Laquelle il fait son entrée dans Ja ville de Jérusalem, peu de joursdevant qu'il» mourût. Il étoit monté sur un âne,: ah ! fidèles, n'en rougissons , pas. Je sais bien , que; Jlçs grands.de la terre sg niaqvieroient d'un si t^riste et si malheureuç K^yj6qn,%m, 3»f . ^-1») Tract, lxiii; ih/oan, fkl 2 ; tom, x^ part. 11 , col. 670. N. 454 FOUR LÀ CIRCONCISION équipage ; mais Jésus n'est pas venu pour leur plaire: et quoi que puisse penser la folle arrogance des hommes^ cet équipage d'humilité est certes bien di-^ gne d'un roi qui est venu au monde pour fouler aux pieds ses grapdeurs. Ce n'est pas là toutefois ce que je vous veux faire considérer. Jetez, jetez les yeux sur ce concours de peuple de toutes les conditions et de tous les âges, qui accou^ rent au-devant de lui, des palmes et des rameaux à là main, en signe de r^ouissance; et qui, pour faire paroître leur zèle à ce nouveau prince, dans une si sainte cérémonie, font retentir l'air de leurs cris de joie : a Béni soit, dîsoient-ils , le Fils de David; » vive le roi d'Israël » : Hosanna Filio Das^id; ie- nedictus qui venit in nomine Domini rex Israeti}). Et parmi ces bienheureuses acclamations il entre dans Jérusalem. Quel est ce nouveau procédé, si éloigné de sa conduite ordinaire ? et depuis quand, je voustprie, aime-t-il les applaudissemens ; lui qui étatit cherché autrefois par une grande multitude de gens qui s'étoient ramassés des villes et des bour- gades voisines, en résolution de le faire roi, comme je vous le rapportois tout à l'heure, s'étoit retiré tout seul au sommet d'une haute montagne, pour éviter leur rencontre ? Il entend aujourd'hui tout ce peuple qui l'appelle hautement son roi ; les phari- siens jaloux l'avertissent d'imposer silence à cette po* pulace échauffée : « Non, non, répond mon Sauveur; >> les pierres le crieront, si ceux-ci ne le disent pas » assez haut » : Si hi tacuerint^ lapides clamaBuntW. Que dirons-nous, je vous prie, d'un changement (0 Mauh, xu. 9. Joan. xu, i3. — (>) Luc. sus. ^o. SE IrOTllË SEIGITEUK. 4^5 €1 inopiné? il approuve ce qu'il rejetoit; il accepte aujourd'hui une royauté qu il avoit autrefois refu* sée. Ah ! n'en cherchez point d'autre cause ; c'est qu'à cette dernière foi§ qu'il entre dans Jérusalem, il y entre pour y mourir ; et piouïv à mon Sauveur, c'est régner. En effet quand est-ce qu*on l'a vu pa- roitre avec une contenance plus ferme et avec un maintien plus auguste, que dans le temps de sa pas- sion? Que je me plais de le voir devant le tribunal de Pilate, bravant, pour ainsi dire, la majesté des faisceaux romains par la générosité de son silence ! Que Pilate rentre tant qu'il lui plaira au prétoire , pour interroger le Sauveur, il ne satisfera qu'à une seule de ses questions. Et quelle est cette question , mes Frères? Admirez les secrets de Dieu. Le prési- dent romain lui demande s'il est véritable qii'il soit roi ; et le Fils de Dieu aussitôt, ayà^t ouï parler de sa royauté, lui qui n'avoit pas encore daigné satis*- faire à aucune des questions qui lui étoient faites par ce juge trop complaisant, ni niéme l'honorer d'un seul mot: « Oui certes, je suis roi »;, lui dit-il d'un ton grave et majestueux : Tu éUciSj quta. rex sum ego (0 : parole qui jusqu'alors ne lui étoit pas encore sortie de la bouche. Considérez, s'il vous plait , son dessein. Ce qu'il n'a jamais avoué parmi les applaudissemeus des peu- ples qui étoient étonnés et du grand nombre de ses miracles, et de la sainteté de sa vie, et de âa doc- trine céleste, il commence à le piâ>lier hautement,, lorsque le peuple demande sa, mort par des «ccla>- mations furieuses. Il ne s'en est jamais découvert («) Joan. XYiii. 37. s. 4^6 POiriL LA CIRCONCISION que par iSgures et paraboles aux apôtres ^ qui rece- voient ses discours comme paroles de vie étemelle : il le confesse nùement au juge corrompu , qui par vne injuste sentence le va atliacher à la iiroixV II n^a lanrais dit qu'il fût roi ^ iquandil fatisôit des actions d'une puissance divirie; etdl lui'plait de le déclarer, quand il est prêt de succoiaber volontairement à là dernière des infirmités humaines. KeA-CQ pas faire les thûses fort à contre-temps 7 et néanmoins c est la sagesse étemelle qui a dispose tous les temps. Mais ô merveilleux contre*temps ! à secret admi^ rable de la Providpncé ! • ^ ' Je vous entends y 6 mon roi Sauveur ! C'est que vous mettez votre gloire à souffrir poi^r Tambur de vos peuples , et vous ne voulez pas que Ton vous parle dp royauté que dans le même moment auquel par une mort glorie^fee vous allez délivrer vos miser râbles sujets d'une servitude étemelle. C'est alors, c'est alors que «vous ^onfeâsez que vous êtes roi. Bonté incroyable de notre roi ! que le ciel et la terre chantent^à jamais ses miséricordes. Et vous^ ô fidèles de Jésus - Christ y bienheureux sujets de mon roi 3auveury ô peuple de conqiiête que mon prince vic- torieux a acquis au prix de son sang y par quel amour et par quels respects pourrez-vous dignement reconnottre les libéralités infiniesd'un roi si clément et si généreux? Certes je ne craindrai pas de le dire , ce ne sont ni les trônes, ni les palais ■, ni la pourpre y ni les richesses, ni les gardes qui environnent le prince , ta cette longue suite de grands seigneurs y ni la foule des courtisans qui s'empressent autpur de sa p^r- DE NOTILE SEIGNEUR. 4^7 Sonne ; non y non y ce ne sont - pas ces choses que j'admire le plus dans les rois. Mais quand je consi- dère cette infinie multitude de peuples qui attend de leur protection son salut et sa liberté ; quand je vois que dans un Etat policé , si la terre est bien cultivée y si les mers scmt libres y si le commerce est riche et fidèle y si chacun vit dans sa )naison dou- cement et en assurance ; c'est un effet des conseils et de la vigilance du prince : quand je vois que , comme un soleil^ sa munificence porte sa verjtu jusque dans les provinces les plus recalées y que ses sujets lui doivent les uns leurs honneurs et leurs charges, les autres l^ur fortune ou leur vie y tous la sûreté publique et là paî^ y de sorte qu il n^ 6n a pas un seul qui ne doive le chérir comme son père; c'est te qui me ravit, chrétiens, c'est en quoi la majesté des rois me semble entièrement admirable; c'est en cela que je les reconnois pour les vivantes imagés de Dieu , qui se plait de remplir le ciel et la terre des- marques de sa bonté , ne laissant aucun en- droit de ce monde , vide de ses bienfaits et de ses largesses. Eh! dites-moi, je vous prie, dans quel siècle, dans quelles histoires, dans quelle- bienheureuse contrée a-t-on jamais vu un monarque, je nedis pas si puissant et si redoutable , mais si bon «t si bien-» faisant que le nôtre ? Le règne de notre prince , c'est notre bonheur et notre salut, «c Ce qu'il daigne » régner sur nous, c'est clémence, c'est miséricorde; V) oe ne lui e^t pas un accroissement de puissance, » mais c'est un témoignage de sa bonté » ; Dignatia est, non promotio ; miserationis indicium , non po^ 4S8 POUR LÀ GiRcoircisioir testatis augmenUmi , dit radmirable saint Augus-* tin (0. Regardez cette vaste éteodue de l'univers ; tout ce quil y a de lumières célestes , toutes les saintes inspirations , toutes les vertus et les grâoes , c^est le sang du prince Sauveur qui les a attirées sur la terre» Autant. que nous sommies de chrétiens ^ ne publions-nous pas tous les jours que nous n*avons rien que par lui ? Ce peuple merveilleux , que Dieu en sa bonté a répandu parmi tous les autres ^ peuple qui habite en ce mande et qui est étranger en^ ce monde ^ qui trafique en la terre afin d'amasser dans le ciel : fidèles 9 vous m'entendez 9 c'est du, peuple des élus que je parle, de la nation des justes et des gens de bien : que ne doivent-ils pas au Sauveur ? Tou$ les particuliers de ce peuple y. depuis l'origine du monde jusqu'à la consommation des siècles ; voye^ quelle grande étendue! ne crient-ils pas jour et nuit et de toutes leurs forces à notre brave libérateur : C'est vous qui avez brisé nos fers , c'est vous qui ave^ ouvert nos prisons ; votre mort nous a délivrés et de l'oppression et de la tyrannie ; votre sang uou$ a rachetés de la damnation étiernelle. Par vous nous vivons y par vous nous respirons, par vous nous espérons, par vous nous, régnons. Car la munifi- cence de notre, prince passe à un tel excès de bonté, qu'il fait des monarques de tous ses sujets; il ne veut voir en sa cour que des têtes couronnées. Ecoutez, écoutez le bel hym^ç des vingt-quatre vieillards de l'Apocalypse , qui repré$entent ^ à mon avis, toute l'universalité des. fidèles de l'an- (0 Traeu Lf . in Joan* n, 4 y ^O"** ni * P^"^ u , coL 635. DE KOTRE SEIGNEUR. 4^9 cien et du nouveau Testament; douze pour les douze premiers patriarches ^ les pères de la syna- gogue ; et douze pour les douze apôtres , princes et fondateurs de TEglise. Ils sont rois ^ ils sont couronnes, et chantent avec une joie incroyable leà louanges de TÂgneau sans tache, immoM pour Famour de nous. avez faits rois et sacrificaiteurs à notre Dieu , et » nous régnerons sur la terre » ! Et regnabimas super terram (0. O Dieu éternel ! chrétiens , quelle est la merveille de cette cour ? Toutes les grandeurs humaines oseroient-^elles paroître devant une telle magnificence ? Cet ancien admirateur de la vieille Rome (*) s'étonnoit d'avoir vu dans cette ville maîtresse autant de rois , disoit-il , que de sénateurs. Mes Frères , notre Dieu tout - puissant nous appelle à un bien autre spectacle , dont. nous ferons nous-mêmes {^rtie. Dans cette cour vrai- ment royale , dans cette nation élue , dans cette cité triomphante que Jésus a érigée par sa mort , je veux dire dans la sainte Eglise; je ne dis pas que nous y voyions autant de rois que de séna- teurs y mais je dis que nous y devons être autant de rois que de citoyens. Qui a jamais ouï parlei* d'une telle chose 7 G*est tout un peuple de rois que Jésus a ramassés par son sang, que Jésus sauve*, que Jésus couronne, qu'il fait régner en régnant sur eux •, parce qu^e « servir notre Dieu , c'est ré- (0 Apoc, T. lO. (*) Gyneas, ambassadeur de Pyrrliua, yoytz Pititarch. F'iL Parait, in Pjrrrh, et Fhn Mer. Rom. Hfi. i^ cap, XTiir. EdiU de DéforU. 46o POUR LA CinCONCISION » gner » : Servire Deo , regnare est C^). O royauté auguste du roi Sauveur, qui partage sa couronne avec les peuples qu'il a rachetés ! ô mort vraiment glorieuse ! ô sang utilement répandu ! ô noble et magnifique conquête! Quelques louangfss que nous dotinions aux victo- rieux, il ne laisse pas d'être véritable que les guerres et }es conquêtes produisent toujours beaucoup plus de larmes , qu'elles ne fout naître de lauriers. Considérez, je vous prie , fidèles ^ les Césars et les Âlexandres,.et tous ces autres ravageurs de provin*» ces que nous appelons conquérans : Dieu ne les en- voie sur la terre que dans sa fureurs Ces braves, ces triomphateurs , avec tQus'leurs magnifiques éloges^ ils ne sont ici-bas que pour troubler la paix du monde par leur ambition démesurée. Ont-ils jamais fait une guerre si juste ,. oh ils n aient opprimé une infinité d'innocens ? Le^urs victoires>' sont le deuil et 1^ désespoir des v^uyes et des orphelins. Ils triom- phent de la ruine des na,lfion$ ejt de« la désolation pu- bliqpe. Ah! qu'U: n'e^t pasr ainsi djç mon prince! c'est, u^ capitaine Sauveur , qui sapve lès peuples p£(rçe.q^'il les dompta; et il les dompte en mourant pour eux. Il .n'enlpleie ni le fer ni le feu pour le^ subjuguer : il cpn^bat par an^pUj;' il combat par bienfaits, par des attraits tout-rpulss^ns, par des charr mes invincibles. , . Et c'est ce qu'e:¥:plii<|ue divinement «un. excellent passage. du. Psaume .quarante- quatrième , que je iAr cheraide vous exposer. Renouvelez, s'il vous plaît , vos attentions. I^e prophète en ce lieu considère n.o- (0 iS. Léo, Ep. ad^Demetriad. cap. pr. DE NOTRE SEIGNEUR. 4^1 tre Seigneur comme un prince victorieux ; et voyant en esprit qu'il devoit assujettir sous ses lois un si grand nombre de peuples rebelles, il l'invite à pren- dre ses armes. « Mettez votre épée, lui dit-il, ô mon » brave et valeureux capitaine » : Accingere gladîo tuo super fémur tuum (0. Et incontinent , comme s'il eût voulu corriger son premier discours par une seconde réflexion ; ( ce sont les mouvemens ordinai- res de l'expression prophétique). « Non, non, ce )) n'est pas ainsi, ô mon prince, ce n'est pas par les ».arm tout droit au cœur des ennemis de mon roi » : Sagittœ Potentis acutœ (4). Après -quoi il élève les yeux à la majesté de son trône et à la vaste étendue de son empire : Sedes tua^ Deus , in sœculum sœ-- culi (5) : « Votre trône , ô grand Dieu , est établi » es siècles des siècles » ; et le reste. Et que veut dire ce règne? quelle. est cette victorieuse beauté? que signifient ces coups, et ces flèches, et ces peu- ples blessés au cœur ? C'est ce qu'il nous faut expli- quer avec l'assistance divine par une doctrine toute CO Ps. XLiv. 4. — W Ibid, 5. -. {}) Ibid, n. — (4) Ps. cx«. 4. — (5) Ps, XMV. 8. X 46a POUR hk CIKCONCISION chrétienne y toute prise des Livres sacrés et desEcri* tures apostoliques. Mais , fidèles, je vous avertis, que vos esprits ne soient point occupés d'une vaine idée de beauté corporelle, qui certes ne méritoit pas d'entretenir si long-temps la méditation du prophète. Suivez , sui- vez plutôt ce tendre et affectueux mouvement de l'admirable saint Augustin. « Pour moi, dit ce grand » personnage, quelque part où je voie mon Sau- » veur, sa beauté me semble charmante. Il lest beau » dans le ciel, aussi est-il beau dans la terre , beau » dans le sein de son Bère , beau entre les bras de sa » mère. Il est beau dans les miracles, il ne Test pas » moins parmi les fouets. Il a une grâce non pa- » reille, soit qu'il nous invite à la vie, soit que lui- » même il méprise la mort. Il est beau jusque sur » la croix , il est beau même dans le sépulcre n : Pulcher in cœlo, putcker in terrd ; « • • pulcher in ' miraculis , pulcher inflagellis ; pulcher inviians ad 'viUun > pulcher non curons mortem ; . . • pulcher in Ugno, pulcher in sepulcro* » Que les autres j dit-il , » en pensent ce qu'il leur plaira; mais pour nous » autres croyans , partout [où] il se présente à nos )> yeux ,. il est toujours beau en perfection » : Nobis credantièus uhique sponsus pulcher occurrat (0. Surtout il le faut avouer, chrétiens , quoi que le monde croie de sa passion , quoique ces membres qruellenient déchirés, et cette pauvre chair écorchée fasse presque soulever le cœur de ceux qui approchent de lui , quoique le prophète (') In Ps. xuTf n. i^ tom, iv, coL 38a. DE NOTRE SEIGNEUR. 4^3 Isaïe ait prédit que dans cet état « il ne seroit pas » reconnoissable , qu'il n'auroit plus ni grâce , ni » même aucune apparence humaine » ; Non est ^pecies ei j neque deoor; *vidimus ewn, et non erat aspectus (0 : toutefois c'est dans ces linéamens effacés y c'est dans ces yeux meurtris, c'est dans ce visage qui fait horreur j que je découvre des traits d'une incomparable beauté. Sa douleur a non^ seulement de la dignité , elle a de la grâce et de l'agrément. Mais peut-être vous me direz : Quelle étrange imagination de chercher sa beauté parmi ses souf- francies y qui ne lui laissent pas même la figure d'homme ! Que ne la regardes - vous bien plutôt dans sa merveilleuse transfiguration , ou dans sa résurrection glorieuse ? Ecoutez y et comprenez ma pensée y et vous verrez que cette beauté est incom«- parable pour nous. Un soldat eist couvert de grandes blessures qui semblent lui déshonorer le visage. Les délicats peut-être détourneront la vue de dessus ces plaies ; mais le prince les trouvera belles , parce que c'est pour son service qu'il les' a reçues : ce sont de belles marques; ce sont des cicatrices honorables , que la fidélité pour son roi et l'amour de la patrie embellit. Donc y ô fidèles de Jésus-Christ y que les ennemis de mon Mattre trouvent de la difformité dans ses plaies y certes je ne le puis empêcher. Mais, « pour » nous autres croyans » , nobis credentibus , comme disoit tout à l'heure saint Augustin ; pour moi , qui suis assuré que c'est pour l'amour de moi qu'il est (0 /«of. un. 2. 464 VOV% LA GIRGQNGISIOlf ainsi couvert de blessures , je ne puis être de leur sentiment. La véritable beauté de mpn maître ne lui peut être ravie : non , non , ces cruelles meur- trissures n ont pas défiguré ce visage ; elles Tout embelli à mes yeux« Si les .blessures des sujets sont si belles aux yeux du prince , dites-moi, lesbles* sures du prince quelles doivent-elles être aux yeux des sujets ? Celles-ci sont mes délices i je les b^e , je les arrose de larmes. L'amour que mon roi Sauveur a pour moi y qui a ouvert toutes ses plaies, y a répandu une certaine grâce qu'aucun autre objet ne peut égaler , un certain éclat de beaui^ qui transporte les âmes fidèles. Ne voyez- vous pas avec combien de douces complaisances elles y de- meurent toujours attachées? Ce leur est un sup* plice f que de les arracher de cet aimable objet» De là sortent ces flèches aiguës que David chante dans notre psaume ^ de là ces traits de flamme invisible « qui percent les cœurs jusqu'au, vif » : In corda inimicorum régis : « tellement qu'ils ne » respirent plus autre chose que Jésus crucifié»^ à l'imitation de l'apôtre : Non judicavi me scire aliçmd int&r vos nisi Jesum Christwn , et hune crucifixum {}). C'est ainsi que le roi Jésus se plaît de régner dans les cœurs. C'est pourquoi je ne m'étonne pas si je ne vois dans sa passion que des marques de sa royauté^ Oui y malgré la rage de ses bourreaux ^ ces épines font un diadème qui couronne sa. patience ; ce roseau fragile devient un sceptre en ses mains , cette pourpre ridicule , dont ils le couvrent , se CO /. Cor. II. a. changera DE HOTR^ SEIGlTEVE. 4^5 changera en pourpre royale sitét qu'elle sera teinte du sang de mon maître. L(H*sque j'entends le peuple crier que le Sauveur mérite la mort à cause qu il s'est fait roi ^ certes , dis-je incontinent en moi--méme , ces furieux disent mieux qu ils ne pensent; car mon pHnce doit régner par sa mort. Quand il porte lui-mâme sa croix sur ses épaules innocentes , tout autre qu'un chrétien seroit étonné de son impuissance ; mais le fidèle se doit souvenir de ce qu'a dit de lui Isaïe ^ « que sa domination^ » sa principauté est mise sur son épaule » : Prin^ cipatus super humerum ejus (0. Qu'est^e à dire cet empire et cette principauté sur ses épaules? ah ! ne l'entendez-vous pas ? c'est sa croix. C'est ainsi que l'explique Tertullien , dans le livre contre les Juifs (^). Sa croix ^ c'est son sceptre y sa croix c'est son bâton d'ordonnance ; c'est elle qui ran^ géra tous les peuples sous l'obéissance de notre Seigneur. Et n'avez-vous jamais pris la peine de consi*- dérer ce beau titre que les ennemis de mon maître attachèrent au-dessus de sa croix ^ Jésus de Nâ^ KÂHBTH Eoi DES JuiFs y écrit eu gros caractères^ et en trois sortes de langues , afin que la chose fût plus connue 7 II est vrai que les Juifs s'y oppo^ sent y mais Pilate l'écrit malgré eux. Qu'est-ce à dire ceci, chrétiens ? Ce juge corrompu avoit envie de sauver mon maître , et il ne l'a condamné que pour plaire aux Juifs : les mêmes Juifs le pressent de changer ce titre ; il le refuse:^ il tient ferme , il n'a < (') /foi. IX. 6. — (s) Adi/. Juâ, n. lo. BOSSUET. XI. 3i 466 POUR LJl CIECOKCIS.ION plus de complaisance pour eux. Quoi ! cet homme ci complaisant , qui livre un innocent à la mort de crainte de choquer les Juifs , commence à devenir résolu pour soutenir trois qu quatre mots qu il avoit écrits sans dessein , et qui paroissoient de si peu d'importance ! Remarquez tout ceci, s*il vous plaît: il e$t lâche et ferme y il est mol et résçlu dans la même affaire , à Tégard des mêmes personnes. Grand Dieu y je reconnois vos secrets : il falloit que Jjésus mourût en la croix y il falloit que m rpyauté fût écrite au haut de la croix. Pilate exécute le premier par sa complaisance , et Tautre par sa fermeté. « O » vertu ineffable de l'opération divine , même dans » le cœur des ignorans , s'écrie en cet endroit Tad- » m\r^ble saint Augustin (0 ! Ils ne savent tous ce » qu'ils disent , et ils disent tous ce que veut mou » Sauveur ». Une secrète vertu s'empare invinci'»- l>lement de leur amç » et mfilgré leurs méchantes intentions exécute de très-sages et très-salutaires conseils. Caïphe y en plein conseil de pharisiens y parlaoit de notre Seigneur y dit « qu'il est eipi^ient qu'ij » meure y afin que toute la nation ne périsse pas ». Sa moi/t empêchera donc toute la nation de périr ; il est donc le Sauveur de tpute la nation y remarque très-à-propos l'évai^géliste saint Jean C^). Merveil* leux jugement de Dieu! il pensoit prononcer l'arrêt de sa mort^ et il faisoit une prophétift de isa gloire. Le même arriva à Pilate : il condamne le Fils de Dieu à la croix; et voulantb écrire selon la coutume la (0 Tract, czTii. en Joan. n. S'ytom, lu, part, ii, çoL 79S. — (*} /oa/i. XI. 5oy 5a. DE NOTRE SEIGNEXJK. ^6*] cause de son supplice ^ il dresse un monument à sa royauté. Tant il est vrai que Dieu a des ressorts in- faillibles pour tourner où il lui plaît les cœurs de ses ennemis y et les faire concourir , malgré qu'ils en aient y à l'exécution de ses volontés! Parce que le règne du Sauveur devoit commencer à la croix , il plaisoit à nôtre grand Dieu que sa royauté y fût at- testée par une écriture publique , et de l'autorité du gouverneur de la province, qui servira, sans y penser, à la Providence divine. Ecrivez donc, ô Pilate, les paroles que Dieu vous dicte , et dont vous n'entendez pas le mystère. Quoi qtie l'on vous puisse alléguer, gardez-vous de changer ce qui est déjà écrit dans le ciel : que vos ordres soient irrévocables, parce qu'ils sont &its en exécution d'un arrêt immuable du Tout-puissant. Que, la royauté de Jésus soit écrite en langue hébraïque (0, qui est la langue du peuple de Dieu; et en la langue grecque, qui est la langue des doctes et. des philo- sophes ; et en la langue romaine, qui est celle de l'empire et du mondé. £t vous, 6 Greics,; inventeurs des arts; vous, ô Jui£s, héritiers des promesses; vous, Romains, maîtres die la terre, venez lire cqt admirable écriteau ; fléchissez le genou devant vo- tre roi. Bientôt, bientôt vous verrez cet homme, abandonné de ses propres disciples, ramasser tous les peuples sous l'invocation dis son noip. Bîeptôt arrivera ce qu'il a prédit s^utrefpis, qu'étant élevé hors dé terre il attirera tout à soi, et changera l'instrument du plus infâme supplice en une m(|- chine céleste , pour enlever tous les cœurs : Et ego^ (>) Jixm, zix. 20. ... 468 POUR LA CIRCONCISION ciim exaltatus fueny à terra , omnia traham ad meipsumW. Bientôt les nations incrédules , esquelles il étend ses bras , viendront recevoir parmi ses em- brassemens paternels cet aimable baiser de paix , qui selon les prophéties anciennes y les doit récon- cilier au ytdX Dieu qu'elles ne connoissoient pas. Bientôt ce crucifié sera « couronné d'honneur et » de gloire : à cause que, par la grâce de Dieu , il ï) « goûté la mêrt pour tous » , comme dit la di- vine épître aux Hébreux (2) , il verra naître de soii sépulcre une belle postérité; et sera glorieusement' •accompli ce fameux oracle du prophète Isaïe : « S'il donne son âme pour le péché, il verra une » longue suite d'enfans » : Si posuerit pro pecceuo wiimam suam, ^idebitsemen longœi^um (3). « Cette >» piçrre , rejélée- de la structui e du bâtiment , sera ^y fai\e la pierre angulaire et fondamentale qui sou- ^) tiendra tout le nouvel édifice (4) » ; et ce mysté- Tieux' grain de froment, qui représente notre Sauveur, étant tombé en terre (^) se multipliera par sa propre corruption; c'est-à-dk'e que le Fils de Dieu.tom* bera de la croix dans le sépiikre, et par un mer^ veilleux contre-coup « tous les peuples tomberont à » ses pieds » : Populi sub te codent j disoit BOtr« psaume (6). - Que je triomphe d'aise, quand je vois dans Tertùl- lien que déjà de son temps le nom de Jésus, si près de la iriôrt de notre Sauveur et du commencement de l'Eglise , déjà le nom de Jésus étoit adoré par toute la terre; et que dans toutes les provinces du (») Joan, XII. '32. — (») Hehr. il. 9. — O Istd, lui. 10. — W) /*'#. cxTii. aa. — C^) Joan. xu. a4« — ^^ ■^** ^^^Y» 6. DE irOTRE SEIGNEUR. 4^9 monde, qui pour lors étoient découvertes, le Sauveur y avoit un nombre infini de sujets ! « Nous sommes, » dit hautement ce grand personnage , presque la » plus grande partie de toutes les. villes » : Pars pêne major cwitaUs cufusçue (0. Les Par thés invincibles aux Romains, les Thraces antinomes., comme les ap- peloient les anciens, c'est-à-dire gens impatiens de toute sorte de lois, ont subi volontairement le joug; de Jésus. LesMèdes, les Arméniens, et les Perses, et les Indiens les plus reculés ; les Maures et les Arabes , et ces vastes provinces de TOrient ; l'Egypte et l'Ethiopie, et l'Afrique la plus sauvage; les Scythe» toujours errans, les Sarmates, les Gétuliens, et la Barbarie la plus inhuniaine a été apprivoisée par la doctrine modeste du Sauveur Jésus. L'Angleterre , ahl la perfide Angleterre, que le rempart de ses mers rendoit inaccessible aux Romains , la foi du Sauveur y est abordée : Britannorum inaccessa Ro" manis loca^ Christaverb subditaW, Que dirai -je* des peuples des Espagnes^ et de la belliqueuse na- tion des Gaulois, l'effroi et la terreur des Romains , et des fi^ers Allemands, qui se vantoientde ne craindre autre chose sinon que le ciel tombât sur leurs.tétes? Ils sont venus à Jésus, doux et simples comme des agneaux , demander pardon humblement , poussés d'une crainte respectueuse, Rome même , cette ville $uperbe qui s'étoit si long-temps enivré)e du sang des martyrs de Jésus , Rome la maîtresse a baissé la tête , et a porté plus d'honneur au tombeau d'un pauvi^e pêcheur, qu'aux temples de son Romulus : Osten- C») AdScap» /ï. a. — (*) Ter^ adv, Jud. n. 7» 47^ POUR LA ciRCôNCisioiir datur niihi Romœ tanto in honore templum Romuli, in quanto îbi ostendo Memoriam Pétri {^). Il n'y a point d'empire si vaste , qui n'ait été res- serré dans quelques limite^. Jésus règne partout, dit le grave TertuUien ; c'est dans le livre contre les Jiiifs, duquel j'ai tiré presque tout ce que je viens de vous dire de l'étendue du royaume de Dieu. « Jésus règne » partout y dit-il y Jésus est adoré partout. Devant lui yi la condition des roisn'est pas meilleure quecelle des » moindres esclaves. Scythes ou Romains, Grecs ou a) Barbares, tout lui est égal, il est égal à tous, il est roi » de tous, il est le Seigneur et le Dieu de tous » : ChrisU regnum et nomen ubique porrigitur; unique régnât, vbiquedidoralur; non régis apud ilhim major gratia, non barbarialicujus inferiorlœtitia; omnibus œqualis^ omnibus rex ^ omnibus Deus etDominus estip^). Et ce qui est de plus admirable, c'est que ce ne sont point les nobles et les empereurs qui lui ont amené les simples et les roturiers : au contraire il a amené les empereurs par l'autorité des pécheurs. Il a permis que les empereurs avec toute la puissance du mondé résistassent à sa pauvre Eglise par toute sorte dè^ cruautés , afin de faire voir qu'il ne tenoit pas son royaume de l'appui ni de la complaisance des grands. Mais quand il lui a^plu d'abaisser à ses pieds la ma-* jesté dé l'empire : Venez , venez à moi, ô Césars; as- sez et trop long-temps vous avez persécuté mon Eglise : entrez vous-mêmes dans mon royaume, où vous ne serez pas plus considérables que les moin-' (0 s. Aug. in Ps. XLiv, n. a3, tom. iv, col, 394. — (') Tertttt. ad^* Judasos^ «. 7. DE NOTBB SEIGSTEUR. ^']% dres de vos sujets. A même temps Constantin ^ ce triomphant empereur , obéissant à la Providence^ éleva Tétendard de la croix au-dessus des aigles l'o* maines ; et par toute Fétendue de Tempire la paix fut rendue aux Eglises. Où éles-vous, 6 persécuteurs? que sont devenus ces lions rugissans quivt)uloient dévorer le troupeau du Sauveur? Mes Frères, ils ne sont plus; Jésus les a défaits; « Ils sont tombés à ses pieds » : Popxdisub te codent. Il en est arrivé comme: de saint Paul. « Jé- » sus fit mourir son persécuteur , et mit en sa place » un disciple » : Occisus est ininUcus Christi, vwit discipidus Christi, dit saint Augustin (0. Ainsi ces peuples farouches ^ qui frémissoient comme des lions contre les innocens agneaux de notre Seigneur, ils ne sont plus , ils sont morts ; ce Jésus les a frîippés » au cœur » : in corda inimicorum. « C'étoit dans » le cœur qu^ils s'élevoient contre lui, c'est dans le » cœur qu'il les a abaissés » : Codant in corde. Ibi se erigebant od^ersiis Christum^ ibi codant ante Chris-- tam. « Les flèches de mon Maître ont percé le cœur » de ses ennemis » : Sagittee Potentis acatœ^ in corda inimicoram régis. Il les a blessés de son saint amour. : Domuit, orbem, non^ ferro, sed ligno (3). « Le royaume qui n'étoit pas de » ce monde a dompté le monde superbe , non par » la fierté d'un combat, mais par l'humilité de la pa- (0 InPs. XLiv. lï. i6, tom. iv, co/. 389. -^ (») S» Aug. ibid,-^ i}) In Ps. xcv. n. 2 , col. io33. 4721 ' POVR LA CIRCONGISIOH » iience » : Regnum quod de hoc rmmdo nên erat^ superbum mundum non iUrocitate pugnandi , sed patiendi humilitate vincebat (0. C'est pourquoi dans ce même temps ^ faites avec moi cette dernière remarque ; dans ce même temps , dis-je y dans lequel la paix ëtant donnée à FEgiise tout ne respiroit que Jésus ^ on lui élevoit destem*^ pies de tous côtés ^ on renversoit les idoles par toute la terre ; dans ce même temps où les vénérables évê* ques , qui sont les princes de son empire , s'assem- blèrent de toutes parts à Nicée pour y tenir les pre- miers états généraux de tout le royaume de Jésus* Christ y dans lesquels toutes les provinces du monde confessèrent sa divinité; dans ce même temps la croix précieuse à laquelle avoit été pendu le San- veur, croix qui jusques alors avoit été cachée , et peut-être que la Providence divine jugeoit que la croix de notre Seigneur paroissoit assez en ses mem- bres durant la persécution des fidèles : la croix donc jusques alors cachée, pesez toutes ces circonstances^ fut découverte en ce temps par de grands et extraor-» dinaires miracles; elle fut reconnue , elle fut ado* rée. Et ce n est point ici une histoire douteuse : elle doit être approuvée par tous ceux qui aiment les antiquités chrétiennes, dans lesquelles nous la voyons très-évidemment attestée. Eh ! penserie^-vous bien, chrétiens , qu'une chose si mémorable , si célèbre parmi les Pères, soit arrivée en ce temps sans quel- que profond conseil de la sagesse éternelle? cela est hors de toute apparence. Que dirons-nous donc ea (0 «^. Aug. in Joan. tract, cx^u n, i , iom. m , part, ii , col 794. DE irOTRE SEiaUEUR. 47^ cette rencontre ? c'est que tout le monde est dompté , tout a fléchi sous les lois du Sauveur. Paroissez ^ paroissez, il est temps , ô croix qui avez fait cet ouvrage : c'est vous qui avez brisé les idoles ; c'est vous qui avez subjugué les peuples ; c'est vous qui avez donné la victoire aux valeureux soldats de Jésus qui ont tout surmonté par la pa- tience. Vous serez gravée sur le front des rois, vous fiijerez le principal ornement de la couronne des em- pereurs, ô croix qui êtes la joie etTespérancede tous les fidèles. Concluons donc de tout ce discours, que la croix est un trône magnifique, que le nom de Jésus est un nom bien digne d'un roi; et qu'un Dieu descendant sur la terre, pour vivre parmi les hommes;^ n'y pouvoit rien faire de plus grand , rien de plus royal, rien de plus divin, que de sauver tout |e genre humain par une mort généreuse. Et plût à Dieu, chrétiens, que, pour acheter de vous faire voir la gloire de cette mort , il me restât assez de loisir pour vous entretenir quelque temps de la qualité de pontife que notre Seigneur a si bien méritée ! C'est là que , suivant la doctrine toute cé- leste de l'incomparable épitre aux Hébreux , par la comparaison du sacerdoce de la loi mosaïque , je tâcherois de vous faire connoitre la dignité infinie de la prêtrise de Jésus-Christ. Vous verriez Aaron portant à un autel corruptible des génisses et des taureaux , et Jésus pontife et victime présentant de- vant le trône de Dieu sa chair formée par le Saint- Esprit , oblation sainte et vivante pour l'expiation de nos crimes. Vous verriez Aaron dans un taber- nacle mortel effaçant quelques immondices légales , 474 POtlK I.À CtRCOirCISION et certaines irrégularités de la loi par le sang des animaux égorgés ; et Jésus à la droite de la majesté* faisant par la yertu de son sang la vraie purification de nos âmes. Vous verriez Aal:'on consacré par un sang étranger, comme il estécrit dansleLévitique(i)y et « par cemémesangétranger » , in sanguine aliéna^ dit Fapôtre (V^ entrer dans ie sanctuaire bâti de maiii d'homme ; et Jésus consacré par son propre sang, entrer aussiparson propre sang dans le sanc- tuaire éternel, dont il ouvre la porte à ses sei*viteurs. Vous verriez , à Tadmitable spectacle pour des âmes vraiment chrétiennes! vous Verriez d'une part tous les hommes révoltés' ou^rtenient contre Dieu; et d'autre part la justice divine prête à les précipiter dans l'abîme «n la compagnie des démons , desquels ils avoient suivi les conseils et imité la présomption, lorsque tout à coup ce saint , ce charitable pontife , ce pontife fidèle et compatissant à nos maux, paroit entre Dieu et les hommes. Il se présente pour porter les coups qui alloîent tomber sur nos têtes , il ré- pand son sang sur l«s hommes , il lève à Dieu ses mains innocentes; et pacifiant ain^le ciel et la terre, il arrête le cours de la vengeance divine, et change une fureur implacable en une étemelle miséricorde. Vous verriez comme totis les fidèles deviennent pre- . très et sacrificateurs , par le sang précieux de Jésus par lequel ils sont consacrés. Je voua leâ représen- terois , ces nouveaux sacrificateurs , revêtus d'une étole céleste , blanchis dans les eaux du baptême et dans le sang de l'Agneau, officiant tous ensemble non sur un autel de matière terrestre , mais sur cet au- (0 Lev, VIII. — (») Heb. ix. aS. DE NOTRE SEIGNEUR. 4?^ tel céleste qui représente le Fils de Dieu (0 ; et là charger cet autel, de victimes spirituelles j c*est-à- dire de prières ferventes ^ de cantiques de louange et de pieuses actions de grâces , qui de toutes les parties de la terre montent de dessus ce mystérieux autel devant la face de Dieu, ainsi qu un parfum agréable et un sacrifice de bonne odeur, au nom de notre Seigneur Jésus-Christ , grand** prêtre et sa- crificateur éternel selon Tordre de Melchisédech. Et que ne dirions-nous pas de cet incomparable pontife, de ce médiateur du nouveau Testament^ par qui seul toutes les oraisons sont bien reçues, par qui les péchés sont remis, par qui toutes les grâces sont entérinées, qui par une nouvelle alliance a rompu le damnable traité que nous avions fait avec Fenfer et la mort , selon ce que dit Isaïe : De-- lebitmr fœdus vestrum cum morte , et pactum ves-- trum.cum infemo non stabit (^). « Votre pacte avec » la mort sera annuUé, et votre pacte avec i'enfer » ne tiendra pas ». C'est ce que nous dirions , chré- tiens. Puis joignant cette doctrine toute apostolique à ce que nous venons de prêcher de la royauté du Sauveur, nous conclurions hautement dans Té- panchement de nos cœurs j que le nom de Jésus , qui enferme toutes ces merveilles, est un nom au- dessus de tout nom, comme Tapôtre Tenseigne aux Philippiens (5) ; et qu' « il étoit bien convenable , » selon le même apôtre auxHébreux.(4), que Dieu >) dédiât et consacrât par sa passion le prince de » notre salut » . Mais puisqu'il a plu à . celui qui (0 Apoc. viii. 3. — W Isai. xxTiii. a8. — (') PMlip, n. 9. — (4)^c*r. 11. 10. 4^6 POUK LÀ CIRCONCISION nous inspire dans cette chaire de vérité, de nous fournir assez de pensées pour remplir tout cet en^ tretien de la royauté de Jésus ; fidèles , demeurons- en-lày en attendant que la Providence divine nous fasse tomber sur la même matière , et tirons-en quel* ques instructions pour l'édification de nos âmes. Donc y ô peuples de Jésus-Christ, si le Fils de Dieu est votre vrai roi, songez à lui rendre vos obéis-^ sauces. Rappellerai-je ici de bien loin la mémoire des siècles passés , pour vous faire voir comjme les bons princes ont été les délices de leurs sujets? Que n ont pas fait les peuples pour les rois qui ont sauvé leurs pays, les vrais pères de la patrie? Ah! il y a dans nos cœurs je ne sais quelle inclination naturelle pour les princes que Dieu nous donne, que ni les- disgrâces ni aucun mauvais traitement ne peut ar- racher aux âmes bien nées. Qu il est aisé aux.roîs de la terre de gagner Taffection de leurs peuples ! un souris, un regard favorable, un visage ouvert et riant satisfait quelquefois les plus difficiles. In hila- ritate vultâs régis vita, disoit autrefois le Sage (0 : « La vie est dans les regards du prince , quand on » les a sereins et tranquilles ». Peuples, c'est une chose certaine, vous le savez : un gouvernement doux et équitable , une puissance accompagnée de bonté et d une humeur bienfaisante, charme les âmes les plus sauvages. C'est un sentimeht commun parmi les hommes d'honneur, que pour de tels princes la vie même est bien employée. Il n'y a que le roi Jésus à qui la douceur et les largesses ne servent de rien. Il a beau nous ouvrir DE NOTRE SEIGNEUn. 477 ses bras pour nous embrasser; il a beau nous obliger, non par de vaines caresses, mais par des bienfaits efièctifs ; nous sommes de glace pour lui : nous ai- mons, mieux nous repaître des frivoles apparences du monde, que de Tamitié solide qu'il nous promet. Ah ! pourrai-je bien vous dire avec combien de soin il a recherché notre amour? Il est notre roi par naissance, il Test de droit naturel ; il a voulu Tétre par amour et par bienfaits. Il faut , dit-il , que je les délivre , ces misérables captifs. Je pourrois bien le faire autrement ; mais je veux les sauver en mou- rant pour eux , afin de les obliger à m'aimer. Tirai au péril de ma vie, j'irai avec la perte de tout mon isang les arracher de la mort éternelle. Pi 'importe, je le ferai volontiers ; pourvu seulement qu'ils m'ai- ment , je ne leur demande point d'autre récom- pense. Je les ferai régner avec moi. Eh ! mes Frères, dites-moi , je vou^ prie , que nous a fait Jésus , le meilleur dés princes , qu'avec une telle bonté il ne peut gagner nos affections, il ne peut amollir la dureté de nos cœurs? Certes, peuple de Metz , je vous donnerai cet éloge , que vous êtes fidèle à nos rois. On ne vous a jamais vu entrer , non pas même d'affection, dans les divers partis qui se sont formés contre leur service. Votre obéissance n'est pas douteuse, ni votre fidélité chancelante. Quand on parloit ces jours passés de ces lâches , qui avoient vendu aux ennemiis de l'Etat les places que le roi leur a confiées , on vous a vu frémir d'une )uste indignation. Vous les nommiez des traîtres , indignes devoir le jour, pour avoir ainsi lâchement trompé la confiance du prince^ et manqué de foi 47^ POUR LA CIRCONCISION à leur roi. Fidèles aux roi» de la terre , pourquoi n^ sommes-nous traîtres qu au Roi des rois? Pourquoi est-ce qu'il n'y a qu'envers lui que le nom de per- fides ne nous déplaît pas, qui seroit le plus sensible reproche que Ton nous pût faire en toute autre rencontre? Mes Frères , le roi Jësus nous a confié à tous une place y qui lui est de telle importance ^ qu'il l'a voulu acheter par son sang : cette place , c'est notre aine^ qu'il a commise à notre fidélité. Nous sommes obligée de la lui garder , par un serment inviolable que nous lui avons prêté au baptême. Il l'a munie de tout ce qui est nécessaire , au dedans par ses grâces et son Saint-Esprit , au dehors par la protection an- gélique. Rien n'y manque, elle est imprenable, ellie ne peut être prise que j^ar trahison. Traîtres et per- fides que nous sommes , nous la livrons à* Satan ; nous vendons à Satan le prix du sang de Jésus, à Satan son ennemi capital, qui a voulu envahir soh trône , qui n'ayant pas pu réussir au ciel dans son audaci^mse entreprise, est venu sur la terre lui dis- puter son royaume y et se faire adorer en. sa place. O perfidie ! ô indignité ! c'est pour servir Satan que nous trahissons notre prince crucifié pour nous , notre unique libérateur. Figurez-vous, chrétiens, qu'aujourd'hui, au milieu de cette assemblée, paroit tout à coup un ange de Dieu qui fait retentira nos oreilles ce que disoit autres fois Elie aux Samaritains: « Peuples, jusqu'à quand » chancekrez>*vous entre deux ' partis >» ? Quousçue claudicads in duos parles (0 ? Si le Dieu d'Israël est DE NOTRE SEIONBUR. 479 le vrai Dieu, il faut Fadorer; si Baal est Dieu , il faut Tadorer. Chers Frères, les prédicateurs sont les anges du Dieu des armées. Je vous dis donc aujour- d'hui à tous,. et Dieu veuille que je me le dise à moi-même comme il faut : Quousque claudicatis ? Jusqu'à quand serez-vous chancelans ? Si Jésus est votre roi , rendez-lui vos obéfêsances ; si Satan est votre roi , rangez-vous du côté de Satan. Il faut prendre parti aujourd'hui. Ah ! mes Frères , vous frémissez à cette horrible proposition. A Jésus , à Jésus , dites-vous ; il n'y a pas ici lieu de délibérer^ Et moi, nonobstant ce que vous me dites, je réitère encore la même demande : Quousque claudicatis in dua$ partes? Et ! serez-vous à jamais chancelans, san$ prendre parti comme il faut? « Si je suis votre » maître , dit le Seigneur par la bouche de son pro^ » phçte ,où est l'honneur que vous me devez (0 ? Et » pourquoi m'appelez-vous Seigneur, et ne faites » pa$ ce que je vous dis » , dit notre Sei^eur en sou Evangile (2) ? Que voulez-vous que l'on cpoie^ pu nos paroles., ou nos actions? Le Fils de Dieu nous' ordonne que noAs appro-^ chions de son Père en toute pureté et en tempé- rance. Et pourquoi donc tant d'infâmes désirs? pourquoi tant d'excessives débau^ches ? il nous or- donne .d'étre charitables; et, fidèles, la charité pourra-*t-elle jamais s'accorder avec nos secrètes eur vies, >avec nos médisances continuelles, aV'ec nos inimitiés irréconciliables ? Le Fils d^ Diisù nous or- donne de soulager les pauvi^es , autant que nous le pourrons ; et nous ne craignons pas de consumer la (0 Malac. 1. 6.— ^î<) 'Maith, vu. 21. 1 I 486 POUR LÀ ciRcoircisioir substance du pauvre , ou par de cruelles rapines , ou par des usures plus que judaïques. Quousçuc claudicatis ? Mes Frères, il ne faut plus chanceler j il faut être tout un ou tout autre. Si Jésus est notre roi y donnons-lui nos œuvres , comme nous lui don* nous nos paroles. Si Satan est notre roi, ô chose abominable ! mais la dureté de nos coeurs nous contraint de parler de la sorte ; si Satan est notre roi, ne lui refusons pas nos paroles , après lui avoir donné nos actions. Mais à Dieu ne plaise, mes Frères, que jamais nous fassions un tel choix ! Et comment pourrions-nous supporter les regards de cet Agneau sans tache , meurtri pour Tamouk* de nous? Dans cette terrible journée, où ce roi des* cendra en sa majesté juger les vivans et les morts , comment soutiendrions-nous Taspect de ses plaies qui nous reprocheroient notre ingratitude ? Où trouverions-nous des antres assez obscurs et des abîmes assez profonds, pour cacher une si noire perfidie ? Et comment soujOTririons^nous les repro- ches de cette tendre amitié si indignement méprisée^ et la voix effroyable du sang de. TAgneau qui a crié pour nous sur la croix pardon et miséricorde , et dans ce jour de colère criera vengeance contre notre foi mal gardée et coatre nos sermens infidèles ? O Dieu éternel ! combien dur , combien insup- portable sera ce règne que Jésus copoimencera en ces jours .d'exercer sur ses ennemis! Car enfin, fidèles , il est nécessaire qu'il règne sur nous. L'em- pire des nations lui est promis par les prophéties* S'il ne règne sur nos âmes par miséricorde, il y ré- gnera par justice ; s'il n'y règne par amour et par grâce. DE VOTftE SEIGNEtTR^ 4^1 grâce , 3 y régnera par la sévérité de ses jugemens et par la rigueur de ses ordonnances. Et que diront les méchans , quand ils sentiront ^ malgré qu ils en aient y leur roi en eux-^mémes appesantir sur eux son bras tout-puissant ; lorsque Dieu frappant d'une main, soutenant de Fautre, les brisera éternelle'* ment de ses coups sans les consumer ? Et ainsi tau* jours vivans et toujours mourans, immortels pour leur peine, trop forts pour mourir, trop foibles pour supporter, ils gémiront à jamais sur des lits de flammes , outrés de furieuses et irrémédiables 4ou* leurs ; et poussant parmi des blasphèmes exécrables mille plaintes désespérées , ils confesseront par une pénitence tardive , qu'il n'y avoit rien de si raison* nable'que de laisser régner Jésus sur leurs âmes. Dignes certes des plus horribles supplices, pour avoir préféré la tyrannie de l'usurpateur à la douce et légitime domination du prince naturel. O Dieu et Père de miséricorde, détournez ces malheurs de dessus nos têtes. Mes Frères , ne voulez-vous pas bien que je re- nouvelle aujourd'hui le serment de fidélité que nous devons tous à notre grand roi ? O roi Jésus , à qui nous appartenons à si juste titre , qui nous ave^ rachetés par un prix dVmour et de charité infinie y je vous reconnois pour mon souverain. C'est à vous seul que je me dévoue. Votre amoUr sera ma vie , votre loi sera la loi de mon cœur. Je chanterai vos louanges , jamais je ne cesserai de publier vos misé^* ricordes. Je veux vous être fidèle , je veux être à vous sans réserve , je veux vous consacrer tous mes* soins, je veux vivre et mourir h votre service. Amen* BossvET. xi« 3 a ^S% POUR LA CIRCONCISION ^ IV SERMON FOUR hA FÊTE DE LA CIRCONCISION ÊE NOTRE SEIGNEUR (*). Hoyaut^ de Jésus- Christ, sa nature, ses efièts :, droits qa*^e lui donne sur nous : comment nous devons la reco^noltre* ^•n0*^*/^nt%^^/Vy^»/9^ Deus autem rex noster ante saeada, opera^u» eB% s^utem in tnedio terrae. Dieu y ijfui est neéf^ rot avant tous les siècles y a opéré noire salut au mùHeu de la terre, Ps. lxxiii. i3* « Quoique nous appreaioas par les saintes Lettres que Dieu, se considère dans tous ses ouvrages , et que ne voyant rien dai^ le monde qui ne soit infiniment au-dessous de lui, il ne voit aussi que lui-même qui mérite d'être \à, fin de ses actions; toutefois il est as« sure qu il n'a^gineRle. pas pour cela ses propres ri« çhesses., parce qu'eUessont infiiûes. Quelques beaux (^ Mbuff ayons suppitittié dé ce sermon plusieurs morceaux tirés. mot a mot du précédent, qui pouvoient être retranchéa sans inter- rompre Tordre et la suite du dis^oursi : nous en userons ainû dana toutes les occasions où les circonstances le permettront, afin d^évi-^ ter, autant quil sera possible, les répétition3 trop fréquentes. Edit* un iroïRE sËidiVEVR. 4^3 ouvrages que produise sa toute-puiâsance, il n'en retire aucun bien que celui d'en fkire aux autres; il n'y peut rien acquérir que le titre de bienfaiteui^; et Fintérêt de ses créatures se trouve si heureusement conjoint avec le sien , que comme il ne leur donnée que pour l'avancement de sa gloire , aussi né peut- il avoir de plus grande- gloire que de leur donner j C'est pourquoi l'Eglise , inspirée de Dieu^ nous ap- prend, dans le sacrifice , à lui rendre grâces pour sa grande gloire : Gratias agitntts tibi propter ma" gnamgloriamtnam^ afin que nous comprenions par cette prière y que la grande gloire' de Dieu, c'est d'ê- tre libéral à SÀ créature. Cest pour cette raison quer le Fils de Dieu prend aujourd'hui le nom de Jésus et la qualité de Sauveur. Ce n*est pas assez que l'on nous enseigne que ce petit enfant est né pour les hommes y il faut que son nom nous le fasse entendre t et il tTk i^evient à notre natui^e ce grand et glorieux avantagé , qu'on ne peut honorer le notn de Jésus , sans célébrer aussi notre délivrance ; et ainsi que le salut des mortels est devenu si considérable, qu'il Élit non-seulement le bonheur des hommes et le sujet des hymned des anges ^ mais encore lé triomphe du Fils de Dieu même. Sainte Mëre de mon Sauveur , doni lé SàiUt-^Es-^ prit s'^st servi pour lui donner un nom si aimable ^ obtenez-nous de Dieu cette grâce, que nou^èu sien- tions les douceurs que l'ange commença de vous ex-< pliquer, après qu'il vous eut ââhsi saluée. jÉi^e^ Maria: i EiréciàlE que le mystère 'de cette journée, cachatil? à nos yeux la, divinité, nous représente le Fils d& 484 POVR LA GIRCOirCI^IOlf Dieu, non-seulement dans^rinfirmité de la cbair^ mais encore dans la bassesse de la servitude y et que les. cris y les gémissemens et le sang de cet enfant circoncis semblent plutôt exciter en nous le|5 ten- dresses de la pitié que les soumissions du respect ; néanmoins la foi pénétrante , qui ne peut être sur- prise par les apparences , nous découvre dans ses foiblesses des marques illustres de sa grandeur et des témoignages certains de sa royauté. C'est j fidèles y cette vérité chrétienne que je me propose de vous faire entendre avec le secours de la grâce. J'espère que vous verrez aujourd'hui d^ns le nom que l'on impose au Sauveur des âmes , et dans les prémices du sang précieux qu'il commence à verser pour l'amour des hommes , une expression évidente de la souveraineté très;^auguste que son Père céleste lui a destinée. Et vous reconnoitrez que cette doc- trine nous est infiniment fructueuse, puisqu'en éta- blissant la gloire du maître et les droits de 6£| royauté^ tenons apprend tout ensemble les devoirs de l'o- béissance. Entrons donc en cette matière sous 1 a conduite des Lettres sacrées, et disons avant tontes choses que le nom de Jésus est un nom de ix)i , et qu'il signifie une royauté qui n'est pas :moins légitime qu'elle est ab- solue. Pour mettre cette vérité dans son jour, je sup- pose premièrement que la royauté est le véritable apanage de la nature divine , à laquelle seule appar- tient la souveraineté et l'indépendance. Or, entre tous les divins attributs , il y en a trois principaux qui établissent le règne de Dieu sur ses créatures, la puissance , la justice , la miséricorde, Que Dieu règne. DE NOTRE SEI&KEXril« 4^5 par sa puissance, c'est une vérité st constante ^qn^elle entre par elle-même dans tous les esprits^ sans qu'il soit besoin d'alléguer des preuves. En effet c'est par sa puissance qu'il dispose des créatures , ainsi qu'il lui plaît y sans que rien puisse résister à ses volontés ; ' et par conséquent il en est le roi avec une autorité qui n'a point de bornes. C'est pourquoi l'apôtre saint Paul y en parlant de Dieu, c'est, dit -il, « le bien- » heureux et le seul puissant » ^ et il ajoute aussi- tôt api^ès, « le Roi des rois et le Seigneur des sei- »gneurs(*) »; comme ayant dessein de nous faire en- tendre que l'empire de Dieu doit être infini , parce que sa puissance est incomparable. Mais je remarque ici, chré^ens^ que ce règne ^st universel, et enferiûe indifFéi*emment tous les êtres qui relèvent également de la toute-puissance divine. Si bien que les hommes et les anges étant ca- pables d'un gouvernement spécial, parce qu'ils peu- vent être conduits par raison; ilparbit manifestement qu'outre ce règne de toute-puissance , qui comprend généralement toutes les créatures, il faiit enoor^ re^ connoitre en Dieu quelque domination plus partit culière pour les natures .intelljigente&. C'est aussi ce que nous voyons éclater dans sa bonté et par sa jus- tice.. Car comme entre les anges et les hommes, les uns sont rebelles à leur Créateur et les antres sont obéissans, les uns suivent ses: volontés et les autres les contredisent, et que d'ailleurs il est impossible que rien échappe de ses mains souveraines., ni se dé^ robe de son empire ; qui ne voit qu'il est. nécessaire qu'il établisse deux gauvernemens difTérens ^ l'un de {}) L Timot. \i. i5. 486 fOUIL LÀ CIKCOUrCISION )ustice^ Tautre de bonté; Tun pour la vengeance âes crimes , lautre pour le couronnement des Veri- tas; Tun pour ranger les esprits rebellés par la ri- gueur d un juste supplice; Tautre pour enrichir les respectueux par la profusion des bienfaits? De là ces deux règnes divers dont il est parlé dans les saintes Lettres : Ynp. de rigueur et dé dureté que le Psalmiste nous représente en ces mot^ : <( Vous les » régirez, dit-il, avec un sceptre de fef , et vous les M briserez tous ainsi quun vaisseau de teiTC (0 » ; l'autre de douceur et de joie , que le même Psalmiste décrit ; a A.van'Ciez, dit-il, o mon Prince, combattez » heureusement y et régnez p^r votre beauté et par * votre bonne grâce (?) »* Par où le Saint-Esprit nous veut faire entendre qu'il y a un règne de fer, et c'est ie règne de la justice lîgoureuse qui assujettit par ibrce les esprits rèbeUes , en les contraignant de por^ •ter le poids d'uâe impitoyable vengeance s et qu'il y & un règne de paix , et c'est le règne de la bonté qui possède les cœurs souverainement par les grâces de -ses attraits infinis i de iBorte que nous avons prouvé par les Ecritures le règne de la puissance, et de la justice, etdé la miséricorde divine. - des vérités étant supposées, venons inaintenant à l'enfant Jésus ; et puisque tant de prophéties, tant d'oracleis, tant de figures du vieux Testalnent lui promettent qu'il sera roi , ne craignons pas de lui demander de quelle nature est la royauté qu'il est venu chercher sur la terre* Il est certain , aimable Jésus , que ce nouveau règne ne s'établit pas sur vo- tre pouvoir, puisque vous vous revêtez de notre j (0 P*. u. 9. — C«j -P*. xwv. 5. r DE IVOTRE SEIGNEUR. 4^7 foiblesée; ni sur la rigiïeiir àe votre justice , pliisque vous déclarez lians vatre Evangile que « vous n'étés 3» pas venu pour juger le monde (0 ». Que nous reste-t-il donc maintenant ii dire , sinon que le rè- gne quie vous comnlence^ est un règne de miséri- corde ? A^ssi ne pï*en mondes. Mais, fidèles, s'il est véritable que le nom de Jésus soit un nom royal^^un nomrdé candeur et de majesté, qui prpmet à Tenfantque nous adorons un empire -si magnifique , pourquoi voyons-nous du sang ré- pandu ^ et ne i^cherchons-nous point dans les Ecri- tures le secret dfB cette mystérieuse cérémonie? J'en- tends votre dessein, ôinon roi Sauveur. Ce n'est pas âssez que vous soyez roi , il faut que vous soyez un roi conquéraM. Comme roi, vous sauvez vios peu- ples; cotadiÉie conquérant , vous donnez du sang, et^ Vous achetez à ce prix les peuples qufe vous soumet- tez à votre pouvoir. Et c'est, fidèles, pour cette Maison que dans cette même journée, où il reçoit le titre de roi dans la qualité de Sauveur, il veut que son sang comnience à couler, afin de nous faire voir 488 patin LA ciacoircisiow son règne établi sur le salut de tous ses sujets et sur l'effusion de son sang. Considérons ces deux vérités qui comprennent tout le mystère de cette jouraée. I^rouvons par des raison^ invincibles gu^il n'est point d'empire mieux affermi , ni de conquête plus glo- rieuse; et tâchons de profiter tellement de cette doctrine toute apostolique ^ que nous méritions en- fin d'être la conquête de notre monarque Sauveur, qui n'a conquis et ne s'assujettit ses peuples, qu'en les délivrant. Pour comprendre solidement combien grande, combien illustre , combien magnifique est la sojuve* raineté du Sauveur des âmes , il faut premièremei^ former en nous-mêmes la véritable idée de la royauté, où je vous demande, fidèles, que vous ne vous lais- siez pas éblouir les yeux par cet éclat et par cette pompe qui remplit d'étonnement le vulgaire, Cgm- prenons, dans la royauté des rois quelque cb,o^e de plus relevé- que ce que l'ignorance y admijre. Certes je ne craindrai pas de le publier : ce ne sont m les trônes , ni les palais , ni la pourpre , ni les richçsses , ni les gardes qui environnent le prince, ni cette longue suite de grands seigneurs, ni la fovile des courtisans qui s'empressent autour de sa pçr^onne, et pour dire quelque chose de plu$ redoutable ,^ ce ne sont ni les forteresses , ni les armées qui me mon- trent la véritable grandeur de la dignité royale. Je porte mes yeux jusque sur Dieu même , et de cette Maj.esté infinie je vois tomber sur les rois un rayon de gloire que j'appelle la royauté. Et pour? dire plu^ clairement ma pensée ,. je soutiens que la royauté, à la bien entendre; qu'est-ce, fidèles, et que dirons- DE NOTRE SEIGNEUR. 4^9 nous? G^est une puissance universelle de faire du bien aux peuples soumis : tellement que le nom de roi, c'est un nom de père commun, et de bienfaiteur général; et c'est là ce rayon de divinité qui éclate dans les souverains. Expliquons toutes les parties de cette définition importante , qui sera le fondement de tout mon dis* cours. Je dis donc que la royauté est une puissance. Je ne m'arrête point à prouver une vérité si cons- tante ; mais passant plus outre je raisonne ainsi. Je dis que si la royauté est une puissance , il s'ensuit manifestement que c'est une puissance de faire du bien, et f appuie cette conséquence sur ce beau prin- 'cipe : Tout ce qui mérite le nom de puissance natu- rellement tend au bien. Jugez si j'établirai cette vé- rité par des raisons assez convaincantes. . La puissance qui s'emploie à faire du mal aux au- tres , le fait ou justement ou injustement. Si elle le 'fait avec injustice, il est certain que c'est impuis*^ sance : car nul ne peut opprimer les autres par vio^ lence et par injustice , qu'il ne se mette le premier dans' la servitude. C'est pourquoi il est écrit dans TApocaljrpse , que «celui qui mené les autres en » captivité, va lui-métbe en captivité » : Qui in cap^ tii^itatem duxerit , in eapliifitatem vadet (>). Sans doute afin que nous concevions que celui qui op- prime, celui qui tourmente, est le premier esclave de son injustice , seloti l'expression de l'apôtre : Ser^^i injitstiiiœ (?). Etante dans un si honteux esclavage^ itne peut pas être appelé puissant.; et par consé-^ quent la puissance d'affliger les autres avec injustice^ 49^ POUR LA ci]iceNCi9ioir n'est pas une véritable puissance : Nihilpossumms contra ^eritatem, sed pro wriiafe (0 : « Noii$ n^ ;» pouvons rien contre la vérité^ mais nous pouvons » tout pour die » ; puisisance qbi se détruit elle- même. Mais que dîroiis-nous maîâ tenant 4e cettie puis- ^abce qui puait les crimes, et qui donne des armes .à la |usJtÂee contre le^s entreprises des m/échans? Cest ici qu'il faut que je vous propos» une belle tbéolpgjp de Tertullien ; eUe donnera un grand jiour à la vé- rité quefai avancée, que tout ce qui mérite lie nom .d^ puissance est naturellement bienfamant. Ce grand homme comparant la bonté de Dieu, par laquelle il fait An bien à ses créatures > wec ia seyérité ri- •goureuse par laquelle il les châtie selota )^T^ np^érites, dit que la première Itxi est naturelle , pe0t-è-dire 1^ j^aunificéxicie; et que l'autire est comm^ ei)ûpruntée, c'est-à-dire la sévérité ; ///^ ingemi^j ho^o acç}- dens^ illa èdiUt , hœc adhibiUif itta.pr<^prU$j, hçep 'accammodatai^h Eît il en rend cette ex^U^nte rai*- soh : car y dit^il^ la toute-puis^nce divine jamais n'afflige àes créatures > que lor5q.u!elle y çst forcée par les^ ^rimés^ Si dioûe jaituais elle ne s.e résout à leur faire i^ebttr du )ml que par u&e espèce de force , 41 paroît qu'elle leur fait du bien par natur^.; et paf- là ma proposition demeure învîppibl^mei^t jétabllq. Car ce n'est pas une véritable puissance tfaflliger les liommes avec injustice; parce qu>insiqiie nous avons dit , l'injustice est une foiblçgsq et uo esrclavage : de sorte que la véritable puissance ne faisant jamais de mal à personne ^ que lorsqu'elle^ est coptraiate et (0 //. Cor. xiii. 8. — (>) Lib, II V ^y* MlMrâQiL n, i u DE KOTRE SEIGITEUR. 49^ forcée, U ^'ensuit que par i»Ue-même et de sa nature elle est éternellement bienfaisante. Et c'est pout cette raison, chrétiens, que je dis que la royauté est une puissance de faire du bien ; parce que telle est la nature de toutes les puissances légitimes , et que Ifi puissance des rt}is est un rayon de la puissanc édi^ vine si naturellement libérale. Mais j'ajoute que cette pûis^nceest universelle; «t c'est, fidèles, cette différence qui distingue le feou*- verain d'avec les sujets. Ltes libéralités particulières 5ont nécessairement limitées ; c'est le privilège du prince de pouvoir étendre ses bienfaits jpar tout son empire : il montre réminence die sa dignité par ré>- tendue de son influence. Ainsi Dieu a mis le solefl dans une place si élevée au-dessus de nous , pour réjouir par sa vertu toute la nature. L'action dm prince , occupé à faire du bien à ses peuplées , mé montre sa grandeur et son abondance : c'est le ca^ ractère de la royauté , c'e^t ce qui fait la maj^é des monarques ; et par-là vous pouvez eomprendi'é quelle est la royauté du Sauveur Jésus. 3'il est vrai que la royauté, c'est une puissancie de faire du bien ; si le salut qui mène avec lui la paix j Taboiidance , la félicité , est un bien si eoqsidé^ riable qu'il est capable de rassasier jusques aux désirs les plus vastes ; qui ne voit qu'il n'est rien plus digne d'un roi que de s'établir en sauvant son peuple? ^t nous en lisons un très'-belexemple dans les Ëori^ tures ss^créea. Lorsque Saîil entendant les glorieux éloges que tosit le monde dohnoit à David : % Sàiii ^ en a défait inille, et David dis mille (0^ à a frappé (0 7. Âeg, xvxii. 7. 4^^ pom LA ciRCOKCisioir » le Philistin , et a ôté l'opprobre d'Israël » : aussi- tôt il s'écria tout troublé : x( Après cet éloge y dit-il ^ » il ne lui manque plus rien que le nom de roi (0 ». Gomme s^il eût dit : On me dépouille de ma royauté, puisqu'on m'ôte la gloire de garder mes peuples ; on transfère Tbonneur royal à David^ en reeonnois- sant que c'est lui qui sauve , et il ne lui en manque plus que le titre. Tant il est véritable, ô fidèles ^ que c'est le propre des rois de sauver. C'est pourquoi le prince Jésus , en venant au monde, considérant que les prophéties lui promettent l'empire de tout l'uni^ vers , il ne demande point à son Père une maison ri* ehe et magnifique^ ni des armées grandes et vic'^ torieuseSy ni enfin tout ce pompeux appareil dont la majesté royale est envircuinée. Ce n*est pas ce que |e deiQande , 6 mon Père. Je demande la qualité de Sauveur y et l'honneur de délivrer mçs sujets de la misère^ de la servitude , de la damnation éternelle^ Que je sauve seulement, et je serai roi. O aimable royauté du Sauveur des âmes ! Ces vérités étant supposées, venee maintenant adorer, mes Frères, l'auguste monarchie du Sau- veur des âmes ; et parce que mes sentimens sont trop bas pour vous exprimer une telle gloire, écoute^ de la bouche de saint A.ugustin ce qu'il en a. appris dans les Ecritures, ce Ne nous imaginons pas, dit ce » grand docteur , que ce soit un avantage pour le » Roi des anges d'être fait aussi le prince des hommes. 9 Le règne qu'il lui plaît établir sur nous, c'est là » paix , c'est la liberté, c'est la vie et le salut de ses D peuples. Il n*est pas roi , poursuit -il encore , nî (0 /. Reg, XYiii. 8. DE NOTRE SEIGNEUR» 49^ » pour exiger des tributs , ni pour lever de grandes ïk armées; mais il est roi, dit ce saint évéque y parce » qu'il gouverne les âmes , parce qu'il nous procure » les biens éternels , parce qu'il fait régner avec lut » ceux que la charité soumet à ses ordres ». Et enfin il conclut ainsi : « Le règne de notre prince, c'est » notre bonheur ; ce qu'il daigne régner sur nous y « c'est clémence, c'est miséricorde; ce ne lui est pas » un accroissement de puissance , mais un témoi- » gnage de sa bonté » : Dignatio est, ^on promotio; miserationis indicium^ nonpotestatis augmentum (0» Mais , fidèles, d'où savons-nous que tels sont les sentimens de notre monarque 7 Ecoutons l'Ecriture sainte ; écoutons , et que nos cœurs s'attendrissent ^ en contemplant la miséricorde infinie de Jésus notre souverain très-aimable. Je remarque dans son Evan- gile une chose très- considérable. C'est que jamais il n'a confessé qu'il fût roi que devant le tribunal de Pilate, et il le fait dans des circonstances qui sont dignes d'être observées;... (*) Qui ne vous loueroit , ô mon Prince ? qui n'ad- mireroit vos bontés ? Que le ciel et la terre chan- tent à jamais vos miséricordes. Que vos fidèles cé- lèbrent éternellement la magnificence de votre rè^ gne. Quel empire est mieux acquis que le vôtre ^ puisqu'on ne voit parmi vos sujets que des captifs que vous avez délivrés, des pauvres que vous avez enrichis , des misérables que vous rendez bienheu- reux, des esclaves que votre bonté a changés en rois? {}) Tract Li. inJoan. n. 4; tom, m, p€trt. ii, col, 635. (*) Voyez le sermon précédent , pa^. 44o* 494 POUR LA CIRCONCISION Mais I fidèles^ ce n ^st pas assez de contempler la gloirq çle notre Prince : elle est si grande et si ëcla** tante ^ qu elle n'a pas besoin d'être rdlevée par nos paroles; mais elle veut être hoi^or^e par nos actions. Faisons donc cette réflexion chrétienne sur les vé- rités que l'ai annonoées. Chaque monarchie a se» droits^ selon la. qualité des n^narques : ainsi nous devons régler nos devoirs sur le litre de notre prince. Or ie tous demande y mes Frères ^ que ne doivent pas des peuples sauvés à un roi Sauveur ? Considère, ô peuple sauvé ^ que si Vou t'asauv^^ tu étois perdu; et si l'on t'a sauvé tout entier^ tu Aois perd» tout entier ; et si tu étois^ perdu tout entier^ tu te doi» aussi tout entier à celui par qui tu subsistes. Et ce* pendant tu oublies Jésus ; ou les ài^irçs y ou les débauches ^ ou les vains empressemens de la terré t'enlèvent entièrement à lésus. Du moi»» âe seils-tK pas en ta conscience que tu crois faire beaucoup de te partager ? Jésus aura ce quart^^d'heure > etc. ; mai^ le cœur n'est à lui qu'à demi} et n'y étant qu'à de- mi, il n'y est piodut du tout. S'il y a quoique diose en nous dont Jésus ne soil pas. SauVeUr^ je veux, qu'il nous soit pensiiç de le Feserver4 Mlâs si notis voulcms avilir la cansolatkii 4e croke qWil a sie^uvé tout ce que nous souimes ^ pourquoi ne voulons-^nous pas avoil^ la }ustice de hiî donner aussi tout ce que nous soiâmes 7 Eh ! n^ voyons-nous pas qu'étant le Sauvèor^^ et ne vouku^t régner qu(è conîme Sauveur, nous ne lui donnons rien qu'afin qu'il le sauve ? Quelle est notre ingra^ titude et notre folie , si nous nous soulevons tous les jours contre ce roi de miséricorde , dont le règne DE VOTRE SEiaiTEUR. 49^ est notre salut ; si au lieu de nous joindre aux pieux enfans qui présentent des palmes à notre Sauveur^ ^ Vive , disoient-ils , le Fils de David ; béni soit le » roi d'Israël (»>», nous embrassons le parti rebelle des séditieux de la parabole , en nous écriant avec eux : « Nous ne voulons point qu'il régné sur » nous(^) >i ? Car oserions-nous dire qu'il règne sur jious y pofsqiic nous foulons aux pieds tant de fois' les saintes maximes de son Evangile ? Quelle illu- sion \ quelle moquerie ! Nous disons qu'il est notre roi , et àous méprisons ses^ commandemens. Nous nourrissons des inimitiés implacables , et nous nous disons les sujets du Roi pacifique. Nous brûlons de convoitises brutales , et nous voulons ^re à FEpoux des vierges. Notre ame est eniyrée des plaisirs du monde , et nous servons un roi couronné d'épines. Retournons , retournons , fidèles , à l'empire du roi Sauveur. Reftiser un prince qui sauve , c'est re- noncer ouvertement au salut. Imprimons bien avant en notre pensée que nous soHunes un peuple sauvé, afin qu'ayant toujours en notre mémoire les misères dont Jésus^brist nous a délivrés , nous apprenions que nous n'avons rien que par la miséri- corde du libérateur. Et puisque le prince qui nous a sauvés , non-seulement nous tire de la servitude , mais encore nous rend participans de sa royauté,* rougissons de retomber dans les fers, nous que Jésus- Christ a &it rois. Ne jetons pas aux pieds de Satan la couronne que Jésus a mise sur nos têtes. Puisque la bonté du Sauveur nous a non-seulement affran- chis, mais encore en quelque façon déjà couronnés, C*) âfatth. zxi. t5.— (*) Luc. xi«. i4» 49^ VOVK LA CIRCOKGIfilOZr concevons qu'il est indigne de nous de servir ce- divin Monarque dans la servilité de la crainte. Servons- le donc, fidèles y dans la liberté de la sainte dilec- tion (*) ; servons-le d'une affection libérale , puisqu'il ne demande que notre amour pour le prix de ses travaux et de ses conquêtes. Mais afin que vous compreniez ma pensée qui ne tend qu'à l'édification de vos ameS; il faut que )e déduise par ordre quel* ques propositions importantes. La première proposition, c'est que le Fils de Dieu surmontant le monde devoit principalement sur- monter les cœurs. C'est ce qui nous est prophétisé manifestement dans le psaume oii David parle de lui en ces termes : Sagittœ Potentis ^cutœ (0 : « Les » flèches du Puissant sont perçantes; les peuples » tomberont à ses pieds ; ses coups donnent tout » droit au cœur des ennemis de mon roi ». Par où. vous voyez, chrétiens, que le roi dont parle cette prophétie, c'est-à-dire sans difficulté le Sauveur des âmes, devoit principalement subjuguer les cœurs. Et la raison en est évidente. Car le Fils de Dieu est venu au monde pour dompter les peuples rebelles ^ qui s'étoient révoltés contre Dieu son père. Et quand je cherche la rébellion par laquelle nous nous sou- levons contre Dieu, je trouve mfailliblement qu'elle est dans le cœur. Ce ne sont pas nos bras ni nos C^) On trouve sur Tenveloppe du manuscrit original ces paroles écrites de la main de Bossuet, qui ont rapport à ce qu'U dit ici : « Agir en amis, en rois, non en esclaves, par la charité. C'est » elle.qui nous fait agir royalement m : JRegium mandatum, regalem legem. Jac. ii. 8. Edit, de Déforis» CO Ps, xuv. 7. i lûains DE nothe seigiîeur. 497 mains qui s'élèvent insolemment contre Dieu-, c est le cœur qui s'enfle au dedans, c'est lui qui mur- mure , c'est lui qui résiste : Dixil insipiens in corde suo : Non est Deus (0 : « L'insensé a dit en son « » cœur : Il n'y a point de Dieu »• L'insensé combat contre Dieu ; et voyant bien qu'il ne le peut détruira en effet, il tâche de le détruire du moins en son cœur« La rébellion est donc dans le cœur. Et c'est pour- quoi le même prophète qui a remarqué que c'est là que se nourrit là rébellion ^ nous apprend aussi que c'est là que portent les coups du victorieux : In corda inùnicorum régis. C'est ce qui fait dire à saint Au- gustin que les peuples que Jésus surmonte tombent dans le cœqr. Qu'est-^ce à dire, tomber dans le cceur? « C'est dans le cœur qu'ils s'élevoient contre lui ^ » c'est dans le cœur qu'il les abaisse et les fait tom- » ber » : Jii se erigebant adversiis Christum^ ibi caduntante Christum C^).. D'où passant plus outre, je dis en second lieu avec le même saint Augustin, que pour abattre ses ennemis dans le cœur, il falloit qu'il les remplit de son saint amour. C'est alors que les cœurs tombent devant lui^ saintement abaissés par la charité : Populi sub te codent^ nous dit le Psalmiste. De là vient que notre prophète arme les mains de son con- quérant de flèches aiguës, qui signifient les traits perçans par lesquels la charité pénètre les cœurs : Sagittœ Potentis actOas* Et c'est ici, chrétien, que tu dois apprendre que si Jésus ne te touche au cœur, si tu ne brûles pour lui par un saint amour, tu ne C») Ps, LU. I. — (») Enar. in Ps, ri.iy. n« i6, tom. iv, coL 389. BossuET. XI. 33 49B POUR LJL CIECONGISION pourras jamais être sa conquête. Cartu ne peux être sa conquête ^ jusqu'à ce que tu sois blessé par ses armes. Puis donc que les armes de notre prince sont des flèches qui percent les cœurs, tant que tu le sers seulement par crainte , tant que le cœur n'est point blessé par le saint amour , tu n'es point la conquête du Sauveur des âmes. Or pour blesser les cœurs par amour, pour les gagner, pour les conquérir, il &1- loit que mon Prince répandît du sang. Et c'est ce qui achève mon raisonnement, et nous découvre le secret de la prophétie ; c'est là que je découvre les charmes par lesquels Jésus subjugue les cœurs. De là vient que nous lisons dans son Evangile , que pendant le cours de sa vie il a toujours eu peu de sectateurs; jusque-là que ses amis rougissoient souvent de se voir rangés sous sa discipline. Mais après qu'il a répandu son sang, tous les peuples peu à peu tombent à ses pieds ^ jusques aux terres les plus inconnues , jusques aux nations les plus inhu- maines, que sa doctrine a civilisées. Rome, après s'être long-temps enivrée du sang de ses généreux combattans, Rome la maîtresse a baissé la tête , et a rendu plus d'honneur au tombeau d'un pauvre pêcheur, qu'aux temples de son Ron^ulus. Les em- pereurs même les plus triomphans sont venus au temps marqué par la Providence, rendre aussi leurs devoirs; ils ont élevé l'étendard de Jésus au-dessus des aigles romaines; ils ont donné la paix à l'Eglise par toute l'étendue de l'empire. Où êtes-vous maintenant, ô persécuteurs? Que sont devenus ces peuples farouches qui rugissoient comme des lions contre l'innocent troupeau de Jésus ? DK NOTKK SEIGNEUR. 499 ce Ils ne sont plus, dit saint Augustin; J^susles a » frappés dans le cœur : Jésus a défait ses ennemis ^ » et il en a fait des amis : les ennemis sont morts , )) ce sont des amis qui sont en leur place » : Ceci-* derunt; ex inimicis amicifacti sunt; inimici mortui sunt ^ amici vi\fimt (0. Le sang répandu par amour a changé la haine en amour. O victoire vi'Saiment glorieuse , qui se rend les cœurs tributaires ! 6 noble et magnifique conquête ! ô sang utilement répandu ! Mais finissons enfin ce discours par une dernière considération ^ par laquelle' Tapôtre nous fera com-- prendre combien nous sommes acquis au Sauveur des âmes par le sang qu'il a versé pour l'amour de nous. Nous ne sommes pas seulement au prince Jésus comme un peuple qu'il a gagné par amour , mais comme un peuple qu'il a acheté d'un prix infini. Et remarquez qu' « il ne nous a pas achetés y comme » dit saint Pierre (2) , ni par or , ni par argent , ni » par des richesses mortelles ». Car, étant maître de l'univers y tout cela ne lui coûtoit rien; mais parce qu'il nous vouloit beaucoup acheter , il a voulu qu'il lui en coûtât. Et afin que nous enten- dions jusqu'à quel point nous lui sommes chers , il a donné son sang d'un prix infini. Entrons profon- dément en cette pensée. Tout achat consiste en échange. Vous me don- nez, je vous donne y c'est un échange; et dans cet échange, fidèles, ce que je reçois remplit la place de ce que je donne. L'achat n'est point une perte. Je me dessaisis, mais je ne perds pas ; parce que ce que je reçois me tient lieu de ce que je donné. Gela (0 S, Aug, uU suprà, — W /. Petr. i, 18. SoO POUR LA CIRCONCISION est dans le commerce ordinairç. Qu a donné Jésus pour nous acheter? il a donné sa vie, sa chair et son sang. Donc nous lui tenons lieu de sa vie;. nous ne sommes pas moins à lui que son propre corps et que le sang qu'il a donné pour nous acheter; et c'est pourquoi nous sommes ses membres. Belle et admi-* rable manière d'acquérir les hommes! Âh! mes Frères , élevons nos cœurs ; travaillons à nous ren* dre dignes de l'honneur que nous avons d'être à lui par une sorte d'union si intime. N'ôtons pas à Jésus le prix de son sang. Songeons à ce que dit l'apôtre saint Paul : « Vous n'êtes pas à vous , nous dit-^il ; » car vous avez été payés d'un grand prix (0 ». Con* sacrons toute notre vie au Sauveur y puisqu'il l'a si bien achetée ; et comme il ne nous achète que pour nous sauver, parce qu'il ne nous possède que comme Sauveur , ne rompons pas un marché qui nous est si avantageux. Considère, ô peuple fidèle , que nous appartenons au Seigneur Jésus par le droit de notre naissance^ Etant donc à lui à si juste titre , puisqu'il nous paie encore , puisqu'il npus achète , comprenons que c'est notre amour qu'il veut acheter, parce que notre rébellion le lui a fait perdre. Qui ne vous aimeroit, ô Jésus? qui ne vous donneroit un amour que vous exigez avec tant de force , que vous attirez avec tant de grâce , et enfin que vous couronnez avec une telle libéralité? Aimons donc Jésus de toute notre ame, aimons fortement , aimons constamment ; et ayons toujours en notre pensée, que l'amour que nous lui rendons est un amour gagné par le sang. C'est pour- CO /. Cor. Yi. 19, 20» DE NOTRE SEIGNEUR. 5o I quoi résolTons-nous, chrétiens, à aimer Jésns-Ghmt parmi les souffrances. Cest aimer trop foiblement Jésus-Christ , que de ne souffrir rien pour Tamour de lui. Son amour paroît par son Bang ; il ne recon- noit point d^amour qui ne soit marqué de san^ tout comme le sien. Mais quel sang lui donnerons-nous ? Irons-nous chercher bien loin des persécuteurs qui répandent notre sang pour Tamour de lui ? non , fidèles , ce n'est pas là ma penséie. Il n'est pas nécessaire de passer les mers , ni de visiter les peuples barbares. Si nous aimons assez Jésus-Christ, la foi inventive et industrieuse nous fera trouver un martyre au milieu de la paix du christianisme. Quand il nous exerce par les souffrances, si nous l'endurons chrétienne- ment, notre patience tient lieu de martyre. S'il met la main dans notre sang et dans nos familles ^ en nous ôtant des parens et des proches que noud chérissons , et que bien loin de murmurer de ses or- dres, nous sachions lui en rendre grâce ; c'est notre sang que nous lui donnons. Si nous lui offrons avec patience Un cœur blessé et ensanglanté par la perte qu'il a faite de ce qu'il aimoit justement ; c'est notre sang que nous lui donnons. Et puisque nous voyons dans les saintes Lettres, que l'amour que nous avons des biens corruptibles, est appelé tant de fois la chair et le sang; lorsque nous retranchons cet amour^ qui ne peut être arraché que de vive force, de sorte que l'ame se sent comme déchirée par la violence qu'elle souffre, c'est du sang que nous donnons au Sauveur. Quelques philosophes enseignent que c'est la 5o2 FOUR LA CIRCONCISION même matière du sang qui fait les sueurs et les larmes. Je ne recherche pas curieusement si cette opinion est la véritable ; mais je sais que devant le Seigneur Jésus et les larmes et les sueurs tiennent lieu de sang. J'entends par les sueurs, chrétiens , les travaux que nous subissons pour Tamour de lui^ non avec une nonchalance molle et paresseuse^ mais avec un courage ferme et une noble conten- tion. Travaillons donc pour Famour de Dieu. Faut- il faire quelque établissement pour le bien des pau- vres 5 se présente-t-il quelqu'occasion d'avancer la gloire de Dieu , d'employer des soins charitables an salut des âmes ; faut-il résister généreusement aux entreprises de l'hérésie , afin qu'étant plus soumise elle devienne par conséquent plus docile , afin qu'é- tant plus humble elle devienne plus disposée à ren- dre les armes à la vérité : montrons de la vigueur et du zèle. Travaillons constamment pour l'amour de Dieu y et tenons pour chose assurée que les sueurs que répandra un si beau travail^ c'est du sang que nous donnons au Sauveur. Mais quel sang est plus agréable à Jésus que ce- lui de la pénitence ; ce sang que le regret de nos crimes tire si amoureusement du cœur par les yeux, c'est-à-dire le sang des larmes amères, qui est nommé par saint Augustin (0 le sang de notre ame ; ce sang que nous versons devant Dieu, lorsque repassant nos ans écoulés, dans l'amertume de notre cœur, nous pleurons sincèrement nos ingratitudes ? c'est ce sang que nous devons au Sauveur. Présentons-le- lui devant ses autels, mélons-le dans le sang de son (0 Serm. cccu. n, 7 , tom, y, coL i356. BE NOTRE 8EI&NEVR* So3 sacrifice; portons-le à ces tribunaux de miséricorde , que rinfinie bonté du Sauveur érige dans les égli« ses, pour purger nos fautes. Mais, fidèle , si c'est un sang que tu aies consacré au Seigneur Jésus, prends garde de ne Tôter point de ses mains. Tu lui ôteâ les larmes que tu lui as données, lorsque tu re^ tournes au péché que tu as déjà pleuré plusieurs fois; car alors tu improuves tes premières larmes, tu condamnes tes déplaisirs, tu te repens de ta pé- nitence. Âh ! Jésus n'improuve pas ce qu'il a fait une fois pour toi : au contraire il le perpétue tous les jours en quelque façon sur ses saints autels.... Serment de fidélité au roi Jésus prêté au baptême : renouvelons^le devant Dieu (*). i*) Voyez le sermon précédent, pti^» 4^i. Vf So4 POTJR LA CmCONCISIDN III." SERMON PQUR LA FÊTE DE LA CIRCONCISION DE NOTRE SEIGNEUR, PRÊCHÉ LE PREMIER JOUR DE l'aw 1687 W. Malice du péché, ses effets. Etendue de nos maladies : trois grâces du Sauveur pour nous en délivrer : dispositioiis pour y ré- pondre. Moyens d'assurer notre guérison. Vocabîs nomen ejus Jesum : ipse enîm salvum faciet po- ' pulum suum à peccatis eorum. J^ous lui donnerez te nom de Jésus, c^est-^à-dire Scaiveur; parce que c^est lui qui sauvem son peuple de ses pé^ chés. Matth. i. 21. iSi nous avions conservé les sentimens que Dieu avoit mis d'abord dans notre nature , il ne faudroit aucun effort pour nous faire entendre que le péché est le plus grand de tous les maux ; et sans le secours des prédicateurs y notre canscience nous en diroit plus que tous leurs discours. Ce qui nous trompe y mes Frères/ ce qui fait que nous avons peine à (o) A Parisy dans Téglise de Saint-Louis des Jésuites. « DE NOTRE SEIGNEUR. So5 donner au péché le nom de mal ; c est à cause qu'il est volontaire. Mais en cela notre erreur est visible , puisqu'au contraire c'est de notre faute , qui est vo- Untaire, que Ja peine, qui ne Test pas, prend sa naissance : c'est pour venger le consentement que nous avons donné de nous-mémès à notre perte et à notre honte , que la mortalité, que les maladies , que l'enfer même et tous ses supplices viennent en foule nous accabler malgré nous. Et quiconque sera le Sauveur des hommes , il doit uniquement s'atta- cher à ce principe volontaire et universel de tous nos maux. C'est pourquoi Dieu nous avertit , que si aujourd'hui parmi les douleurs de la circoncision , il donne à son Fils le nom de Sauveur , et relève par un si grand nom son humiliation; c'est à cause qu'il doit sauver son peuple fidèle de ce grand mal du péché. D'autres ont porté ce beau nom pour avoir délivré le peuple ou d'une longue captivité, ou des périls de la guerre , ou des horreurs de la famine. Toute langue doit confesser que celui-ci est un Sau- veur à meilleur titre ; puisqu'il ne vient pas nous sauver , comme les autres , des peines ou de quel- ques suites du péché : il vient nous sauver du pé- ché même : et attaquant le mal jusque dans sa source, il est le véritable Libérateur et le Sauveur par excellence. C'est, mes Frères, en peu de paroles l'explication de mon texte , et c'est par-là que le nom sacré de Jésus est au - dessus de tout nom. Je pourrois vous faire voir avec saint Paul qu' « à ce » nom tout genou fléchit dans le ciel , dans la terre »^et dans les enfers (0 », et par ce moyen remplir («) PhiUp. II. 10. .5o6 PQUU LA CIRCONCISION VOS esprits d'admiration et d'etonnement pour un nom si auguste et si magnifique. Mais j'aime mieux vous faire voir, par le propre sens de mon texte, qu à ce nom le ciel et la terre sont remplis de joie, d'es- pérance , d'actions de grâces ; et que tout cœur doit être enflammé d'un saint amour : c'est à quoi je con-* sacre tout ce discours. Et comme j'apprends de saint Paul , que « nul ne peut même nommer le Seigneur 3» Jésus, que par la grâce du Saint-Esprit (0 »; je Ja demande humblement par l'intercession de la bienheureuse Vierge, j^i^e. La rémission des péchés , le propre ouvrage du Sauveur, et la grâce particulière de la nouvelle al- liance, se commence dans le baptême, se continue dans toute la vie et s'achève dans le ciel. C'est ce que saint Augustin nous explique par une excellente doc- trine , en interprétant cette parole de saint Jean- Baptiste : c( Yoilà l'agneau de Dieu ; voici celui qui » ôte les péchés du monde (^) » . Les paroles de saint Augustin sont trop belles et trop précises pour n'ê- tre pas rapportées au commencement de ce discours, puisqu'aussi bien elles en sont tout le fondement : Tollit auterrij et dimittendo guœ facta sunt... etad- juuando ne fiante et perducendo advitam ubifieri omnino non possint (3). o Jésus-Christ ôte le péché ,^ -» et parce qu'il nous le pardonne, lorsque nous y 3» sommes tombés » : et dimittendo quœfactasunt : « et parce qu'il nous aide à n'y tomber plus » : et iidjui^ando ne fiant : a et parce qu'il nous conduit à (0 /. Cor, XII. 3. — (») Joan, i. 29. — \?) Op* imperf. «ont, Jt^h iib, II y n. 84» 20771. Xy coL 986. DE NOTRE SEIGNEUR. 5o7 u la vie bienheureuse y où nous ne pouvons plus y » tomber jamais » : Et perducendo dd vitam ubi fieri omnino non possint. 'Ainsi le règne du péchë est entièrement détruit, et la grâce de notre Sauveur remporte sur cet ennemi une pleine victoire. Et afin de la mieux entendre , [considérez, ] mes Frères, [que] quand nous nous livrons au péché, il a sa tache qui nous déshonore , et qui entraîne après elle la mort éternelle : et lors- que le péché est effacé dans les âmes par la grâce du saint baptême, ou par celle de la pénitence, il y laisse encore ses appas trompeurs et ses attraits qui nous tentent : et dans la plus grande vigueur de la résistance, si nous vivons sans péché, du moins sans ces péchés qui donnent la mort , nous ne vivons pas sans périls; puisque nous avons toujours en nous- mêmes cette liberté malheureuse et cette déplorable facilité de succomber à un mal si dangereux. Pour être notre Sauveur, et remplir toute l'étendue d'un titre si glorieux , il faut que le Fils de Dieu nous délivre de ces trois maux : il ôte le mal du péché, par la grâce qui nous le pardonne : il en réprime l'attrait , par la grâce qui nous soutient durant tout le cours de la vie : enfin il en arrache jusqu'à la ra- cine, et en ôte tout le péril, par la grâce qui nous couronne et nous récompense. Tel est l'ouvrage du Sauveur. Ah ! mes Frères , faisons le nôtre : à ces trois grâces, qu'il nous donne, doivent répondre de notre côté trois dispositions ; retenez-les, chrétiens. Et si vous voulez jouir du salut qui vous est offert en Jésus-Christ, reconnoissez avant toutes choses avec amour et action de grâce, le pardon qui vous 5o8 FOUR LA CIRCONCISION a été accordé; combattez , sans vous relâcher jamais y Fattrait pernicieux qui vous porte au mal ; et aspi- rez de tout votre cœur à Tétat heureux où vous n'au- rez plus à craindre le poids intérieur d'aucune foi- blesse. Voilà toute la vie chrétienne, qui répond au nom adorable de Jésus-Christ« Et , mes Frères , je serai heureux si je puis vous imprimer dans le cœur ces trois vérités.. PREMIER POINT. Pour comprendre parfaitement ce que vous devez au Sauveur , comprenez avant toutes choses ce que c'est que le péché dont il vous délivre. Je ne veux pas ici j chrétiens, que vous regardiez dans le péché, ni la Ibiblesse qui le produit , ni la honte qui l'environne ^ ni le supplice affreux qui le suit de près : non, non ^ pour le détester , je ne veux que vous attendiez , ni la sentence du juge, ni la sanglante exécution de ce dernier jugement, ni le soulèvement universel des créatures unies pour venger l'outrage de leur Créateur, ni l'ardeur d'un feu dévorant , ou comme l'appelle saint Paul , son émulation, ignis œmuUitio ( ^) , et cette force toujours renaissante qui s'irrite de plus en plus contre les méchans. Ce n'est point tout cela que je veux que vous remarquiez : ce que je voudrois vous faire entendre, c'est ce qui mérite tout cela; ce qui par conséquent est plus funeste^ plus mauvais et plus digne de notre haine ; c'est-à-dire , le dérègle- ment, l'iniquité , la laideur , la malice même du péché. Et d'où vient cette laideur et cette malice qui le rend si digne d'exécration? il est aisé de l'entendre. (0 Héb. X. 37. DE irOTRE SEIGNEUR. 5o9 Cest que rhomme est soumis par sa nature, et il doit être soumis par son choix à la volonté divine et à la raison éternelle qui en dirige la conduite ; il s*y doit unir de tout son cœur : car c'est ce qui le fait juste y ce qui le fait droit , ce qui le fait ver-* tueux. Quand il pèche , il s'en détache : il préfère sa volonté à celle de Dieu ; la volonté dépendante et subordonnée à la volonté souveraine ; la volonté errante et défectueuse à la volonté toujours droite, qui est sa règle elle-même ; la volonté particulière , et qui se borne aussi à contenter un particulier, c'est-à-dire soi-même, à la volonté première et uni- verselle , par laquelle tout subsiste ; où tout ce qui est, tout ce qui vit, tout ce qui entend, trouve son ordre, sa consistance, son repos. Il n'y a rien de plus indigne ni de plus inique, et il n'est pas pos« sible de pousser plus loin, ni la rébellion contre Dieu , ni , ce qui en est une suite , la haine contre soi-même. Voilà sans doute de tous les maux le plus perni-* cieux , la rébellion contre Dieu : « Contre qui vous » êtes-vous soulevés? contre qui élevez-vous vos re- » gards superbes? contre le saint d'Israël (0 ». La haine contre soi-même : « Celui qui aime l'iniquité » est ennemi de son ame W ». Oui, chrétiens, tout pécheur est ennemi de son ame, corrupteur dans sa conscience de son plus grand bien , qui est l'inno- cence. Nul ne pèche qu'il ne s'outrage lui-même : nul n'attente à l'intégrité d autrui , que par la perte de la sienne : nul ne se venge de son ennemi, qu'il ne porte le premier coup et le plus mortel dans son (0 ir. lUg. XIX. 22. — C«) Ps. X. 6. 5lO POUK LA CIRCONCISION propre sein : et la haine , ce venin mortel de là vie humaine ) commence sa funeste opération dans le cœur où elle est conçue , puisqu'elle y éteint la cha- rité et la grâce. Parjure, qui voulois rendre le ciel complice de ta perfidie ; ce dépôt de la bonne foi que Dieu avoit confié à ta garde ^ mais que tu te ravis à toi-même y combien valoit-il mieux que celui que tu refuses de reconnoitre ? Ainsi le péché est le plus grand et le plus extrême de tous les maux : plus grand sans comparaison que tous les maux qui nous menacent par le dehors ; parce que c'est le dérèglement et l'entière déprava- tion du dedans : plus grand et plus dangereux que les maladies du corps les plus pestilentielles ; parce que c'est un venin fatal à la vie de l'ame : plus grand que la perte de la raison ; parce que c'est la perte de la probité et de la vertu ; et qu'après tout, c'est perdre plus que la raison, que d'en -perdre le boa usage ; sans quoi la raison même n'est plus qu'une extravagance et un égarement criminel : Mal intime qui efiace en nous, et qui y déracine tout ce qui nous unit à Dieu; et qui, faisant entrer la malice jusque dans le fond de notre ame, l'ouvre aussi de toutes parts à la vengeance. Par conséquent, pour conclure, mal par-dessus tous les maux; malheur excédant tous les malheurs ; parce que nous y trou- vons tout ensemble et un malheur et un crime ; malheur qui nous accable, mais crime qui nous déshonore; malheur qui nous ôte toute espérance^ mais crime qui nous ôte toute excuse; malheur 'qui nous fait tout perdre, mais crime qui nous rend cou- pables de notre perte , à qui même ne reste pas le DE NOTRE SEIGNEUR. 5ll triste droit de se plaindre, et dont la honte est plus grande que les infortunes , digne à la fois d'une haine et d'un mépris éternel. C'en est assez y c'en est assez : je ne puis plus seu- - lement souffrir le nom de péché. Accablé que- je suis d'un si grand mal , si je ne trouve un Sauveur, je ne vis plus. Car, ô Dieu ! sans ce Sauveur miséri-? cordieux , ô Dieu ! où trouverai-je un remède contre le mal qui me presse? où trpuverai-je un remède contre les désordres ou un asile contre les frayeurs de ma conscience, tristes avant-coureurs des rigueurs inexorables de votre justice ? quel recours cherche- rai-je? Non,^ mes Frères, il n'y a plus que le Sau- veur qui nous puisse donner le moyen de respirer un moment. Ne dites pas avec les impies, dont il est parlé dans le prophète : « Le Seigneur ne nous fera » ni bien ni mal » : Non faciet kene Dominus , et nonfaciet malh (0. Car aussi quel mal lui pouvons^ nous faire , potir attirer ses vengeances ? Occupé autour des cieux , dont il roule continuellement la grande machine, nos injures ne vont pas jusqu'à lui; nos péchés, dont on dit qu'il est offensé, ne pénètrent pas jusqu'à lui : c'est ainsi que parle l'im- pie, et il se rassure sur son. impuissance. Ignorant , qui ne voit pas au contraire que quiconque est le vengeur des injustices , doit par sa propre grandeur être au-dessus de ses attaques. C'est à cause que la règle est inaltérable, que le tort et l'injustice se bri* sent contre elle. C'est à cause que la vérité est in- vincible, que le mensonge et l'erreur sont confon- dus en sa présence. Le châtiment doit partir d'une {}) Soph. I. la. 5l2, POU& I.À GIUGOSrCISION main inaccessible aux injures : autrement plus occu-* pée à se défendre des crimes , qu à les punir , elle laissera triompher Tiniquité. A Dieu ne plaise ! sous un Dieu si saint ^ si nos péchés pouvoient nuire à son règne , si nous pouvions afToiblir sa puissance par nos rebellions, ou blessex^^sa dignité par nos outrages, il seroit un vengeur troj^peu redoutable. Mais parce que son trône est }iors d'atteinte, que la justice Tenvironne, que son jugement procède tou~ jours en puissance et en vérité; malheur, malheur encore une fois, et malheur jusqu'à Tinfini, à qui- conque pèche sous ses yeux. . Et cette vérité est si importante , qu'il falloit qu'elle parût dans le Sauveur même j c'est pour cela que Dieu fait paroitre un Sauveur chargé de nos crimes sur la croix. Qu'étoit-ce en effet que le Sau- veur? qu'étoit-ce que ce Verbe incarné, mes Frères ? qu'étoit-ce autre chose ^ si ce n'est la vérité même manifestée dans la chair? Ainsi toute vérité y devoit être manifestée, et autant la vérité des rigueurs de Dieu que celle de ses miséricordes. Dieu donc « a mis » sur le Sauveur l'iniquité de nous tous (0 » , comme disoit le prophète ; et en même temps pour concilier toutes choses , et de peur qu'au milieu des miséri- cordes les rigueurs ne fussent oubliées , il a fait du médiateur de sa grâce un exemple de sa justice. Jésus-Christ a subi ce joug pour l'amour de nous. Dès le commencement de sa vie il a reçu la circon- cision , c'est-à-dire le sacrement des pécheurs et la marque de leur servitude. Quand il commencera son ministère , quand , sorti de sa retraite profonde, (0 Isai. Lin. 6. il DE NOTRE SEiaiTEUR* Sl3 il commencera l'ouvrage pour lequel il est envoyé, il recevra encore ui^ autre sacrement des pécheurs dans le baptême. Quoi ! Jésus être baptisé ! Jésus , Knnocence même , être mis au rang des pénitens ! Saint Jean à qui il s'adresse en est troublé lui-même : «c Seigneur^ que je vous baptise ! Laissez-moi ^ ré« » pond le Sauveur : c'est ainsi que nous devons ac- » complir toute justice (0 ». Et prêt à porter la peine de tous les pécheurs, il est juste que j'en prenne la, ressemblance. « Dieu a donc mis sur lui , dit le pro-* » phète^ l'iniquité de nous tous (?) ». Il a subi ce |oug volontairement. Le voilà donc en quelque fa- çon le plus grand de tous les pécheurs , puisqu'il le& représente tous dans sa personne : et voilà en même temps y je ne m'étonne point, la vengeance qui le poursuit, à sa naissance, à sa mort, dans tout le cours de sa vie. Il y auroit succombé , s'il n'eût été Dieu, Quel est, mes Frères, ce nouveau prodige! Le paganisme a bien pu comprendre qu'il faut être Dieu pour exercer la justice dans' toute son éten- due ; et on en vit quelque idée dans le platonisme. Mais qu'il fallût être Dieu pour la souffrir, c'est le mystère du christianisme, mais mystère très -mani- feste aux yeux épurés : car le poids de la vengeance divine sur le pécheur est si grand, que s'il faut une puissance infinie pour l'envoyer il n'en faut pas une moindre pour le soutenir. Que Jésus-Christ prenne seulement la forme d'esclave et la ressemblance du péché, que Jésus -Christ ne soit que pécheur, en- (0 MaUfu III. i4, i5.— (^) Isai. un. 6. BOSSVET. XI. 34 5l4 POUR LA CIRCOWCISiaïf tendez toujours , par la représentation de tous les pécheurs , et la charge qu'il s'est imposée de porter la peine de touâ les crimes : sa croix l'accablera de son poids ; il demeurera enseveli dans les ombres de la mort ; et les prisons de l'enfer où il a fallu qu'il descendit y le tiendront éternellement captif. Mais parce que ce pécheur par représentation est en effet un Dieu tout^puissant , c'est pour cela y comme dit David, qu'il a été « libre entre les morts (0 », et supérieur non-seulement à la peine du péché, mais au péché même : il est devenu par son sang la pro* pitiation de tous les péchés , et le Sauveur de tou^ les hommes. Accourez donc, ô pécheurs, quels que vous soyez : soit que votre or soit votre force, ou que vous met* ' tiez votre force et Yotre confiance dans vos déguise^^ mens; que vpûs vouâ soyez fait k vous^-méme une fausse divinité dans une créature aussi «malheureuse et aussi aveugle que vous : soit que. votre flamme naissante vous lais;àe encore la liberté de vous recon- noître , ou que votre joug se soit appesanti, et qu'en- durci dans le mal , vous sembliez avoir fait avec le -péché une alliance éternelle. Par la grâce de Jésu&- Chri£t qui vous appelle , « votre pacte avec l'enfer 9 sera rompu , et le traité que vous avez fait avec la 9 mort ne tiendra pas W ». Vous recevrez gratuite* ment la rémission de vos péchés par Les mérites da Sauveur ; et vous entendi^ez die sa bouche : « Allez » en paix (3) ». Ecoutez seulement, pécheurs, la douce loi qu'il vous impose; c'est qu'attendris par tant de bontés , vous lui donniez votre cœur. Vous (0 Ps, LxzxYix. 4« — (") ^sai. xxyiii. i8. — (3) Luc, vu. 5o. DE UrOTRE SEIGNEUR. 5l5 lui devez donc votre amour, quand il vous donne la grâce : vous en devez davantage , quand il Ta don^ née : et si yous voulez sa^voir la mesure de Tamour qu'il attend de vous, connoissez-la par vos crimes. . « Un créancier avoit deux débiteurs : Tunlui de- y> voit cinq cents deniers , et l'autre en devoit cin* 3> quante. Comme ils n'avoient pas de quoi le payer^ » il leur remit à tous deux la dette entière. Lequel » des deux l'aime le plus » ? Vous reconnoissez , chrétiens, Ja parabole de l'Evangile (0 : c'est ce que demande Jésus au Pharisien , vous le savez. Et que répond le Pharisien; c'est*à-dire, que répond la du- reté même et la sécheresse même? Ne répondez pas^ mes Frères, plus durement que lui. Lequel des deux aime le plus? sans doute que c'est celui à qui on re- paet davantage ? Lei Pharisieu répond ainsi^. et sa ré- ponse mérite l'approbation du Sauveur. Et vous^ mes Frères, qu^^répondrez-vous? votre cœur insen- sible ne dira-t-il rien à v.otreiibérateur? Et si, se- lon son. oracle^ celui à qui on remet le plus^aimis davantage;. après tant de péchés remis, après tant de grâces reçues, où Êroaverez-Tons as&ez d'amour pour les jrecoimoitre ? Mais si vous n'en avez pas i si votre amour loin de s'enflammer, ne fhit que lan« guir et ya s'éteindre ; si la grâce de la pénitence tant et tanit.de fois méprisée, pour .tout finit n'a. produit dans votre cœur ingrat qu'une confiance insensée , ^t dans des rechutes continuedles une insensibiliié étonnante; n'entendez-VQUS pas déjà votre sentence 7 Si Jésus ne voit rien en .vous de ce qui doit suivre comme naturellement la rémission des péchés, et (0 Luc. VII. 4i 5 etstUf'» . . 5i6 POUR LA cmcoNcrsioN qu'il n'aperçoive dans vos œuvres aucune étincelle d'amour; insensibles^ ne craignez- vous pas qu'il ne vous ait rien remis? Non, vous n'étiez pas disposés à recevoir une telle grâce. Ainsi votre pénitence n'é- toit qu'une illusion. Je puis vous dire avec saint Paul : ce Vous êtes encore dans vos péchés (0 » ; c'est-à-dire, vous êtes encore dans la perdition et dans la mort. Que votre état est funeste ! Mais quand vous aurez reçu la rémission de vos péchés , si le mé- decin qui vous a guéris ne vous continue son secours ^ la rechute est inévitable. Car il est ce^Sauveur misé- ricordieuxy qui non-seulement entre quand on lui ouvre, mais encore qui frappe pour se faire ouvrir (^). SECOND POINT. C'est ici qu'il nous faut entendre les foibl esses ^ les blessures, la captivité de notre nature vaincue par le péché' : et au dedans et au dehors tout con-^ court à établir son empire. Et premièrement au de* hoi^ , enivrés dé notre bonne fortune , envieux dà celle des autres, insensibles à leurs malheurs , trou- blés et abattus par nos moindres pertes , nous ne gardons ni envers nous-mêmes, ni envers nos frères j^ le juste milieu : tout ce qui parott au dehors nous est une occasion de scandale. Et au dedans, quelles ténèbres ! quelle ignorance ! Les biens véritables sont les moins connus ; on ne peut nous les faire entendre. Et pour ce qui est de nos connoissances^ ou la passioii les obscurcit, ou l'inconsidération lés rend inutiles ; témoins tant de savans déréglés : oik la curiosité les rend dangereuses; témoins tant d'î&i'^ (0 /. Con XV. 17. — W j^poc. m. 20. I DE NOTRE SEIGNEUR. 5l7 pietés et tant d'hérésies. Dans toutes les rencontres de la vie, la raison nous conseille mieux, les sens nous pressent davantage; c'est pourquoi le bien nous plaît, mais cependant le mal prévaut; la beauté de la vertu nous attire , mais les passions nous empor- tent : et pendant que celle-là combat foiblement, celles-ci remportent une trop facile victoire , éta- blissent leur tyrannie , et se font un règne paisible. Tout ce qu'il y a de meilleur en nous se tourne en excès, le courage en fierté, l'activité en empresse- ment, la circonspection en incertitude. Que de- viendrai-je ? où me tournerai-je ? homme misérable ! que ferai-je de ma volonté toujours afToiblie par la contrariété de ses désirs ? Ou la paresse l'engourdit j^ ou la témérité la précipite , ou l'irrésolution la sus* pend , ou l'opiniâtreté la tient engagée et ne lui permet plus de rien entendre. Tantôt le péril l'é- tonne, tantôt la sûreté la relâche, tantôt la pré- somption l'égaré. O pauvre cœur humain ! de com^ bien d'erreurs es-tu la proie? de combien de vanités es-tu le jouet ? de combien de passions es-tu le théâ- tre ? Etrange misère de l'homme, que ses ignorances aveuglent, que ses lumières confondent; « à qui sa » propre sagesse est un lacet, et sa vertu même un » écueil contre lequel ses forces se brisent » , parce que son humilité y succombe ! Cui sua fit laçueus sapienlia, cm sua virtus est scopulus (>). Dans cette foible^e déplorable, mes Frères, je me sens pressé de vous exciter à rendre au Sauveur vos reconnoissances, non tant pour les péchés qu'il vous a remis , que pour ceux dont sa grâce vous a préser- CO S, Prosper, Cavm, de In gratis. 5l8 POUR LA CIRCONCISION vés. C'est un beau sentiment de saint Augustin ^ dans le livre de la sainte Virginité (0. Omniapeccata sic habenda tanquam dimitlantur ^ à çuibus Deus custodit ne committantur : « Vous devez croire , dit » saint Augustin , qu il vous a remis tous les péchés j> où sa grâce vous a empêché de tomber »; parce que nous les portons tous , pour ainsi parler, dans le fonds de corruption que nous avons dans le sein. Non, mes Fières , il n'y a erreur si extravagante, ni passion si désordonnée, dont nous n'ayons en nous le principe : que Dieu seulement laisse aller la main pour ûous livrer à nous-mêmes , comme dit saint Paul (2), qu'il lève tant soit peu la digue, notre ame §era inondée de toutes sortes de péchés. Et ne me dites pas qu'il y a des crimes pour lesquels vous vous sen- tez tant de répugnance, que vous les pouvez ^viter sans ce secours : car quipourroit ici vous représenter l'enchaînement de nos passions; et comment ces pas^ sions que vous chérissez introduisent l'une après l'autre , pour ainsi parler, leurs compagnes qui vous font horreur? Combien éloigné de l'idolâtrie devoit être le sage Salomou, à qui Dieu s'étoit fait con- noître par des apparitions si manifestes? ses aveugles amours l'y précipitent. Quoi de plus opposé à la clémence et au cœur magnanime de David , que de répandre le sang innocent d'un de ses plus fidèles serviteurs, d'un Urie qui ne respiroit que son service? un regard jeté mal à propos , et trop doucement arrêté, l'a engagé peu à peu contre son humeur à une action si noire et si sanguinaire. Combien étoit ennemi de l'incontinence Lot , qui s'étoit con- (0 N, 42 5 tom. VJ, col 362. — (a) Rom, 1. 24. 8 11 it i fi Ih lî |y t i ï k I DE KOT RE SEIGNEUR. Big serve sans tache avec sa famille parmi les abomina- tions de ces villes qu'on n'ose nommer? on sait où le vin l'emporta. Nabuchocjonosor n'étoit que su- perbe : son orgueil méprisé ie fait devenir cruel. Qu'avoit besoin Balthasar^ dans ses banquets disso- lus , des vaisseaux du temple de Jérusalem ? n'y âvoit-il pas assez d'autres coupes d*or dans Baby- lone enrichie de la dépouille de tant de rois ? Qu'on les apporte néanmoins ; précipitez vos pas , troupe d'esclaves. Enivrons-nous, dit- il k ses femmes et à ses maîtresses, enivrons -nous dans ces coupes sa- crées d'où l'on a fait tant d'effusions au Dieu deià Juifs. C'est ainsi que son intempérance le pousse jusqu'à la profanation et au sacrilège. Tant il est vrai que la lumière de Dieu étant une fois éteinte, le principe de la droiture entamé, et la conscience affoiblie , tous les crimes l'un après l'autre se natu- ralisent , pour ainsi parler, dans notre cœur, et nous tombons d'excès en excès. En effet l'auriez -vous cru, je vous le demande, l'auriez-Vous cru, si on vous l'eût dit dans votre jeu- nesse, que vous eussiez dû vous durcir le^front jus- qu'à mépriser tous les bruits et tous les reproches du monde? Et vous, l'eussiez -vous pensé que vos lèvres accoutumées, je ne sais comment, à ce plai- sir qu'on ne connoît pas, de mentir toujours, à la lin dussent proférer gratuitement autant de men- songes, ou même autant de parjures que de paroles ? Vous êtes tombés par degrés dans cet abîme ; et pour vous faire descendre dans ces profondeurs , dont vous aviez tant d'horreur, il n'a fallu que vous y conduire par une pente plus douce et plus insen- SâO POUR LA. CIRCOKGISION sible. Ainsi y ôdivia Sauveur! je bornerois trop ma r^connoissance envers vous, si je la renfermois seu- lement dans les crimes que vous m'avez pardonnes. Hélas ! « ils se sont multipliés par- dessus les che-^ » veux de ma tête y et mon cœur m'abandonne quand » j'y pense (0 »« Enfin le nombre en est infini; et je vois parottre à mes yeux une suite qui n*a point de fin y de péchés connus et inconnus. Si mes mains en sont innocentes , je le dois à la bonté du Sauveur. ( O grâce ) ! Apprenons donc à connoitre la société des péchés y et dans un seul que nous commettons » concevons l'infinité toute entière de notre malice. ,Un respect humain vous empêche de faire une bonne action. Pendant qu'on se déchatne contre les dévots y vous rougissez de la profession de la piété véritable. C'est par un semblable commencement, que durant la persécution tant d'ames infirmes firent naufrage dans la foi , et que l'Eglise pleura leur, apostasie. Si bientôt vous ne corrigez l'indifTérencô inhumaine que vous avez pour les malheureux et pour les pauvres , vous viendrez , plein de vous- même et de vos plaisirs ^ à Tinsensibilité du mauvais riche. Qu'on pousse à bout cette vanité qui exige tant de complaisances , ou cet intérêt qui vous fait faire un faux pas dans le chemin de la bonne foi et de la justice; on verra naître d'un côté ces monstres d'orgueil qu'on ne pourra plus supporter , et de l'autre les trahisons et les perfidies signalées. Regar- dez donc dans ce premier pas où la main du Sau* veur vous a soutenu , toute l'horreur de la chute. Ce que nous ne craignons pas de notre malice^ crai- (OPf.zuis. i3. DE W-OTIIE SEIGMBUR. 521 ,gnpns-le de notre foiblesse : ou plutôt craignons tout de notre malice et de notre foiblesse tout ensemble ; parce que, de l'un à l'autre, notre malice nous porte à tout , et que notre foiblesse sans défense et découverte de tous côtés, hélas! ne résiste à rien. Soyons donc toujours en garde contre nous-mêmes : nous avons à entretenir un édifice branlant ; pour en soutenir la structure, qui se dément de toutes parts , il faut éjtre toujours vigilant, toujours atten- tif et en action . étayer d'un côté , réparer de l'au- tre, affermir le fondement, appuyer cette muraille caduque qui enti'aînera tout le bâtiment,' recouvrir le comble ; c'est par-là que la foiblesse succombe , c'est par4à que les pluies pénètrent. Jusqu'à ce que nous connoissions toutes ces infir- mités, nous ne connoitrons pas assez le Sauveur. Que ce nom me donne de confusion ! mais que ce nom me donne de joie et de confiance ! Qu'il me donne de confusion ! car combien me dois-je tenir pour perdu, puisque j'ai besoin d'un Sauveur à cha- que moment ! Mais combien aussi d'autre part me dois-je , pour ainsi dire, tenir pour sauvé, puisque )'ai un Sauveur si puissant et si secourable, un Sau- veur qui ne se refuse à personne, « dont le nom est » un parfum répandu (0 », et dont les grâces s'éten- dent sur tous les pécheurs, c'est-à-dire, sur tous les hommes; qui ouvre ses bras à tous, à tous ses plaies, à tous ses grâces! De quelque tempérament, de quelque âge , de quelque condition que vous soyez, ne craignez pas de venir à lui, qui non-seu- lement entre quand on lui ouvre , mais qui de lui- (0 CanL I. a. 5a« POUR LA CIRCONCISIOW même frappe toujours pour se faire ouvrir (0. Cette pécheresse a trouvé à ses pieds un plus digne objet de ses tendresses, un meilleur emploi de ses par- fums, un plus bel usage de ses longs cheveux (a). Les pécheurs grossiers y ont épuré leurs pensées : les publicains s'y sont enrichis du vrai trésor : un saint Paul a puisé dans sa croix une science plus émi- nente que celle qu'il avoit acquise aux pieds de Ga- nialiel (3) : la contemplation et Faction y goûtent d'égales délices : enfin il a des consolations pour tous les maux, des attraits pour toutes les complexions^ des soutiens pour toutes les infirmités. «c Âh! je me glorifierai au Seigneur mon Dieu^ et » je me réjouirai en Dieu mon Sauveur » : In Deo sahitari meo (4}. « Mon ame , bénis le Seigneur , et » que tout ce qui est en moi célèbre son saint nom : » mon ame, encore une fois, bénis le Seigneur, et » ne laisse échapper à ton souvenir aucune de ses » bontés. C'est lui qui a pardonné tous tes péchés : » c'est lui qui soutient toutes tes foiblesses (^) »• Mais, pour comble de félicité, c'est lui qui te déli- vrera de tous tes périls, et qui t'élevant à une si haute et si parfaite liberté , fera que tu ne pourras çlus servir au péché. C'est donc ici , chrétiens , la dernière gi^âce , le prix , la perfection et le comble de toutes les autres. C'est ce sabbat éternel , c'est ce parfait repos qui nous est promis, où notre fidélité ne sera pas moins assurée que celle de Dieu ; parce qu'alors il fixera nos désirs errans par la pleine communication du (0 Apoc. III. 2o. — W Luc, vu. — ' (3) Act, XXII. 3. — (4) Luc. i. 46, 47. — v5) Ps. eu. DE VOTRE SEIGNEUR. 523 bien vA'itable. Encore un mot, chrétiens , sur cette dernière grâce. TROISIÈME POINT. Cette dernière grâce sera donnée au fidèle par notre Sauveur, lorsqu^après la fin de cette vie il lui adressera ces paroles : « Courage, bon serviteur^ » parce que vous avez été fidèle dans les petites chor » ses , les grandes vous seront données : entrez dans » la joie de votre Seigneur (0 ». Entendez-vous^ chrétiens, la force de cette parole : Entrez dans la joie de votre Seigneur? Entendez-vous cettcjoie su- blime , divine , incompréhensible , qui n'entre pas dans votre cœur comme dans un vaisseau plus vaste qu'elle; mais qui, plus grande que votre cœur, dit saint Augustin (2) , l'inonde , le pénètre , l'enlève à lui-même ? Ce n'est pas sa joie qu'il ressent , c'est la joie de son Seigneur oii il entre : c'est la félicité de son Dieu, parce qu'il est fait, comme dit saint Paul (3), un même esprit par un amour immuable ; si bien que semblable à Dieu, et Dieu en quelque façon dans cette union , tout ce qu'il y a de mortel en lui est englouti par la vie ; il ne sent plus que Dieu seul, et entre dans la plénitude de la joie de Dieu : Jn gau^ dium Domini tuL Alors non-seulement il ne pèche plus , mais encore il ne peut plus péther. Tous ses désirs sont contens; avec la capacité de son ame^ son espérance est remplie. Qu'est devenue cette liberté qui ne cessoit d'errer d'objets en objets? il n'en connoit plus l'appât. Nul mouvement de son (0 Matth. xxT. a3. — (») Confus, lib, iz , cap. x, tom. 1, col. i66. — {}) I. Cor.Yi, 17. Sa4 POtJR LA CIRCONCISION cœur, nulle partie de lui-même ne peutëchappei'au souverain bien qui le possède. Le commencement de notre repos, c'est de pouvoir ne plus pécher : la fin, ne pouvoir plus pécher : voilà , mes Frères , où il faut tendre , voilà ce que nous avons à désirer. « Hâ- » tons-nous, dit saint Paul (0, d'entrer dans ce re- » pos ». On ne vient pas à un si grand bien sans en avoir désiré la jouissance : il faut goûter par avance ces saintes douceurs. C'est pourquoi Dieu nous a donné, dès cette vie même, (présent admirable en- voyé du ciel ! ) un écoulement de la gloire dans la grâce , un essai de la claire vue dans la foi, un avantr goût de la possession dans l'espérance , une étincelle de la charité consommée dans la charité commencée. Commençons donc « à goûter et à voir combien le » Seigneur est douxW ». Mais, quoi ! on ne m'entend plus ; tu m'échappes à ce coup , auditeur distrait. On nous entend quel- que temps pendant que nous débitons une morale sensible , ou que nous reprenons les vices communs du siècle. L'homme curieux de spectacles s'en fait un , tant il est vain ! de la peinture de ses erreurs et de ses défauts, et croit avoir satisfait à tout, quand il laisse du moins censurer ce qu'il ne corrige pas. Quand nous venons à ce qui fait l'homme intérieur, c'est-à-dire à ce qui fait le chrétien , à ces désirs du règne de Dieu, à ces tendres gémissemens d'un cœur dégoûté du monde et touché des biens éternels ; c'est une langue inconnue. Je ne m'en étonne pas : ce Cantique des joies célestes que je commençois à chan- ter , c'est le cantique de lérusalem. Et de qui sont; (0 Heb, IV. 1 1. — (») Ps, xxTtiii. 8. DE NOTRE SEIGlTEUn. 52$ environnés les prédicateurs 7 De qui sont composé» ordinairement les grands auditoires, si ce n*est des kabitans de Babylone , des mondains qui apportent- leurs vanités , leur corruption^ leur vie sensuelle à ces saints discours. Et bientôt ils condamneront encore^ si Dieu le permet, le prédicateur, s'il ne sait pas caresser les tendres oreilles^ et flatter par quelque nouvel artifice, contenter, ou surprendre leur goût ou raffiné ou bizarre. Et je pourrois espé<* rer que des âmes ainsi prévenues des joies de la terre ^ entendissent les joies du ciel! Malheur à nous, malheur à nous, non pas à cause de ce déluge de maux dont la vie humaine est ac-^ câblée , ni à cause delà pauvreté et des maladies, et de la vieillesse et de la mort ! malheur à nous à cause des joies qui nous trompent , qui obscurcissent nos yeux, qui nous cachent nos devoirs, et la fin mal-^ heureuse de tous nos desseins ! Malheur à une jeu<^ nesse enivrée qui se glorifie dans ses désordres , e^ qui a honte de donner des bornes à ses excès! mal"* heur au pécheur fortuné qui dit en son cœur aveugle : « J'ai péché ^ et que m'est -il arrivé de mal W » 7 II ne songe pas que le tou^t-puissant l'attend au maa-» vais jour, et qu'assuré de son coup il ne précipite pas sa vengeance. Malheur à Timpie qui se délect^ dans la singularité de ses sentinaens l II craindroil; de parottre.foible, s'il en revenoit; et plusfoible^ A craint de perdre les vaines louanges de quelques amis , qui , aussi peu résolus que lui sur les vérités de la vie future, sont néanmoins bien aises d'éprou^ ver jusqu'où Ton peut pousser l'apparence de la su- (0 £ccli. V. 4. BaÔ POUR LA CIKCONCISION retéau milieu deTincertitude et du doute. Mais Dieu confondra bientôt leur vaine philosophie ; et malgré cette honteuse dissimulation ^ il trouvera dans leur cœur de quoi les convaincre, « Il n'y a point de paix » pour rimpieCO », dit le Seigneur. Malheur enfin à morts"tout vivans » , comme dit l'apôtre (2) » Jésus-* Christ ne sera pas leur Sauveui: ; car « son royaume » n'est pas de ce monde (3) » , et il ne Fa pas préparé à ceux qui veulent triompher sur la terre. Au con^^ traire, c'est d'eux qu'il a prononcé cette sentence.: .ic Ils oût reçu leur consolation » : et encore, « vous » avez r^çu vost biens (4) ». C'est ce que Jésus-Christ a toujours prêché en public et en particulier, au peuple comme à ses disciples , dans, toutes ses con-^ versations et dans toutes ses paraboles. Quoi I n'y aura-t-il que des excès dans son Evangile ?,n'aurai-t-il jamais parlé qu'en exagérant ? ou faudra-t-il forcer toutes ses paroles.en faveur de nos passions et pour y trouver des excuses? . . . Mais sans raisonner davantage y j'appelle ici votrô conscience : vouLez^vous achever vos jour&parmi ces plaisirs, et dans ce continuel empressement? Ré- pondez-moi, gens du monde, si v^us n'avez pas encore oublié k christiamsme. Je 11e vous parlerai pas de ces coinm^rces dangereux , ni de ces Intri-* gués qui se mènent parmi les ténèbres. Je ne vous parlerai pas de ces rapines cachées, de ces concus- sions , ni de tout ce négoce d'iniquité; Mais voulez- vous que la mort survienne, pendant qu'appesantis <«) fsai, xtviiï. aa.— W /. Tint, v. 6. — i}) Jàtm, xviii. 36. — » (4) Luc, xyi. a 5. DE irOTHE SEIGNEUR. SaJ par les soins du siècle^ ou dissipés par ses divertis- semensCO, pendant qu'incapables de vous occuper, ni du siècle à venir, ni de la prière , ni des œuvres de charité , ni d'aucune pensée sérieuse > vous ne $ongez qu'à remplir un temps qui vous pèse, ou d'un jeu qui vous occupe, [qui vous] travaille, [qui vous] consume j les jours et les nuits; ou de ces conversations dans l^quelles , pour ne point parler des médisances dont on les réveille , ce qu'il y a de plus innocent , p'est après tout d'agréables inutilités, dont l'Evangile nous apprend qu'il faudra un jour i:endre compte (2). Voulez-vous passer dans ces va- nités la dernière année de votre vie, qui est peut-* être celle que .vous commencez aujourd'hui ? Car quel caractère particulier aura cette année fatale où vous serez; comptés parmi les morts ? Egalement trpmpeuses, toutes les années se ressemblent ^ et c'est à nous à y mettre de la différencefc Mais je languis jujsques à mourir, dans ces exerr ciceS' de piété , dans ces oraisons y dans ces lectures^ Que vous dirai- je ? ce dégoût , c'est un reste de la maladie : le goût vous reviendra avec Ija santé : tâchet seulement de vous guérir. Le tem|3s des épreuves e$t long. Le naiionde. nous le prédie assez par sek amertumes,; npus n'eu sommes que ti^op dégoûtési Mais vous, en attendant le moment des consolations:, portez votre pénitence , portez la peine de la mol- lesse , où vous languissez depuis si long - temps , et n'espérez pas, comme un nouveau Paul, être d'a- bord ravi au troisième ciel. Souvenez-vous de Jésus, qui, avant ses grandes douleurs et le supplice de la (0 Luc. XXI. 34. — (*) Matth. XII. 36. 528 POUR LÀ CIRCONCISION croix , a voulu souf&ir pour votre salut des abbat« temens, des ennuis, des détresses extrêmes , laissez* moi dire ce mot, et une tristesse jusqu'à la mort. Prenez ce remède nécessaire , et buvez le calice de sa passion } la joie vous reviendra avec la santé. Mais puisque les joies de la terre sont si mortelles à Famé , ne cessons de réveiUer sur ce sujet le genre humain endormi ; répandons dans les saints discours le baume de la piété; et au lieu de ces finesses dont le monde est las , la vive et majestueuse simplicité^ les douces promesses et Tonctioa céleste de TEvangile. Et vous, célèbre (*) compagnie, qui ne portez pas en vain le nom de Jésus , à qui la grâce a inspiré ce grand dessein de conduire les enfans de Dieu, dès leur plus bas âge, jusqu*à la maturité de l'homme parfait en Jésus-Christ ; à qui Dieu a donné vers la fin des temps des docteurs , des apôtres , des évan« gélistes , afin de faire éclater par tout Tunivers , et jusque dans les terres les plus inconnues, la gloire de l'Evangile ; ne cessez d'y faire servir, selon votre sainte institution, tous les talens de l'esprit, de l'é- loquence, la politesse, la littérature; et afin de mieux accomplir un si grand ouvrage, recevez avec toute cette assemblée, en témoignage d'une éter- nelle charité, la sainte bénédiction da Père, da Fils, et du Saint-Esprit. {*) D. Déforis a cru important de remarquer que Bossuet ayoit d^abord mis sainte et savante^ qu'il a efîacé pour y subfiliUier cé- Uhr^. ( EdU. de rersailles ). IV/ DE NOTAC SEIGITEUR. 629 IV.^ SERMON POUR LA FÊTE DE LA CIRCONCISION DE NOTRE SEIGNEUR, PRÊGfiÉ PENDANT UN JUBILÉ; Grandeur de nos maux. Nécessité de la grâce du Sauveur , pour nous guérir et nous sauver : aea différentes opérations en nbiis. Fi- délité de Dieu à notre égard : nos infi<£éUtés envers lui; Oppositioià des folles joies du siècle aux joies solides qui nous sont promises. Vocabis nomen ejus Jesum ; ipse eoim salvum faciet po* pulum suam à peccatis eorum. F'ous donnerez à Véi\fant le noni de Jésus ^ c*est-h'dir& Sauveur } car t'est lui qui scuivera et délivrera sod peuple de sespéchés^ Mattfa. i« ai. CfELiTi dont il est ëorit que son nom est le Seigneur et le Tout-puissant, semble avoir quitté ces noms magnifiques ; lorsqu'après avoir prifr la fonne d'es- clave, il a encore subi aujourdliui une loi servile, et porté imprimée en Son propre corps la marque de la servitude. En effet , quand le Fils de Dieu « se » fait circoncire , il s'oblige et s'assujettit, dit le saint BossuET. XI. 35 53o POUR LA CIRCONCISIOK » apôtre (0, à toute la loi de Moïse » ; et ainsi se chargeant volontairement du joug que Dieu impose aux serviteurs, non -seulement il se dépouille en quelque façon de sa toute-puissante .souveraineté^ mais il semble qu il se dégrade jusqu'à renoncer à la liberté et à la franchise. C'est dans ce temps inysté- rieux^ c'est dans cette conjoncture surprenante, que Dieu qui sait rehausser magnifiquement les humilia- tions de son Fils, lui donne le nom de Jésus et la qualité de Sauveur du monde. Il lui rend par ce moyen tout ce qu'il se le avoir perdu. Pendant que le Fils de Dieu se range parmi les captifs, il en est fait le libérateur, et rentre sous un autre nom dans les droits de sa royauté et de son empire ; parce qu'il devient, par un nouveau titre, le Seigneur de tous ceu? qu'il sauve , et s'acquiert autant de sujets , qu'il rachète de pécheurs et qu'il affranchit d'esclaves» La grâce du jubilé se trouve enfermée si heureu- sement dans le saint nom de Jésus et dans le texte de mon évangile , que je ne puis rien traiter de plus convenable à ce concours de solennités. Mais saint Paul ayant prononcé que « nul ne peut mém^ noipi- » mer le Seigneur Jésus sans la grâce du Saint-Es- » prit W », moi,. qui dois vous expliquer le mys- tère de ce nom aimable et en faire tout lesujet de mon discours, combien. ai^je donc besoin de l'assis- tance divine? Je la demande humblement par l'in- tercession de la sainte Vierge, -df^^e. ^ Combien grande, combien illustre, combien né* cessaire est la grâce que nous apporte le Sauveur CO Gai Y. 3. -<- C») /. Cor. xii. 3. DE NOTRE SEIGJNEUR. 53l Jésus eft nous délivrant de nos péchés ! On le peut aisément comprendre par la qualité du mal dont elle nous tire. Carie péché n étant autre chose que la dépravation de Thomme en lui-même et dans sa partie principale , il est clair que les maux qui nous attaquent dans notre fortune , ou même dans Tétat de notre santé et dans notre vie, n'égalent pas ce- lui-ci en malignité; et que c'est le plus grand de tous les maux , puisque c'est celui qui nous fait perdre le bon usage de la raison^ l'emploi légitime de la li- berté , la pureté de la conscience , c'est-à-dire tout le bien et tout l'ornement de la créature raison- nable. Mais, mes Frères, ce n'est pas assez; et voici ce qu'il y a de plus déplorable. Le comble de tous les malheurs, c'est que cette volontaire déprava- tion ne corrompt pas seulement en nous ce qu'il y a de meilleur; mais encore nous rend ennemis de Dieu, contraires à sa droiture, injurieux à sa sain- teté, ingrats envers sa miséricorde, odieux à sa jus- tice, et par conséquent soumis à la loi de ses ven- geances. Tellement qu'il n'y a nul doute que le plus grand mal de l'homme ne soit le péché : et si jusques à présent il y a eu plusieurs Jésus et plusieurs Sauveurs, maintenant il n'est plus permis d'en con- noître d'autres que celui que nous adorons, qui, nous sauvant du péché comme du plus grand de tous les malheurs , mérite d'être nommé le véritable Jé- sus, Tunique Libérateur et le Sauveur par excellence. La grâce du jubilé qui nous a été accordée durant ces saints jours, jointe à la réception des saints sa- cremens et aux pieuses pratiques qui nous ont été ordonnées , fait en nous une entière application de 532 poua LA cincoNCisiON ce beau nom de Sauveur que le Fils de Dieu reçoit aujourd'hui : et le concours de ces choses m'oblige à traiter à fond de quelle manière ce divin Sauveur nous délivre de tous nos péchés. Or dans le dessein que je'me propose de vous expliquer le mystère du nom de Jésus (*) , et le salut qui nous est donné en notre Seigneur, je ne trouve rien déplus convenable que de vous proposer aussi nettement que mes forces le pourront permettre, une excellente doctrine de saint Augustin , dans le second livre du second ou- vrage contre Julien, où ce grand homme remar- que que cette délivrance de tous nos péchés a trois parties principales et essentielles. Car expliquant ces paroles de saint Jean-Baptiste : « Voici TÂgneau » de Dieu , voici celui qui ôte le péché du monde ( 0 »; il enseigne que le Fils de Dieu ôte en effet les pé- chés, et parce qu' « il remet ceux qu'on a commis , » et parce qu'il nous aide pour n'en plus commettre , » et parce que, par plusieurs périls et par plusieurs » exercices, il nous mène enfin à la vie heureuse » oh. nous ne pouvons plus en commettre aucun » : Tollitautem, etdimittendo quœ facta sunt,.... etad- juvando ne fiant, etperducendo ad vitam ubifieri omnino non possint {?). Et certes quand nous abandonnons au péché no- C'^) On lit en marge du manuscrit les paroles suivantes , qpii font voir que Fauteur a voulu approprier ce sermon au jour de la nais- sance du Sauveur : « An jour de la naissance du Sauveur, j^entre- » prends de vous £aire voir quelle est la cause de son arrivée, quel 3» est le mal dont il nous sauve, et quel est le sahit qu'ail nous ap-- 3) porte ]>. Edit. de Déforis, (") Joan, 1. 29. ^- W Oper, imperf. cont Jul, lib. ii , /t. 84 , tom. x^ col, 986. DE lîOTEE SEIGNEUR. 533 tre liberté égarée ^ il a sa tache qui nous déshonore et sa peine qui nous poursuit; et quand il nous a été pardonné par la grâce du saint baptême et par les clefs de TEglise y il a encore ses appas trompeurs et ses attraits qui nous tentent : Unusquisque tenta-r tur à concupiscentiâ sud (0 : « Chacun est tenté pair » sa propre concupiscence ». Et dans la plus grande vigueur de la résistance, voire même dansFhonneur de la victoire, si nous vivons sans péché, nous ne vivons pas sans péril ; ayaM toujours en nous-mêmes cette déplorable facilité et cette liberté malheureuse de céder à notre ennemi. Ainsi le divin Jésus ^ pou;* être notre Jésus, et remplir toute Tétendue d'un nom si saint et si glorieux , doit nous délivrer pav sa grâce, premièrement du mal du péché, secon-v, dément de l'attrait , troisièmement du péril. C'est ce qu'il commence en cette vie et qu'il achève dans la vie future; il le fait successivement et par ordre* Jl ôte le mal du péché, par la grâce qui nous par- donne : il en réprime en nous l'attrait dangereux ^ par la grâce qui nous aide et qui nous soutient : il en arrache jusqu'à la racine^ et le guérit sans retour dans la bienheureuse immortalité, par la grâce qui nous couronne et récompense : Dei gratid régéné- rante non imputandum, Dei gratid nos jui^ante fre- nandum , Dei gratid rémunérante sanandum W. Par conséquent, chrétiens, si vpus voulez saintement }Ouir du salut qui vous est offert ^ et de l'indulgence générale qui vous est donnée par l'autorité de l'E^ glise au nom de notre Sauveur, reconnoissez hum- blement et avec de continuelles actions de grâces, (0 Jac. 1. 14. — W Lib. 11. eonU JuL cap, iv, n. 9, tom. x, col 532. 534 POUR LA CIRCONCISION le pardon qui vous a été accordé ^ combattez avec foi et persévérance l'attrait tyrannique qui vous porte au mal; et aspirez de tout votre cœur au par- fait repos et à la félicité consommée où vous n'aurez plus à craindre aucune foiblesse. Voilà les trois grâ- ces qui sont enfermées dans le nom et dans la qua- lité de Sauveur , dont j'espère vous montrer Fusage dans les trois points qui partageront ce discours. PREMIER POINT. Quoique j*aie déjà tracé quelque image du mal que le péché fait en nous , l'ordre de mon discours exige de moi que j'en donne une idée plus forte , et que j'établisse les choses en remontant jusques à lu isource de tout le désordre. Pour raisonner solide- ment, je commencerai, chrétiens, à définir le pé- ché. Le péché est un mouvement de la volonté hu- maine contre les règles invariables de la volonté di- vine. Il a donc deux relations ; il est la malheureuse production de la volonté humaine? et il s'élève avec insolence contre les ordres sacrés de la volonté di- vine ; il sort de l'une et résiste à l'autre : et par-là il est aisé d'établir, selon la doctrine de saint Au- gustin (0, en quoi le mal du péché consiste. Il dit qu'il est renfermé en une double contrariété , parce que le péché est contraire à Dieu , et qu'il est aussi contraire à l'homme. Contraire à Dieu , il est ma- nifeste ; parce qu'il répugne a ses saintes lois : con- traire à l'homme, c'est une suite, à cause que l'at- tachement à ses propres inclinations , comme à dès lois particulières qu'il se fait lui-même, le sépare (■) De CwiU Dei, Uh ilii, cap. m, tom, yij, col, ^0%, 1>E NOTRE SEIONEUlt. S3^ des lois primitives et de la première raison à laquelle il étoit uni par son origine céleste. Ainsi il le tire de son ordre et le dérègle en lui-même. D'où il paroît, chrétiens , ique le péché est également contraire à Dieu et à l'homme ; mais avec cette différence qu'il est contraire à Dieu, parce qu'il est opposé à sa. justice; mais de plus contraire à rhomme, parce qu'il est nuisible à son bonheur : c'est-à-dire con- traire à Dieu y comme à la règle qu'il combat ; et outre cela contraire à l'homme , comme au sujet qu'il corron>pt. Ce qui fait dire auPsalmiste, que <( celui qui aime l'iniquité, a de l'aversion pour son >> ame » ; à cause qu'il y corrompt avec sa droiture les principes de sa santé ^ de son bonheur et de sa vie : Qui diligit inùjfuitatem ^ odit animam suami^)* Et certes il est nécessaire que les hommes se per- dent eux-mêmes en s'élevant contre Dieu. Car que sont-ils autre chose, ces hommes rebelles, que sont- ils, dit saint Augustin , que des ennemis impuissans, mais c< ennemis de Dieu, poursuit-il, parla volonté » de lui'résister , et non parle pouvoir de lui nurre » : Jnimici Deo resistendi voluntate^ , non potestaie lœdendi ip). Et de là ne s'ehsùit-il pas que la malice du péché, ne trouvant point de prise sur Dieu qu'elle attaque , laisse^ nécessairement tout son venin dans le cœur de cdui qui le commet ? Gomme la terre , qui élevant des nuages contre le soleil qui l'éclairé, ne lui 6te rien de sa lumière, et se couvre seulement de téoèbres', ainsi le pécheur téméraire résistant fol- lement à Dieu , par un juste jugement n'a de force CO P*. X, 6. — ^>) Dt Cw, Dei^ uH suprà. 536 POUR LA GIRCONCISIOV que contre lui-même ^ et ne peut rien que se d^ruire par sop entreprise insensée. C'est pour cela que le {loi prophète prononce, cette malédiction contre les pécheurs : Gladius eo^ mm ù^tret in çordQ> ipsQfim^j, et arcus fionim con- fnngi^r ^^)' V Que leur épée leur perce le cœur, » et que leur arç soit hris^ ». Vous voyeis4eux sprtes d'ar{ne$ entre le^ xmm^ du pécheur^ un arc pour tirer de loin , une épée pour frqjper de près : Tare jie rpmpt > et e^t inutile^ Tépée porte fion coup > mais coiitfe lui-même. Entendons : le pédbieur tire de loin contre le ciel et contre Dieu y et nonrseulisment les traits n'y arrivent pas , mais encore lare se rompt au premier effort. Impie , tu t'élèves contre Dieu , tu te moques des vérités de son Evangile > et tu fais un jeu sacrilège des mystères de sa .bonté et. de sa |ustice. Et toi , hlasphémateur téméraire ^ impudent profanateur du saint nom de Dieu > qui> non content de prendre en vain ce nom vénérable qu'on ne doit jamais prononcer sans; tremblement y profères des exécrations qui font frémir toute la nature > et te piques d'être inventif en nouveaux outrages contre cette bonté suprême si Seconde pour toi en nouveaux bienfaits ; tu es donc assez furieux pour tç prendre à Dieu de toutes les bizarreries d'un jeu excessif: ou bien poussé par tes ennemis sur lesquels tu n*as point de prise, tu tournes contre Dieu seul ta rage impuissante y comme s'U étoit du nombre de tes en- nemis j et encore le plus foible et le moilns à crain* dre \ parce qu'il ne tonne pas toujours , et que y DE 2ÏOTKE SEIGNEUR. 53^ meilleur et plus patient que tu nés ingrat et inju- rieux , il réserve encore à la pénitence cette tête que tu dévoues par tant d*attentats à sa justice. Tu prends un arc en ta main y tu tires hardijtnent contre Dieu f et les coups ne portent paa jusqu'à lui , que sa sainteté rend inaccessible à tous les outrages des hommes. Ainsi tu ne peux rien cQntre lui y et ton arc se rompt entre tes mains y dit le Rpi prophète* Mais y mes Frères y il ne suffit pas que son arc $e brise, et que çon entreprise demeure inutile j il faut que son glaive lui perce le cœur, et que pour avoir tiré de loin contre Dieu , il se donne de près un coup mortel , si le Sauveur ue le guérit par miracle. C'est la commune destinée de tous les pécheurs : le péché, qui trouble tout dans le monde , met le dé- sordre premièrement dans celui qpi le commet. La vengeance, qui sort du cœur pour tout ravager, porte toujours son premier coup et le plus mortel sur ce cœur qui la produit , la nourrit. L'injustice , qui veut ravir le bien d'autrui, fait son essai sur son auteur qu'elle dépouille de son plus grand bien, qui est la droiture , avant de ravir et d'usurper celui des autres. Le médisant ne déchire ds^m les autres que la renommée, et déchire en lui la vertu même. L'impudicité, qui veut tout corrompre, commence son effet par sa propre source ; parce que nul ne peut attenter: à l'iptégrité d'autrui que par la perte de la sienne. Ainsi tout pécheur est ennemi de scH-mên^e, cor- rupteur en sa propre conscience du plus grand bien de la nature rai/sonnable , c'est-à-dire de l'in- nocence. D'où il s'ensuit que le péché, je ne dis pas 53S POUR LA ClftCONCIS^OW dans ses suites , niais le péché en- lui - mém'C est le plus grand et le plus extrême de tous les maux : plus grand sans comparaison que tous ceux qui nous me^ aacent par le dehors , parce que c'est le dérègle- ment et l'entière dépravation du dedans : plus grand et plus dangereux que les maladies du corps les plus pestilentes, parce que c'est un- poison fatal à la vie de Tame : plus grand que tous les maux qui a^ fectent notre esprit , parce que c'est un mal qui cor- rompt notre conscience : plus grand par conséquent que la perte de la raison , parce que c'est perdre plus que la raison qu€ d'en perdre le bon- usage , sans lequel la raison même n'est qu'une folle cri- minelle. Enfin^ pour conclure ce raisonnement, mal par-dessus tous les maux , malheur excédant tous lés malheurs , parce que nous y trouvons tout ensemble et un malheur et un crime. Malheur qui nous ac- cable et crime qui nous déshonore ^ malheur qui nous ôte toute espérance , et crime qui nous ôte toute excuse : malheur qui nous fait tout perdre pour l'éterâité , et crime qui nous rend coupables de cette perte funeste ; et ne nous laisse pas même su|et de nous plaindre. Pourquoi pour l'éternité ? car il faut encore ex- pliquer ceci en un mot, pour entendre de quel mal Jésus-Christ nous sauve. Ici je pourrois vous dire que Dieu étant étemel , il ne faut pas s'étonner qu'il ait des pensées éternelles, et que tout l'ordre de ses conseils se termine à l'éternité. Je pourrois encore ajouter qu'ayant résolu pour cette raison de se don- ner à la créature par une éternelle communication, elle se rend digne d'un mal éternel; quand elle perd DE NOTRE SEIGNEUR. SSq volontairement un bien qui le pouvoit être. Mais je veux entrer plus avant dans la nature du mal : c'est •dans cette source intime de malignité y c'est dans la secrète et profonde disposition des volontés déré- glées, que je veux découvrir la cause funeste de Fé- ternité malheureuse qui menace les impénitens. Je demande seulement que vous m'accordiez que nul homme ne veut voir la fin de sa félicité ni de son bonheur. Il ne faut point de raison ; la nature parle : partout où rhomme établit sa félicité , qui ne sait qu'il voudroit y joindre l'éternité toute entière ? Maintenant en quoi est-ce que le pécheur a mis sa félicité ? Il Ta mise dans les biens sensibles : et c'est eu cela , dit saint Augustin y que consiste son dérè- glement y que « lui y qui peut aspirer à la jouissance » des biens éternels y abandonne lâchement son 3) cœur à l'amour des biens périssables » : In extremi boni dilectione turpiter volutatur, cui primis inhœ- rerefruique concessum estiO. Que s'il y établit sa félicité ; par les principes posés il s'ensuit qu'il vou- droit y voir l'éternité attachée. Tous nos désirs dé- terminés enferment je ne sais quoi qui n'a point de bornes , et une secrète avidité d'une jouissance éter- nelle« La volonté ne veut être ni empêchée y ni in- terrompue, ni troublée dans son action ; si bien que tout ce qu'elle aime , elle voudrait et l'aimer tou- jours et le posséder éternellement sans appréhen- sion de le perdre. Consultez votre cœur, jamais l'homme ne veut voir la fin ni de son plaisir ni de son bonheur. C'est alors que la pensée de la mort nous est plus amère : la loi de Dieu nous devient in^ (0 DeverdReL cap» xlt, n. 83, tom, i, coL 778. 54o POUR LA CIRCONCISION commode et importune^ parce qu'elle nous con- trarie ; et si notre cœur en étoit cru, il aboliroit cette loi qui choque son inclination ^ par la force d'un secret instinct , qui veut lever tout obstacle à ses passions , et par consëquetit les rendre immor- telles. Dans cette malheureuse attache ^ combien de fois avez-vous dit que vous ne vouliez jamais rompre ? dans la haine , Je ne le veux jamais voir? Eloigne- ment éternel des choses qui nous répugnent y éter- nelle possession de celles qui nous contentent, c'est le secret désir de notre cœur ; et si l'eifet ne s'ensuit pas, ce n'est pas notre volonté, mais notre mortalité qui s'y oppose. Et ne me dites pas , ô pécheurs , que vous pré- tendez vous corriger quelque jour. Car, au con- traire, dit excellemment le grand pape saint Gré- goire, « les pécheurs font voir assez clairement qu'ils » voudroient pouvoir contenter sans fin leurs mau- » vais désirs ; puisqu'ils ne cessent en effet de les » contenter tant qu'ils en ont le pouvoir ; et que ce » n'est point leur choix , mais la mort qui met fin » à leurs désordres et à leurs poursuites. C'est donc, M conclut ce grand pape, un juste )ugement de » Dieu qu'ayant nourri dans leurs cœurs une secrète » avidité de péchei* sans fin , ils soîeùt punis rigou- >> reusement par des peines interminables qui n'en » ont pas, et qu'ils ne trouvent non plus de bornes » dans leurs supplices, qu^ils: n'en ont voulu dorïner D à leurs excès détestables » : Non ûotda hùmimgmj sedjacta pensayit, tniqtd enim ideo cumfine dêli" çuerùnt , quia cum fine ^ixeruni. Nom voilassent utiquojf si potuùsent , fine sine vipère , ut poUiissent DE NOTRE SEIGI^EUR. 5^1 sine fine peccare, Osiendunt enim quia in peccato semper vii^ere cupiunt , qui nunquàm desinunt pec~ care dum vii^unt, Ad magnam ergo justiliam judi- cantis pertinetj ut nunquam careant supplicio, qui in hdc vitd nunquam voluerunt carere peccato (0. Entrez donc aujourd'hui, mes Frères , dans la profondeur de vos maux, et voyez de quel abîme Jësus-Ghrist nous tire. Il est temps maintenant que nous célébrions les miséricordes de ce Sauveur qui nous est donné aujourd'hui contre un si grand mal ; de ce puissant Médiateur de la nouvelle alliance qui s*est mis entre Dieu et nous , afin déporter pour nous tout le poids de sa colère implacable ; qui a noyé nos péchés y non plus au fond de la mer, comme di- soit le prophète (^)y mais dans te bain salutaire , dans le déluge précieux de son sang ; qui nous a renou- velés par sa grâce , consacrés et sanctifiés par son Saint-Esprit, qu'il a répandu en nous coihme un gage de vie éternelle. Accourez ici, chrétiens : Ma- gnificate Dominum mecum, et exaltemus nomen ejus in idipsum (3) : « Glorifiez tous ensemble avec moi » notre Seigneur, et ne cessons jamais d'exalter son » nom » ; ce nom aimable , ce nom de Jésus , notre unique consolation et Fappui de notre espérance. Je m'en vais vous raconter les miséricordes qu'il a exercées dans la rémission de nos crimes. Quand le souverain accorde une grâce et une rémission, ou il relâche toute la peine, ou il la com- mue : et le Sauveur se sert de ces deux manières dans la rémission de nos crimes. Par la grâce du (0 Dial. Ub. lY, cap:-xjAYy tom, xi, col. 449* "^ ^*^ Mich» th. 19. — C*) Ps. xz&iii. 3. 54^ FOUR LA GIRGONGlSIOir saint baptême y vil donne une entière abolition : il fait des créatures nouvelles sur lesquelles il répand si abondamment sa miséricorde ^ qu il ne réseryp aucun droit ni aucune. peine à sa justice iiTitée. Mais quand nous avons violé ce pacte sacré du baptême, manqué à la foi dolnnéè^ foulé aux pieds indigne- ment le sang de la nouvelle alliance par lequel nous avons été rachetés et purifiés; .c^est une doctriixe constante qu'il se montre plus rigoureux, et réserve quelque peine : non que son sang ne soit suffisant pour emporter une seconde fois la coulpe et la pejine ; mais il [ en ] dispense l'application selon, les ordres de sa sagesse, et suivant quil nous est utile pour nous retenir dans un penchant si dangereux. Car alors il ne permet pas que nous sortions tout -à- fait des liens de la justice : en pardonnant aux pénitens la peine éternelle qu'elle pouvoit exiger, il lui laisse néanmoins quelque prise ; afin que nous ressentions par quelque atteinte les engagemens malheureux et inévitables où. nous aous étions jetés. ,« Et ainsi , dit » saint Augustin , il accorde tellement la grâce , » qu'il ne relâche pas tout-à-fait la sévérité de la » discipline » : Sic impertitur largitas misericQrdiœ, ut non omittatur sesferitas disciplinœ (0, C'est pourquoi deux prisons dans PËvangile. Une prison éternelle où cent portes d'airain ferment la sortie , ou un vaste chaos (^) , une immense et in- surmontable séparation rend le ciel pour jamais inaccessible. Et il y a une autre prison, dont il est écrit qu'on n'en sortira qu'après avoir payé jusqu'à (i) S, Aug. de Corain» n. iH, tom. ti, coL 3o5. •— C*)\£ttew zvi. 36. DE KOTRE SEIGNEUR. 54^ la dernière obole (0 : et c'est cette prison temporelle que les Pères et les saints conciles et l'ancienne tra- dition appellent le purgatoire. Quoique cette peine soit bornée à un certain temps ^ il est aisé de com- prendre, comme saint Augustin l'a remarqué (2), qu elle passe de bien loin tontes celles que nous res- sentons en ce corps mortel. « Tout est ombre, tout » est figure en ce monde » : Figura hujus mundi (^). En l'autre il n'en est pas ainsi : là s'exerce la justice^ là se ressent la vérité sans mélange. Et c'est pour- quoi le Sauveur qui ne se lasse jamais de nous bien faire, use encore d'une seconde commutation. La première a changé la peine éternelle en des peines temporelles, mais peines du siècle futur, mais peines qui ont un poids extraordinaire ; il consent que nous subissions en échange les peines de cette vie. Delà les saintes sévérités de l'ancienne pénitence , qui fioumettoient les pécheurs à de longues humilia- tions, à des rigueurs inouies qui se pratiquoient sans relâche durant le cours de plusieurs années. Une profonde terreur de la justice divine leur fai- soit chercher quelque proportion avec ses règles ri- goureuses; Ainsi les cilices, les prosternemens , les gémissemens et le pain des larmes, le renoncement à tous les plaisirs^ même aux plus innocens, étoiexit l'exercice des saints pénitens , qui s'estimoient trop heureux d'éviter par une si foible compensation les peines de la vie future, quoique déjà modérées^ mais toujours plus insupportables que toutes celles de cette vie. Notre extrême délicatesse ne peut en* CO Hauh. T. 26. — («) jEnarraL in Ps. xxivu. n. 3, to/if. ty, «o/. 2g5. — {}) I. Cor. vu. 3i* 544 POUR LA cmcoircisiozr core souffrir ce tempérament : soldats lâdbes et eSé^ minés ^ et indignes de marcher sous Tétendard de la croix y nous ne pouvons endurer la discipline de notre milice ; et voici que le Sauveur se relâche en- core. Il fait une troisième commutation des peines que nous avions méritées^ Il change les anciennes austérités en quelques jeûnes , quelques stations, de» prières et des aumônes ; et pourvu que le cœur du moins soit percé des saintes douleurs de la pénitence et rempU de ses amertumes , il permet à son Eglise d*user d'indulgence. C'est la grâce du fubilé qui s'ac-« corde sur la terre, et qui a son efièt dans le ciel^ conformément à cette parole qui a été dite à saint Pierre : « Tout ce que vous lierez sur la terre, sera » lié dans le ciel ; et tout ce que vous délierea suf » la terre, sera délié dans le ciel » : Quodcumqua ligauem super terranij erit ligatum in cœlis : et quodcumque soli^eris super terrant-^ erit solutum iw cœlis W. Grâce singulière, grâce abondante, grâce qui tient lieu d'un second baptême à ceux qui sont disposés dans le degré que Dieu sait. O J^us , vrai-* ment Jésus et Sauveur ! ô miséricorde infinie ! « C'est 3» moi , dit ce grand Sauveur, c^est moi qui ai efiàcé » tes iniquitéis comme un nuage qui s'évanouit : c'est » moi qui les ai dissipées sans que vous en soyez }a-- )i mais recherché, comme une légère vapeur qui ne » laisse plus dans l'air aucun vestige » : Delei^i M nubem iniquitates^ et quasi nebulam peecéêta tua : revertere ad mCj. quoniam redemi te (2). O Sauveur,- ô Libérateur ! Par quelles actions de grâces !.... « O » cieux, réjouissez-vous 3 que votre reconnoissance (>) Maiih, XYi. 19. — (0 hai, XLiy, 22. » soit DE NOTRE SEIGITETJR. 545 » soit portée jusqu'aux extrémités delà terre ; que les » montagaes tressaillent de joie avec vous : que les » déserts , les bois , les rivages, et enfin toute la na- » ture retentissent du bruit de vos louanges ,et de » vos actions de grâces » : Laudate, cœU, çuoniam misericordiam fecit Dominus f jubilate ; extrema terrœ } resonate, montes, laudationem, saltus ,tt omne lignum ejus (0, N'abusons pas , mes Frères , d'une telle grâce. Lç criminel qui a reçu son abolition, se regarde comme recevant une vie nouvelle, et considère le prince comme un second père qui lui rend, et la lumière, et la vie , et la société des hommes, et qui efface de dessus son front la tache honteuse qui le condamnoit à une éternelle infamie. Regardons le divin Jésus potreroi, notre pontife, notre avocat, notre unique libérateur, comme celui seul par qui nous vivons (*}. Commençons donc aujourd'hui une vie nouvelle; et (0 Isai. XLiv. a 3. (*) Toute la grâce de la rémission est en Jésus- Christ. S'il faut éloigner de nous nos péchés , qui nous fera cette grâce, sinon celui qui a pris sur soi nos iniquités, et a porté nos crimes en son propre corps ? S'il en faut effacer la tache, quel autre que lui a donné son sang pour laver notre conscience des œuvres de mort ? Qui est celui qui les couvre aux yeux de Dieu , sinon celui qui nous a re- vêtus de son innocence ? Qui empêche qu'on nous les impute , sinon celui dont la charité en a transporté sur soi-même toute la peine ?. Ce morceau u^a point de place fixe dans le manuscrit de Tau- teur ^ il est entièrement détaché du corps du discours , mais il s'y rapporte visiblement : c^est pourquoi nous le donnons à la fin du premier point auquel il convient parfigâtement. £dit. de DéforU* BossuET. XI. 36 546 POUR LÀ CIltCONGTSION pour in'élre point mécohnoissans de la grâee qui re» met ïias crimes , soyons fidèles à celle qui se présente pour nous aider à n'«n plus commettre. SECOND POINT* Les médecins ordinaires nous traitent assidûment durant tout le cours de la maladie; quand la fièvre nous à quittés tout-à-fait ^ ils nous quittent aussi sans crainte , et nous laissent peu à peu réparer nos for- ces : si bien que la marque la plus certaine que le malade est guéri, c'est lorsque le médecin le laisse à lui-même et à sa propre conduite pour achever de se i*etablir. Les maladies de nos âmes ne se traitent' pas de la sorte. Le péché, quoique guéri par la grâce justifiante, laisse néanmoins de si mauvais restes, et' afibiblit tellement en nous le principe de la droiture, que la grâce médicinale ne nous est pas moins né-* cessaire pour conserver persévéramment que pour recouvrer la justice ; et si le médecin qui nous a trai- " tés nous abandonne un moment^ la rechute est iné- vitable : Et Jiunt noifissîma hominis iîlius pejora prioribus (0 : « et le dernier ét-at de.-cet homme de- » vient pire que le premier ». Cest ici qu il nous faut entendre les foiblesses, les blessures, les captivités de notre nature vaincue; et nous verrons, dirétiens, que le péché nous séduit par tant d'artifices, nous gagne par tantxl'atti'aits, nous pénètre par tant d'avenues, qu'il faut tme pré- voyance iiifinie, et une puissance sans bornes, et uii soutien sans relâche pour nous tirer de ses mains, et nous sauver de ses embûches. Et au dedans et au W MaUh, XII. 45. ' ' dehors, tout concourt à établir son empire. Et pre- mièrement au dehors y tout ce qui est autour de nous nous est une occasion de péché; tant nous sommes dépravés et corrompus ! ce qui est plaisaat^ nous captive, ce qui est choquant nous aigrit. Notre bonne fortune nous rend superbes, celle des autres, envieux ; leurs malheurs nous causent un mépris in^ juste, les nôtres un lâche abattement et le désespoir. Pour les amis , nous sommes flatteurs ; pour les en- nemis , inexorables ; pour les indiSerens , durs et dé^ daigneux; par conséquent injustes pour tous. Nous corrompons toutes choses; Tamitié par la complai- sance et par les cabales, la société par les fraudes^ les lois mêmes et les jugemens par les partialités et par l'intérêt. Autant d*objets différens qui nous en- vironnent, autant de pierres de scandale, autant d'occasions de déréglemens. Et pour le dedans , ô Dieu ! quel désordre ! Premièrement pour la con« noissance; ou Tignorance nous Tôte, ou la passion Tobscurcit, ou le défaut de réflexion la rend inutile, ou la témérité ruineuse. Tout ce qu'il y a de meil- leur en nous tourne et dégénère en excès. Les sim- ples sont grossiers , les subtils sont présomptueux. Les biens réels sont les moins connus, les idées' les^ plus véritables sont les moins touchantes; le spiri- tuel est plus fort , le sensible est plus décevant : la raison y succombe. Après cela, chrétiens, aurons- nous peine à connoître que nous avons besoin d'un Sauveur qui' nous excite à chaque moment, nous soutienne en chaque occasion , nous prête la main à chaque pas , pour empêcher nos égaremens et nos chutes ruineuses 7 548 POUR LA CIRCONCISIOIir Ajoutons encore à toutes ces plaies celles que nous recevons par nos habitudes vicieuses : car on ne sort pas de ce labyrinthe aussi facilement qu^on s'y engage. La volonté humaine , il est vrai^ est natu- rellement indéterniinée ; mais il n'est pas moins as- suré qu elle a aussi cela de naturel y qu'elle se fixe elle-même par son propre mouvement , et se donne un certain penchant dont il est presque impossible qu elle revienne. Ainsi par sa liberté naturelle elle est maîtresse de ses objets , qu'elle peut prendre ou ' rejeter comme il lui plaît : mais autant qu'elle est maîtresse de ses objets, autant est-elle capable de se lier par ses actes. Elle s'enveloppe elle-même dans son propre ouvrage comme un ver-à-soie ; et si les lacets dont elle s'entoure semblent de soie par leur agrément , ils ne laissent pas toutefois de surmonter le fer par leur dureté. Non, elle ne peut pas si faci- lement percer la prison qu elle se fait, ni rompre les entraves dont elle se lie. Et ne me dites pas ici que, puisque vos engagemens sont si volontaires, la même volonté qui les fait, les pourra facilement dé- nouer. Au contraire c'est ce qui fait la difficulté, de ce que la même volonté qui s'est engagée, est aussi obligée de se dégager : c'est elle qui fait les liens et qui; les veut faire , et elle-même qu'il fajit employer pour les dénouer^ elle-mênie qui doit tqutensemble soutenir le choc et livrer l'assaut. Qui ne voit donc manifestement que s'il ne lui vient du dehors quel- que force et quelque secours , elle cQmbattra ea vain , et ne fera que s'épuiser par des efibrts inutiles? Car , comme dit saint Ambroise , « On n'est pas » long -temps fort et vigoureux, quand c'est soi- DE NOTRE SEIGNEUK. 549 » même (*) [ qu'il faut vaincre. Le combat qu'on est » obligé de soutenir contre soi-même et ses pro- » près cupidités , est trop rude pour qu'on puisse , » seul, en sortir victorieux » : Ad^^ertis quant gratte certamen sît^ quodest intrà hominem; uisecum ipse conjligat, cum suis cupiditatibus prœlietur ;,.,,, nec potuisse ei^adere^ nîsi esset Domîni Jesu gratid libe- ratus (0. « Bientôt l'homme misérable se voit en dan- » ger de périr, si son Dieu ne vient à son secours, » s'il ne crie vers lui au milieu de ses frayeurs , en » lui disant: O Seigneur, délivrez mon ame » : Mi- ser homo congreditur ^ ut vincatj et ipse in pericu- lum ruit^ nisi Damini nomen adfuerit, nisi cum ve- retur^ orauerit dicens : O Domine , libéra animant nteant (2). « La victoire est donc réservée à celui » seul qui met sa confiance dans la grâce , et qui ne 3) présume point de ses forces » : Ille vincit qui gra- liant Dei sperat ^ non qui de sud virtute prœsumit (3). Mais après que la grâce du Sauveur nous a fait triom- pher de nous-mêmes, il faut des précautions pour persévérer dans cette heureuse liberté. Plus les dan- gers sont multipliés, plus il est nécessaire de se tenir en garde , d'apporter de soin et d'application à l'af- faire de son salut. Malheur à ceux , ou qui oublient l'état d'où la bonté divine les a tirés, ou qui négli- gent de prendre les moyens qu'elle leur prescrit (^) Il nous manque ici dans le manuscrit un feuillet, qui s^est trouvé égaré. Pour lier ce qui précède avec ce qui suit, nous avons tâché de remplir la lacune, par le morceau qui est mis entre desix. crochets. Edlu de Défoiis, (0 S. Amhr, in PsaL cxviii. n. 4^, tom» i, col. ia34. — (*) Idem, de X)bU, Theodos. Oral, n. a4> to/w. 11, col. i2o4» "^ ^) Ibid, n. 2 5. SSo POUR LÀ CIRCONCISION pour assurer ses dons! Tu t'endors déjà, pécheur, miraculeusement délivré par une charité toute gra- tuite : tu prétends te reposer, comme si tu n'avois plus d'ennemis à craindre : tu marches au milieu des périls auxquels lu t'exposes encore, avec une sécu- rité dont tu es le seul qui ne sois pas effrayé. Ces oc- casions , qui te sont devenues mortelles , ne te pa- roissent plus dangereuses; tu recommences à te fa- miliariser avec les objets de tes passions. Les diffi-^ * cultes presque insurmontables q ue tu avois éprouvées dans l'œuvre de ta conversion, ces douleurs si vives et si profondes que tu t'es vu obligé de ressentir pour t'arracher à la créature et à toi-même, ne te re- tiennent pas. Ingrat, tout ce que la grâce a fait pour briser les chaînes de ta volonté captive, ne te touche plus. Tu semblés regretter ton ancien escla- vage, et vouloir secouer le joug du nouveau mattre qui t'avoit affranchi en te recevant sous son empire. Les pratiques de la piété ne t'inspirent que du dé- goût ; la gêne et les contraintes d'une vie réglée tç sont insupportables. Tu renonces peu à peu aux exercices pénibles, mais salutaires de la vie chré- tienne que tu avois embrassée. Tu n'envisages qu'a- vec horreur la mortification et les austérités de cette pénitence qui avoit tant contribué à te rendre la vie, qui devoit servir à l'augmenter, à la conserver eu toi, en y faisant mourir à jamais le péché. Le monde et ses plaisirs l'emportent insensiblement sur ton cœur par leurs funestes attraits ]. Va, tu périras misérablement, et ta pertfe sera signalée par un in- fâme naufrage. Par conséquent, chrétiens , soyons sobres et vigi- DE KOtraE SEIftlTBUlU S5l lanSy marchons avec crainte et circonspection* Mé* ditons ces paroles de TertuUien : Hos inter sco^, pulos , has inter tempestates fides nasfigat tuta^ si sollicita^ secura, si attonitai^) : « Parmi tant >y d'orages , parmi tant d*écueils , la foi sera ferme )> si elle est craintive ; et naviguera sûrement ^ si ». elle marche toujours tremblante et étonnée de ses » périls ». Et c'est après les bienfaits, c'est après les grâces et les indulgences , que la crainte doit être plus grande. Car la vengeapçe suit de près l'ingra- titude ; et rien n'irrite tant la bonté que le mépris qu'on en fait. C'est pourquoi le Saint-Esprit , ayant représenté aux Galates, par la bouche de l'apôtre, les immenses bontés de Dieu, leur adresse ces pa- roles : Nolite errare , Deus non irridetur (2) : « Ne » vous y trompez pas, on Q.e $e moque pas de Dieu ». Non , non , ne vous, trompez pas par cette ffiusse, idée que vous concevez des miséricordes divines. Cette bonté de Pieu que vous vantez tant, et que vous faites l'appui de vos crimes, n'est pas une bonté insensible et déraisonnable, sous laquelle les pécheurs vivent à leur aise. C'est une bonté vigou- reuse et juste. Dieu est boa, parce qu'il est ennemi du mal; et il exerce l'amour qu.'il a pour le bien^ par la haine qu'U a pour le crime. Sajustice est lente,^ mais non endormie : ne vous persuadez pas quil prétende flatter par sa patience l'espérance de l'im- punité; autrement vous vous feriez , non. un Dieu vivant, mais une idole muette et insensible , un Dieu bon jusqu'au mépris', «et indulgent jusqu'à la foi- blesse. Nolite errare : il n'en est pas de la sorte.;, on ne se moque pas de lui. Et qui sont ceux qui s'en (0 De Idololat. n. a4. — (») Gai vi. 7. SS^ VOVBL LA CIECOHCISION moquent y sinon ceux qui abusent de ses boutes; qui croient qu'on leur donne le temps de pécher, parce qu on leur en donne pour se repentir ; qui font un jeu sacrilège de ses sacremens ^ du ministère des clefs, et des indulgences de sa sainte cEglise; qui tournent contre lui tous se& bienfaits , et font de ses miséricordieuses facilités un chemin à la rébellion et à la licence 7 Donc, mes Frères, que ce jubile finisse nos ingratitudes. Ne nous moquons pas de Dieu : car, comme ajoute Vapôtre, « Thomme re^ » cueillera ce qu il aura semé (0 ^i ; de peur qu'il ne se moque à son tour, et que nous ne puissions sou-- tenir cette cruelle et insupportable moquerie. Ah ! mes Frères , détournons nos yeux ; je veux espéreir de vous de meilleures [dispositions]. Prions le divin Sauveur qui a lavé tous nos péchés , qu il guérisse encore toutes nos langueurs ; et par-là nous obtien* drons la dernière grâce, qui est celle d'être à jamais impeccables. C'est ma dernière partie. TROISIÈME POINT- C'e^t donc ici , chrétiens , la dernière grâce ,' l'assurance, le prix, la perfection et le comble de toutes les autres, d'être menés à la vie oii nous serons impeccables , où nous jouirons éternellement avec les saints anges de cette heureuse nécessité de ne pouvoir plus être soumis au péché. C'est pour cela qu'il nous est né un Sauveur sur qui le péché ne pouvoit jamais avoir de prise , afin que , régénérés du même Esprit dont il a été conçu , nous pussions par sa grâce devenir un jour heureusement incapa- bles de succomber au péché. C'est là le bonheur COGa/.vi. 8. ))£ HOTHE SEIGNEtJll.'t 553 parfait y c'est le salut accompli, c'est enfin le dernier repos qui nous est promis en notre Seigneur. Le commencement de notre repos, c'est de pouvoir ne plus pécher ; la fin* de notre repos , c'est de ne pouvoir plus pécher. Le commencement de notre repos, c'est de pouvoir être justes; la fin de notre repos y c'est d'avoir une assurance certaine , infail- lible, de ne déchoir jamais aux siècles des siècles^ de la grâce ni de la justice. Pour comprendre profondément la différence de t^es deux repos , dont l'un est la consolation de la vie présente y et l'autre est la félicité de la vie future, il faut remarquer, Messieurs, que par la grâce du christianisme nous sommes très-assurés que Dieu ne nous délaissera pas; mais nous ne sommes pas assu« rés que nous ne délaisserons pas notre Dieu ; c'est- à-dire ^ si nous l'entendons, que nous sommes assurés de Dieu , mais toujours incertains de nous et de notre propre foiblesse. Nous sommes assurés de Dieu ; car nous sommes très-assurés qu'il ne quitte point , si on ne le quitte : il ne change pas comme un homme, et « ses dons, dit le saint apôtre (0, sont » sans retour et sans repentance ». Jésus invite à kii tous ceux qui ont soif de la vérité et de la justice : mais lui«-méme il a soif des âmes ; îl donne plus vo- lontiers que les autres ne reçoivent. Il ouvre ses bras à tous, à tous son sang et ses plaies, à tous sa mi- séricorde et sa grâce ; et « si on ne l'abandonne , il » n'abandonne jamais » : Non deserit, nisidesera- tur (2). C'est la doctrine de tous les saints Pères , c'est la foi constante de tous les conciles , c'est l'es- (0 Rom, XI. 39. — (») S, Aug, in Ps. cxly. n. 9, tom. ir, col. 1629. 554 POUR LA ci&coirGisioir pérance de tous les fidèles ; si quelqu'un k nie, qu'il soit anathéme. La foi de Dieu nous est engagée , ainsi qu'il l'a assuré par son saint prophète : « Je » vous ai épousée en foi » : Despondi te nUhi in fide (0 : et cette parole est sacrée, cette foi est in- violable ; c'est à Jésus-Christ qu'elle est donnée , et son sang nous est le gage de sa vérité infaillible. C'est pourquoi tous les oracles divins nous assurent que le traité qu'il fait avec nous est un traité éter- nel : Fericun vobiscum pactiun sempiternum ip) ; c'est-à-dire que notre grand Dieu , toujours fidèle à sa vérité et à ses promesses, ne quitte jamais de lui-même ceux qu'il a une fois admis à la nouvelle alliance , à la société de son Fils et à l'unité de ses membres. Mais, si nous sommes bien assurés qu'il ne rompra pas le traité , nous ne sommes pas assurés de ne le pas rompre. Il est vrai, cet Epoux toujours fidèle ne fera jamais de divorce : mais (*) que son amour est délicat ! mais que sa jalousie est scrupu- leuse! Cette ame, perfide et ingrate épouse, qui tant de fois s'est souillée d'un amour indigne et pror fane , l'obligera peut-être à se séparer; et ainsi, dit le prophète Isaïe, ce elle dissipe , elle viole le pacte » éternel » : Dissipaperunt fœdus sempiternum ^X. Comment est-il dissipé, s'il est étemel et irrévocable^ « C'est à cause, dit ce prophète ,. que les hommes » ont transgressé la loi ancienne , et qu'ils ont » changé le droit établi » : Transgressi sunt leges , mutaverunt jus (4) ; c'est-à-dire, si nous l'entendons^ (0 0«ee« 11. 20. -« (•) Isai. lv. 3. — (3) Ihid. xxiv. 5. — (4) lhid\ (*) On lit ici en marge de Toriginal : Fidélité réciproque. DE NOTRE SEIGNEUa. 55S que le pacte étoit éternel de la part de Dieu , mais qu'il a été rompu de la part des hommes. Celui qui est immuable ^ est toujours prêt à demeurer ferme ; mais rhomme qui change à tout vent , comme la face de la mer, a tout renversé en linanquant à la foi don* née. Voilà donc, âmes chrétiennes, quelle est notre assurance durant cette vie ; voilà quel est notre re- pos durant cet exil. Grand et admirable repos ! car qu'y a-t-il de plus grand que d'être assuré de Dieu ? Mais incertitude terrible ! car qu'y a-t-il de plus misé- rable que de n'être pas assurés de nous ? Viendra donc enfin le dernier repos et l'assurance parfaite, où nous serons assurés de Dieu et non moins assurés de nous. JVous sommes déjà certains que Dieu ne peut jamais nous manquer de lui- même ; alors nous serons certains que nous ne pour* rons jamais manquer à Dieu, et que notre fidélité^ je l'oserai dire , ne sera pas moins assurée ni moins inébranlable que la sienne propre, parce qu'il fixera nos désirs errans par la pleine communication du bien véritable. Tel est ce jour de repos et de sab- bat éternel qui nous est promis; voilà quels nous serons à la fin , sans fin , immuables comme Dieu même , saints comme Dieu même , impeccables comme Dieu même. Gomment, mes Frères, pourra arriver à des hommes toujours changeans cet état de félicité immuable , si ce n'est que ce même Dieu ^ qui a fait la créature raisonnable dans la loi des changemens, ne cesse de la rappeler à la loi de son éternité ? Car qui ne sait qu'il nous a créés pour être participans de lui-même? Il commence en nous cette grâce dans ce lieu de pèlerinage ; c'est pourquoi S56 POUE LA CIRCONCISION nous y pouvons être saints : mais il ne fait encore que la commencer ; c'est pourquoi nous pouvons devenir pécheurs. Alors nous serons saints sans chan- gement et délivrés du péché sans aucun retour, lorsque nous serons élevés à la parfaite unité ^ « à la » pleine communication du bien immuable » : Plend participatione incommutabilis bonii^). Cette dernière grâce nous sera donnée ainsi que toutes les autres par Jésus -Christ notre Sauveur. Car il faut que nous participions successivement à la grâce de sa mort et à celle de sa glorieuse résur- rection. « Il est mort une fois pour nos péchés , et il » est ressuscité pour ne mourir plus.(^) » : il se donne à nous comme mort, et il faut qu'il se donne à nous comme immortel. Nous participons à la grâce de sa mort y lorsque nous feisons mourir en nous le péché avec ses mauvais désirs ; et nous participerons à la grâce de sa glorieuse immortalité, lorsque nous vi- vrons, pour ne mourir plus, à la sainteté et à la justice. Alors nous aurons la plénitude de la grâce que Jésus-Christ nous a apportée : alors nous serons semblables aux anges, possédant Dieu, possédés de Dieu ; nous vivrons entièrement sauvés du péché , sans trouble, sans péril, sans tentation. Combien libre sera alors notre liberté, combien vive notre vie, combien tranquille notre paix! « Là nous n'au- » rons plus aucun vice, ni dont il nous faille secouer » le joug, ni dont il nous faille effacer les restes, ni » dont il nous faille combattre les attraits trom- » peurs » : Nullum habens vitium, nec sub quo ja- (') S, Aug. Epist, GXL. ad Honorai, n. ^4 j 'O'^* " > ^^ 4^^ » ^^ seq. — (*) Rom, vi. 9, ii par la vie » , comme dit l'apôtre saint Paul (0 : et l'ardeur des fausses joies de la terre étant tout-à-fait éteinte , il ne restera dans les cœurs que le plaisir immortel et le chaste attrait de la vérité, et un amour suprême, un amour constant, un amour im- muable pour la justice: Gundium de veritatp , dit saint Augustin C^). ce Donc , mes Frères , dit le saint apôtre (?) , hâ- » tons - nous d'entrer dans ce repos éternel » : Festinemus ergo ingredi in illam requiem. Vous («) //. Cor. Y. 4. — (') €onf9tt, Uh. x, cap. xxni , «. 33 , tom. i , eoL i8a. — (3) Heh. iy. 11. 56o POVÏt LA. CIRCONCISION tous qui avez cherché dans la participation des saints sacremens , dans les œuvres de pénitence , dans la grâce du jubilé^ le repos de vos consciences ; dans le calmé de vos passions tourne^ maintenant tous vos désirs à ce repos éternel , où vous n'aurez plus aucune tentation à combattre : Festinemus : n Hâ- » tons-nous )>• Il faut travailler : ceux qui s'imagi- nent que le temps fera tout seul leur conversion;..., folie et illusion. 11 est vrai^ je le reconnois, il y a une certaine ardeur de la jeunesse , et je ne sais quelle force trop violente delà nature que Tâgepeut tempérer. Mais cette seconde nature qui se forme par rhabitude , mais cette autre nouvelle ardeur encore plus insensée qui naît de raccoutumanee, le temps ne TafToiMit pas , mais plutôt il la fortifie. Ainsi vous vous trompez déplorablement ^ si vous attendez de Tâge et* du temps le remède à vos pas- sions ^ que la raison vous présente en vain. L'ex- périence [le prouve clairement] ; les vices ne s'af- foiblissent pas avec la nature : les inclinations ne se changent pas avec la couleur des cheveux ^ et, comme dit sagement TEcclésiastique, « la vieillesse ne trouve » pas ce que la jeunesse n'a pas amassé (0 ». Je sais que le temps est un grand secoui^s; mais. Messieurs , il en faut juger comme des occasions. Dans les affaires du monde , chacun attend les momens heureux pour les terminer; mais si vous attendez sans vous remuer, si vous ne savez pas profiter du temps, il passe vaine- ment pour vous, et ne vo.!» apporte en passant que des années qui vous incommodent. Ainsi , dans l'af- faire de la conversion , celui-là peut beaucoup es* (0 £ccli. xxY. 5. pérer Dfe VOTRE SElGKBtrU. 56t pérer du temps , qui est actif et vigilant pour s'en servir et le ménager. Mais pour celui qui attend toujours et ne Commence jamais , que lui apporte le temps > sinon une atteinte plus forte à sa vie , un plus grand poids à ses crimes , une violence plus tyrannique à «es habitudes 7 Festinehms ergo : tx Hâ^ )) tournons , efibrçons^nous »« Il faut combattre^ il faut &ire effort. Gé sont ici les jours malheureux ^ les jours de Tancien Â.dam , où il faut gagner par nos sueurs et par notre travail le pam de vie éternelle , oii les vertus sont sans relâche aux mains avec les vices. Viendra le temps de poser les armes et de re^ cevoir les couronnes > de se refaire du combat et de jouir de la victoire^ de se délasser du travail et de goûter le repos : Amodojam dicit Spiritus ut re* çuiescant à laieriius suis (0 : « Bès maintenant , » dit TEsprit) ils se Reposeront de leurs travaux ». Le paresseux repose dans son crime ^ il désespère de le pouvoir vaincre. Je ne puis atteindre si loin : tou* jours des difficultés t Léo est in vid W : « Le lion est » dans le chemin ». Non certes^ vous ne pourrez point faire un second pas tant que vous n*aurez pas fait le premier» Mais faites un premier effort , passez le premier degré ; vous verrez insensiblement le chemin s^aplanir et se faciliter devant vous : Erunt prava in directa (5). Vous dites que la tertu est trop difficile : contez-nous donc vos travaux; dites-nous les efforts que vous avez faits. Mais que vous ne cés*- siez de nous dire que l'entreprise est impossible ^ avant que de vous être remué ; que vous serez ac^ 10 Apoc, XIV. i3. — C») Prof^. XXVI. i3. — (3) Lue. «i. 5. BOSSUET. XI. 37 56a I^OYTIL liA CIRCONCISION câblé d'un travail que vous n'avez pas commencé , et fatigué d'un chemin où vous n'avee pas fait .en- core le premier pas ; c'est une lâcheté inouie. JFestinemus ergo ingrediin illam requiem : « Donc^ » mes Frères , dit le saint apôtre , hâtons-^nous d'en- » trer dans ce repos éternel ». Quel seroit votre repos y si Ton vous disoit que vos richesses sont si assurées que jamais vous n'aurez à craindre aucune indigence ; votre fortune si bien établie que jamais vous ne souflrirez aucune disgrâce; vos forces et votre santé si bien réparée qu'elle ne sera jamais altérée par aucune maladie ! quelle seroit votre joie ! quel votre repos! Combien donc serez -vous heureux , et quelle sera la tranquillité, mais quelle sera la gloire et la dignité de votre repos , lors<|ue vous nb pourrez plus être injustes, vous ne pourrez plus être déshonnétes , vous ne pourrez plus être pécheurs , vous ne pourrez plus perdre Dieu , vous ne pourrez phis déchoir de votre justice, ni par con- séquent de votre bonheur ! O vie sainte ! ô vie heu- reuse ! ô vie désirable ! Jésus a commencé de nous délivrer, parce que nous pouvons ne pécher pas : oui , mes Frères , ceiles nous pouvons ne pécher pas ; ^sa miséricorde est toujours prête, sa grâce est toujours présente. Je puis ne pécher pas : que ma liberté est grande ! mais , hélas ! je puis encore pécher : que ma foiblesse est déplorable ! Malheureuse puissance de pécher, que ne puis-je te déraciner tout-à-fait ! q^e ne puis-je te retrancher de mon franc-arbitre ! Mes Frères, il n'est pas temps, il faut suivre tous les de- grés des présens divins et tous les progrès de la grâce. Usons bien de la liberté que nous possédons pour OE iroTEB setgueur. 563 pouvoir pécher et ne pécher pas; c'est-à^re ne pé- chons plus y et cette autre liberté nous sera donnée parlaquelle nous ne pourrons jamais pécher. Celle- là qui est imparfaite nous est accordée pour notre mérite : celle-ci qui est parfaite est réservée pour la récompense. Usons donc bien de la liberté qui peut se dégager de la servitude ; et la liberté nous sera donnée très-pleine , très-entière et très-puissante , par laquelle nous ne pourrons jamais être soumis à aucune servitude de nos passions^ ni à aucun attrait du péché. Jésus-Christ Sauveur nous offre ses biens. Seipsum dabit^ qmaseipsum dédit (<) : %/^ Pour nous préparer à eatrer dsin^ cette }oi% abon* danrte , accoutumons-nous à la recevoir quand elle descend du ciel dans, nos cœurs ; corrigeons les joies de la terre. Mais, ô Dieu! à quelle joie aba^on- non3-nous notre cœur? Jésus-Christ est né^ et avec lui f ô dquleur ! les profanes divertissemens Tont prendre naissance. [Se] masquer, [se] déguiser^ danser, courir, aller deçà et. delà ^ dégoût, renou- vellement d'ardeur > encore dégoût, mouvemens al- ternatifs : voilà la grande occupation de oeux (pn se disent chrétiens. Pendant que Jésus comixienoe le cours d'une vie pénible, nous allons non pas com- mencer, mais <:pntkitter avec un renouvellement d'ardeur une vie toute dissolue. Le carnaval mieux observé que le carême, va devenir la grande affaire du monde. Les forces épuisées, on n'en trouvera! {*) Cette conclusion se trouve dëtachëe de tout le reste du dis- cours dans le manuscrit. EUe A été itnprimée, dans rëdition de D. Déforisy à la fin du sermon précédent, comme en faisant partie intégrante. On se convaincra en la lisant, qu'eUea été à la vérité composée pour ce discours , mais devant être prêché dans une cir- constance différente. H nou^ a donc paru plus convenable de la placer à la suite de ce sermon y mais sépai^ment. £àit. de Fer' sailUs, DE KOTRE SEIGNEUR. 565 plus pour le saint carême : infatigable pour les plai* airs , on commeoce à devenir infirme pour la péni* tenoe. Les médecins ne sufl^ont pas à écrire les at- testations des infirmités, ni les prélats à en donner les dispenses* Chrétiens , confluhez7les donc ; n^ les croye?; pas, seulement quand ilâ'agit de transgresser les lois de TEglisej demande>4e^r si vos courses, si vos veilles, œs inquiétudes , ces chagrins dans le jeu, et cette ardeur qui vous transporte hoi's de vous-mêmes, n'altèrent pas beaucoup plus un tem- pérament que le jeûne et Tabatinence. Mais je laisse ces pensées , quoiqu'elles soient as- sez importantes : je veux bien ne parler pas, si vous voulez, de fous ces vains divertissemens considérés en eux'^mémea. Parlons des ciroonstaaces qui les ac^ compagnent : oserions^ nous y penser dans cette chaire ? O Dieu ! ponvonsTnous penser que parmi tous ces changemens et toutes les joies sensuelles , nous puissions jamais conserver en nous une seule goutte de la joie du ciel? Les autres joies se peuvent mélei^; la variété et le mélangé en font même le plus doux assaisonnement. Mais cette joie dont je parle est sévère^ chaste, séiîeuse, solitaire et incompa-^ tible : le moindre mélange là corrompt; et elle perd tout son goût, si elle n'est goûtée toute seule. Ainsi quand vous ne feriez rien d'illicite ; et plût à Dieu que nous n'eussions pas à nous en plaindre? ce n'est pas une vie chrétienne ; vous perdez tout , dès-là seulement que vous vous abandonnez à la joie mon* daine. Est*ce en vain que Jésus a dit : « Malheur à » vous qui riez (0 » ! et encore : « Malheur à vous , (0 Luc. VI. a5. 566 POUR LÀ CIRCONCISION » riches! car vous avez votre consolation (0 »? Les richesses ne sont pas mauvaises^ mais n'employer les richesses que pour vivre dans les plaisirs et dans les délices y pendant que les pauvres meurent de faim et de froid , est-ce une vie chrétienne? Que re* proche Abraham au mauvais riche? ses rapines, ses excès, ses concussions, ses impuretés, ses débau- ches? Recepisti bona W : « Vous avez reçu vos » biens » : voilà son crime , voilà sa sentence. fTjr a-t-il donc que des excès dans FEvangile ? Jésus- Christ n'a-t-il parlé qu'en exagérant? Ne faut-il rien entendre à la lettre ; ou £9iudra-t-il forcer toutes les paroles, faire violence à tous les préceptes en fa* veur de vos passions, et pour leur trouver des ex- cuses? non , non , TEvangile ne le souffre pas. Mais je ne veux plus appeler que votre propre conscience : voulez*vous passer parmi ces plaisirs la dernière année de votre vie?  cette heure tant chantée et si peu attendue, quand Jésus viendra frapper à la porte , voulez-vous qu il vous trouve ainsi occupés? Quelle folie, quelle illusion, que penchant toujours à la mort, et plutôt mourant que vivant, nous ne pouvons imprimer en nous les sentimens que la mort inspire! Peut être que cette année nous sera funeste : ô Dieu , détournez le coup; combien menacés ! Je veux bien ne pas craindre en- core rirrégularité des saisons, les fléaux qui acca- blent nos voisins. Je ne veux point faire de mauvais présages : il y a dans cet auditoire des têtes trop précieuses dont nous souhaitons prolonger les jours, et même , sans hésiter, aux dépens des nôtres. Je ne («9 Luc. VI. a4. — W Ibid. XTi. a5. DE NOTRE 8EIGHE17R. ' SG'J consulte point les astres, ni leurs fabukuses in** fluences : des chrétiens s'amuser à ces rêveries crimi* nellesy et attendre leur bonne fortune d'une autre source que de la divine Providence ! loin de .nous^ ces prédictions. Je trouve tous les mauvais pronos* tics dans nos consciences, dans notre vie licencieuse et toute profane. J'ai peur que Dieu ne se lasse de supporter nos ingratitudes. Que ne vous éveillez-* vous donc, et que ne pensez-vous à votre salut? Re* tirez-vous des plaisirs du monde , [ travaillez à] tbu-« jours circoncire, aujourd'hui un plaisir et demain un autre, une vanité et demain une auti^e, un bë-' soin [et puis un autre] : enfin vous n'aurez plus be- soin que de Dieu, vous n'aurez plus soif que de la justice. Si vous pleuriez de bonne foi vos péchés, si vous pouviez vous déprendre de ces plaisirs dégoû- tans , e crains pas de me tromper ni dé parler à contre-temps , en lui propo- sant pour objet ce grand et éternel repos. Quand je médite attentivement tout Tordre de votre conduite et lea grands événemeùs dont elle est sdivie ^ f en dé- eouvre quelque peinture dans ces paroles d'un pro- phète : Princeps *»erb ea t/uœ digna stmt principe oogitabii, ei ipse sup^r duces stahit (0 : « Le prince » prendra des pensées qui seront dignes d*un prince, » et il commandera à la tête des chefs et des capi- 3» taines )>. En efiet^ votre altesse a pris des pensées dignes de son rang, de sa naissance et* de son cou- rage y quand elle s'est fidèlement attachée au plus grand monarque du monde, et que cherchant ^on hopueur dans sa soumission, elle n'a médité que de grands desseins pour sa gloire et pour son service : Princeps ea quœ digna sunt principe cogitabit, et ipse super duc^s stahit. (il /foi. XXXII. 3, >l »■ Kmêm^mmmÊmmrmmmi DE KOTRB 8EIGVE€R. 56g %,,,■ , „< „^iJA. PREMIÈRE PARTIE DU MÊME SERMON, AUTREMENT TRAITÉE. Excellence du nom de Jésus: terribles engagemens que le Sauveur contracte dans sa circoncision. Sentimens 4u pécheur réconcilié. Noirceur de Tingratitude d^ celui ^[ui r^lçnm^ ^u péché. <%/m^^^^/^%i'm/^^/^%/%^%/^ QukuD nousGonsidéronsla première id^e que[ette dans nos esprits le npm de Sauveur (*) , rien ne nous paroît ni plus beau, ni plus grand , ni plus désirable» Ce nom met tous les hommes aux pieds de Jésus, lui donne autant dé sujets et de créatures nouvelles , qu'il délivre de captifs et qu'il affranchit d'esclaves , les attache à sa personne sacrée par les plus aimables de tous les liens, c'est-à-dire par les bienfaits, le fait les délices du genre humain et l'objet éternel de notre amour. Mais certes quand on regarde à quoi (*) n n naît comme jm banni. H va à la cité de David, k la » source de son extraction royale ; mais les siens n4 Font pas reçu. » Une étable.... Comparatus t^tjumentis : il s'égale aux animaux » par la demeure , parce que les hommes se sont ravilis jusqu^à » leur condition par leurs brutales convoitises.... Il ne se sauve » point à main armée, il se sauve comme un esclave par la fuite ». Ces paroles , que Fauteur a écrites en marge , étoient sans doute destinées à ramener son discours au jour de la naissance du Sau* veur. Edit. de Déforis. 5^0 POUB LÀ CIRCONCISlOir engage ce nom, on est saisi de frayeur , et on trouve qa^il y a de quoi frémir. Car la rémission de nos pé- chés ne nous a pas été accordée par une simple abo- lition , mais par une satisfaction actuelle. Vous sa- vez que La justice divine a voulu être payée ; et comme les pécheurs dévoient à Dieu tout leur sang , lorsque Jésus a entrepris de les sauver, il a obligé tout le sien , et il ne peut plus s'en réserver une seule goutte. Sine sanguinis effusione non fit remissio (0 : « Les » péchés ne sont point remis sans effusion de sang ». Voyez les sacrifices anciens; comme on prodigue le sang ! il faut que tout nage dans le sang, et les vic- times, et Tautel, et, les prêtres, et les peuples, et le livre même ; qu'on répande le sang comme Feau. Je ne m'étonne pas qu'on prodigue celui des animaux; mais celui du Fils de Dieu ne doit- [il] pas être épargné? [Ntfn] : après que toutes ses veines seront épuisées , s'il y a encore dans le fond du cœur quel- que secret réservoir, on le percera par une lance. C'est pourquoi dès le même jour qu^il reçoit le nom de Sauveur, il commence à verser du sang par cette douloureuse circoncision. Mais s'il faut qu'il en donne tant pour avoir seulement le nom^ à quoi se doit-il attendre quand il en faudra opérer l'effet ? Sans doute il faudra un déluge entie^ pour noyer les péchés du monde : et nous ne devons regarder ce pre- mier sang que verse la circoncision , que comme un léger commencement, comme un gage que Jésus- Christ donne à la justice divine, qui l'oblige à la dette entière; enfin comme des prémices qui lui (0 Heh. IX. aa. DE NOTRE SEIGNEUR. 5^ I consacrent toute la masse et la lui dévouent. 4insi la circoncision et la qualité de Sauveur nous mène à la croix : c'est là que la victime est immolée, c est là que le sang se déborde par toutes les veines, c'est là que s'accomplit la rémission des péchés et l'expiation du monde. Ecoutez ici les belles paro- les du philosophe martyr, je veux •dire de saint Justin (0 : « Un seul est frappé, dit-il, et tous sont » guéris; le juste est déshonoré, et les criminels » sontrétablis dans leur honneur. Cet innocent subit 1) ce qu'il ne doit pas, et il acquitte tous les pécheurs » de ce qu'ils doivent. Car qu'est-ce qui pouvoit » mieux couvrir nos péchés que sa justice? Comment » pouvoit être mieux expiée la rébellion des servi- » teurs que par l'obéissance du Fils? L'iniquité de » plusieurs est cachée dans un seul juste ; et la justice » d'un seul fait que plusieurs sont justifiés ». C'est ce que dit saint Justin , c'esl; ce qu'il a appris de l'a- pôtre des Gentils. Voilà, mes Frères, ce grand con- seil de la sagesse de Dieu , conseil profond , conseil inconnu aux plus hautes puissances du ciel, que le Père, dit ce saint martyr, n'avoit communiqué qu'à son Fils; ajoutons, et à l'Esprit éternel qui procède de l'un et de l'autre : conseil qui s'est découvert dans les derniers temps , et c[ui a fait dire à l'apôtre que « la sagesse de Dieu a été manifestée par l'Eglise » aux célestes intelligences (^} ». Oui, les anges sont étonnés de ce secret admirable , de cet échange in- compréhensible , qui fait que Dieu en même temps se venge et s'appaise , exige et remet , punit nos pé- '(»} Epist, ad Diognet. ». 9, p. 238. — (») £ph. xn. 10. 5^2 FOUR LA CIRCORCISIOir chés et les oublie , frappe son Fils innocent pour Tamour des hommes coupables , et pardonne aux hommes coupables pour l'amour de son Fils inno- cent. Mais nous y que cette grâce regarde y nous ne devons pas seulement Tadmirer avec les anges; plutôt nous devons penser à quoi elle nous oblige envers notre aimable Sauveur ; et je vous prie, chrétiens, de TOUS y rendre attentifs. Je ne puis mieux , ce me semble , vous représenter cette obligation que par l'exemple d'un criminel à qui le prince accorde sa grâce. Regardez , chrétiens, ce criminel qui , enfermé dans un cachot , n'attend plus que la dernière heure , qui ne sait s'il est vivaat ou mourant y et ) Is. XLIY. a3. 5^4 POUR LA CIRCONGISIOir » ai effacé vos iniquités comme un nuage qui s*éva- »^ nouit y et qui les ai dissipées connue une vapeur » qui ne laisse plus dans Tair^ucun vestige : retoar* » nez donc à moi , parce que je vous ai racheté , dit » le Sauveur » : Mémento horum , Jacob et Israël, çuoniam serions meus es tu ; fomiavi te , setvus meus es tu; Israël j ne obliviscaris met , delevi ut nubem iniçuitcOes tuas, et quasi nebulam peccata tua : re- vertere ad me, quia redemi tei^). Que si vous voulez savoir quelle doit être la mesure de l'amour qu'il attend de vous y connoissez-la par vos crimes. « Un » homme avoit deux créanciers, dont l'un lui devoit » cinq cents deniers y et l'autre en devoit cinquante: » comme ils étoient tous deux insolvables ^ il leur » quitta la dette entière. Lequel est-ce des deux qui » l'aime le plus ? sans doute que c'est celui auquel » il a remis davantage : allez et faites semblable* » ment W ». Où trouverez-vous assez d'amour pour le reconnoître ? Mais surtout quelle seroit votre ingratitude , si vous retombiez dans les mêmes crimes ! Je laisse les raisonnemens recherchés ; je veux vous représenter les obligations de cette amitié si saintement réconci- liée. Souvenez-vous dans quels sentimens voashavez demandépardon à votre Sauveur. Un pécheur pressé en sa conscience , qui voit qu'il n'y a {>lus rien entre lui et la damnation éternelle qu'une vie qui est em- portée par le premier souffle ^ voit la main de Dieu armée contre lui; il voit l'enfer ouvert sous ses pieds pour l'engloutir dans ses abîmes : quel efiroyable ,C«) Is. XLiT. ai. — (») Luc. TU. 4ï« DE NOTRE SEIGNEUR. 87$ spectacle ! Dans la crainte qui le saisit , pressé de ce glaive vengeur tout prêt à frapper le dernier coup , il s'approche de ce trône de miséricorde , qui jamais n est fermé à la pénitence. Ah ! il n'attend pas qu'on l%:cuse, il se rend dénonciateur de ses propres crimes ^ et il sait bien qu'il faut avouer le crime quand on demande sa grâce, il est prêt à passer condam- nation pour prévenir l'arrêt de son juge : la justice divine se lève , il prend son parti contre lui-même ^ il confesse qu'il mérite d'être sa victime , et toutefois il demande grâce au nom du Sauveur. A ce nom qui calme les flots et les tempêtes y qui fait cesser les vents les plus orageux ^ qui appaise le ciel et la terre , on commence à l'écouter, on lui propose la condi- tion de coniger sa vie déréglée , de renoncer à ses amours criminels , à cet aveugle désir de plaire , à toutes ses intelligences avec l'ennemi. Il promet , il accorde tout ; faites la loi y j'obéis. Vous l'avez fait , mes Frères , souvenez-vous-en ; ou jamais vous n'a- vez fait pénitence y ou votre confession a été un sa- crilège. Vous avez fait quelque chose de plus : vous avez donné Jésus -Christ pour caution de votre pa- role : car étant le médiateur de la paix, il est aussi le dépositaire des paroles des deux parties. Il est cau- tion de celle de Dieu par laquelle il promet de vous pardonner : il est caution de la vôtre par laquelle vous promettez de corriger votre vie. Voilà le traité qui a été fait , et pour plus authentique confirmation , vous avez pris à témoin son corps et son sang qui a scellé la réconciliation à la sainte table. Et après la grâce obtenue vous cassez i^in acte si solennel ! Vous 576 POUR LA CI&CONCISIOir DE Jf. S. VOUS êtes repentis de vos pëcbés, tous vous repentez de votre pénitence. Vous aviez donné à Dieu des larmes et des regrets ^ gages prédeiix de votre foi ; vous les retires de ses mains , vous dâavouez vos promesses , et Jésas4Ihrist qui en est garant , et sin corps et son sang, mystère sacré et inviolable, le- quel certes ne devoit pas être employé en vain : quy auroit-il de plus outrageux et de plus indignç ? Après la grâce qui remet les crimes , [soyons] fidèles à oser de celle qui nous aide à n'en plus commettre. C'est la seconde partie. SERMON sua LES GARACTÈ&ES DXS DEUX ILLIASCES* 877 SERMON POUR LE SECOND DIMANCHE APRÈS L'EPIPHANIE. Union sainte de la nature divine avec les âmes fidèles. Charité de' Jésus pour son Epouse. Jésus et ses mystères, fin de toutes les Ecritures, de toutes les cérémonies : impuissance de la loi ancienne, caractère distinctif des deux alliances. m^*^/m^^%^^^^^%^^^^mt%i Nuptiae factae sunt in Gana Gallleae, et erat mater Jesu ibi. Yocatus est autem et Jésus, et.discipuli ejus. // sejîe des noces à Cana en Galilée, et la mère de Jésus y était, Jésus fut aussi convié à ces noces avec ses dis- cipks* Joau. II. I et a. • Jésus et sa sainte Mère avec ses disciples : chères Sœurs y xjuelle compagnie ! ils sont invités à un fes^ tiix y Q festin pieux ! et à un .festin nuptial ^ ô noces mystérieuses ! Mais à ce festin le vin y manque y le vin, que les délicats appellent Famé des banquets; Est-ce avarice, est-ce pauvreté, est-ce négligence? ou bien n'est-ce pas plutôt, quelque grand mystère^ que le Saini'^Esprit nous, propose pour exercer ^nos intelligences? Certes iL^est; ainsi, mes ti'ès- chères Sœurs. Car je vois que le Sauveur Jésus, pour sup- BossuET. XI. 38 S-jS SUA LES CA&ÀGTtKES pléer à ce défaut , change Teau en vin excellent ; et ce vin se sert à là (in du repas y au grand étonne- ment de la compagnie. O vin admirable et plein de mystères , fourni par la charité de Jésus aux prières de la sainte Vierge ! Je vous demande, mes Sœurs , quel intérêt prend le maître de sobriété à ce que cette compagnie ne soit pas sans vin. Etoit-ce chose qui iriéritât que sa toute-puissance y fût employée? Ëtoit-ce en une pareille rencontre où il devoit com- mencer à manifester sa gloire ; et un ouvrase de cette nature devoit -il être son premier miracle? Croyez-vous que ceci soit sans mystère ? à Dieu ne plaise y âmes chrétiennes , que nous ayons une telle opinion de notre Sauveur. II est la Sagesse et la Pa- role du Père : tous ses discours et toutes ses actions sont esprit et vie ; tout y est lumière , tout y est in- telligence ^ tout y est raison. O Sagesse éternelle^ éclairez par votre Esprit saint notre Ibible et im- puissante raison , pou» nous faire entendre la vôti*e« Dans cette histoire miraculeuse , tout me repré- sente le sauveur Jésus. Il y est loi - même en per- sonne : mais si j'ose parler de la sorte , il y est en- core plus en mystère. Il est invité selon la vérité de rhistoire; et si nous le savons entendre, il est lui-même l'Epoux selon la vérité du mystère. C'/est une chose connue que Jésus est TEpoux- des âmes fidèles. Et néanmoins si vous me le permettez, je ious déduirai sur ce point quelques vérités chré- tiennes m^veiUeosement pieuses. Dieu remplit le del et la terre, et il se trouve en tous lieux , comme l'enseigne la théologie : mais il sait encore se communiquer d'une façon toute par- ÎOES DEUX ALLIANCES* 879 ticuli^re aux créatures intelligentes : Ad ipsum i;e- niemus, et mansionem apud eum/àciemus (')y « Nous ^ » viendrons à lui^ et nous ferons en lui notre de* it meure ». Certes il est incompréhensible , mes Sœurs, comment la nature diyine s'unit aux esprits purs par de diastes embrassemens ; et bien que ce soit un secret ineffable, si est-ce toutefois que les Ecritures divines nous le représentent en diverses manières et par de diff&entes figures. Tantôt elles BOUS disent que Dieu est une fontaine de vie, qUi se répandant en nos âmes les lave et les nettoie , leur communique une divine fraicbeur, .et étanche leur soif ardente par les ondes de ses vérités : Fons açuœ salieniis (>}... • QmemMdmodamdesiderat cervus ad fontes aquarum (3), a Comme le cerf altéré sou- » pire après les eaux des fontaines ». Tantôt elles BOUS le décrivent tout ainsi qu'une douce rosée, qui arrosant nos esprits comme par une féconde humi* dite, y fait germer les semences célestes : Rorate, eœU, desuper (4). Quelquefois elles nou» le repré-* sentent à la manière d'un feu consumant , qui péné- trant toutes nos puissances dévore toute» les affecr tions étrangères, et épure nos âmes comme Tor dans une fournaise : Ignis eonsumens est (^}. Elles nous disent ailleurs que Dieu est une nourriture admi- rable : car de même que toutes les parties de nos corps attirent à elles une certaine substance sans laquelle eUes défaudroient , et ensuite se Tincorpo- rent par la vertu d^une secrète chaleur que la na- ture leur a donnée ^ ainsi seroient nos âmes desti- (0 Joan. xiY. aS. — (») Uid, lY. 14. — W Pt- XW. i- ^ W) /*«• ftT. 8. — (^ JhuL iT. a4. 580 SUR LES CÂRÀGTÈHES tuées de toute vigueur, si par de fidèles -désirs ^uê le Saint-Esprit leur excite, elles n'attiroient à elles- mêmes cette vérité éternelle qui seule est capable de les sustenter. C'est ce qui nous est signifié par' ce pain des anges, qui est devenu le pain des hommes, ce ï^ain céleste que nous désirons par un appétit de » vie éternelle, que nous prenons par Fouie, que » nous ruminons par l'entendement^ que nous digé- » i^ons par la foi » : In causam viiœ appetendus, et déporandus auditu, et ruminandus intellectu, etfide digerendus (0. Telles sont à peu près les comparai- sons dont $e servent les Ecritures, pour nous faire en quelque sorte comprendre cette sainte union de la nature divine avec les âmes élues. Mais de toutes ces comparaisons, la plus douce , la plus aimable et la plus ordinaire dans lés saintes Lettres est celle où notre grand Dieu est comparé à un chaste époux, qui, par un sentiment de miséricorde, épris de l'amour de nos âmes , .après mille amoureuses caresses, après mille recherches de ses saintes inspi- rations, s'unit enfin à elles par des embràssemens inefiables ; et les ravissant d'une certaine douceur, que le monde ne peut entendre , les remplit d'un germe divin , qui fructifie en bonnes œuvres pour la vie éternelle. Trois conditions du mariage^ Union : Erunt duo in came und ip) : « Ils seront deux dans une seule » chair ». Douceur : Faciamus adjutorium : il est seul , ce donnons-lui un aide » : il est doux d'être aidé. Fécondité : Crescitè et multiplicaminî' i^) ^ « Crois- » sez et multipliez », C'est ce que l'apôtre saint Paul (0 TtrtulL de Resur, carnis, n. 3;. — W Gen. ii. 114.—. (3) Ibid. 18. DES DEUX ALLIAJrCES. 58 1 nous «enseigne y lorsqu'il dit aux chrétiens que de même que le mari et la femme ne sont qu*une même chair, ainsi « qui s'attache à Dieu est un même es- » prit avec lui » : Qui adhœret Dondno unus spi- ritus est {^); doctrine quele^aint apôtre a trouvée si utile à nos âmes, qu'il la répète en divers endroits, qu'il seroit trop long de vous rapporter. Or (d'autant que nous sommes déchus de cette pre- mière pureté qui nous égaloit aux anges dansTinup- cence de notre origine, étant devenus charnels et grossiers , nous ne pourrions plus soutenir les appro- ches de la nature divine, si elle ne s'étoit première- ment rabaissée. Et de là vient que le Fils de Dieu égal et consubstantiel à son père, pour rappeler les âmes des hommes à cet heureux mariage avec Dieu , dont elles a voient violé la sainteté par l'infamie de leur adultère, est descendu du ciel en la terre ;iil s'est revêtu de chair; il a déposé cette majesté ter- rible , ou plutôt il en a tempéré l'éclat ; il a pris nos foiblesses, afin d'être en quelque façon notre égal , et a voulu que par la nature humaine qu'il a daigné avoir commune avec nous, nous trouvassions un chemin assuré à la nature divine, de laquelle nous nous ^ions éloignés par une funeste désobéissance. C'est ce charitable Epoux de l'Eglise, c'est-à-dire des âmes fidèles, que l'apôtre nous dépeint [dansTé- pître] aux Ephésiens. W. C'est le plus beau des eft- fans des hommes, qui a aimé son épouse laide, afin de la faire belle. Il l'est venu, chercher dans la terre, afin de la conduire en triomphe dans la céleste pa- trie. 11 a donné son ame pour elle , il Ta lavée de son (0 /. Çpr. VI. 17. — (») Cap. T. 27. 59% SVti LES GAEÂCTil&ÏSS sang f il la nettoyée en Teau du baptême par des paroles de TÎe ; son royaume est sa dot : ses grâces sont sa parure. Cest cet Epoux , chères Sœurs, qui fidt aujourd'hui son premier mirade , et représente en son premier miracle ce qu'il est venu faire en ce monde. Ses disciples croient en lui eu ce jour ? c'est le commencement de l'Eglise. Il garde son meilleur vin pour la fin du repas : c'est l'Evangile pour le dernier âge , qui doit durer jusqùes à la consom- mation des siècles. Ce vin il le tire de l'eau ^ et il change cette eau en vin ; c'est qu'A diange la loi en l'Evangile , c'est-à-us disent que le vin n'est qu'une eau colorée , qui prend en passant par la vigne une certaine impression de ses qualités , parce qiie cet élén^ent est 'susceptible de sa nature de toutes altérations étrangères. Ainsi l'eau de la loi ancienne devient le vin de la loi nouvelle. C'est cette même eau de la loi mosaïque ^ qui étant appropriée à Jésus-Christ, vraie vigne du Père éternel , prend ' une nouvelle forme et une nouvelle vigueur. Donc, mes Sœurs, passons les nuits et les jours à méditer la loi du Seigneur. Cherchons Jésus partout, et il n'y ^ura endroit où il ne se montre à nos yeux. Et puisqu'il a plu à notre grand Dieu de nous présenter Ce vin nouveau dé son Evangile, mais de le présenter pur et sans mélange, débrouillé de la lie des figures et de l'eau des expressions prophétiques, n'ayons point désormais d'autre breuvage que cette sainte et iiçmortelle liqueur; que notre esprit soit toujours à goûter la parole divine. Mais ne nous arrêtons point à la lettre ; suçons l'esprit vivifiant que Jésus y a coulé par sa grâce. C'est notre seconde partie , et pour une plus grande brièveté, nous y attacherons aussi là troisième dans une même suite de raisonne- ment. . SECOND POINT. Qde ne puis-je vous transporter en esprit sur cette terrible mont^ae où paroîtla majesté du Seigneur! c'est la montagne de Sina sur laquelle Dieu dcmne sa loi à Moïse. Là je vois ce grand Dieu tout-puis- sant, qui grave sur de la pierre ses saintes lois , di- gnes d'être écrites dans le ciel le plus élevé avec les DES DEUX ALLIAIVCES. 689 rayons du soleil. Et après cela j par la bouche de son serviteur Moïse ^ il fait publier à son peuple ses ordonnances j et menace les transgresseurs de peines dont le seul récit faithorreur. Certescette loi est très- sainte : mais ne vous persuadez pas, mes très-chères Sœurs , qu'elle contienne la vie. Toutes ces paroles majestueuses et cette Bcrîture du doigt de Dieu ne sont qu'un instrument de mort, si elles ne sont ac- compagnées de Tesprit de la grâce. « C'est une lettre » qui tue » , dit le grand apôtre saint Paul (0. Com- . bien d'ames présomptueuses ont été précipitées dans la mort éternelle par ces augustes commandement! Ke vous étonnez pas de cette parole : c'est la doc- trine de l'apôtre saint Paul, et en voici la véritable explication. La loi montroit bien ce qu'il falloit faire; mais elle ne subvenoit pas à l'impuissance de notre nature. Elle frappoit les oreilles ; mais elle ne touchoit pas le cœur. Ce n'étoit pas assez que Dieu d'une voix tonnante et impérieuse fît annoncer au peuple ses volontés : il falloit qu'il parlât intérieure- ment , et que par une opération toute-puissante il amollit notre dureté. Grand Dieu éternel , vous me commandez; il est juste que vous soyez obéi : mais ce n'est rien faire que me commander, si vous ne me donnez la grâce par laquelle je puisse observej: vos commandemens. Or cette grâce n'est point par la loi : c'est le propre don de l'Evangile , selon . ce que dit l'apôtre saint Jean (^), que « la loi a été )) donnée par Moïse , et la grâce et la vérité a été ?y faite par Jésus-Christ »• Qu'^t»ce donc que faisoit la loi? Elle ordonnoit, elle commandoit, elle lioit (0 //. Cor. lu. 6. — (») Joan- 1. 1 7. SgO SUR LES CÂRÀCTÈRSi les transgrèsseurs d^éternelles malédictions ; parc^ que « maudit est celui qui n'observe pas les paroles » qui sont écrites en ce livre (>) » : mais elle ne soula- geoit en rien nos infirmités. C'étoit une eau foible et sans vigueur^ capable de nous agiter ^ incapable de nous soutenir. C'est pourquoi le sauvenr^Jésus ayant compassion de notre impuissance , vient nous donner un vin d\ine t^éleste vigueur : c est sa grâce ^ c'e^ son Esprit saint dont les apôtres furent esivrés au jour de la Pente- côte. C'est ce «sainl et devin Esprit qui porte la loi au fond de nos cœurs, et l'y grûVe par des caractères de flamme. Là il l'anime intérieurement et la rein- plit d'une force vivifiante : il change la lettre en es- prit, et c'est la nouvelle alliance que Dieu contracte avec nous par son Evangile. C'est pour cette ra&on que parlant par la bouche de lérémie , « Voici , » dit-il Wf que ^'établirai avec la maison de Joda un 9 nouveau testament , non selon le testament que » l'ai établi avec leurs pères : ils ne sont point de- » meures dans mon testament , et moi je les ai re- » jetés, dit le Seigneur. Mais voici le testament que » je di^oserai à la maison d'Israël » , c'est-à-dire aux vrais en&ns d'israâ et au peuple de la nouvelle alliance : « J'inspirerai, dit-U, ma loi dans lettre 9 âmes ; et je l'écrirai non en des tables de pierre , 9 mais je l'écrirai ea leurs cœurs; et ils seront mon 9 peuple, et je serai leur Dieu ». Quelle est donc cette vertu merveilleuse, qui entre si profondânent dans nos cœurs ! d'oà vient à cette loi nourelte cette force si pénétrante 2 Chères Sœurs, elle vient de Fes- (0 Deui. xxyii. a6. — («) Jerem. xuu. 3i, er #cmV. DES DCUX AILIANCES^ SqI prit de Dieu^ qui est le vrai moteur de nos âmes, qiii tient nos cœurs en sa main , qui est le mattre de nos inclinations. Mais par quelle sorte d'opérations la. porte-t*il ainsi au fond de nous-mêmes ? c'est par une charité très -sincère^ par un puissant atnour quil nous inspire, par une chaste délectation , par une sainte et ravissante douceur* Dieu exerce deux sortes d'opératiois sur nos âmes , qui font la différence des deux lois. Premièrement il les effraie , il les remplit de la terreur de ses juge- mens : et en second lien il les attire, il les enflamme d'un saint amour. La première opération , qui est la crainte , ne peut pénétrer au fond de nos âmes : elle les étonne , elle les ébranle ; mais elle ne les change pas. Par exemple, que vous rencontriez des voleurs, si vous êtes le plus fort, ils ne vous abor- dent qu'avec une apparence de civilité feinte : ils n'en sont pas moins voleurs , ils n'en ont pas l'ame moins avide de carnage et de pillerie. La crainte étouffe les sentimens, eller semble les réprimet*; mais elle n'en coupe pas la racine. Vojez cette pierre sur laquelle Dieu écrit sa loi : en est-elle changée , pour avoit en soi de si saintes paroles? en est-elle moins dure? rien moins. Ces saints commandefiiens ne tien- nent qu'à une superficie extérieure. Ainsi en eist-il de la loi de Dieu : quand elle n'entre dans nos ameS que par la terreur , elle ne touche que la surface r tant qu'il* n'y a que cette crainte seiTile, lé fond ne peut être changé comme il faut. Il if y a que Ta- mour qui entre au plus secret de nos coeurs : lui seul en a la def; lui seul en m6dère les mouvemens. Vous avez de méchantes inclinations , vous avez des 59^ SUH LES GAnACrÇRES. affections déréglées : . jamais elles ne pourront être chassées que par des inclinations contraires ^ que.par un saint amour , que par de chastes affections du vrai bien : ainsi l'ame sera toute autre. L'amour la dilate par une certaine ferveur : il l'ouvre, jusqu'au fond y pour recevoir la rosée des grâces célestes. Ce n'est plus une pierre sur laquelle on écrit au de- hors : c'est un«i cire pénétrée et fondue par une di- vine chaleur. C'est ainsi que le sauveur Jésus est vé- ritabfement gravé dans toutes les facultés de nos âmes. Il est dans nos volontés toutes transportées de son saint amour : il est dans la mémoire; car on ne peut oublier ce qu'on, aime k il est dans l'entende- ment; car l'amour curieux et diligent n'a point d'au- tre satisfaction 9 que celle de contempler les perfec- tions du bien-aimé qui l'attire. De là il passe dans les corps par l'exercice des vertus et par de saintes opérations^ qui, prenant leur origine de l'amour de Jésus y en conservent les traits et les caractères. Tel est y mes très-chère^ Sœurs, l'esprit de la loi nouvelle. C'est pourquoi Dieu ne vient point ànous avec cette apparence terrible qu'il avoit sur le mont de Sina. Là cette montagne fumoit de la majesté du Seigneur, qui « fait distiller les montagnes çojnme » de la cire (0. ». Ici il ne rompt pas seuletnent un roseau à demi-brisé (^); il est tout clément et tout débonnaire. Là on n'entend que le bruit d'un long et effroyable, tonnerre : ici c'est une voix douce et bénigne : « Apprenez de moi^ dit-il, que je suis doux » et humble de cœur (3) ». Là il est défendu d'ap- pi^ocher sous peine de la vie : « ff 'approchez pas, (>) Ps. XGYi. 5. — («) Mauh. XII. ao. -** i?) Ibid. zi. ag. » dit-il. BBS DEUX ALLIicNCXS. 5^3 » dit-il I de peur que vous né siourieK'^et les hommes » et les animaux qui approcheroniL de la montagne^ p ils mourront de mort (0 j». Ici iJl change biea.de langage : « Venez , venez ^ dit41 IpO ,. approd^z ^ ne » craignez pas ^ mes enfaiss : venez ,. oppressés ^ ]• » vous soulagenaûy je vous aiderai. à pcK^ter tos lar«- » deaux : veiie:&;« malades, jt vohs gusiirai : pé« » cheurs, pubHcains , approchez , je suis votre lÀbé* » rateur ; ne chassez pas ces petits^eitfaïasy à de tels » appartient le royaume de Dieu (?) i». B*o& viient ce changement y^imest très -chères Sœurs 2 ah! dest qu'il se veut faire aimer. Il vient changer .la terrewr en amour y cette eau froidede la ci^amtequi ii^esseri^ roit le cœur par une basse et seji^vik timidité^ ep un vin d'une divine ferVeur qui le dilatera /qui lleiicoùr ragera ^ qui réchauffera par de bienheureuses ar*> deurs. C'est Tesprit de la loi nouvelle. Je vous ai dit les cbangemens qu a faits le Sauveur* I^eau ^ vous ai-je dit , est fade et iqsipid^.* Âinsi^ étoit la loi dans ses ombres et dana ses figures, si Jésus w la^ehange en la vérité de son Evangile j^ vi0 doiux et sav^ureiftx^ qui nous remplit* de délices ;€élestesi V^au ulik-ppinM de, force pour noitô émouveir. Ainâi étoit la ;lor pat sa lettre inutile. et impuissaate^ si eUe^nle&t s^çomr. pagnée du vin de la loi nouvelle:^ c'est^^dipe' de Tea-» prit de la grâce.. Ces deux premiers chaiiigeii^ns'ne sont que pour le troisième. Asâez et tropdoagrtamps BOUS avons été abreuvés de cette, itoîde terreur :.il est temps qae nos cceurs soient échauf£»fl de rainùiin de Diea. {^)Exod. XIX. 12, l3.— C») ATaft/xi. 2S, 'et alibi -^ (}) Marc! BOSSUET. XI. 39 i I N î 5^4 ^^^ ^^^ CARA.GTÊRB»' Mes Sœurs ^ nous ne sommes plus sous la loi de crainte y nous sommes sous la loi d'amour; parce que nous ne sommes plus dans la servitude; nous sommes dans la liberté des enfaqs de Dieu : Jésus , qui est la vérité y nous a délivra. Partant servons notre Dieu d'un amour libéral et sincère. Aimons la justice, aimons la vérité, aimons la vraie et solide raison, aimons Tunique repos. Tout cela c'est Jésus : aimoùs donc Jésus de toute l'aiFection de nos âmes : qui n'aime pas Jésus, je l'ose dire, il n'est pas chré- tien» Un chrétien c'est un homme renouvelé : nous ne pouvotis être renouvelés sans l'esprit de la loi nou- velle : l'esprit de la loi nouvelle , c'est la charité : qui n'a pas la charité n'est pas chrétien. Ah ! que le siè- ole se réjouisse dans les débauches et dans les ban- quets, dans les vins friand^ et délicieux ! Nous avons un vin dont il nous est permis de nous enivrer ; vin qui nous échauffe, lâais d'une ardeur toute spiri- tuelle; qui nous fait chanter, mais des cantiques d'amour divin , qui nous ôte la mémoire, mais du monde et de ses vanités ; qui nous excite une grande jbie, mai&une joie que le monde ne comprend pas. Buvons de ce vin y mes irès^chères Sœurs. Jour et nuit ne respirons que Jésus : vous particulièrement qu'il a retirées du siècle, goûtez Jésus^ dans la sK>li- tude ; c'est là qu'il se communique aux âmes fidèles. ' Et vous, chères Soeurs, que par sa miséricorde in- finie, il a miraculeusement délivrées des ténèbres de l'hérésie , c'est à vous, c'est à vous que je parle. Et quelles paroles pourroient vous exprimer la ten- dresse que mon cœur a pour vous ! IVendez-iui à ja- mais vos actions de grâces. Voyez combien l'err^ir DES DEUX ALLIANCES. SqS est répandue par toute la ville. Dieu vous a triées deux ou trois qu'il a appelées à sa sainte Eglise : donc ne soyez pas ingrates à cet inestimable bienfait. Persévérez dans cette bienheureuse vocation. Voyez la pureté , voyez Tinnocence et )a candeur de ces saintes filles, avec lesquelles vous conversez. O Dieu, quelle différence de cette véritable dévotion qu'elles vous enseignent en toute humilité et simplicité, avec le faste, et l'orgueil, et la piété contrefaite de l'hé- résie! Persévérez, mes très-chères Soeurs ; n'écoutez ni les larmes ni les reproches de vos parens. Dieu vous fasse la grâce d'expérimenter combien sa sainte maison est plus douce que la maison paternelle. Voyez ces redoutables autels : les sacremens que nous y distribuons , ce ne sont pas des ombres ni des figures : nous ne sommes plus sous la loi judaïque : c'est la réalité, c'est la vérité , c'est la propre chair de Jésus autrefois pour nous déchirée; c'est son sang vivifiant épanché pour l'amour de nous. Jouissez des délices de cette chair de laquelle l'hérésie s'est pri- vée , pour se repaître de la vanité d'une cène ima- ginaire, etc. 596 Stn LES CARACTÈRES FRAGMENT SUR LE MEME SUJET W. «»<%»^^^^fc et d'autant plus que la cause est parfaite, d'autant plus ce rapport est exact : et la raison en çst évidente ; car si la cause est plus excellente , il s'ensuit que l'opération est mieux ordonnée. Or il est certain que l'ordre consiste dans l'accord de la fin avec les moyens ; et c'est de ce concert que ré- sulte cette justesse qu'on appelle l'ordre. Cette vérité étant supposée , passons outre maintenaht , et disons : La loi est une œuvre d'intelligence^ et d'une intelli* gence infinie; parce que c'est une œuvredeTespritde (<*) Ce morceau a visiblement rapport au premier point du ser* mon précédent : aussi s''est-il trouvé réuni au même manuscrit sur une feuiUe séparée. Nous ne Pavons cependant pas incorporé à ce premier point, parce qu''il étoit impossible de lier Tun avec Fautre sans quelque confusion. Edit. de Déforis, CO /. Cor. X. 1 1 .. ©ES DEUX ALLIANCES. Sg^ Dieu. Par conséquent elle aune fin à laquelle elle est destinée ; et quand nous connoitrons cette fin , il ne faudra nullement douter que toutes les parties de la loi n'y soient rapportées. Or l'apôtre saint Paul nous assure que a Jésus-Christ est la fin de la loi » : Finis legis ChristusW. C'est pourquoi, et les pa- triarches , et les prophètes soupiroient perpétuelle- ment après sa venue ; parce qu'il étoit la fin de la loi et le sujet principal de ses prophéties. D'où il s'en- suit manifestement que toutes les cérémonies de la loi j toutes ses solennités y tous ses sacrifices regar- doient uniquement le Sauveur ; et qu'il n'y a page dans les Ecritures en laquelle nous ne le vissions, si nous avions les yeux assez épurés. Et certes, puisqu'il plaisoit à notre grand Dieu de se revêtir d*une chair humaine , il étoit conve- nable , mes Sœurs , que de même que ce mystère étant accompli, nous en célébrons la grandeur par de pieuses actions de grâces ; aussi ceux qui en ont précédé l'accomplissement , vécussent dans l'attente de ce bonheur qui devoit arriver à notre nature. Il est vrai que le Verbe éternel, en se faisant hpmme , est né dans un temps limité ; car c'est une éuite de la condition humaine. L'éternité s'est alliée aveè le temps , afin que ceux qui sont sujets au temps pus- sent aspirer à l'éternité. Mais encore que la venue du Sauveur fût arrêtée à un temps certain par les ordres de la Providence divine 5 toutefois il faut avouer que le mystères du Verbe fait chair devoit remplir et honorer tous les temjps. C'est pourquoi il (0 Jlom. X. 4. S98 Sun LES CÂRÀCTÈIIES ëtoit à propos qu'où il n étôit pas par la vérité de sa présence y il y fût du moins d'une autre manière par des figures très-excellentes. Et de là vient que la loi de Moïse est.pleine de merveilleuses figures qui lions représentent le sauveur Jésus. En efiet je vous demande ^ mes très-chères Sœurs, d'où vient tant de sang r^andu dans les cérémonies anciennes; sinon pour représenter le sang de Jésus? Pourquoi est - ce que par le sang de l'Agneau le peuple est délivré du glaive vengeur qui désola les maisons des Egyptiens ? pourquoi est-ce que l'alliance est signée et ratifiée par le sang ? pourquoi n'y a-t-il point d'entrée dans le sanctuaire, si le pontifia n'a les mains teintes du sang des victimes 7 pourquoi les crimes sont-ils expiés , les pontifes et leurs vête- mens consacrés par le sang versé dans le sacrifice ? Je sang des animaux égorgés étoit-il sufiisant pour appaiser Dieu? étoit-il capable de purifier l'homme? Si ce n'est pour nous faire entendre qu'il n'y a ni délivrance , ni consécration , ni alliance , ni expia- tion , ni salut , que par le sang de l'Agheau sans ta- che y « qui a été tué, dit saint Jean (0, dès l'origine » du monde » : tué, dis-je, dès l'origine du monde, parce que dès l'origine du monde sa mort a étéfigu- rée par une multitude infinie de sacrifices sanglans. C'est ce qui fait dire à Tertullien : O Christum in novis veterem (2) ! « O que Jésus - Christ est ancien » dans la nouveauté de son Evangile» ! Ce que nous honorons ^t nouveau , par(^ que Jésus-Christ l'a mis dans un nouveau jour : ce que nous honorons (0 Apoc, xiii. 8. — C«) LiÏK IV. adv. Marcioiu n.2i% DES DE0X ALLIÂSrCES. S99 est ancien , parce que la figure s'en trouve dès les premiers temps. La loi est un Evangile caché -, et TE vangile est une loi expliquée. Et c'est ce qù'exprinie l'apôtre saint Paul en ces excellentes paroles : « La loi a l'ombre des choses » futures y et non point la vive image (0 ». Que veut dire ce grand apôtre^ que la loi a l'ombre et non point la vive image des choses ? La comparaison est prise de la peinture. Le peintre dessine le portrait du roi. Vous en voyez déjà quelque ressemblance dans les premiers crayons du tableau : ce sont ses traits y c'est sa taille , c'est son air, c'est l'image du prince que vous y voyez : mais quand l'ouvrage sera accompli , c'est alors que le roi paroîtra avec sa ma- jesté naturelle. Ainsi la loi avoit Jésus-Christ dans des ombres et dans des figures , et comme dans un crayon imparfait ; mais elle n' avoit pas l'image finie. Et de même que la peinture achevée efface les linéa- mens imparfaits , ainsi la beauté parfaite de l'Evan- gile efface l'imperfection de la loi par des couleurs plus vives et plus éclatantes. C'est pourquoi Jésus- Christ change l'ëau en vin , c'est-à-dire la loi de Moïse an son Evangile. ii)ffebnx, I. 6oO SUft I«à LÈPllE P17 PÉCHÉ ABRÉGÉ D:UN sermon POUR LE TROISIÈME DIMANCHE APRÈS L'EPIPHANIE. »»^^K%^W»«4<^^^*<*^^<*»% Evangile du Lëpreux et da Centenier. MaUh. tiii. i. Marc, I. 4o« Luc, v. 13. Deux sacremens : dans la guérison du Lépreux^ Fexpiation du péché par la pénitence ; dans le Cen* tenier, Iji préparation à Teucharistie. Jésus en descendant de la montagne j où il vient de publier tous les préceptes de la loi évangélique , nous apprend la rémission des péchés. Après le pré- cepte ^ la prévarication ; et par grâce , la rémission. Il ne souvient [guère] de songer aux bonnes œuvrer qui sont à faire , aux péchés qui sont à expier. .« Nous » devons cependant travailler chaque jour à la ré- » mission des péchés que nous commettons sans » cesse » : Sub quotidiand peccatorum remissione mvamus (0. Dénombrement des péchés. Toute notre viC; inutilité : non-seulement paroles oiseuses; mais tout oiseux : nous sommes Toisiveté même. Je con- fesse vos péchés et les miens , ceux que la plupart du CO s. Aug. Serm. lviii. n. 6, tom. r, coL ^^^ ET tES MOTEN5 DE LA GBÉRIR. 6oi monde ne confesse pas. Venez donc à Jésus; [dites- lui ] : « Si vous voulez , vous pouvez me guérir » : Si vis j potes me mundare; [Il vous répondra] : « Je » le veux, soyez guéris» : Volo, miindareW. Quand le prêtre parle, Jésus parle : c'est lui qui dit : « Je » le veux , soyez guéris » : Volo^ mundare. Il lui défend de parler , il Tenvoie aux prêtres « pour leur sei*vir de témoignage » : In testimonium illis {^). Ce n'est pas qu'il veuille que le peuple ignore ses merveilles et sa mission ; il veut qu'il les apprenne par la voie ordinaire établie de Dieu. La cure du lépreux. La lè^pre est une impureté : elle signifie le péché. « [ Le pécheur ainsi que le lé- » preux ] doit être condamné comme impur » : Im- mundiUœ condemnabitur (^). On ne traite pas de même tous les lépreux. La lèpre nouvelle et la lèpre invétérée. Les pécheurs ne doivent pas s'étonner si [ on les traite ] diversement. Médecins qui ne dis- cernent pas. Il faut savoir discerner entre la lèpre et la lèpre. Les clefs pour fermer et pour ouvrir. La communion avec discrétion ; Et dixit Atersatha eis ut non comederent de sancto sanctorum , donec surgeret sacerdos docius atque perfectus (4) : « Le w gouverneur leur dit de ne point manger^ de » viandes sacrées, jusqu'à ce qu'il s'élevât un pon- » tife docte et parfait ». « Un malade^ dit saint » Augustin , reçoit d'autres préceptes pour traiter » sa maladie , que ceux qu'on lui donne en santé » : Secunda prœcepta œger accepit (5). (0 Matih. TUT. a. — (») Ihid. 4. — (3) Lei^it. xiii. 8. — (4) LEsdr. H. 63. — (5) Serm, lxxxyiii. n» 7, tom. v, coL 473. Senn, cclxxyii. n. a. coL 1 1 24. 602 sua Zk zfePRË DU PÉCHÉ « Tout homme infecté de la lèpre, qui avoit été y> séparé des autres par le jugement du prêtre , de- » voit avoir ses vétemens décousus, la tête nue, le » visage couvert de ton vêtement , et devoit crier » qu'il étoit impur et souillé* Il étoit obligé de de- » meurer seul hprs du camp , pendant tout le temps » qu il étoit lépreux et impur »: Quîcumçue macula- tusfuerit leprâ ^ et separalus est ad -arbitrium sa- cerdotis ^ Jiabebitvestimenta dissutUy caput nudum, os veste contectum , contaminatum ac sordidum se clamabit : solus habitabitextra castrai^). Le pécheur doit être séparé de peur delà contagion: c'est pour- quoi la victime pout* le péché [ s'immoloit ] « hors » du camp » : Extra castra (2) ;et notre Seigneur [ a été crucifié] «hors des portes de Jérusalem » : Extra portam (^): excommunicatiou que Jésus -^ Christ 2^ soufferte. Offeres munus quod prœcepit Moyses{^ : « Vous » offrirez le don que Moïse a prescrit » , deux passe- reaux. On en immole Tun ; on délivre l'autre , on le lâche en liberté après avoir été trempé au sang de l'autre (5»}. Jésus- Christ immolé ; toute la nature vi- vante : elle est délivrée, mais il faut quelle soit trempée au sang de Jésus -Christ par la mortifica- tion. La vie délicieuse ne souffre pas qu'on soit trempé da^ ce sang. « Cejile qui vit dans les. délices » est morte, quoiqu'elle paroisse vivante » : Vivens mortua est {^). * Le lépreux étoit obligé de couper tous les poils , ses cheveux, sa barbe, ses sourcils. La lèpre s'atta- (0 Levit. XIII. 44» 4^> 4^' "^ ^'^ ^^^^' iv^ ai. — (3) Heb. xiii. n. — (4) Mau, viii. 4. -u 15j LevU. xiv. 4, 5, 6, 7. -- (6) /. Tim, v. 6. ET LES MOYENS SE LA GTTÉRIR. 6o3 choit principalement 3in:£ cheveux et aux poils. « L'homme de la tête de qui les cheveux tombent , » est chauve et pur » : f^ir de cujus capite capilli Jluunt, calvus et mundus est{^)i c'étoit une marque. { Les poils sont ] un superflu : le superflu retran- ché j c'est là que les péchés s'attachent. Ne deman- dez pas ce qu'il faut retrancher : retranchez quelque chose y la lumière vous viendra pour retrancher tou- jours davantage. Retranchez par l'aumône ; retran- chez tous 'les jours quelque chose à la vanité. On objecte toujours la bienséance : il faut couper même 4 les sourcils et la barbe : il n'importe pas quand le visage sera un peu défiguré. Personne plus obligé aux aumônes que les lépreux purifiés y les pécheurs guéris. Deux raisons pourquoi l'aumône ôte les péchés : i.o Le péché naturellement demande d'être puni par la privation de tout bien. Qui est ingrat et re- belle envers Dieu^ mérite la soustraction de tous ses dons y et ne doit rien avoir dans son empire : il a abusé de tout. Si l'on n'est pas effectivement privé ^ il faut compatir à ceux .qui le sont^ soufirir avec eux : fc Exercer la patience à l'égard des uns y et » la miséricorde envers les autres » : Aliosperpa- lienliam, alios per misericordiam W. 2.® Par l'aumône on empêche les péchés des au- tres, une infinité de péchés où la'pauvreté engage; péchés inconnus, iAcestes pour n'avoir point de lits, et autres abominations. Rien de meilleur pour ex- pier nos péchés commis, que d'empêcher que les autres n'en commettent. « La charité couvre la mul- (0 Levit, XIII. 40' — W S, Léo. 6o6 SUK LE MÉLANGE que je parle. Ces lettres ce sont les Ecritures divines que notre Père céleste nous adresse par le ministère de ses saints prophètes et de ses apôtres, et même par son cher Fils qu'il a envoyé sut la terre pour nous apporter ici-bas des nouvelles de notre pays, et nous donner l'espérance d'un prompt et heurenx retour. De sorte que si nous désirons ardemment de voir cette glorieuse «ité dont nous devons être les habitans , si nous sommes vivement touchés de l'a- mour de notre patrie , où notre bon Père nous con- serve un grand et. éternel héritage; toute notre consolation doit être de lire ces lettres : nous en devons baiser mille et mille fois les sacrés caractères, et surtout nous en devons nuit et jour ruminer le sens. C'est pourquoi le prophète David chantoit à son Dieu parmi des soupirs amoureux : « O Sei- » meur, voyez que je suis étranger sur la terre : an » moins ne me refusez pas cette unique consolation » de méditer votre sainte parole » : Incola ego sum in terra, non abscondas à me mandata tua (0. Ainsi je ne m'étonne pas, mes très-chères Sœurs, si vous avez une telle avidité d'entendre la parole de Dieu« C'est un effet de ce pieux gémissement que le Saint- Esprit inspire en vos âmes, les sollicitant par de saints désirs. Je m'estimerois bienheureux si je pou- vois contribuer quelque chose à satisfaire ces pieux désirs. Ecoutez, écoutez, mes Soeurs, les paroles du saint Evangile ; et si je vous semble peu de chose, comme en effet je ne suis rien, songez que c'est la voix de votre Epoux que vous entendez par ma touche. SUR LE UÉhAJXGlt DES BONS AVEC LES MÉCHÀNS. 6o5 SERMON POUJl LE CINQUIÈME DIMANCHE APRÈS L'EPIPHANIE. « Jérusalem et Babylone, leur esprit et leur caractère. Raisons de la conduite de Dieu dans le mélange des bons avec les méchans : comment ils sont séparés dés à présent : suites de la dernière sé- paration. ^^^l^^^^^f^f^^9riÊMf^ Sinite utraque crescere usque ad messem. Laissez croître Vun et Vautre jusqiih la moisson. M atth, XIII. 3o. 1 ouT autant qae nous sommes de chrétiens ^ nous sommes de pauvres bannis ^ qui étant relégués bien loin de notre chère patrie, sommes contraints de passer cette vie mortelle dans un pèlerinage conti- nuel y déplorant sans cesse la misère de notre péché qui nous a fait perdre la douceur et la liberté de notre air natal , seul capable de réparer nos forces perdues et de rétablir notre santé presque désespé- rée. Cependant y mes très-chères Sœurs , ce qui adou- cit les ennuis et les incommodités de notre exil, ce sont les lettres que nous recevons de notre bienheu- reuse patrie : vous entendez bien que c'est du ciel 6o8 SVK LZ MÉLAKGE gloire. Animé de ce bon succès , il n'a cessé de ]eter autant qu'il a pu les semences du vice et du dësoi> dre f partout où il a vu que la munificence divine ré- pandoit celles de ses grâces. Si bien que, par ses arti- fices, le bon et le mauvais gi^ain, c est-à-dire les bons et les mauvais se sont trouvés çiêlés ensemble dans le même champ , c'est-à-dire, ou bien dans le iDonde, comme notre Seigneur l'interprète^ ou [dans] la sainte 'Eglise, comme je le paurroîs justifier aisé- ment par d'autres endroits de FEcnture. Là dessus quelques faux zélés se sont élevés, qui ont trouvé ce mélange insupportable : il leur a semblé que la jus- tice divine devoit incontinent exterminer les impies, et ouvrir sous eux les plus noirs abimes pour les en- gloutir. Mais notre sage Père de famille ne défère pas à leur zèle inconsidéré et superbe : il ordonne que l'on les laisse croître jusques à la moisson, c'est- à-dire la fin des siècles : et alors il enverra ses saints anges pour faire cette dernière et éternelle sépara- tion , par laquelle les méchans séparés pour jamais de la compagnie des bons^ seront jetés dans la flamme , pendant que la troupe des justes toute pure et toute éclatante , fera voir dans le royaume de Dieu autant de soleils que de saints. C'est Tin- terpréiatioA de notre parabole. [Daaas ce discours je vous exposerai] TintentioR de notre Seigneur ea deux réflexions^ la première sur le mélange^ la se^ conde sur la séparation des bons et dés mauvais. Depuis le péché du premier homme, l'iniquité a régné dans le monde. Tous s'étoient écartés de la bonne voie : « Il n'y avoit personne qui fit bien, » non SES BOVS AVEC LE9 HÉÇMÀNS. 609 >i non pas même un seul » y. comme chantoit autre- fois le Psalmiste (0, [au psaume] rapporté dans Yé^ pitre aux Romains (^). C'est pourquoi saint Augustin a dit (c qu'il y ayoit dans le monde comme une ville 3» d'iniquité y qu'il a appelée Babylone (^) ». Baby* lone en langue hébraïque^ c'est-à-dire confusion : il l'appelle donc Babylone , parce que l'iniquité et \% confusion sont inséparables. Cette, cité, mes Sœurs y c'est le règne, l'assemblée, ^t pour parler de la socte^ la république des méchans. Mais Dieu regardant d'enr» haut en pitié cette noire et criiiiinelle ignorance,, a envoyé son Fils au monde pour le réformer. C'est lui qui contre cette cité turbulente^ qui par son auda* cieuse rébellion dominoit.par toute la terre, a établi une cité sainte qui doit servir d'agile à tous ceux qui se voudront retire^r de cette confusion générale. Cette cité; mes ti^ès-chères Soeurs, c'est la sainte , la spirituelle, la mystérieuse Jérusalem, c'est-à-dire vision de paix ; aQn d'opposer la paix des enfans de Dieu au désordre et au tumulte des enfans du monde» Mais oik se bâtira cette viUe innocente? quelles montagnes assez hautes, quelles mers et quel océan assez vaste la pourroient assez séparer de cette au- tre cité criminelle? chères Soeurs, le Prince son fon-^ dateur ne l'en veut point séparer par la distance des lieux : dessein certainement incroyable ! il bâtit Jérusalem au milieu de 3abylpne. Durant le cours de ce siècle pervers , les bons seront mêlés, avec les méchans. O Dieu éternel ! quel mélange de ces deux (0 Ps, xni. 4- — W Rom, ui. la. — P) InPs. xxyi. ». i8, tom. it, ooL ia6. BOSSUET. XI. 4<^ peuples divers , je veux dire des saints et des impies ! YutL est prédestiné à la vie éternelle , ^ l'autre ré-^ prouvé- à jamais. Leurs princes sont ennemis. Le prince de Jérusalem c'est Jésus : le diable est le prince de Babylone. Ils vivent sous des Jôis directe- ment opposées. L'apôtre, comme vous savez , distin- gue deux sortes de lois; l'une est la loi de l'esprit, elle gouverne Jérusalem : l'autre est la loi de la qhair^ qui domine dans Babylone. Leurs tncèurs sont toutes contraires. L'une se propose pour dernière fin une paix trompeuse^ à cause qu'elle est passagère : l'autre, parmi beaucoup d'afflictions présentes, gé- mit et soupire sans cesse après une paix assurée , à cause, qu'elle est éternelle. Qu'est-ce à dire ceci; mes très-chères Sœurs? Ces deux peuples de bons et de méchans , dont les lois sont si fort opposées , les ipœurs si contraires , les desseins si incompatibles, >4vent néanmoins ensemble dans une méine société ; i^s sont éclairés d'un même soleil -, ils respirent un même air-, la terre, leur mère commune, leur four- nit à tous indifféremment une nourriture semblable. Bien plus, nous les voyons tous les jours se présenter aux mêmes autels; ils sont associés dans la commu- nion de l'Eglise ; ils participent aux mêmes mystè- res ; ils sont régénérés et repus de la vertu des mê- mes sacremens. Oserions -nous bien, ô Seigneur; vous demander raison d'un mélange si surprenant? it Quelle convention ^ je vous prie , entre Jésus- ]»: Christ et Bélial(')»? Pourquoi voulez-vous que les corps soient si proches, et les cœurs tellement sé- DES BONS ÀVBG LES MÉGHANS. 6ll parés? Que vous ont fait vos enfans de les punir si cruellement , les contraignant de vivre avec vos en- nemis et les leurs? Quel nouveau genre de supplice de joindre ainsi le vif et le mort ? Vous , Seigneur , qui avez si bien rangé chaque chose en sa place ^ qui avez séparé la terre et le firmament, les ténèbres et la lumière y ne séparerez-vous point les justes d'avec les impies? Certes le ciel et la terre ne sont pas si fort éloignés , les ténèbres et la lumière ne sont pas si contraires y que sont la vertu et le vice : pourquoi donc les laissez -vous ensemble? N'avez- vous dé- brouillé la confusion du premier chaos , qu'afin de nous rejetet* dans un chaos plus horrible? Eclairez- nous , Seigneur y sur cette difficulté, non point par les raisons de la philosophie humaine, mais par la considération de vos secrets jugemens et de votre providence irrépréhensible. L'admirable saint A^ugustin nous donne sur ce su« jet une très-belle doctrine. « Les méchans , dit ce » grand personnage (0, ne sont dans le monde, ou » que pour s'y convertir, ou que pour y exercer les » bons » : Nisi ut conyerlantur , vel ut per eos boni exerceantur, O peuple choisi , ô enfans de paix , ô citoyens de la Jérusalem bien-aimée, si Dieu votre père eût voulu que vous vécussiez en paix en ce monde, il ne \ous auroit pas exposés en proie au milieu de vos ennemis : mais voulant exercer et épu- rer votre vertu par l'épreuve de la patience, il vous^ a mis parmi une nation ennemie, afin que vous souf- frissiez en ce siècle leur persécution et leur violence. 6l^ SUR I.E HÉLAK&B C'est pourquoi dans la. mai$oa de nQtive père Abra- ham, selon, qpe l^ remarqua TapôlijL^e (0, Ismaël letifant de la chair et de la servante , pers^çutoit Isaac le fiU de la promesse et de sa maîtresse. TSq voye^-vops pas que dans le veotre de E^j^qcca, femme du patriarche Isaac , ces deux gemea^ox qu elle porte, Esao et Jacob^ Tua %ure des réprouvés. Tau* tre Timage des. enfant de Dieu, « encore enfermés Il daçs les mêmes entrailles commencent k. se faire » la guerre » : ColUdek^r^r in uiero ejuspa,tvuli (^J, Que signifie ce . mystère , mes. Sosurjs ? « Tu portes , i> ô,Râ>eccay dans tqp. ventre, dit la. parole divine, » deux grandes et nombreuses natipiis)! : i)ui^ gén- ies simt in utero tuQ (3). Quelles sont ces nations, chères Sceurs? c'est d'une part la nation des justes , et de l'autre celle des impies^ rep^éseutées dans ces deux enfans. Esaii, je l'avoue, supplantera Jacob pour un peu de temps ^ il sortira le premier^ il em- portera le di^oitf d'aînesse. Il faut quq dans le cours de ce siècle les. bous etilessaiptSy le nipnde prédestiné serv.e et gémisçe pour rQ^^i^^ir^ ^us l'oppression et la tyrannie des méchan^i et^ d^s réprouvés, jyiais en- fin tôt ou tard la face des choses sera chapgée. Après qu'Esaiî aura joui quelquq temps de sçn dnoit d'aî- nesse; c'est-à-dire après que les méchant auront en apparence triomphé quelque temps dans ce monde par leur imaginaire félicité,. J^cpb emportera la bé- nédiction paternelle : il; demeurera le seul et véri« table.supplantateur, comme sou nom le lui promet- toit. La prophétie divine s'accomplira, qui dil.que (0 Gai tv. — C«) Gènes, «y. aa. — W lèid. a3. DES BOirS AVEC L'ES MlÊCnÀN'^. 6l3 le Faîne servira au cadet » : Major serviet minorii^) : 6*e^»àHiire que les bonB^ qui paroissoient ici-bas être dans Toppression et dons la disgrâce, dans cette grande révolution qui arrivera à la fin de^ siècles ^ commenceronft à prendre la première place; et les méchahs étonnes d'une si grande vicissitude^ gënri*^ ront à jamais dans une captivité insupportable. G*est ce qui nous est montré en figài'e en la Genèse. Maii; en attendant y mes très-bhères Sœurs , il est néces^ saire que les bons souffrent. Car de même que notre grand Dieu a jeté notre ame, qui est d'une si divine origine, dans une chair agitée de tant de convoi- tises brutales , afin que la vigueur -de Fesjf^rit s'éver- tuât tous les jours par la résistance du t^oi^^ ainsi a-t-il mêlé lel$ bons parmi ies im|>iés , afin qnè ceux- là supportant la persécîitioii de ceux-ci, ^'aniânas-* sent d'aatant plus à la vertu ^ qu'ils ytrouveroient plus d^obstaclï». Et c^st, à vrai dire, mes Soettrs , le grand miracle de la grâce divine. Mener une vie innocente loin de la corruption commune , c'est f effet d'nne vertu or- dinaire : mak Itfisser les ^ftrstés dans la compagnie des méchans, et fortifier par -là leur vertu ; leur faire resfrirer le même air, et les préserver de la con- tagion ; les faire vivre parmi Finiquité^, et leur faire observer la justice; c'est où paroît le tnomphe de la toute - puissance divine. C'est- ainsi , mes Sœurs, qu'elle se plait de faire parottre la lumière plus écla- tante et plus pure parmi F^aisseur des nuages. Ce grand Dieu tout-puissant qui a préservé , et les en-^ (0 Gene4, xxv. aS. 6l4 S^^ l'K MÉLÀITGB fans dans la fournaise , et Daniel parmi les lions, qui a garde la famille de Noé sur un bois fragile contre la fureur inévitable des eaux universellement déborr dées; celle de Lot, de Fembrasement et des mons** trueuses voluptés de Sodome ; qui a fait luire à ses enfàns une merveilleuse lumière parmi les ténèbre^ d'Egypte ; qui a fait iiattre des eaux vives parmi les déserts arides de la Libye : ce Dieu a pris plaisir^ pour faire voir son pouvoir, de conserver ses servir leurs innocens dans la corruption générale ; que dis- ]e il les a préservés? Içur vertu en a paru davantage. Et certes, s'il n'y avait point eu de méchans , combien de vertus seroient étouffées ! que devienr droit le zèle de convertir les âmes , dont les saints ont été transportés ? où seroient tant d'exhortations véhémentes ? où cette béatitude de ceux qui souf- frent pour la justice ? où le triomphe du martyre ? Qui auroit mis la main sur la personne de notre Sei* gneur, s'il n'y avoit eu que des pistes ? Mais quel se- roit le désordre des choses humaines , si parmi cette prodigieuse multitude de méchans, il n'y avoit du moins quelques justes, qui , par leurs avertîssemens et par leurs exemples, réprimassent la licence effré- née , et retinssent du moins les choses dans quelque modération ? C'est pourquoi le sauveur Jésus parlant au petit ncMnbre de gens de bien qu'il avoit par sa grâce assemblés près de sa personne, les appelle le sel de la terre : JTos estis sal terrœ (0 : voulant dire^ à mon avis, que s'il n'eût répandu quelques per^ sonnes verttieuses deçà et delà dans le monde comme DES BOlfS AVEC I^BS MéGlIÀK&« *6l5 une espèce de sel salutaire y les hommes auroieiit été entièrement corrompus, au lieu quil y reste peut-être quelque petite trace de vertu. Cela étant de la sorte que nqus autres chrétiens nous sommes envoyés pour étrela lumière du monde; vivons en enfans de lumière , et c< ne communiquons » point aux œuvres des ténèbres (0 » qui nous en- vironnent. Méprisons cette vie , mes très - chères Sœurs f où nous sommes en captivité. Regardez le siècle. ; de toutes parts vous y verrez régner Tim- piété y le désordre y le luxe , les molles délioes , Fâva^ rice y Tambition , et enfin toutes sortes de crimes. Quel plaisir pour nous en cette vie où les meilleurs ne sont pas mieux traités que les plus méchans? Au contraire nous verrons ordinairement les méûhans dans le haut crédit et les sages dans l'a bassesse. QueUe estime pouvons -nous faire de cette sorte de biens y que notre Père céleste y qui sait si parfaite-* ment le prix des choses , donne en partage à ses en- nemis? Considérez, mes très - dières Sœurs , que clans une grande maison ce que Ton réserve aux en- fans est toujours le plus précieux; et que ce que les serviteurs peuvent avoir de comi^un av^c eux est toujours le moins important Nous sommes les en&o^ de Dieu , et les mécl^ns n ont pa& seulement Thoii^ neur de pouvoir ^tre nommés ses esclaves : ce sont ses ennemis et les .victiqies de sa Cureur. £t néan- moins les plaisirs et les grands avantagés i^ès les- quels, les mort^ abusés ne cessent de soupirer^ sont presque pour l'ordinaire en. la possession des mér {*)£phes.y. IX. 6l6 Sun LE MÉLAVCfi chaos. Souhaites* vous des richesses? you^n'en aurez jamais plus que Grésus : les dâices? vcms n'en aui^ez jamais plus que Sardanapalè : le pouvoir? vous n'en aufez jamais plus que Nëron , Caligula , ces mons- tres du genrehamain, et néanmoins les mattres du monde. Oùest^eeque Téloquence^ la sagesse mon- daine f le crédit des beaux arts a été plus glrand que daûs Teiftpire romain ? c'étoient des idolâtres, fc Youlez-^Tous, dit saint Augustin, que Dieu vous » donne de l'argent 7 les voleurs en ont aussi t dési- » rez-vous une femme ^ une nombreuse famille , la » santé du oorps, les «Ugnités du siècle? considérez » que beaucoup de médians possèdent tous ces ». avantages. Est-ce Tunique objet pour lequel vous » servez Dieu ? Yoa pieds chancelleront -ils et croi- 3». rez-vous servir Dieu. en vaid, lorsque vous voyez n dans ceux qui ne le servent pas tous ces biens qui )> vous manquent ? Ainsi il donne toutes ces choses 31 ^ux méchans mêmes , et il se réserve lui seul pour n les. bons » v Pécuniam ms à Dèo ? haiet et kuro. Uxorem , foàmmditaêem^^iorum ^ salutem ^orporis, digmtaieni sasctdi? attende quant mulU mali habent. Hoc esf totum pvopter quod eum ooKs ? Nulabunl pedes tid], poÉaiù te sine causé colère, çuando in eis vides ista qui tei^m non colunl ? Ergo ista dot omnia etiam malis , se solum servàt bonis (0. Par- tant, que Tami de Jésus, s'il prétend à quelque chose de plus que les ennemis de Jésus , vive avec la grâce de Dieu dans Fattente d'une plus grande féli- cité. O sainte paix de Sion ! ô égalité des anges ! 6 0) S, Aug» in Ps, Lzxis, n. x4> tom» ir, coL 85QI DES BOBS AVEC LES MÉCUÀNS. 617 divine Jérusalem , où il n y a point de séditieux y point de fourbes^ point de maifaiteorB; où il ny a .que des gens de bien , des amis et des&ères I 6 heu- reuse égalité des anges ! ô ^nte oompagnie^ oh Dieu régnera en paix y où nul jie blaspkémera son saint nom j nul ne contreviendra à ses ordonnances ! ô sainte Sion, où toutes dioses sont stables ! Eb Dieu! qui nous a jetés dans ce flux et reflux de choses hu*- maines? qui nous précipite dftns <:et abtme et cette mer agitée de tant de tempêtes? Quand retoumet*ai* je à vous ; ô Sion 7 quand verrai* je vos belles mu«- railles , et vos fontaines d'eaux vives qui sont la ié- licite éternelle , et votre temple qui est Dieu même > et votre lumière qui est FÂgneau 7 ce Alors ^ ô mon » Dieu y vous nous vivifierez , vous nous renouvelle^ » rez y vous nous donnerec la vie de l'hoaime inté^ » rieur, et nops invoquerons votre nom; c est-à-dire » nous vous aimerons. Après tfons avoir pardonné » avec bonté tous nos péchés , vous vous donnerez » vous-même pour être la récompense parfaite de » ceux que vous aurez justifiés. Seigneur Dieu des » vertus y convertissez-nous y montrer votre face y et » nous serons sauvés : Yivificabis nos, innouabis nos, » citant interioris hondnis dahis noiis ; et nomen -» tuum invocabimus : id est, te dikgemus. Tu noBis » dulcis eris remissor peccmiorum nostrorum, tu eris Ti totum prœmium justificaxormH» Domine Deus vir- » tutum , couverte nos y ostende faciem tuam y et » salvi erimus (0 ». [Cest alors que se fera l'entière séparation des bons et des méchans.] (') S, Aug, in Ps. Lxuz, u6i suprâ. 6l8 SUR LE XÉLiLVGB ' • f Cette séparation , sines, très-chères Sœurs , a divers .degrés. Eremièrementles élus sont déjà séparas dans la prédestination éternelle , même dans la contagion du siècle , même dans cette masse de corruption- o& le monde semble les envelopper dans une commune confusion. Dieu les a déjà discernés : « Dieu sait » ceux qui sont à lui » : Cognoi^it Dominas qui sunt ejus (0 : il les connoit par nom et par surnom : Pro- prias oves voeat nominatim C^).- « Il appelle ses pro- » près brebis chacune par leur nom ». Il en a un rôle dans- son cabinet : ils sont écrits dans son livre. O joie ! ô bonheur incroyable ! aimables brebis die Jésus y quelque part où vous erriez dans les chemios détournés de ce siècle , l'œil de votre pasteur est sur vous : il vous sépare des autres , non point de corps> mais de cœur : il vous sépare par de saints désirs et par une bienheureuse espérance. Les affections, mes Sœurs y ce sont co^pie les pas de Tame ; c'est par .elles qu elle se remue. Ainsi les enfans de lunûère mêlés ici-bas parmi les enfans de ténèbres , en sor- tent par de saintes et de célestes affections. Us sont en ce monde ^ mais leur amour en est détaché. Dieu, ,qui les a mêlés avec ses ennemis » ne cesse de les en réparer peu à peu par une.opérationtouterpuissante. U purifie.leurs intentions , il les démêle insensible- ment des embarras de la terre. Comme ils sont dans -un corps mortel , et que néanmoins ils vivent en quelque sorte détachés du corps » et que Dieu rompt peu à peu leurs liens, ainsi que dit Fapôtre saint Paul, que « vivant dans la chair, nous ne vivons (<) //. Ttm. XI. 19. — (*) Joan. Xr 3. DES BONS AYEC LES MÉCHAITS. 619 » pas selon la chair (0 » : de même, bien qu'ils soient parmi les méchans, leur façon de vivre les discerne d*eux. Viendra y viendra enfin cette dernière séparation* .O jour terrible pour les méchans ! ô jour mille et .mille fois heureux pour les bons !• où iront les mér chans séparés des enfans de Dieu ? C'est ce mélange, mes Sœurs y qui empêche que Dieu ne les foudroie*: il leur pardonne pour l'amour des siens : leur préf^ sence modère sa juste fureur. C'est pourquoi y dans notre Evangile , il défend « d'arracher l'ivraie , de » peur d'endommager le bon grain » : NeforCé coU ligisntes zizania , eradicetis simul cum eis et triti*- cum W. Considérez , mes Sœurs , que comme en xx inonde les bons et les méchans sont mêlés , aussi la «colère et la miséricorde divines sont en quelque far .çon tempérées l'une par l'autre. C'est pourquoi le prophète a dit que « le calice qui est en la main de » Dieu est mêlé ». Le vin signifie la joie ; J^inum lœiificat (3) : « le vin réjouit » ; et l'eau , les tribu- lations : Salvum me fac , Deus , quoniam intrave-* runt aquœ (4) : « Sauvez-moi , mon Dieu , parce que » les eaux sont entrées jusque dans mon ame ». Le prophète David dit que son ame est environnée d'eaux , c'est-à-dire de tribulations : [ il nous repré- sente le Seigneur comme] « tenant dans sa main » une coupe d'un vin fort y mêlé de différentes li- » queurs » : Vini meriplenus nùxto (5). C'est ce mé- lange que le siècle doit boire. Sa vengeance est tou- CO //. Cor, X. 3. — («) Matth» xiii. 29.— {?) Ps. an. 16. — (4) Ps. LXYIII. 1. — ^^ P*. LZXIT. 7. 620 SUR LE MÉLANGE DES BONS ATEG LES MÉCHAN8. jours mêlée de miséricorde, sa miséricorde de même : Parcente manu sœuit et donaU Mais après ce siècle il ne restera plus que la lie. Verumtamen fœx efms non est exinanita ; bibent omnes peccatores terrœ ( 0 : « La lie n'en est pourtant pas encore épuisée : tous » les pécheurs delà terre en boiront ». Ces pécheois séparés des bons, ces pécheurs surpris dans leur crime y ces pécheurs qui ne seront jamais gens de bien; ils boiront toute la lie et toute Famertume de la vengeance divine. Fuyons ^ fiiyons, mes Sœurs , fuyons de leur compagnie : n*ayons point de com- merce avec eux. Votre profession vous en a d^à en Quelque façon séparées. Mais ne faites pas comme les Israélites : ne désirez point les plaisirs de !*& gypte : ne retournez pas la tête en arrière y pour voir ce que vous avez quitté ; mais tenez vos yeux fichés éternellement à l'héritage qui vous est promis , aux saints qui vous attendent , à Jésus qui von^ tend les bras pour vous recevoir en sa gloke. (0 Ps, txxiy. 8. FIN DU TOME ONZIEME. TABLE DU TOME ONZIÈME. I.®*". SERMON POUR LA FETE DE TOUS LES SAINTS, préchë à Metz, eu faveur d'une assemblée de charité, consacrée au soulagement des pauvres malades. — Le discours n'est point enjLier; mais, q^(âq^e imparfait, il contient . des vérités qui le rendent très-intéressant. L'auteur y iait^voir ce qu'eiiige envers les pauvres et les misé- rables la miséricorde reçue ou espérée. P^ge i ExoEDE d'un Sermon prêché dans une assemblée de cha- rité. ,5 IL* SERMON POUR la fete de tous les saints. — Des- seins admirables, de Dieu sur ses élus : il les a mis au- dessus de tous ses ouvrages ; il se les est proposés dans toutes ses entreprises ; il les a inséparablement unis à . la personne de son Fils , afin de les traiter comme lui. Merveilles que Dieu op'tre dans ^exécution de ces grands desseins. iiy IIL* SERMON POUR la fête de tous les saints, prêché devant le Roi. — Conditions nécessaires pour être heu- reux : n'être point tiompés, ne rien souffrir, ne rien craindre. Elles ne se trouvent véunies que dans le ciel. . Nous n'y serons plus sujets à l'erreur, à la douleur, à l'inquiétude : parce que nous y verrons Dieu, que nous y jouirons de Dieu, que nous hous reposerons à J4mais en Dieu. ^^ rV.* SERMON POUR LA FÊTE DE TOUS LES SAINTS. -^ LcS désirs des natures intelligentes pour la félicité. Leurs erreurs à cet égard. Ou se trouve la véritable féhcité; en quoi elle consiste ; quels so«t les moyens pour y par- venir ; quelle est la voie qui y conduit. qq Fragment d'un discours sur le même sujet, où, à l'occa- sion de la solennité des bienheureux , il est parlé des * fidèles qui achèvent de se purifier dans le purgatoire. Comment leur sainteté est-elle çonfiimée. 1 08 62a TABLE. , SERMON POUR LE JOUR DES MORTS, SUT la r^surrectioii dernière. — Deux sortes de mort, deux sortes de ré- surrection : celle de l'âme doit précéder celle du corps : comment l'une et l'autre s'opèrent. Page i la I.er SERMON POUR LE I.*' DIMANCHE DE l'avent, préché devant le Roi. — Sur la nécessité pressante de s'éveil- ler de sortir de sa langueur, et de travailler sans délai à son salut. '^ Abrégé d'un sermon sur le même texte que le précédent: sur la vigilance chrétienne. 17 1 IL* SERMON POUR le i.er dimanche de l'avent, prédié devant le Roi, sur le Jugement dernier. — Son objet • sa nécessité : ses eflfets. Confusion des pécheurs, qui amusent le monde par leurs vains prétextes; des hy- pocrites, qui font servir la piété d'enveloppe et de cou- verture à leur malice ; des pécheurs scandaleux , qui font trophée de leurs crimes. 179 ExoRDE d'un autre Sermon pour le même dimanche. — Gloire qui doit suivre les humiliations volontaires da Sauveur. 200 III.* SERMON POUR LE I.**^ DIMANCHE DE l'aVENT. Fondemens de la vengeance divine. Le pécheur acca- blé par la puissance infinie contre laquelle il s'est sou- levé immolé à cette bonté étonnante qu'il a méprisée^ dégradé et asservi à une dure et insupportable tyran- nie, par cette majesté souveraine qu'il a outragée. 2o3 !.•' SERMON POUR le il* dimanche de l'avent , prêché à Metz : sur Jésus-Christ comme objet de scandale. — Caractères du Messie promis , opposés à ceux que les Juifs charnels s'étoient figurés. Jésus -Christ les réunit tous en sa personne. 228 ExoRDE d'un Sermon sur le même texte, prêché devant • des religieuses. 267 II.* SERMON POUR LE II.* DIMANCHE DE l'avent, préché à la Cour : sur la Divinité de la religion. — Les moyens par lesquels elle s'est établie, la sainteté de sa morale si bien proportionnée à tous les besoins dé l'homme, preuves évidentes de sa divinité. Injustice de ses con- tradicteurs , infidélité des chrétiens. 269 SERMON POUR LE ni.* DiMANiiflE DE l'avent, sur la né- TABLE. 623 cesské de la pénitence, proche à la Cour. Endurcisse-* ment des pécheurs : leur insensibilité . surprenante • effets terribles du péché et de la justice divine sur eux i lUusion de leur fausse sécurité : extrémité de leur mal- ^ ^^'^^ ' Page 364 FRAGMEifs sur le même sujet. ^ Activité de la justice divme contre le pécheur. Son opposition à la loi» de Dieu. Eflfets qui en résultent contre lui. Ce qu'il doit faire pour éviter les coups de la main vengeresse. Dignes fruits de pénitence , toujours salutaires. 386 ABRioK d'un autre Sermon pour le troisième dimanche ^e l'A vent : sur le fauxTionneur et l'humilité chrétienne; 4o4 SERMON POUR LE iv.« DIMANCHE DE l' A VENT, sur la véri- table conversion. - Nécessité de la soUtude, pour par- Tenir à une solide conversion : caractère d'un vrai pénitent : remèdes propres à sa guérison : combien dif- ficile le changement des inclinations d'un pécheur d'ha- bitude, quelle doit être son épreuve queUes, dispositions lui sont nécessaires pour être réconcihé avec Dieu. 410 L" SERMON SUR le mystère de la nativité de notre Seigneur. — Objet, fin, utUité, prudente économie des abaissemens du Fils de Dieu , dans son incarnation : sagesse des moyens qu'il emploie pour réparer notre nature et guérir ses maladies. Ses contradictions sa gloire, son triomphe. 206 Fragment d'un autre Sermon sur le même mystère. - IJieu unique dans ses perfections : comment il les corn- munique à l'homme. Orgueil, cause de sa chute : in- If ^^pÎ^^Ï ^^ ^^ ^^^^' '^"^^^^ ^ ^««« «^^ï**e. 333 11. >i^MON SUR LE MYSTÈRE DE LA NATIVITÉ DE NOTRE bEiG^UR, prêché dans l'Eglise cathédrale de Meaux ^ 1691.— Caractères du Messie promis. Trois sortes' de contradictions auxquelles il est en butte, même parmi les chrétiens et dans l'Eglise. 34 1 ExoRDE sur le mystère de la Nativité de N. S. 356 Pensées détachées sur le même sujet. 358 Fragment sur les mystères de la sainte Enfance de notre Seigneur, pour le dimanche dans l'octave de Noël. 434 !.«' SERMON POUR LA FÊTE DE LA CIRCONCISION DE NOTRE Seigneue, prêché à Metz. ~ Royauté de Jésus-Christ : 6i4 TàBLE. en quoi elle consiste : comment il l'a acquise : dé qadie manière il l'exerce : infidélité et ingratitude de «es su- jets. Excellence de son sacerdoce. P^HS^ 44^ IL® SERMON POUR la fête de la CiacoirciÀoir de notre Seigneur. — Royauté de Jésus-Christ , sa nature, ses effets : droits qu'elle lui donne sur nous : comment nous devons la reconnoîtré. 4da III.^ SERMON POUR LA F£T£ DE LA CiBCOIfCISIOIf DE NOTRE Seigneur y prédié le premier jour de Tan 1687.— Ma- lice du péché, ses eifets. Etendue de nos maladies: trois ' grâces du Sauveur pour nous en délivrer : dispositions pour y répondre. Moyens d'assurer notre guérison. 5o4 IV.' SERMON POUR LA FETE DE LA CiBGONCISION DE NOTRE . Seigneur, prêché pendant uti juhilé. — Grandeur de nos maux. Nécessité de la grâce du Sauveuir, pour nous guérir et nous sauver : ses' différentes opérations en nous. Fidélité de Dieu à notre égard : nos infidélités . envers lui. Opposition des folies joies du siècle aux joies solides qui nous sont promises. 629 Autre Conclusion du même sermon. 564 pREitiÈRE PARTIE DU HEHE Sermon, autrement traitée, — Excellence du nom de Jésus : terribles engagemens que le Sauveur contracte dans sa ^circoncision. Senti- mens du (pécheur, réconcilié. Noirceur de l'ingratitude de celui qui retourne au péché. 569 SERMON POUR le second dimanche APRES l'Epiphanie* -— > Union sainte de la nature divine avec les âmes fidèles. Charité de Jésus pour son Epouse. Jésus et ses mys- tères, fin de toutes les Ecritures, de toutes les cérémo- nies : impuissance de la loi ancienne, caractère distinctif des deux alliances. 577 Fragment sur le même sujet. Sgô Abrégé d'un sermon pour le troisième dimanche après L*EpipnANiE. 600 SERMON POUR LE CINQUIEME DIMANCHE APRES l'EpIPHANIE. -— Jérusalem et Babylone , leur esprit et leur caractère* Raisons de la conduite de Dieu dans le mélange des hons avec les médian»^; oomment ils sont séparés dès k présent : suites de la dernière séparation. 6o5 FIN DB LA TABLE DU TOME ONZIEME* 62635-i;;n «•9 , " •« ^